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  • Covid-19 : on ne traite pas une maladie sans en traiter d'abord les causes (4) / Comme si vous y étiez : la réalité des « marchés vivants » (« wet markets ») d'Asie

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                                                       Photo : Jo-Anne McArthur / We Animals

     

    Le sang gicle à chaque coup de couperet. Les sacs en plastique bruissent car ils sont pleins de chair animale. Les machines cliquettent tandis que les clients attendent leurs achats : les corps démembrés des animaux fraîchement abattus.

    C'est une journée ordinaire dans l'un des nombreux marchés vivants d'Asie.

    Bien que le nom de « marchés vivants » soit devenu familier des lecteurs de la presse internationale concernant le COVID-19, manquent dans les informations délivrées les images brutes et troublantes de ce qui se passe sur ces marchés.

    La photojournaliste Jo-Anne McArthur et la cinéaste Kelly Guerin de We Animals Media ont visité et documenté des marchés vivants à Taiwan, en Chine, au Laos, au Vietnam et en Thaïlande au cours des 12 dernières années. Les photos de Guerin et McArthur montrent d’une façon pratiquement inédite les conditions d’insalubrité dans lesquelles vivent les travailleurs dont les mains, les vêtements et les postes de travail sont imbibés de sang, la mutilation des animaux vivants et le pur chaos qui règne dans ces marchés.

    « Le brouhaha des clients qui crient et marchandent est constant, tout comme le rugissement des scooters qui serpentent au milieu des rangées étroites des stands des fournisseurs », rapporte Guerin. « Les couperets découpent en rythme des morceaux de chair incroyablement gros, à proximité d’autres morceaux de viande et de jus. Parfois, les cris d'un animal pris au fond d’une caisse et qui tente une ultime évasion désespérée couvrent le vacarme omniprésent, avant d'être massacré et démembré devant un client. »

    Le manque de couverture médiatique des marchés vivants est regrettable, mais pas surprenant. Parler des hôpitaux bondés, des rayons vides des supermarchés et de l'augmentation du nombre de décès permet de faire la une des journaux bien plus que de dévoiler les vérités inconfortables qui résident dans notre système alimentaire mondial. L'absence de reportages sur le bien-être animal dans les actualités est si dramatique que nous en savons presque aussi peu sur les marchés vivants asiatiques que sur les élevages industriels en Amérique.

    « Nous montrons le gouffre qui existe entre l'animal vivant et les parties de son corps emballées, méconnaissables. Nous montrons la réalité de ces marchés vivants, véritables creusets de contamination croisée et de transmission des maladies », écrit Guérin. « Ces marchés sont la preuve de ce qui n’a cessé d’être vrai : qu’il s’agisse des porcs ou des pangolins, nous ne sommes jamais aussi éloignés des animaux que nous aimerions le prétendre. »

    Rendre compte sur le terrain de l'exploitation animale est extrêmement éprouvant, mais nécessaire si nous voulons comprendre comment empêcher la prochaine épidémie d’advenir.

    Le récit du COVID-19 en images

    Selon une étude du Pew Research Center de 2019, plus de la moitié des adultes aux USA glanent la majorité de leurs informations sur les réseaux sociaux. Sentient Media a analysé la présence sur ces derniers de trois grands organes de presse afin de mieux comprendre la manière dont ceux-ci décrivent les marchés vivants d'Asie à leurs abonnés. Voici ce que nous avons trouvé :

    Le New York Times compte plus de 70 millions de followers sur Facebook, Instagram et Twitter. Si le NYT a parlé des marchés vivants sur son site Web, ses plates-formes sociales manquent en revanche cruellement de photos de marchés vivants asiatiques, et plus précisément des animaux achetés et vendus sur ces marchés. En 2006, le NYT a même suggéré à ses lecteurs de les visiter à des fins touristiques.

    Le Washington Post compte 23 millions de followers sur les trois mêmes plates-formes. Non seulement le WP, sur ses réseaux sociaux, néglige de publier des photos de marchés vivants, mais la couverture globale de son site Web sur le sujet est mince. Un article mentionne la chute du prix du poulet en Inde, car de nombreux consommateurs n'achètent plus de viande sur les marchés vivants, mais on ne voit aucune image desdits marchés. Un autre article sur le rôle du système alimentaire chinois dans la prévention des pandémies semblait prometteur, mais au lieu de publier les photos atroces de ces marchés, on y voit trois hommes tout sourire tenant dans leurs bras des chèvres vivantes. Une telle photo est loin de rendre compte du niveau abyssal de peur, de confusion et de souffrance que les animaux endurent.

    HuffPost compte plus de 11 millions d'abonnés sur Twitter et plus de 23 millions sur les trois principales plates-formes. Sans surprise, on constate le manque dramatique de reportages multimédias sur les marchés vivants. Si vous recherchez les mots « wet markets » sur le site Web du HuffPost, l’absence de résultats est tout aussi préoccupante. Si un article les mentionne, illustré d’une photo des fruits de mer qui y sont vendus (ce qui est louable), cette photo ne rend pas compte de leur horreur intrinsèque.

    Ces trois médias ont le pouvoir de toucher ensemble plus de 116 millions de personnes – soit environ les deux tiers de la population américaine - sur trois réseaux sociaux. Pourquoi ne l’utilisent-ils pas pour donner à voir la réalité des marchés d’animaux vivants à la source de COVID-19 ?

    Les médias grand public peuvent atteindre chaque jour des millions, voire des milliards de personnes dans le monde grâce aux articles imprimés, aux articles en ligne, aux blogs et aux réseaux sociaux. Les gens leur font confiance pour rendre compte de la réalité et les informer au mieux de leur intérêt. Or ce n'est visiblement pas toujours le cas. Sentient Media croit en la divulgation des faits et en la responsabilisation - des valeurs que nous espérons partager avec les principaux médias.

    Comme nous le constatons avec le traitement médiatique qui est fait du COVID-19, les médias grand public négligent de montrer les raisons pour lesquelles cette épidémie est advenue. Il est temps de lever le voile sur la réalité des marchés humides asiatiques et de signaler la vérité inconfortable qui se trouve au cœur du problème : notre consommation de chair animale.

