Le commerce des peaux de chat bientôt hors la loi en Suisse
Jean-Marc Ducos
jeudi 06 mars 2008 | Le Parisien
Grâce à la mobilisation française contre les enlèvements de chats qui alimentent le commerce des peaux et fourrures, la Suisse va modifier la loi sur la protection des animaux. En attendant, des tanneries helvétiques continuent à exporter via la Poste.
L'INCONTOURNABLE Brigitte Bardot, mais aussi le champion de Formule 1 et résident suisse Michael Schumacher et son épouse Corinna figurent parmi les signataires. Une pétition de 106 000 signatures franco-suisses sera déposée aujourd'hui au Parlement suisse, à Berne, pour demander l'interdiction du commerce et de l'exportation des peaux de chat. La fourrure des animaux sert à confectionner couvertures, manteaux, ceintures antidouleur ou garnitures de vêtement.
Un commerce légal et autorisé jusqu'à présent chez nos voisins helvètes. La motion de modification de la loi a déjà été acceptée par le conseil fédéral, le gouvernement du pays. Une initiative de l'association SOS Chats de Noiraigue, un refuge pour des chats dits caractériels , venus de toute l'Europe.
« Au moins 500 disparitions suspectes en Haute-Savoie »
Cette révision de la loi suisse n'aurait jamais eu lieu sans le tapage organisé par la SPA de Thonon-les-Bains après avoir constaté « au moins cinq cents disparitions suspectes de chats » au cours de l'été dernier. « Ces disparitions continuent. On peut estimer que huit cents personnes ont perdu un petit félin en Haute-Savoie. Cette tuerie organisée doit cesser », implore Patricia Dolciani, la présidente de la SPA locale, qui a déposé plainte en novembre 2007 chez les gendarmes.
Et de rappeler, en consultant ses épais cahiers où elle note tous les appels de détresse des propriétaires d'animaux perdus, que, le 20 juillet 2007, « quatorze chats ont disparu à Megève le même jour ». Même scénario à Neuvecelle où quinze matous ne sont jamais rentrés à la maison. Des collets ont été retrouvés dans ce village. A Morzine, encore, quinze chats n'ont plus donné signe de vie. Quatorze autres à Saint-Paul-en-Chablais. « Ce sont toujours de très beaux spécimens au pelage épais et intact », remarque Patricia Dolciani, qui pointe un doigt accusateur vers la Suisse où « l'on tanne les peaux de chat ».
« Nous avons trouvé les preuves »
Une information judiciaire a été ouverte au tribunal de Thonon et la gendarmerie de Haute-Savoie a déjà été saisie pour l'instant de vingt-quatre plaintes mais, devant « la sensibilité du dossier » et « le caractère affectif porté à ces animaux de compagnie », le colonel Olivier Kim a décidé d'organiser une cellule d'enquête baptisée Félin 74 avec six gendarmes pour « organiser tous les recoupements » et vérifier s'il s'agit bien de vol en bande organisée à destination d'un trafic.
A Noiraigue, sur les contreforts ardus du Jura suisse, Tomi Tomek, 55 ans, une ancienne assistante sociale à la retraite reconvertie dans la défense du chat, est convaincue que « ce trafic existe ». Installée dans une ancienne ferme à l'écart du monde, elle héberge 263 chats en liberté dans cette grande bâtisse posée au milieu d'un alpage. « Pendant onze ans, nous avons cherché les preuves. Nous les avons trouvées dans une mercerie de Bienne qui vendait des peaux et nous sommes remontés vers les tanneurs. C'est un commerce indigne », s'émeut Tomi Tomek, la responsable de SOS Chats.
C'est elle qui a aussi piégé l'automne dernier plusieurs tanneries en Suisse, facture d'achat ou d'exportation des peaux de chat en main. C'est ainsi qu'elle a réussi à faire expédier des peaux vers des pays européens où ce commerce est interdit. Elle reste convaincue que « des hommes de main enlèvent les chats partout et notamment en France pour les revendre aux tanneurs ». Tomi Tomek dit « savourer sa victoire grâce à la mobilisation de la France ».