Peter Singer (1946)
" Si un être n'a pas la capacité de souffrir, ni de ressentir du plaisir ou du bonheur, alors il n'existe rien à prendre en compte. Ainsi, c'est le critère de la sensibilité (pour employer ce mot comme raccourci pratique, mais en toute rigueur inexact, pour désigner la capacité à souffrir et/où à ressentir le plaisir) qui fournit la seule limite défendable à la préoccupation pour les intérêts des autres. Fixer cette limite selon une autre caractéristique comme l'intelligence ou la rationalité serait la fixer de façon arbitraire.
Pourquoi ne pas choisir quelque autre caractéristique encore, comme la couleur de la peau ? les racistes violent le principe d'égalité en donnant un plus grand poids aux intérêts des membres de leur propre race quand un conflit existe entre ces intérêts et ceux de membres d'une autre race. Les sexistes violent le principe d'égalité en privilégiant les intérêts des membres de leur propre sexe. De façon similaire, les spécistes permettent aux intérêts des membres de leur propre espèce de prévaloir sur des intérêts supérieurs de membres d'autres espèces. Le shéma est le même dans chaque cas."
Animal Liberation (1975)
" J'ai essayé de comprendre pourquoi on applique un niveau moral aux animaux et pourquoi on met les animaux à un niveau plus bas.
Au début, je suis allé voir ce qu'on écrit les autres philosophes à ce sujet. À ma grande surprise, peu d'entre eux s'y étaient intéressés. Cela m'a fort étonné étant donné le très grand nombre d'animaux qui meurent chaque jour pour notre confort.
Il y avait quelque chose qui n'allait donc pas. Le nombre d'animaux utilisés pour la vivisection, par exemple, est énorme. alors pourquoi n'en parlions-nous pas ? Cela pouvait peut-être s'expliquer par la tradition philosophique propre à Kemp : seul un être capable de raisonner ou d'agir indépendamment est digne de prétendre à un traitement moral.
Bien entendu, cette explication de Kemp n'expliquait pas le fait que l'on puisse maltraiter les animaux. Cela d'autant plus que les hommes sont parfois dans cette situation. C'est notamment le cas pour deux groupes : les enfants et les personnes qui ont perdu la capacité de raisonner indépendamment.
Or, ces derrnières années, les droits des enfants anormaux ont beaucoup évolué. De plus, les animaux ont parfois la capacité de réagir et de raisonner tout comme les êtres humains, or, on n'étend pas les 'droits' des animaux.
En conséquence, comment justifier la différence entre humain et non-humain ?
Je me suis rendu compte qu'il n'y avait pas de justification. Notre attitude envers les animaux doit être modifiée. Après que j'ai suivi ce changement d'attitude, j'ai vu un parallèle avec le racisme, le sexisme et le specisme. Dans ces cas, on suit toujours le même schéma : il y a un groupe dominant qui est situé dans une sphère morale et il y a un groupe inférieur qui se trouve à l'extérieur du groupe moral.
J'ai vu un parallèle entre le fait que les animaux aient été négligés par les philosophes et le fait que les Noirs américains aient été négligés par ceux qui se battaient pour les droits de l'homme.
J'en ai déduit qu'il fallait sortir de cette perspective anthropocentrique qui considérait tout ce qui n'est pas humain comme une ressource à exploiter. J'ai développé une morale basée sur l'égalité de considération humain/non humain, étant donné que toutes les espèces peuvent souffrir. C'est une philosophie qui a été développée plus profondément par le professeur Haine, enseignant de philosophie à l'Université d'Oxford. A partir de là, il était clair que si on voulait modifier ce concept d'égalité avec les animaux, il fallait modifier notre relation. "
" J'encourage les initiatives pour réduire les souffrances des animaux. Mais c'est le comportement qu'il faut changer. On peut ne plus manger de viande. "
" Les enfants ont naturellement une attitude positive envers les animaux. Ce n'est qu'après que les parents leur enseigne qu'il est logique que l'on exploite les animaux à notre seul profit. "