    Voir le reportage photo ici.


    Couvrir COVID-19

    Covid-19 est la pire pandémie mondiale que nous ayons connue depuis plus d'un siècle. Il est plus important que jamais de s'assurer que les faits sont intégralement rapportés, et non seulement ce qui nous arrange.

    En ces temps incertains, aidez-nous à faire connaître la réalité des marchés vivants. Assurez-vous que le monde prenne conscience du fait que notre espèce ne peut pas survivre si nous continuons d’exploiter comme nous le faisons la planète et les animaux non humains.

    https://sentientmedia.org/

    https://sentientmedia.org/covid-19/

     

    [Traduit de l'anglais par Méryl Pinque.]

  • Covid-19 : on ne traite pas une maladie sans en traiter d'abord les causes (3) / Chronique d'une pandémie annoncée

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    La crise du coronavirus a mis sur la table l'une des plus grandes menaces pour la santé humaine au niveau mondial : les zoonoses, soit l'ensemble des maladies ou infections qui peuvent être transmises des animaux aux humains.

     

    Le 31 décembre 2019, le gouvernement chinois a lancé une alerte à l'Organisation mondiale de la santé (OMS) au sujet d'une nouvelle maladie qui se propageait dans la ville de Wuhan. Les patients étaient atteints d'une fièvre mystérieuse, de toux sèche et de pneumonie. Très vite, les premiers décès ont commencé à être signalés. Les autorités ont initialement indiqué que le nouveau virus était le SRAS-CoV-2, qui avait auparavant fait des ravages, mais les autorités sanitaires chinoises faisaient la course contre la montre pour trouver la véritable source.

    L'hypothèse principale est que le virus est né d'animaux en cage dans un marché de Wuhan, car 27 des 41 premiers patients s'y trouvaient. Ce n'est pas une surprise pour de nombreux experts, car des situations semblables se sont déjà produites. En 2003, un virus très similaire au SARS-CoV-2 a émergé d'un marché à Foshan, en Chine. Il a provoqué la maladie du SRAS, qui s'est propagée à des dizaines de pays et a tué près de 800 personnes. Au 6 mars, le SRAS-CoV-2 avait atteint 83 pays et tué plus de 3 400 personnes, la plupart en Chine.

    Les similitudes entre les deux virus soulèvent la question : pourquoi de nouvelles maladies continuent-elles d'émerger de Chine ?

    Zoonoses

    Bon nombre des virus qui ont engendré l'inquiétude au cours des dernières décennies proviennent d'animaux. Les conditions dans lesquelles l'industrie de la viande les élève et les confine, font passer de nombreuses maladies animales aux humains. C'est ce qu'on appelle les zoonoses. Sida, Ebola, maladie de la vache folle, grippe aviaire, peste porcine, SRAS... Toutes ces maladies ont été transmises par les animaux et ont touché des personnes qui les côtoyaient dans les élevages, les marchés ou à l'état sauvage.

    Les virus ont tendance à passer des animaux aux humains avec une certaine facilité, mais ils sont rarement mortels ou produisent au contraire les effets que nous connaissons aujourd'hui. Cependant, de plus en plus de maladies typiques des porcs, des vaches et des volailles affectent la population humaine, même si les plus inquiétantes sont celles qui proviennent d'animaux sauvages élevés pour la consommation humaine ... et nous revenons ici au cas de la Chine.

    En 2003, les civettes - du type mangouste - ont été interdites et abattues en grand nombre après qu'on a découvert qu'elles avaient probablement transmis le virus du SRAS aux humains. Des serpents, des chauves-souris, des ratons-laveurs, des porcs-épics, des pangolins, des cerfs et une foule d'autres animaux exotiques étaient vendus au marché de Wuhan, entassés et empilés dans de petites cages et abattus vivants pour les acheteurs.

     

    "Vous avez des animaux stressés. Par conséquent, leur système immunitaire est affaibli, et c'est via le processus de manipulation, dont l'abattage, que serait advenu le plus grand risque de contagion des animaux aux humains", explique Steven Galster, expert en trafic d'espèces sauvages.

    Tout comme le virus VIH est soupçonné de provenir de chimpanzés et Ebola de chauves-souris, il existe des preuves que le nouveau virus COVID-19 provient également de chauves-souris qui l'ont transmis aux pangolins, qu'ils ont finalement transmis au citoyens de Wuhan.

     

    "C'est exactement ainsi qu'un virus peut passer d'un animal à un autre, explique le professeur Peter Li de l'Université de Houston. Si cet animal entre en contact avec ou est consommé par un humain, le virus peut potentiellement l'infecter. Et si le virus se propage ensuite à d'autres humains, il provoque une épidémie", ajoute-t-il.

     

    Marchés vivants

    Les marchés qui vendent des animaux vivants pour la consommation sont présents dans le monde entier, mais en Chine, ils sont particulièrement protégés. Le gouvernement chinois lui-même promeut ce type de marché de la faune sauvage depuis 1978, afin de faire face à la crise alimentaire que le pays traversait à l'époque. Au départ, il ne s'agissait que de petites fermes rurales qui élevaient des animaux sauvages, mais dès 1988, la décision officielle a été prise de transformer ce marché en une nouvelle industrie. Les petites fermes locales ont commencé à croître. Par exemple, une ferme qui ne comptait que trois ours en a ensuite élevé plus d'un millier.

     

    "Des élevages d'animaux plus importants signifient de plus grandes chances qu'un animal malade puisse transmettre la maladie, explique Li. Et comme une grande variété d'espèces est généralement élevée, il y a une plus grande quantité de virus à propager."

    Au début des années 2000, les marchés vivants en Chine étaient à leur apogée, engendrant l'inévitable. En 2003, le SRAS est apparu sur un marché du sud du pays et le gouvernement a réagi en interdisant la consommation de civette... mais quelques mois après l'épidémie, il a été de nouveau autorisé, avec 54 autres espèces d'animaux sauvages. En 2004, cette industrie a généré 100 milliards de yuans de bénéfices et, en 2018, plus de 148 milliards.

