Les médias et les droits des animaux (David Ruffieux)
La polémique concernant l’émission ‘L’objet du scandale’ de France 2, dont le thème est la corrida, a suscité un vif intérêt.
Rappelons brièvement les faits.
L’émission programmée le 05 avril à 16h20 sur France 2, a été reportée par le producteur de l'émission Stéphane Simon qui s’explique :
« On n’a jamais subi autant de pressions pour l’organisation d’une émission de débat. Depuis 10 jours, l’alliance anti-corrida ne cesse de nous insulter. Nous recevons 500 mails par jour... Et mardi, lors du tournage de l’émission, une vingtaine d’agités a manifesté devant le siège de France Télévisions. »
Les agités dont parle Mr. Simon, sont des militants regroupés dans l’urgence par la ‘Fédération des luttes pour l’abolition de la corrida’ qui entendaient protester contre l’annulation de la présence de Christian Laborde et des principales associations anti-corrida durant l’enregistrement de l’émission.
En effet, sous la pression des milieux taurins, Stéphane Simon, a donc invité les personnalités taurines, et quelques personnes anti-corrida tels l’amusant Laurent Baffie, Marie Claude Bomsel, le chanteur Francis Lalanne, Bernard Maris, et Elisabeth Hardouin Fugier qui ne sont pas des « spécialistes » de la lutte anti-corrida.
Disons que le débat aurait été mieux équilibré et surtout plus argumenté si Christian Laborde, auteur de Corrida, Basta avait été présent.
Bref, pour une chaîne publique d’éclipser à ce point les artisans de la lutte anti-corrida qui oeuvrent depuis des années dans ce domaine, c’était faire preuve de peu de respect et d’honnété et d’un manque de déontologie calculé.
Calculé en effet, car si c’est le droit et la liberté de la chaîne de choisir ses invités, on se demande vraiment comment la présence des principaux protagonistes et intéressé(e)s de la lutte anti-corrida pouvait tomber dans la caricature, comme le craignait son producteur.
C’est assez insultant et frustrant pour un activiste expérimenté d’être traité ainsi par les faiseurs d’émissions télé.
Est-ce que les militants intimident ?
L’auteur de l’ouvrage pamphlétaire - un genre littéraire qui se fait rare aujourd’hui - Christian Laborde rapporte son expérience avec la chaîne :
« Ils sont obligés de me déprogrammer, au motif que les pro-corrida invités sur le plateau refusent de débattre avec moi, et ce en raison de la violence de mon livre. Ils me disent : Si on vous invite, les pro-corrida ne viennent pas et, du coup, l'émission ne peut pas avoir lieu. On est donc obligé de ne pas vous inviter. »
Ce n’est pas un événement unique en son genre.
Le traitement d’un débat entre les pro et les antivivisectionnistes, par la chaîne anglaise BBC, a scandalisé le groupe ‘Europeans for Medical Progress’ (EMP) pour qui l’émission avait un parti pris flagrant pour les vivisecteurs.
Ce programme, intitulé ‘Monkeys, Rats and Me’ (Les singes, les rats et moi) et diffusé sur BBC 2, le 27 novembre 2006, traitait de la recherche sur les primates par le professeur Tipu Aziz et ses collègues à l’université Oxford, mais aussi de la controverse créée par ce type de recherche sur les animaux.
L’émission télé se proposait d’analyser l’efficacité de la recherche animale pour des fins médicales.
EMP accusa la BBC de partialité, de violer les directives éditoriales et d’induire les téléspectateurs dans l’erreur en omettant une argumentation équilibrée.
En particulier, à plusieurs reprises il fut mentionné dans l’émission que toutes les découvertes médicales découlaient de la recherche sur les animaux, ce qui est une exagération.
De plus, l’exemple de la stimulation profonde du cerveau (deep brain stimulation), cette procédure utilisée pour redonner de la mobilité aux patients souffrant de la maladie de Parkinson’s, était décrite comme le résultat de travaux sur les singes.
Pourtant, cette découverte fut mise au point chez des patients comme le démontre un article du New Scientist. (vol 183 issue 2457, 24 July 2004, page 40).
