Cuisine chinoise : la biodiversité est dans les assiettes
Écrit par Claire Goujon-Charpy Le 19 mai 2009
Le ragoût de tortue soigne le cancer, la viande de crocodile soulage l'asthme, les écailles de pangolin régulent les menstruations…
Du moins, c’est la sagesse traditionnelle chinoise qui le dit.
Cette croyance est particulièrement forte dans le sud de la Chine.
Ainsi, dans la province de Guangdong, les marchés d'animaux regorgent de serpents, de scorpions, de salamandres, de tortues et d‘oiseaux, tous voués à finir leur vie dans les restaurants ou les pharmacies, même s‘ils font partie d‘espèces menacées.
Principal responsable : la médecine traditionnelle chinoise, qui énumère les qualités curatives de nombreux animaux exotiques.
Et souvent, plus l’animal ou la plante est sauvage, meilleurs sont ses effets.
Ici, un dicton populaire dit d’ailleurs que l’on peut manger tout ce qui a quatre pattes, sauf les chaises, tout ce qui vole sauf les avions et tout ce qu’on trouve dans l’eau, sauf les bateaux…
Une enquête menée par Traffic, une organisation intrenationale qui surveille le commerce de plantes et d'animaux, a révélé l'an dernier que près de la moitié des citadins avaient mangé des animaux sauvages dans les douze mois précédents.
Il faut dire que ces dernières années, la demande d’animaux sauvages a bondi avec l’augmentation du niveau des revenus : de nombreux chinois peuvent maintenant consommer des aliments qui étaient autrefois considérés comme des délices pour riches.
Beaucoup de reptiles arrivent discrètement au bord de l'extinction, alors que l'attention internationale a tendance à se concentrer sur les grands mammifères comme le tigre de Sumatra et le panda géant.
La Wildlife Conservation Society fait état d'une forte baisse de la diversité de tortues d'eau douce, des serpents et des grenouilles dans la nature.
Les tortues sont parmi les plus menacées, car elles se reproduisent lentement et leur viande est considérée comme bonne pour la longévité.
Heureusement, un groupe grandissant d’étudiants chinois activistes tentent de s’opposer à ces habitudes de consommation destructrices.
Cette ONG en devenir agit dans des domaines où les autorités ont des succès limités : surveillance de marchés et de restaurants, rapports de vente d’espèces menacées, changement des habitudes de consommation.
Ses membres essayent de combler le fossés entre la culture dans laquelle ils ont grandi et l’intérêt pour la conservation des espèces, auquel ils ont été sensibilisés via l’école et l’internet.
De leur côté, les autorités effectuent des contrôles et lancent parfois des raids sur les restaurants et les vendeurs.
Mais pour les partisans de la conservation de l‘environnement, le plus important est de faire évoluer les mentalités.
Car tant qu’il y aura des consommateurs, il y aura des vendeurs.
Les protecteurs de la nature craignent aussi que le business des animaux sauvages ne soit tout simplement poussé dans la clandestinité.
Un célèbre marché de Nansha a été fermé.
Mais d’autres prospèrent illégalement.
Dans une sombre banlieue de Taiping, à une heure de route du centre de Guangzhou, le Guardian a trouvé des vendeurs qui cachaient leurs marchandises dans trois longues rangées de hangars, hors de vue des autorités et des protecteurs de la nature.
Le lieu ressemblait à un zoo étroit et sale, rempli d’animaux prisonniers dans des cages métalliques.
Et de tel marchés existent dans tout le sud de la Chine…