     

    Peu de temps après l'épidémie de COVID-19, la Chine a fermé des milliers de marchés et de nouveau interdit le commerce d'espèces sauvages. Cependant, la loi sur la protection de la faune de ce pays reste inchangée et ce marché continuera probablement après la fin de la crise.

    "La plupart des Chinois ne mangent pas d'animaux sauvages. Les personnes qui les consomment sont les riches et les puissants, une petite minorité", explique Galster. "Cependant, les conséquences de ce type de marché retombent toujours sur les plus vulnérables".

     

    Que faire ?

    La seule raison pour laquelle ce genre de zoonose apparaît en Chine n'a rien à voir avec la culture de ce pays ou parce que ses conditions sont trop différentes de celles que nous avons dans les pays occidentaux. Les marchés vivants chinois confinent simplement une grande quantité d'animaux d'espèces diverses dans des conditions terribles. Ce n'est pas très différent de ce que l'on peut voir dans n'importe quel élevage industriel dans les pays les plus développés.

    Le fait de manger de la viande s'ajoute à cette liste de dangers. Non seulement la viande est mauvaise pour la santé, a des conséquences désastreuses pour la planète et génère des souffrances intenses chez les animaux, mais elle met en danger la vie de ceux que nous aimons à travers des pandémies que nous commençons seulement d'expérimenter.

    La crise du COVID-19 a mis sur la table l'une des plus grandes menaces pour la santé mondiale. L'ensemble des maladies ou infections pouvant être transmises entre les animaux et les humains est de plus en plus fréquente.

     

    "Nous détruisons les écosystèmes, ce qui fait que les animaux sauvages ont plus de contacts avec les humains. Par ailleurs, jamais dans l'histoire humaine nous n'avons eu autant d'animaux entassés dans les élevages et les marchés pour être mangés. C'est une bombe à retardement", explique Galster.

     

    Francisco Vasquez Neira, 15 mars 2020

     

    Traduit de l'espagnol / Source : https://www.animanaturalis.org/n/45361/covid-19-cronica-de-una-pandemia-anunciada

  • Le futur sera végan ou ne sera pas

                                                                                                                 
    Le véganisme n’est pas une mode : il est le signe de l’émergence d’une nouvelle conscience, à la fois devant les autres espèces et les enjeux environnementaux considérables auxquels nous devons faire face.

     

    Qu’est-ce que l’humanité ? Les dictionnaires soulignent la dimension morale et rationnelle de notre espèce. Est qualifié d’humain celle ou celui qui fait preuve de logique, de discernement, de compassion, d’altruisme et d’un sens aigu de la justice.

     

    Si l’on se fonde sur cette définition, force est de convenir que bien peu d’entre nous le sont. Consommer des produits d’origine animale n’est en rien rationnel : c’est une folie à tous les niveaux. Écologique, sanitaire et bien sûr éthique. Le Covid-19, comme le SRAS, le MERS et la fameuse grippe espagnole avant eux, devrait une fois de plus nous alerter sur nos pratiques alimentaires. Tous ces virus mortels sont nés parce que nous élevons des animaux et que nous les mangeons1. Le goût prononcé de notre espèce pour la violence est attesté par notre histoire. Et la violence fondatrice, celle qui génère toutes les autres et conditionne l’existence même de la violence, est celle que nous exerçons sur les membres des espèces non humaines. La barbarie commence exactement là où l’autre animal souffre et meurt de notre main.

     

    Nous n’avons pas besoin de produits d’origine animale pour vivre. Par conséquent, notre seule justification – qui bien sûr n’en est pas une – pour élever, engraisser, torturer et tuer autrui pour autant qu’il n’est pas « des nôtres », est que nous aimons le goût de sa chair et de ses sécrétions corporelles (lait, ovules, etc.). Sous telle ou telle latitude la « cuisine » varie, mais les meurtres restent les mêmes et aucun n’est justifiable. Tous relèvent d’un spécisme criminel, systématique, qui nie les victimes monstrueusement et absolument.

     

    La chasse ne sert pas à nous nourrir : elle n’est plus que l’expression d’une barbarie assumée, cette ultime part maudite que le chasseur inscrit à tort dans un ordre naturel qu’il est le premier à dérégler. Les modernes nemrods, ces terroristes auxquels plus un seul vivant ne semble échapper, qui s’approprient la nature et en font leur terrain de jeu sanglant, éprouvent une jouissance à détruire, et si certains s’efforcent maladroitement de recouvrir leur sadisme d’oripeaux clinquants (au premier rang desquels de pseudo-arguments écologiques qui n’abusent personne), d’autres assument entièrement leur passion. « J’aime tuer », revendique ainsi le sinistre Thierry Coste2.

     

    La jouissance du ventre, le divertissement, le plaisir, ne justifient pas le fait de soumettre, moins encore de massacrer des êtres doués de sentience3. C’est la sentience qui conditionne la possession de droits fondamentaux inaliénables et fonde l’égalité en droit des individus qui en sont pourvus. « Le véganisme abolitionniste est l’unique position qui soit cohérente avec la reconnaissance du fait que la vie des humains et celle des non-humains sont moralement équivalentes. Le véganisme doit être la ligne de conduite morale sans équivoque de tout mouvement social ou politique accordant aux animaux non humains une valeur morale inhérente ou intrinsèque, et reconnaissant qu’ils ne sont pas des ressources à notre usage4 », écrit Gary L. Francione.