EMP décida donc, devant cet exposé biaisé de porter plainte.
Mais c’est seulement deux ans plus tard que la BBC, après de multiples échanges de courriers avec EMP et une longue évaluation de la plainte par la BBC, rejeta les allégations de manque de justesse, de défaut de transparence et de partialité.
En 2008, dans un article de Science & Vie intitulé : ‘Expérimentation animale : le grand malaise’ on y trouve une volonté de remettre en question la vivisection mais toutefois, en faisant son éloge d’une manière subtile.
En effet, vouloir remettre en question la recherche animale, si tel était l’intention du magazine, en énumérant la liste des prix Nobel qui se rattachent justement ou pas à l'expérimentation animale me paraît assez douteux.
Pour ceux de nous qui militons contre la vivisection, cela ne peut que faire penser à la propagande des chercheurs et à leurs tactiques pour faire accepter la recherche et les tests sur les animaux, sans rentrer dans une évaluation critique.
La seule énumération des prix Nobel doit naturellement forcer le respect et valider, aux yeux des profanes, la pertinence de l’expérimentation animale.
Inutile d’espérer du magazine Science & Vie d’éplucher avec attention chaque recherche et d’analyser dans quelle mesure l'animal a été si utile à une découverte.
Que la pénicilline soit née du hasard dans une simple boîte de Pétri, c’est un détail qui aura échappé aux journalistes.
Seule la souris doit jouer un rôle.
Il est à craindre que cet article ait été traité à la légère et de manière partiale.
Je suggérai à Science & Vie de reprendre l’histoire de l'insuline, qui, à l’époque, dépendait entièrement des techniques de chimie qui ont permis d'extraire la précieuse hormone, hormone qui se trouve aussi dans le pancréas humain.
Mais les expériences sur le chien attirèrent davantage l’attention des éditeurs que les observations sur des patients.
Signaler, au passage, que dans les deux dernières décennies 64% des Nobel, furent attribués pour des projets n'ayant pas recours aux animaux était la preuve que tout ne doit pas tout à l’expérimentation animale.
C’est un détail sans doute.
Beaucoup d’impressionnants Nobel, mais point d’énumération des découvertes médicales issues de la recherche clinique, de l'épidémiologie, de la génétique humaine, du rôle des technologies et de la recherche in vitro, comme la toxicogénomique.
On faisait la part belle à la science du passé, quant il fallait parler de la science d’aujourd’hui.
Le lecteur terminait la lecture de l’article avec l’impression que la recherche animale était rentable, nécessaire, une entreprise à succès dans laquelle les animaux ne souffrent pas et que les méthodes alternatives sont largement utilisées.
Ce n’est pas exactement ce que pensent de nombreuses organisations de défense des animaux et les scientifiques qui se rattachent à elles.
Le magazine me répondit ceci :
« Nous avons consacré un pan entier du dossier à chercher à comprendre comment et pourquoi notre regard sur l'animal à évolué, ce qui est aussi à l’origine du « malaise » évoqué dans le titre. »
Donc, il fallait prendre le terme « malaise » dans son sens le plus large ou y trouver la sémantique qui sied à tout un chacun.
Les médias manquent d’impartialité, de justesse, mentent par omission de dire, jouent sur les formules, prétextant le manque de temps et ne sont pas tendres non plus, avec les défenseurs des animaux.
En effet, les exemples sont nombreux dans lesquels, les militants des droits des animaux sont mis au rang de dangereux terroristes et sont les cibles de propos diffamatoires, visant à discréditer leur cause.
La presse est riche d’exemples, aussi concentrons nous sur celui qui est peu connu dans le monde francophone, mais très bien documenté dans le monde anglo-saxon.
En tout cas, malheur à ceux qui prononcent un discours et posent des actes qui dérangent le bon fonctionnement du monde des affaires, du capitalisme et de la pensée prête à l’emploi.
Honnis soient ceux qui remettent en cause l’ordre établi, le conformisme intellectuel, la brutalité humaine et tous ceux qui osent proposer des idées révolutionnaires.
La presse marchande fustige les croisés de la cause animale et environnementale.
Editorialistes, journalistes, observateurs, analystes, spécialistes en tout et en rien, se donnent le beau rôle de nous dire ce qu’il faut dire et penser.
