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  • LA question la plus cruciale, et aussi la plus taboue : pourquoi les hommes sont-ils sadiques ?

     

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    Brett Kavanaugh et Christine Blasey Ford

    Que faudra-t-il qu’il arrive pour qu’on parle franchement de la source du sadisme des hommes ?

    Le sadisme des hommes est soit inné, soit appris. S’il est appris, c’est un problème auquel on peut s’attaquer.

    Le 6 octobre 2018 par MEGHAN MURPHY (traduit par Pauline Cyr)

     

    Bonjour et bienvenue à l’édition de cette semaine sur Qu’est-ce qui peut bien clocher à ce point chez les hommes?

    Je dois vous avertir que je n’aurai probablement pas de réponse à la fin de cette enquête, mais peut-être qu’un généreux confrère se sentira inspiré à éclairer notre pauvre lanterne.

    Je suis, bien sûr, hors de mon domaine d’expertise, car je n’ai jamais joui en suffoquant un homme avec mon vagin, et je n’ai jamais rêvé non plus d’inviter un groupe de copines à venir torturer avec moi un homme jusqu’à ce qu’il pleure ou qu’il vomisse, tout en me masturbant et en le traitant de sale chien. Je n’ai jamais poussé un homme saoul dans une chambre, verrouillé la porte, et couvert sa bouche pour l’empêcher de respirer ou de crier, pour ensuite le baiser devant une copine en rigolant.

    Vous me trouverez peut-être coincée, mais faire mal à d’autres personnes ne m’excite pas. L’idée d’étrangler ou de torturer quelqu’un ne m’excite pas: ça me rend malade. Cela ressemble à quelque chose qu’on ferait à quelqu’un qu’on déteste, pas à quelqu’un qu’on désire. Et qui veut avoir des relations sexuelles avec une personne qu’on déteste?

    Oh? Ah bon…

    Le 8 août 2017, Justin Schneider a offert à une femme de l’emmener chez son copain à elle, en insistant qu’il le connaissait. Mais il l’a conduite ailleurs, puis a arrêté la voiture et lui a demandé de sortir. Alors qu’elle s’éloignait, il l’a attaquée par-derrière et lui a dit qu’elle allait mourir, avant de l’étrangler jusqu’à ce qu’elle perde connaissance. Lorsque sa victime de 25 ans a repris connaissance, Schneider venait de se masturber et d’éjaculer sur elle. Il refermait sa braguette. Il lui a donné un mouchoir en lui disant : « Je ne vais pas réellement te tuer, j’ai dû te faire croire que tu allais mourir pour pouvoir jouir. »

    Cet homme de 34 ans n’a pas reçu de peine d’emprisonnement, mais son année de détention à domicile lui a donné une chance de « travailler sur lui-même et de devenir une meilleure personne, un meilleur mari et un meilleur père ».

    Bravo pour lui. Super.

    Pour éviter tout malentendu, je dois préciser que je crois en la réhabilitation. Je crois que les gens peuvent changer. Je ne crois pas que la prison réhabilite les gens. Mais je sais aussi qu’il y a énormément d’hommes sadiques dans ce monde, et c’est terrifiant. Je ne crois pas du tout qu’une année de détention à domicile a guéri cet homme de ses désirs sadiques, et je pense que maintenant, comme d’habitude, d’autres femmes courent le danger d’être victimes de cet homme. Et je pense que suffisamment de femmes ont subi des épreuves semblables à celle de la victime de Schneider – et bien pire – et qu’il est temps de commencer à examiner les causes profondes de ce problème au lieu d’accorder aux hommes des peines ridicules après le fait, en leur permettant de continuer à fonctionner comme ils l’ont toujours fait, mais peut-être un peu plus discrètement.

    Il me semble évident que, dans une société qui tolère le sadisme comme une fantaisie sexuelle saine, les hommes voudront réaliser ces fantasmes. Je trouve choquant que tout le monde considère la strangulation comme une façon amusante et inoffensive de pimenter les choses dans la chambre à coucher, mais aussi que personne ne s’attende à ce qu’un homme se masturbe en étranglant une femme.