     

    Si nos sociétés perpétuent ces boucheries alors qu’elles s’abîment littéralement dans l’abondance, c’est parce qu’autre chose de fondamental est en jeu. Comme l’affirmait en substance Derrida, nous nous sommes auto-institués comme sujets en mettant à mort l’animal. On peut établir de même que la masculinité s’est construite contre la féminité (telles du moins que la culture les a définies), et qu’il existe un lien direct entre virilisme, consommation de chair et massacre animal – d’où le concept derridien de « carno-phallogocentrisme ». « C’est un "penchant au meurtre, une indéracinable pulsion de mort dans ce qu’elle a de plus archaïque, à savoir la dévoration5 ", qui caractérise l’alimentation carnée, note Julia Kristeva. Le concept forgé par Derrida de "carno-phallogocentrisme" pour parler d’une "virilité carnivore6 ", désigne avec force l’indissociabilité des liens entre la carnivorité, le discours et le masculin, c’est-à-dire le sujet tel qu’il est défini par la métaphysique. En tant que tel, ce concept peut constituer une grille de lecture pour ce passage de la Genèse qui voit dans le meurtre de l’animal un moment fondateur d’une humanité au sein de laquelle un double clivage homme/femme et homme/animal se forme7 », estime Florence Burgat. La viande est considérée depuis toujours comme le symbole de la virilité, le véhicule de la force et de l’agressivité qui lui sont traditionnellement associées. Les valeurs de paix et d’empathie sont perçues quant à elles comme féminines. La manière dont les femmes et les animaux non humains sont soumis à l’ordre viriliste du monde en dit long sur le fonctionnement de nos civilisations et leur violence intrinsèque. C’est pourquoi le destin des premières et des seconds est inextricablement lié, et qu’on ne peut être antispéciste sans être également féministe (et vice-versa). La philosophe américaine Carol J. Adams ne cesse dans son œuvre d’éprouver l’unité de ces combats8 .

     

    Aucun argument valable ne peut être opposé aux faits suivants : consommer des produits d’origine animale entraîne des holocaustes gratuits, incomparables et perpétuels. Plus de cent cinquante milliards d’êtres sentients sont massacrés chaque année dans le monde à cette fin9 . L’élevage et la consommation de produits d’origine animale sont l’un des facteurs majeurs, sinon le facteur principal, du dérèglement climatique10 . Tous les animaux de la planète ont intérêt à ce que nous adoptions un régime uniquement végétal – y compris nous-mêmes. Notre survie et notre santé l’exigent. Le véganisme est une nécessité éthique, la clé de la permanence des vivants, des animaux victimes en premier lieu. 

     

    La terre est en train de mourir, par notre faute. Cette oasis foisonnante, sans doute unique dans l’univers, est un miracle que nous sommes en train d’anéantir méticuleusement, et nous avec. Du paradis, nous avons fait un enfer. Tout se passe comme si la nature avait choisi de se suicider à travers la créature humaine qu’elle a également engendrée. Mais la nature pourtant n’a pas de dessein, moins encore de dessein suicidaire. Faut-il alors convenir qu’elle a des ratés et que nous sommes l’erreur, le scandale par lequel la mort s’engouffre ? Sans doute.

     

    Il y a un lien entre l’appauvrissement du langage à l’œuvre, sa syntaxe arbitraire, son orthographe vaincue, et l’appauvrissement de notre rapport à la nature. Il y a un lien entre la disparition des espaces sauvages et le dépérissement de l’imaginaire (quand le poète américain Gary Snyder parlait des « étendues sauvages de l’esprit », il en disait davantage sur l’incarnation de la langue et son intrinsèque naturalité que tous les manuels de philologie réunis). Il y a un lien entre l’assassinat de la beauté et l’évanouissement de la poésie. Entre le règne de la novlangue des technocrates au pouvoir et l’avènement d’un monde vidé de sa sauvagerie prise au sens étymologique du mot, c’est-à-dire de ses forêts. 

     

    Nous sommes devenus des êtres pauvres, privés de ce qui nous a constitués, de ce qui, un jour, a su nous émerveiller, de ce qui continue de nous faire vivre à notre insu. Nous tuons la nature et les êtres qui la peuplent, et ce faisant la substance même de nos rêves. 

     

    Il n’y a qu’un propre de l’humain, de l’homme en particulier : son pouvoir de létalité. C’est en cela que le véganisme éthique est révolutionnaire, en tant qu’il est le signe de l’émergence d’une conscience nouvelle basée sur des valeurs de vie et non plus de mort. L’heure est grave. Nous n’avons plus le temps. Les non-humains moins encore que nous, que nous décimons sans relâche ni pitié11. Le futur sera végan ou ne sera pas.

     

    Méryl Pinque

    http://fr.tiredearth.com/articles/le-futur-sera-v%C3%A9gan-ou-ne-sera-pas

     

    Notes :

    1. Cf. « L’épidémie de coronavirus est liée à la consommation de chair animale », PETA, 29 janvier 2020 (https://www.petafrance.com/actualites/lepidemie-de-coronavirus-est-liee-a-la-consommation-de-chair-animale/) ou encore "China has made eating wild animals illegal after the coronavirus outbreak. But ending the trade won't be easy", CNN, 6 mars 2020 (https://edition.cnn.com/2020/03/05/asia/china-coronavirus-wildlife-consumption-ban-intl-hnk/index.html). Il est singulier, et tristement révélateur, que pas une fois les médias français, qui commentent pourtant abondamment l’épidémie, n’abordent le problème de son origine. C’est encore plus vrai (et plus grave) pour les autorités sanitaires. Or on n’éradique pas une maladie sans en traiter d’abord les causes. Hobbes affirmait que la raison, soi-disant propre de l’humain, était le calcul des conséquences. Tout montre au contraire que notre espèce ne mesure jamais les conséquences de ses actes. Sinon, elle serait devenue végane depuis longtemps.
    2. Voir : https://info-loup.eu/propos-chocs-conseiller-federation-chasseurs-aime-bien-tuer-animaux/.
    3. Être sentient, c’est avoir une conscience subjective. C’est être doué de sensibilité, de la capacité de ressentir et de percevoir, d’avoir des expériences, une volonté, des objectifs, des envies, des intérêts particuliers. C’est posséder n’importe quel esprit permettant d’éprouver la frustration ou la satisfaction de n’importe quel intérêt qu’on possède.
    4. Gary L. Francione, « Les problèmes de la théorie du bien-être animal et l’importance de l’éducation végane », in Bêtes humaines ? Pour une révolution végane (dir. Méryl Pinque), Paris, Autrement, 2015, p. 63. Francione est un professeur de droit et philosophe américain, père de la théorie du véganisme abolitionniste, auteur de plusieurs livres sur le sujet, dont certains ont été traduits en français.
    5. Julia Kristeva, Pouvoirs de l’horreur, Paris, Le Seuil, 1980, p. 115.
    6. Jacques Derrida, « "Il faut bien manger" ou le calcul du sujet », in Confrontation, Cahier n° 20, Paris, Aubier, hiver 1989, p. 102.
    7. Florence Burgat, Animal mon prochain, Paris, Odile Jacob, 1997, p. 164.
    8. Cf. par exemple Carol J. Adams, The Sexual Politics of Meat: A Feminist-Vegetarian Critical Theory, New York, Continuum, 1990. Tr. fr. Politique sexuelle de la viande, une théorie critique féministe végétarienne, Lausanne, L’Âge d’Homme, collection V, 2016.
    9. Voir : https://www.planetoscope.com/elevage-viande/1172-nombre-d-animaux-tues-pour-fournir-de-la-viande-dans-le-monde.html.
    10. « La consommation de viande, principale cause du réchauffement climatique », CNEWS, 21 août 2018 (https://www.cnews.fr/monde/2018-08-21/la-consommation-de-viande-principale-cause-du-rechauffement-climatique-725924).
    11. « De 1970 à 2014, le rapport [du WWF] conclut que le nombre de vertébrés sauvages […] s'est effondré de 60 % alors que le précédent rapport évoquait un recul de 52 %. Le déclin des animaux d’eau douce atteint même 83 % […]. Globalement la dégradation des habitats représente la menace la plus signalée. Et le déclin de la faune concerne tout le globe […]. » (https://www.futura-sciences.com/planete/actualites/developpement-durable-biodiversite-plus-60-animaux-sauvages-ont-disparu-depuis-1970-55431/).
  • Covid-19 : on ne traite pas une maladie sans en traiter d'abord les causes (2)