Concernant la cause animale et environnementale, il est rare, presque impossible de trouver quelque éloge à l’endroit des droits des animaux tant il est radicalement aux antipodes de ce que notre civilisation nous enseigne et perpétue.
Pas d’éloges, certes, mais beaucoup d’idiotie et la volonté affichée de ridiculiser les militants.
De la rigueur dans le commentaire, il serait illusoire, sauf à quelques exceptions près, d’aspirer à autant de professionnalisme de la part de médias inféodés, subordonnés aux puissants de ce monde.
La destruction de l’environnement et les traitements abusifs des animaux (et des humains) sont si courants, qu’il paraît prétentieux d’y vouloir mettre un terme, et pourtant…
Il faudrait être bien ignorant de l’Histoire des luttes pour la justice et les droits civiques pour minimiser le rôle de simples individus dans l’émancipation et la reconnaissance des groupes les plus vulnérables de la société.
Les luttes pour les droits des femmes, des homosexuels, des ouvriers, sont autant de sources d’inspiration et de modèles de lutte pour la cause animale.
Mais les médias avides de nouveauté et de sensationnalisme à bon marché, n’ont que faire des militants calmes et respectueux, qui agissent dans le cadre légal et qui composent la majorité des organisations de défense des animaux.
Peut-on faire plus insidieux que de rejeter un groupe et son mouvement parce qu’il est supposément basé sur le sentimentalisme, sur des illusions vaines de doux rêveurs, pis, sur la détestation du genre humain ?
Le journaliste des masses nous invite à ne point nier l’évidence que l’homme est le plus grand des prédateurs, jusqu’à invoquer, s’il le faut, son droit divin et naturel de nuire tant et de piller si bien les ressources.
Il devient difficile dans ces conditions de faire bonne figure et d’offrir aux médias l’image d’un mouvement pacifique, dont ils ne veulent pas, mais dont les bases éthiques et philosophiques sont profondément cohérentes.
Ce qu’ils veulent c’est du sang, de la violence, de la confrontation, du simplisme et nous renvoyer un reflet tronqué, chatoyant et charmeur d’une société pourtant violente et absurde.
Il ne faut pas manquer les occasions de prouver aux détenteurs du quatrième pouvoir que nos intentions sont rationnelles, justes et éclairées.
Au risque de déplaire aux faiseurs d’actualité spectacle, il nous faut prouver que les démons qui sont faits de nous, sont des constructions médiatiques destinées à braquer l’opinion.
Avez-vous déjà entendu le terme 'Green scare’ (La peur verte) ?
Probablement jamais de ce côté-ci de l’Europe.
Durant les années Bush, le Sénat a fait voter, en 2006, une loi qu’on nomme ‘Animal Enterprise Terrorism Act.’
Celle-ci fut introduite par un consortium de groupes et d’industries et de politiciens les représentant dans le but de criminaliser de manière disproportionnée les actes illégaux commis contre les industries qui utilisent des animaux en recherche et en agriculture et cela, au nom des droits des animaux ou de l’environnement.
Cette législation représente une atteinte sans précédent contre le premier amendement de la Constitution américaine puisqu’elle limite le droit des citoyens d’entreprendre des actions qui pourraient nuire aux intérêts de ces industries.
Dans son champ d’action large et vague, la loi qualifie des militants de terroristes et peut imposer de lourdes peines de prison.
Aux Etats-Unis, certains militants radicaux se rattachant au Front de libération animale (ALF) ou au Front de libération de l’environnement (ELF) sont considérés par le Bureau fédéral d’investigation (FBI), comme des menaces terroristes domestiques de première importance.
Dans l’hystérie sécuritaire de l’après 11 septembre, les autorités américaines ont utilisé la cause de l’anti-terrorisme international pour élargir leurs prérogatives liberticides dans leur pays et mieux cibler certains militants, non pas pour punir leur violence véritable, mais plutôt pour dissoudre leurs idées politiques et leur détermination de faire subir aux industries concernées de lourdes pertes économiques.
