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« Les Femmes du bus 678 » contre les clichés des Egyptiens

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Louis Lepron | Journaliste

Une salle d’audience d’un tribunal du Caire en 2008.

Premier procès, en Egypte, pour harcèlement sexuel.

La plaignante, Noha Rushdi, se fait moquer par l’avocat de la défense.

Mohamed Diab était présent :

« C’est à ce moment là que j’ai décidé de réaliser “Les Femmes du bus 678”. Pour que cet avocat comprenne ce que vivent les femmes. »

Elles seront trois à incarner « les » femmes d’Egypte :

  • Fayza des quartiers populaires,
  • Seba la bourgeoise ;
  • Nelly, tête brûlée.

Toutes les trois victimes d’une agression sexuelle.

Film réalisé par Mohamed Diab

Un cercle vicieux

En Egypte, les harcèlements sexuels concernent 83% des Egyptiennes, et 98% des femmes étrangères de passage.

Le scénariste égyptien s’est inspiré des groupes thérapeutiques qui réunissent des femmes ayant été attaquées.

« Même si cela m’a pris des années pour récupérer des informations, les femmes avec qui j’ai parlé se sont ouvertes progressivement. “

Selon lui, un cercle vicieux caractérise la société égyptienne :

  • les hommes n’ont pas conscience de la gravité de leurs actes ;
  • honteuses, les femmes n’iront jamais avouer avoir été agressées ou violées ;
  • les frères ou maris, s’ils apprenaient une telle chose, se sentiraient comme des ‘sous-hommes’.

Il précise :

‘Dans Les Femmes du bus 678’, chaque mot, chaque phrase, a déjà été prononcé.”

Place Tahrir, l’agression d’une journaliste

A sa sortie dans les salles égyptiennes, “Les Femmes du bus 678” fait beaucoup parler de lui.

Les femmes savent que le film dépeint une vérité ; les hommes, pour la plupart, n’y voient qu’une fiction de plus.

Un mois plus tard éclate la révolution égyptienne.

Mohamed Diab, alors en promotion pour son film, sera l’une des premières personnalités à soutenir le mouvement.

Mais il perçoit une confrontation abstraite entre deux Egypte :

“Les Egyptiens présents lors des dix-huit premiers jours étaient les plus braves car ils pensaient que la police allait les tuer. Avec le courage d’affronter la mort, ils ont fait ressortir le meilleur d’eux-mêmes. Aucune femme, alors qu’on était serrés comme des sardines, n’a été abusée.”

Le réalisateur parle de la “nouvelle Egypte”.

La “vieille”, elle, arrive place Tahrir le 11 février, quelques heures après le départ de Hosni Moubarak : des femmes se font violer, notamment une journaliste d’ABC, une histoire reprise dans le monde entier.

“Un fondement culturel, propre à l’Egypte”

Mohamed Diab en est conscient : le procès auquel il a assisté en 2008, comme son film, ne sont que des étapes vers un changement en profondeur des mentalités.

“Des femmes m’ont affirmé qu’elles ne se laisseraient plus faire ; des hommes m’ont affirmé qu’ils avaient pris conscience.”

Mohamed Diab a confiance dans la nature humaine : pour lui, les hommes ne sont pas mauvais, ils ont simplement, en tête, “de mauvaises images, des clichés”.

Mais il en veut aux médias occidentaux qui font le lien entre les agressions sexuelles et la religion musulmane :

“Ce phénomène arrive aussi en Inde et au Mexique, des pays non-musulmans. Cela s’explique par exemple par la pauvreté ou la densité de population, très forte au Caire. Ce n’est pas un fondement religieux mais un fondement culturel, propre à l’Egypte.”

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