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    "Nous sommes tous inondés d'informations sur le COVID-19 : principalement sur notre propre santé et sur l'économie. À juste titre, mais ce dont on ne parle malheureusement pas assez, c'est de la CAUSE profonde de cette crise : la cruauté des humains envers les animaux.
     
    Avez-vous déjà entendu parler des marchés humides ? Je vous épargne les images, mais vous devez me croire : ces marchés sont l'enfer sur terre pour les animaux. La viande provenant d'animaux sauvages y côtoie d'autres animaux vivants tels que les paons, les rats, les porcs-épics, les chauves-souris ou les civettes... et dans ce décor ahurissant, il n'y a que de la souffrance animale innommable. Les animaux sauvages y sont abattus, devant leurs pairs, dans la même mare de sang et par les mêmes mains que le porc et le poulet qui se trouvent à côté d'eux. C'est horrible et ça me dégoûte.

    Et pour quoi faire ? Pour la consommation humaine, pour le « plaisir » des humains. La honte et la douleur, ce sont les deux sentiments qui m'envahissent ! Le bien-être animal, l'hygiène, la sécurité alimentaire et les normes sanitaires ? Ils ne savent pas ce que c'est dans ces marchés répugnants ! Or, vous le savez sans doute : c'est sur un tel marché humide en Chine, à Wuhan, qu'on a retrouvé la source du nouveau coronavirus.

    Et vous savez ce qui est le pire ? Apparemment, ils n'ont pas appris leur leçon. Dans le cas du SRAS, en 2003, le virus a probablement été transmis de la chauve-souris à la civette et ensuite à l'humain. Et pourtant, à l'époque, le gouvernement chinois n'a pas voulu mettre un terme définitif aux « marchés humides » ni adopter une approche drastique contre le commerce des animaux sauvages. C'est ce qu'on appelle une négligence coupable, cher.e ami.e des animaux. Parce que le nouveau coronavirus a très probablement une origine similaire !

    Alors que nous sommes confrontés à une crise mondiale, la Chine a quand même pris des mesures et fermé temporairement les marchés humides. Oui, vous avez bien lu : temporairement ! Est-ce que tout sera de nouveau comme avant ? Pas si cela dépend de nous. Dès que la vague du Coronavirus sera passée, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) devra exhorter les pays asiatiques et africains concernés, et de préférence le monde entier, à prendre des mesures drastiques contre les « marchés humides » !

    La capture d’animaux sauvages dans la nature doit également être drastiquement freinée, voire bannie. En outre, les contrôles sur la viande de brousse (celle issue d'animaux exotiques) doivent devenir beaucoup plus stricts ! La viande de brousse doit être interdite. L'Union européenne doit également prendre ses responsabilités dans ce domaine et jouer impérativement un rôle de premier plan.

    En attendant, nous continuons à lutter contre le transport de animaux vivants destinés à l'abattage vers des pays tiers, parce que ces transports entraînent le risque de propager des maladies animales aux conséquences désastreuses.

    Si, une fois de plus, nous ne prenons pas les mesures drastiques nécessaires, je n'exclus pas la possibilité que, d'ici quelques années, nous soyons à nouveau confrontés à un virus qui se transmet des animaux aux humains... et qui cause à nouveau une catastrophe à l'échelle mondiale.

    J'espère sincèrement que cette crise nous apprendra aussi quelque chose sur la façon dont nous, en tant qu'humains, traitons les animaux. Tirons-en les leçons : nous le devons non seulement à nous-mêmes, mais aussi aux animaux. Parce que, encore une fois... le comportement scandaleux des humains envers les animaux en est la cause fondamentale.

    Je continue à croire en un monde meilleur pour les humains et les animaux. Parce que l'espoir fait vivre !"

    Michel Vandenbosch
    Président de GAIA
  • Covid-19 : on ne traite pas une maladie sans en traiter d'abord les causes (1)

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    "En capturant, en commercialisant et en tuant les animaux sauvages, les humains propagent des maladies qui leur sont fatales.

     

    Au cours des 40 dernières années, les pires pandémies qui ont affecté l’humanité, dont celle du COVID-19, ont été provoquées par le commerce et la consommation d’espèces sauvages et la destruction de leur habitat.

     

    Le commerce d’espèces sauvages pousse également des animaux comme les pangolins et les girafes à l'extinction. Il faut que cette folie s'arrête.

     

    COVID-19 démontre une fois de plus que les principaux vecteurs de l’extinction – l’exploitation de la faune et la destruction de la nature - alimentent les pandémies mondiales.