‘Animal Terrorism Enterprise Act,’ de par son interprétation abusive de ce que constitue un acte terroriste, envoie un message destiné à affaiblir les mouvements contestataires.
Dans l’Amérique de Guantanamo et de la torture en Irak, depuis le passage de la loi, beaucoup d’activistes ont été infiltrés par la police, intimidés, arrêtés et certains purgent des peines de prison.
Par exemple, les activistes de SHAC7 furent accuser de terrorisme pour avoir organisé une campagne d’actions directes contre la compagnie Huntington Life Sciences, principalement à l’aide d’un site Internet.
Les peines vont de 1 à 10 ans de prison.
D’autres militants sont condamnés pour avoir brûler des automobiles ou des propriétés, et les sanctions pénales peuvent dépasser celles de meurtriers ou de violeurs.
A la décharge des militants, il est important de préciser qu’aucune des actions directes des groupes ALF, ou ELF n’a conduit au décès d’une seule personne, puisque les actions sont par définition des actes de sabotage et de libération et que toutes les précautions sont prises pour ne pas faire de victimes.
Quelle fut la réponse des médias influents aux Etats-Unis au sujet de la nouvelle législation, des corporations à l’origine de cette loi, des dangers d’une dérive autoritaire, et de cette attaque contre les droits et les libertés civiques : ce fut le silence.
Par contre, le nouveau « terrorisme » des écologistes est des animalistes allait faire les choux gras des journaux.
La presse anglaise s’est particulièrement démarquée par ses articles enflammés contre les militants de SPEAK qui protestaient contre la création d’un centre de recherche sur les primates à Oxford, en Angleterre.
Certaines des recherches visent à étudier le comportement des primates dont une partie du cerveau est altéré, détruit.
D’autres primates subissent des chirurgies pour implanter des électrodes et analyser l’activité électrique du cerveau.
D’autres singes sont utilisés pour créer des modèles de maladies neurologiques, comme celle du Parkinson’s.
Ces expériences causent un degré non négligeable de souffrances et de stress chez des animaux sensibles et sociaux, contraints de rester immobiles, privés de leurs mouvements, manipulés sans cesse et subissant des chirurgies multiples et débilitantes.
Ces singes vivent la plupart du temps en isolement.
Malgré l’agitation de SPEAK, ses manifestations, ses pétitions, le 11 novembre 2008, l’université d’Oxford déclarait dans une conférence de presse que le laboratoire était construit et annonçait son fonctionnement dès 2009.
Fort du soutien politique de Tony Blair, la presse n’hésite plus à représenter les activistes comme des terroristes, des extrémistes et des fanatiques en raison de leurs méthodes radicales et de leurs tactiques de confrontations : on lit « Animal rights "terrorist" in court » ( « Terroriste » des droits des animaux en Cour) dans le ‘Journal.’
Les militants sont présentés comme des opposants à la science et au savoir : « Animal rights versus science » (Les droits des animaux contre la science), écrit dans le New Guardian et qui mettait l’accent sur le caractère violent des activistes.
Alors qu’une partie de la presse affiche une volonté claire d’avilir les activistes, celle-ci feint largement d’ignorer la souffrance des animaux dans les laboratoires et les recherches dont la valeur scientifique n’est jamais remise en question de manière officielle.
Du terrorisme vrai, inhumain et sordide contre le genre animal, la presse s’en fait rarement l’écho.
Pour ma part, manifester vigoureusement, écrire et s’exprimer avec force et conviction, entreprendre des actions directes comprenant la libération d’animaux, ou le vandalisme des industries qui torturent des animaux, si toutes ces actions peuvent paraître radicales ou extrêmes à certains esprits conformistes et conservateurs, toutes ces actions ne constituent pas pour autant du terrorisme, tel qu’il se définit dans un dictionnaire.
Mais les autorités, suppôts du capitalisme, ont décidé de redéfinir le terrorisme comme les activités de ceux et celles qui mettent en péril la puissante industrie pharmaceutique et donc une partie importante de l’économie.
On retrouve en Angleterre, comme aux Etats-Unis, et maintenant en Europe, la volonté des autorités de criminaliser et de neutraliser ceux qui ont le pouvoir d’arrêter ou d’affaiblir un secteur de l’économie : ce sont des terroristes.