    Et je sais, oui je sais. Je sais ce que vous allez me dire : Le consentement, Meghan… C’est le consentement qui fait la différence. Mais je ne parle pas ici de ce que les femmes veulent (ou de ce qu’elles disent qu’elles veulent, parce qu’elles savent que cela fait bander les hommes). Je parle de ce que les hommes veulent. Parce que même si un homme me demandait de l’étrangler jusqu’à ce qu’il perde connaissance, je ne le ferais pas. Et même si je le faisais, sous quelque prétexte, comme de l’aimer au point que je veuille lui plaire en l’étranglant jusqu’à ce qu’il perde connaissance, parce que pour lui, je ferais n’importe quoi, cela ne me ferait pas jouir.

    La semaine dernière, nous avons entendu Dre Christine Blasey Ford expliquer que ce qui l’a le plus marquée, cette nuit-là, il y a 36 ans, lorsque Brett Kavanaugh l’a agressée sexuellement, c’était le rire : « Le rire éclatant des deux gars » a-t-elle dit de sa voix brisée, « et le fait qu’ils s’amusaient à mes dépens… J’étais sous l’un d’eux, et ils riaient. »

    J’ai beaucoup de souvenirs de jeunes hommes comme ces deux-là, qui ont fait des choses semblables à mes amies, ou qui ont essayé de me les faire à moi. D’une façon ou d’une autre, j’ai réussi à m’échapper de situations semblables, en pleurant et traumatisée, mais seulement de m’être faite traiter de « salope », de « putain », de « chienne », parce que je j’avais refusé de me plier au scénario prévu. J’ai eu beaucoup de chance dans de nombreuses situations qui auraient pu tourner extrêmement mal. Beaucoup de femmes que je connais n’ont pas eu cette chance. Ce que je veux dire, c’est que les hommes de ce genre ne sont pas particulièrement hors de l’ordinaire, même s’il y a de nombreux niveaux aux actes sadiques que différents hommes veulent infliger aux femmes et leur infligent.

    Le 9 juin 2017, Yingying Zhang, chercheuse chinoise invitée aux États-Unis, est montée dans une voiture avec Brendt Christensen à l’Université de l’Illinois, au campus Urbana-Champaign. Christensen a emmené Zhang jusqu’à son appartement où il l’a séquestrée, sans doute agressée sexuellement et torturée de diverses façons, avant de l’assassiner (son corps n’a toujours pas été retrouvé). Christensen est un ancien étudiant au doctorat, inscrit à l’université de Zhang. Il s’est servi du site Fetlife, un « réseau social de la communauté des BDSM, fétichistes et pervers », pour accéder au forum « Enlèvement 101 », qui comprend des sous-titres comme « Fantasme de l’enlèvement parfait » et « Planifier un enlèvement ». Des procureurs à son procès ont révélé que Christensen avait « étranglé et agressé sexuellement » une autre victime en 2013, en Illinois, et déclaré avoir fait « d’autres victimes », et exprimé sa volonté d’être « connu en tant que tueur ». C’était réellement un de ses fantasmes, qu’il a pu entretenir et planifier grâce à des sites BDSM. Christensen était marié et semblait, aux dires de tous, être un homme tout à fait normal. Il était aimé de ses élèves (Christensen a été maître de recherches à la faculté de Physique, lors de ses études post-graduées).

    Peter Masden participait régulièrement à des partys « fétiches ». Il a lui-même figuré dans deux films pornos, et aimait la pornographie violente de type « snuff ». Le jour où il a rencontré la journaliste Kim Wall à Copenhague, qu’il a tuée à bord de son sous-marin en août 2017, Masden a fait une recherche sur Internetavec les mots beheaded girl agony (agonie d’une fille décapitée), et il a regardé un film sur une femme à qui l’on tranchait la gorge. On a trouvé dans son ordinateur des vidéos de femmes torturées et exécutées en direct. L’homme de 47 ans a ligoté Kim Wall et l’a agressée sexuellement avant de la tuer et de démembrer son cadavre. Madsen a été accusé de « relations sexuelles autres que la pénétration vaginale d’un caractère particulièrement dangereux » après qu’on ait découvert des blessures faites au poignard dans et autour des organes génitaux de Kim Wall.

    Il y a beaucoup d’autres récits concernant des hommes comme ceux-là. Il y a les Jian Ghomeshi, qui ne veulent peut-être pas aller jusqu’à tuer quelqu’un, mais veulent simplement avoir le plaisir de frapper une femme à la tête pendant qu’elle leur fait une fellation. Il y a d’innombrables jeunes hommes qui violent des femmes en groupe lors d’un party, parce qu’en fin de compte, c’est un party! Et puis il y a tous les hommes qui regardent tout simplement ce genre de chose sur Internet en se masturbant, et qui suggèrent peut-être très poliment à leurs copines d’intégrer ces « perversions inoffensives » à leur répertoire sexuel. Il y a tellement d’hommes qui trouvent amusant de faire mal à des femmes. C’est une blague. C’est un divertissement, ou c’est sexy.