     

    Les éléphants, les poissons d'aquarium, les rhinocéros, les perroquets, les tortues et même les hippocampes sont tous victimes des humains qui les exploitent. Ceux-ci ont la même mentalité que les chasseurs de trophées, qui ciblent les espèces en voie de disparition pour décorer les murs de leurs villas comme de leurs réseaux sociaux.

     

    Les animaux sauvages ne sont pas des marchandises, a fortiori lorsque leur commerce nous expose à des épidémies. Leur commerce, mondial, doit cesser immédiatement.

     

    Un million d'espèces sauvages vont s’éteindre dans les prochaines décennies si nous ne changeons pas nos tristes habitudes.

     

    Nous devons mettre un terme à l'exploitation commerciale de la faune, ainsi qu’à la destruction de la nature qui laisse les animaux sans abri.

     

    Les animaux sauvages appartiennent à la nature. Sans eux, nous n’existons pas non plus."

     

    Kierán Suckling
    Center for Biological Diversity

  • Le vrai visage de la laine

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    Le vrai visage de l'industrie lainière.

    BOYCOTTEZ LA LAINE.

    DEVENEZ VÉGAN.E.

     

    Source et pétition à signer : https://investigations.peta.org/lambs-wool-australia-mulesing/?fbclid=IwAR17VIRVqKdDKR8CNW8MAZnaCvNmP1XGzm53UN-F4PvD6x-kGqbOy5VXYbw

  • LA question la plus cruciale, et aussi la plus taboue : pourquoi les hommes sont-ils sadiques ?

     

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    Brett Kavanaugh et Christine Blasey Ford

    Que faudra-t-il qu’il arrive pour qu’on parle franchement de la source du sadisme des hommes ?

    Le sadisme des hommes est soit inné, soit appris. S’il est appris, c’est un problème auquel on peut s’attaquer.

    Le 6 octobre 2018 par MEGHAN MURPHY (traduit par Pauline Cyr)

     

    Bonjour et bienvenue à l’édition de cette semaine sur Qu’est-ce qui peut bien clocher à ce point chez les hommes?

    Je dois vous avertir que je n’aurai probablement pas de réponse à la fin de cette enquête, mais peut-être qu’un généreux confrère se sentira inspiré à éclairer notre pauvre lanterne.

    Je suis, bien sûr, hors de mon domaine d’expertise, car je n’ai jamais joui en suffoquant un homme avec mon vagin, et je n’ai jamais rêvé non plus d’inviter un groupe de copines à venir torturer avec moi un homme jusqu’à ce qu’il pleure ou qu’il vomisse, tout en me masturbant et en le traitant de sale chien. Je n’ai jamais poussé un homme saoul dans une chambre, verrouillé la porte, et couvert sa bouche pour l’empêcher de respirer ou de crier, pour ensuite le baiser devant une copine en rigolant.

    Vous me trouverez peut-être coincée, mais faire mal à d’autres personnes ne m’excite pas. L’idée d’étrangler ou de torturer quelqu’un ne m’excite pas: ça me rend malade. Cela ressemble à quelque chose qu’on ferait à quelqu’un qu’on déteste, pas à quelqu’un qu’on désire. Et qui veut avoir des relations sexuelles avec une personne qu’on déteste?

    Oh? Ah bon…

    Le 8 août 2017, Justin Schneider a offert à une femme de l’emmener chez son copain à elle, en insistant qu’il le connaissait. Mais il l’a conduite ailleurs, puis a arrêté la voiture et lui a demandé de sortir. Alors qu’elle s’éloignait, il l’a attaquée par-derrière et lui a dit qu’elle allait mourir, avant de l’étrangler jusqu’à ce qu’elle perde connaissance. Lorsque sa victime de 25 ans a repris connaissance, Schneider venait de se masturber et d’éjaculer sur elle. Il refermait sa braguette. Il lui a donné un mouchoir en lui disant : « Je ne vais pas réellement te tuer, j’ai dû te faire croire que tu allais mourir pour pouvoir jouir. »

    Cet homme de 34 ans n’a pas reçu de peine d’emprisonnement, mais son année de détention à domicile lui a donné une chance de « travailler sur lui-même et de devenir une meilleure personne, un meilleur mari et un meilleur père ».

    Bravo pour lui. Super.

    Pour éviter tout malentendu, je dois préciser que je crois en la réhabilitation. Je crois que les gens peuvent changer. Je ne crois pas que la prison réhabilite les gens. Mais je sais aussi qu’il y a énormément d’hommes sadiques dans ce monde, et c’est terrifiant. Je ne crois pas du tout qu’une année de détention à domicile a guéri cet homme de ses désirs sadiques, et je pense que maintenant, comme d’habitude, d’autres femmes courent le danger d’être victimes de cet homme. Et je pense que suffisamment de femmes ont subi des épreuves semblables à celle de la victime de Schneider – et bien pire – et qu’il est temps de commencer à examiner les causes profondes de ce problème au lieu d’accorder aux hommes des peines ridicules après le fait, en leur permettant de continuer à fonctionner comme ils l’ont toujours fait, mais peut-être un peu plus discrètement.

    Il me semble évident que, dans une société qui tolère le sadisme comme une fantaisie sexuelle saine, les hommes voudront réaliser ces fantasmes. Je trouve choquant que tout le monde considère la strangulation comme une façon amusante et inoffensive de pimenter les choses dans la chambre à coucher, mais aussi que personne ne s’attende à ce qu’un homme se masturbe en étranglant une femme.

    Et je sais, oui je sais. Je sais ce que vous allez me dire : Le consentement, Meghan… C’est le consentement qui fait la différence. Mais je ne parle pas ici de ce que les femmes veulent (ou de ce qu’elles disent qu’elles veulent, parce qu’elles savent que cela fait bander les hommes). Je parle de ce que les hommes veulent. Parce que même si un homme me demandait de l’étrangler jusqu’à ce qu’il perde connaissance, je ne le ferais pas. Et même si je le faisais, sous quelque prétexte, comme de l’aimer au point que je veuille lui plaire en l’étranglant jusqu’à ce qu’il perde connaissance, parce que pour lui, je ferais n’importe quoi, cela ne me ferait pas jouir.

