Le Temps : "Crise alimentaire et régime végétalien"
Sophie GAILLARD (Montréal, Québec)
Suite à la crise alimentaire et aux récentes émeutes suscitées par la hausse du prix des céréales dans de nombreux pays asiatiques et africains, le détournement de celles-ci pour fabriquer des biocarburants fait l'objet de beaucoup d'attention médiatique.
Nous sommes moins attentifs à une forme de « gaspillage » de céréales bien plus importante : la consommation de viande, d'œufs, de produits laitiers et d'autres produits d'origine animale.
Alors que 100 millions de tonnes de céréales vont être utilisées pour fabriquer du biocarburant cette année, plus de 760 millions de tonnes serviront à nourrir des animaux d'élevage, soit plus de sept fois plus, selon la FAO.
La production de viande est extrêmement inefficace en termes de rendement calorique. En effet, il faut en moyenne sept calories d'origine végétale pour produire une seule calorie sous forme de viande.
Plus de 64% des terres cultivables du monde servent à nourrir du bétail, en pâturage ou en fourrage.
En plus du gaspillage de céréales et de terres agricoles, la production de viande et d'autres produits animaux consomme aussi énormément de ressources naturelles et d'énergie.
Alors qu'il faut 100000 litres d'eau pour produire 1 kg de viande de bœuf, 1000 à 2000 litres suffisent pour produire 1 kg de blé, de riz ou de soja, selon l'American Journal of Clinical Nutrition.
De plus, l'élevage requiert une consommation importante d'énergie fossile et produit de grandes quantités de fumier, donc de gaz à effet de serre. La FAO rapporte que l'élevage d'animaux pour l'alimentation est responsable de 18% des émissions de gaz à effet de serre, soit plus que le secteur des transports!
Puisqu'ils requièrent considérablement moins de ressources en termes d'eau, de terre et d'énergie, les régimes végétaliens (c'est-à-dire qui excluent tous les aliments d'origine animale, tels que la viande, les œufs et les produits laitiers) sont plus durables que les régimes omnivores et sont tout autant capables de répondre à nos besoins nutritionnels.
A l'aube d'une crise alimentaire mondiale qui menace de famine plus de 100 millions de personnes à travers le monde, il est grand temps de remettre en question nos propres habitudes alimentaires et d'envisager de réduire et éventuellement d'éliminer notre consommation de viande et d'autres produits d'origine animale.
© Le Temps, 2008.
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