    Où se situe la limite? À quel moment déclarons-nous qu’il est acceptable ou inacceptable qu’un homme rêve de faire mal à des femmes? Lorsqu’il réalise son fantasme? Lorsqu’il se masturbe en regardant des femmes se faire agresser ou humilier sur Internet? Lorsqu’il est trop tard?

    Et d’où viennent ces désirs? Pourquoi tant d’hommes veulent-ils faire mal aux femmes – pourquoi faire mal aux femmes les fait-il bander?

    Je suppose que certains de ces hommes ont eux-mêmes été victimes d’agressions, peut-être sexuelles. Mais ils ont fort probablement, pour la plupart, souffert ces agressions aux mains d’autres hommes. Et beaucoup d’entre eux, bien sûr, n’ont pas subi d’agressions sexuelles – ils n’ont pas été étranglés en se faisant baiser, n’ont pas été étouffés par une queue dans la gorge, n’ont pas été traités de pute ou de chienne en étant pénétrés dans le cul et la gorge en même temps. Il y a une raison pour laquelle les hommes font cela aux femmes. Ce n’est pas parce que les femmes le méritent, ni parce que les femmes le leur ont fait et qu’ils veulent maintenant se venger.

    Beaucoup de gens trouvent difficile d’expliquer ou de constater la misogynie. Cependant, quand on réfléchit à de tels crimes et qu’on cherche leur justification, cela cesse d’être difficile.

    Il y a quelque chose d’inquiétant dans notre peu de préoccupation envers ces comportements et envers la quantité d’hommes qui les adoptent, sous différentes formes. Soit que nous admettons toutes et tous qu’il y a quelque chose d’inné chez les hommes qui les incite à jouir de la torture, et dans ce cas, que doit-on faire des hommes? Soit que nous reconnaissons que ce comportement est surtout appris, et dans ce cas, nous pouvons y mettre fin. Il ne peut pas y avoir autant de psychopathes de naissance dans ce monde. (Et s’il y en a autant, pourquoi sont-ils presque tous des hommes, et presque jamais des femmes?) Et considérant les hommes non psychopathes que nous aimons et avec lesquels nous vivons – ceux qui sont « bons », et qui ne se masturbent pas sur des femmes qu’ils étranglent dans la rue jusqu’à l’inconscience – des hommes qui sont eux aussi excités à l’idée qu’ils pourraient tuer leur copine s’ils le voulaient et qui nous le disent, mais choisissent de ne pas le faire, et trouvent que ce sentiment de puissance en étranglant juste un peu leur copine constitue une perversion inoffensive, alors nous devons reconnaître que ce problème de violence et de domination sexualisées n’est pas seulement un problème de pervers et de « cas psychiatriques ».

    Dans la pornographie et dans la « vraie vie », des hommes veulent nous étrangler, éjaculer dans nos yeux, nous pénétrer jusqu’à nous faire étouffer, pleurer ou vomir – jusqu’à nous tuer peut-être aussi – et peut-être rire tout en le faisant (« Oh, tu ne peux plus respirer? Mais regarde comme ma queue est dure! »), mais ils n’arrivent pas à comprendre pourquoi les féministes protestent! C’est comme s’ils croyaient que les femmes ne voient pas ce qu’ils regardent, ce qu’ils font et ce qu’ils demandent au lit. Mais bien sûr, nous le voyons. Nous le savons toutes. Seulement, la plupart d’entre nous ne veulent pas en parler. C’est trop dur de reconnaître ce problème, et c’est trop dur d’y faire face lorsque nous le faisons. Allons-nous quitter ces hommes? Désespérer d’eux comme étant mauvais et incorrigibles? Allons-nous leur parler et essayer de leur expliquer les torts causés par leurs habitudes pornographiques ou sexuelles? Je n’ai pas de réponse assurée à ces questions. Mais je sais au moins qu’il nous faut commencer à en parler, et dire que cela n’est pas normal, que ce n’est pas acceptable, et que ce n’est certainement pas inoffensif.