    La semaine dernière, nous avons entendu Dre Christine Blasey Ford expliquer que ce qui l’a le plus marquée, cette nuit-là, il y a 36 ans, lorsque Brett Kavanaugh l’a agressée sexuellement, c’était le rire : « Le rire éclatant des deux gars » a-t-elle dit de sa voix brisée, « et le fait qu’ils s’amusaient à mes dépens… J’étais sous l’un d’eux, et ils riaient. »

    J’ai beaucoup de souvenirs de jeunes hommes comme ces deux-là, qui ont fait des choses semblables à mes amies, ou qui ont essayé de me les faire à moi. D’une façon ou d’une autre, j’ai réussi à m’échapper de situations semblables, en pleurant et traumatisée, mais seulement de m’être faite traiter de « salope », de « putain », de « chienne », parce que je j’avais refusé de me plier au scénario prévu. J’ai eu beaucoup de chance dans de nombreuses situations qui auraient pu tourner extrêmement mal. Beaucoup de femmes que je connais n’ont pas eu cette chance. Ce que je veux dire, c’est que les hommes de ce genre ne sont pas particulièrement hors de l’ordinaire, même s’il y a de nombreux niveaux aux actes sadiques que différents hommes veulent infliger aux femmes et leur infligent.

    Le 9 juin 2017, Yingying Zhang, chercheuse chinoise invitée aux États-Unis, est montée dans une voiture avec Brendt Christensen à l’Université de l’Illinois, au campus Urbana-Champaign. Christensen a emmené Zhang jusqu’à son appartement où il l’a séquestrée, sans doute agressée sexuellement et torturée de diverses façons, avant de l’assassiner (son corps n’a toujours pas été retrouvé). Christensen est un ancien étudiant au doctorat, inscrit à l’université de Zhang. Il s’est servi du site Fetlife, un « réseau social de la communauté des BDSM, fétichistes et pervers », pour accéder au forum « Enlèvement 101 », qui comprend des sous-titres comme « Fantasme de l’enlèvement parfait » et « Planifier un enlèvement ». Des procureurs à son procès ont révélé que Christensen avait « étranglé et agressé sexuellement » une autre victime en 2013, en Illinois, et déclaré avoir fait « d’autres victimes », et exprimé sa volonté d’être « connu en tant que tueur ». C’était réellement un de ses fantasmes, qu’il a pu entretenir et planifier grâce à des sites BDSM. Christensen était marié et semblait, aux dires de tous, être un homme tout à fait normal. Il était aimé de ses élèves (Christensen a été maître de recherches à la faculté de Physique, lors de ses études post-graduées).

    Peter Masden participait régulièrement à des partys « fétiches ». Il a lui-même figuré dans deux films pornos, et aimait la pornographie violente de type « snuff ». Le jour où il a rencontré la journaliste Kim Wall à Copenhague, qu’il a tuée à bord de son sous-marin en août 2017, Masden a fait une recherche sur Internetavec les mots beheaded girl agony (agonie d’une fille décapitée), et il a regardé un film sur une femme à qui l’on tranchait la gorge. On a trouvé dans son ordinateur des vidéos de femmes torturées et exécutées en direct. L’homme de 47 ans a ligoté Kim Wall et l’a agressée sexuellement avant de la tuer et de démembrer son cadavre. Madsen a été accusé de « relations sexuelles autres que la pénétration vaginale d’un caractère particulièrement dangereux » après qu’on ait découvert des blessures faites au poignard dans et autour des organes génitaux de Kim Wall.

    Il y a beaucoup d’autres récits concernant des hommes comme ceux-là. Il y a les Jian Ghomeshi, qui ne veulent peut-être pas aller jusqu’à tuer quelqu’un, mais veulent simplement avoir le plaisir de frapper une femme à la tête pendant qu’elle leur fait une fellation. Il y a d’innombrables jeunes hommes qui violent des femmes en groupe lors d’un party, parce qu’en fin de compte, c’est un party! Et puis il y a tous les hommes qui regardent tout simplement ce genre de chose sur Internet en se masturbant, et qui suggèrent peut-être très poliment à leurs copines d’intégrer ces « perversions inoffensives » à leur répertoire sexuel. Il y a tellement d’hommes qui trouvent amusant de faire mal à des femmes. C’est une blague. C’est un divertissement, ou c’est sexy.

    Où se situe la limite? À quel moment déclarons-nous qu’il est acceptable ou inacceptable qu’un homme rêve de faire mal à des femmes? Lorsqu’il réalise son fantasme? Lorsqu’il se masturbe en regardant des femmes se faire agresser ou humilier sur Internet? Lorsqu’il est trop tard?

    Et d’où viennent ces désirs? Pourquoi tant d’hommes veulent-ils faire mal aux femmes – pourquoi faire mal aux femmes les fait-il bander?

    Je suppose que certains de ces hommes ont eux-mêmes été victimes d’agressions, peut-être sexuelles. Mais ils ont fort probablement, pour la plupart, souffert ces agressions aux mains d’autres hommes. Et beaucoup d’entre eux, bien sûr, n’ont pas subi d’agressions sexuelles – ils n’ont pas été étranglés en se faisant baiser, n’ont pas été étouffés par une queue dans la gorge, n’ont pas été traités de pute ou de chienne en étant pénétrés dans le cul et la gorge en même temps. Il y a une raison pour laquelle les hommes font cela aux femmes. Ce n’est pas parce que les femmes le méritent, ni parce que les femmes le leur ont fait et qu’ils veulent maintenant se venger.

    Beaucoup de gens trouvent difficile d’expliquer ou de constater la misogynie. Cependant, quand on réfléchit à de tels crimes et qu’on cherche leur justification, cela cesse d’être difficile.