    Nous pouvons continuer à trouver des excuses, à fermer les yeux, ou à crier : « Ne viens pas contrôler ma sexualité, espèce de sainte-Nitouche! » chaque fois que des féministes suggèrent que, peut-être, le fait de transformer la violence en source d’excitation pourrait inciter les hommes à être excités par la violence. Ou nous pouvons commencer à parler franchement. Étant donné les conséquences, ça semble en valoir la peine.

    Version originale, suivie d’une centaine de commentaires : https://www.feministcurrent.com/2018/10/06/will-take-honest-conversation-root-mens-sadism/

    On trouvera beaucoup d’autres textes de Meghan Murphy sur d’autres pages de TRADFEM.

    photo Meghan C-16Meghan Murphy est écrivaine et journaliste autonome, secrétaire de rédaction du soir pour le site rabble.ca, et fondatrice et directrice du site Feminist Current. Elle a obtenu une maîtrise au département d’Études sur les femmes, le genre et la sexualité de l’Université Simon Fraser en 2012.
    Meghan a commencé sa carrière radiophonique en 2007, dans une caravane installée au milieu d’un champ de moutons. Son émission s’appelait « The F Word » et était diffusée à partir d’une toute petite île au large des côtes de la Colombie-Britannique. Elle a pleinement profité de la liberté que lui laissait cette radio pirate  : buvant de la bière à l’antenne, lisant des passages d’Andrea Dworkin, et passant du Biggie Smalls. Elle est revenue à Vancouver, où elle a rejoint l’émission de radio elle aussi nommée, coïncidence, « The F Word », qu’elle a produite et animée jusqu’en 2012. Le podcast de Feminist Current est le projet « radio » actuel de Meghan, une façon de communiquer une analyse critique féministe progressiste à quiconque s’y intéresse. Feminist Current est une émission syndiquée à Pacifica Radio et hébergée par le réseau de podcasts Rabble.
    Meghan blogue sur le féminisme depuis 2010. Elle n’hésite pas à penser à contre-courant et a été la première à publier une critique des défilés Slutwalk, en 2011. C’est l’une des rares blogueuses populaires à développer en public une critique à la fois féministe radicale et socialiste de l’industrie du sexe. Les critiques adressées par Meghan au #twitterfeminism, à la mode du burlesque, à l’auto-objectivation des selfies, et au féminisme du libre choix lui ont valu une foule d’éloges et d’attaques, mais surtout une reconnaissance comme écrivaine qui n’a pas peur de dire quelque chose de différent, en dépit de ce que le féminisme populaire et les grands médias décrètent comme ligne du parti.
    Vous pouvez trouver ses écrits en version originale dans les médias TruthdigThe Globe and MailGeorgia StraightAl JazeeraMs. MagazineAlterNetHerizonsThe TyeeMegaphone MagazineGoodNational PostVerily MagazineRavishlyrabble.caxoJaneViceThe Vancouver Observer et New Statesman. Meghan a également participé à l’anthologie Freedom Fallacy : The Limits of Liberal Feminism.
    Elle a été interviewée par Radio-Canada, Sun News, The Big Picture avec Thom Hartmann, BBC Radio 5, et Al Jazeera, ainsi que dans de nombreux autres médias.
    Isabelle Alonso a publié une interview d’elle sur son blog.
    Vous pouvez la suivre sur Twitter @MeghanEMurphy.
     

    Source : https://tradfem.wordpress.com/2018/10/08/que-faudra-t-il-quil-arrive-pour-quon-parle-franchement-de-la-source-du-sadisme-des-hommes/

  • "Dictionnaire Colette" (éditions Classiques Garnier)

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    Parution ce 4 octobre aux éditions Classiques Garnier du Dictionnaire Colette à la rédaction duquel j'ai eu, comme d'autres, tant de plaisir à participer.

    Il rend compte du profond renouvellement des études consacrées à l’écrivaine, notamment sur le chapitre de la question animale qui bien sûr a été mon sujet d'élection.

    Colette se révèle en effet antispéciste avant l'heure, considérant les animaux comme des égaux, des personnes à part entière. Elle les a d'ailleurs expressément préférés aux humains en vertu d'une saine misanthropie, et s'identifiait à eux.

    Ce Dictionnaire est un magnifique hommage à ce monument de la littérature française, à cette styliste incomparable qui serait probablement végane si elle avait vécu à notre époque.

     

    https://classiques-garnier.com/dictionnaire-colette.html

  • Pourquoi le véganisme ?

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    Pourquoi le véganisme ?

    Voilà pourquoi.