    Il y a quelque chose d’inquiétant dans notre peu de préoccupation envers ces comportements et envers la quantité d’hommes qui les adoptent, sous différentes formes. Soit que nous admettons toutes et tous qu’il y a quelque chose d’inné chez les hommes qui les incite à jouir de la torture, et dans ce cas, que doit-on faire des hommes? Soit que nous reconnaissons que ce comportement est surtout appris, et dans ce cas, nous pouvons y mettre fin. Il ne peut pas y avoir autant de psychopathes de naissance dans ce monde. (Et s’il y en a autant, pourquoi sont-ils presque tous des hommes, et presque jamais des femmes?) Et considérant les hommes non psychopathes que nous aimons et avec lesquels nous vivons – ceux qui sont « bons », et qui ne se masturbent pas sur des femmes qu’ils étranglent dans la rue jusqu’à l’inconscience – des hommes qui sont eux aussi excités à l’idée qu’ils pourraient tuer leur copine s’ils le voulaient et qui nous le disent, mais choisissent de ne pas le faire, et trouvent que ce sentiment de puissance en étranglant juste un peu leur copine constitue une perversion inoffensive, alors nous devons reconnaître que ce problème de violence et de domination sexualisées n’est pas seulement un problème de pervers et de « cas psychiatriques ».

    Dans la pornographie et dans la « vraie vie », des hommes veulent nous étrangler, éjaculer dans nos yeux, nous pénétrer jusqu’à nous faire étouffer, pleurer ou vomir – jusqu’à nous tuer peut-être aussi – et peut-être rire tout en le faisant (« Oh, tu ne peux plus respirer? Mais regarde comme ma queue est dure! »), mais ils n’arrivent pas à comprendre pourquoi les féministes protestent! C’est comme s’ils croyaient que les femmes ne voient pas ce qu’ils regardent, ce qu’ils font et ce qu’ils demandent au lit. Mais bien sûr, nous le voyons. Nous le savons toutes. Seulement, la plupart d’entre nous ne veulent pas en parler. C’est trop dur de reconnaître ce problème, et c’est trop dur d’y faire face lorsque nous le faisons. Allons-nous quitter ces hommes? Désespérer d’eux comme étant mauvais et incorrigibles? Allons-nous leur parler et essayer de leur expliquer les torts causés par leurs habitudes pornographiques ou sexuelles? Je n’ai pas de réponse assurée à ces questions. Mais je sais au moins qu’il nous faut commencer à en parler, et dire que cela n’est pas normal, que ce n’est pas acceptable, et que ce n’est certainement pas inoffensif.

    Nous pouvons continuer à trouver des excuses, à fermer les yeux, ou à crier : « Ne viens pas contrôler ma sexualité, espèce de sainte-Nitouche! » chaque fois que des féministes suggèrent que, peut-être, le fait de transformer la violence en source d’excitation pourrait inciter les hommes à être excités par la violence. Ou nous pouvons commencer à parler franchement. Étant donné les conséquences, ça semble en valoir la peine.

    Version originale, suivie d’une centaine de commentaires : https://www.feministcurrent.com/2018/10/06/will-take-honest-conversation-root-mens-sadism/

    On trouvera beaucoup d’autres textes de Meghan Murphy sur d’autres pages de TRADFEM.

    photo Meghan C-16Meghan Murphy est écrivaine et journaliste autonome, secrétaire de rédaction du soir pour le site rabble.ca, et fondatrice et directrice du site Feminist Current. Elle a obtenu une maîtrise au département d’Études sur les femmes, le genre et la sexualité de l’Université Simon Fraser en 2012.
    Meghan a commencé sa carrière radiophonique en 2007, dans une caravane installée au milieu d’un champ de moutons. Son émission s’appelait « The F Word » et était diffusée à partir d’une toute petite île au large des côtes de la Colombie-Britannique. Elle a pleinement profité de la liberté que lui laissait cette radio pirate  : buvant de la bière à l’antenne, lisant des passages d’Andrea Dworkin, et passant du Biggie Smalls. Elle est revenue à Vancouver, où elle a rejoint l’émission de radio elle aussi nommée, coïncidence, « The F Word », qu’elle a produite et animée jusqu’en 2012. Le podcast de Feminist Current est le projet « radio » actuel de Meghan, une façon de communiquer une analyse critique féministe progressiste à quiconque s’y intéresse. Feminist Current est une émission syndiquée à Pacifica Radio et hébergée par le réseau de podcasts Rabble.
    Meghan blogue sur le féminisme depuis 2010. Elle n’hésite pas à penser à contre-courant et a été la première à publier une critique des défilés Slutwalk, en 2011. C’est l’une des rares blogueuses populaires à développer en public une critique à la fois féministe radicale et socialiste de l’industrie du sexe. Les critiques adressées par Meghan au #twitterfeminism, à la mode du burlesque, à l’auto-objectivation des selfies, et au féminisme du libre choix lui ont valu une foule d’éloges et d’attaques, mais surtout une reconnaissance comme écrivaine qui n’a pas peur de dire quelque chose de différent, en dépit de ce que le féminisme populaire et les grands médias décrètent comme ligne du parti.
    Vous pouvez trouver ses écrits en version originale dans les médias TruthdigThe Globe and MailGeorgia StraightAl JazeeraMs. MagazineAlterNetHerizonsThe TyeeMegaphone MagazineGoodNational PostVerily MagazineRavishlyrabble.caxoJaneViceThe Vancouver Observer et New Statesman. Meghan a également participé à l’anthologie Freedom Fallacy : The Limits of Liberal Feminism.
    Elle a été interviewée par Radio-Canada, Sun News, The Big Picture avec Thom Hartmann, BBC Radio 5, et Al Jazeera, ainsi que dans de nombreux autres médias.
    Isabelle Alonso a publié une interview d’elle sur son blog.
    Vous pouvez la suivre sur Twitter @MeghanEMurphy.
     

    Source : https://tradfem.wordpress.com/2018/10/08/que-faudra-t-il-quil-arrive-pour-quon-parle-franchement-de-la-source-du-sadisme-des-hommes/

  • Pourquoi le véganisme ?

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    Pourquoi le véganisme ?

    Voilà pourquoi.

  • 15 septembre : #CleanUpDay #CleanUptheWorld

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    Ma récolte de déchets collectés en une heure dans la Méditerranée (Var) en bas de chez moi. 

     

    Contenu principal : plastiques, pailles, mégots de cigarette, serviettes hygiéniques et cotons-tiges - sans compter le pneu qui ne tenait pas dans le sac. 

     

    Oui, l'humanité est dégueulasse.


    #CleanUpDay

    #CleanUptheWorld