Alors que les industries qui exploitent les animaux et l’environnement multiplient les pressions pour apparaître dans la presse, plus blanches que neige, c’est-à-dire éthiques, morales, écologiques, philanthropiques et socialement responsables, les pouvoirs publics protègent ces industries.
En effet, le pouvoir politique organise de véritables campagnes de dénigrement, utilisant la loi, l’argent des contribuables, les services de police et de renseignement pour traquer et anéantir l’esprit de rébellion.
Encore un exemple, pour illustrer ce point. L’Angleterre et l’Autriche ont leur propre législation anti-terroriste et financent des équipes policières qui recherchent à déstabiliser les activistes.
En particulier Martin Balluch, qui est docteur en physique et en philosophie, mais aussi militant, a été victime de la machinerie politico-policière.
En tant que président de l’association contre l'élevage industriel, de sa prison de Vienne le 9 juin 2008, il écrit :
« Mercredi, au petit matin, la police a lancé la plus violente attaque jamais connue dans l’histoire autrichienne moderne contre un mouvement pour la justice sociale et contre des ONG. Des centaines de policiers armés et masqués ont défoncé les portes de 21 domiciles privés et de 6 bureaux appartenant à des ONG différentes, et celui d’un dépôt contenant du matériel utilisé dans des manifestations."
Cette rafle policière, qui bafouait les droits de l’homme, intervenait pendant la préparation d’une campagne organisée par les principales associations autrichiennes de droits des animaux.
Celles-ci demandaient une modification de la constitution en faveur des animaux.
Il est aussi des exceptions dans la presse au sujet des droits des animaux, des articles qui sont si rares qu’ils méritent d’être cités comme des références en la matière.
En effet, le Canard enchaîné publia en juillet 2001, un dossier spécial consacré aux animaux, « Comme des bêtes » qui dénonçait les mauvais traitements et l’exploitation des animaux de laboratoires et aussi la chasse.
Aussi remarquable, la publication dans Le Monde Diplomatique d’août 2001 de l’article de l’écrivain Armand Farrachi ‘Silence on souffre : pitié pour la condition animale ‘.
Il s’agit d’un long article, dans un prestigieux magazine, qui traitait sans concessions des terribles conditions de vie des animaux.
Voici un court extrait :
« la France est couverte de camps de concentration et de salles de torture. Des convois de l’horreur la sillonnent à tout instant et en tous sens… ».
L’auteur évoque les abattoirs, les élevages intensifs et les transports des millions d’animaux de boucherie, la honte infamante et quotidienne de notre inhumanité y est décrite :
« … un supplice de chaque seconde, et ces régimes épouvantables leur sont infligés pour des raisons si mesquines qu’on a peine à croire que des êtres humains puissent s’en prévaloir sans honte… »
Honte à l’appétit féroce et aveugle de l’humain, honte à son indifférence et à son indignité.
Alors qui possède les médias, qui dicte la ligne éditoriale ?
Dis-moi ce que tu écris, je te dirai qui te finance...
Les médias, la presse et la télévision, en présentant rarement les faits avec impartialité et justesse, en ce qui concerne les droits des animaux, les actions des militants, dessert l’idéal de justice et de progrès dans nos sociétés occidentales, pseudo-démocratiques.
Rien qu’en France, des journaux et des chaînes privées de télévisions appartiennent à de grands groupes industriels, dirigés par quelques familles influentes, concentrés dans les mains de quelques individus.
Parallèlement à ce phénomène, en France, il y a une perte d’autonomie toute récente des moyens publics de diffusion, qui dépendent davantage du pouvoir politique.
Ailleurs la concentration des réseaux médiatiques corporatifs peut atteindre des proportions encore plus inquiétantes, notamment en Angleterre, aux Etats-Unis et au Canada.
On l’a vu dernièrement concernant la chasse aux phoques, les médias canadiens sont entièrement mobilisés pour fixer l’opinion sur la légitimité de la chasse.
Voici la remarque de Valérie Fortin sur le traitement de l’information par la presse au Québec :
« Aujourd'hui, plus que jamais, j'ai extrêmement honte d'être Québécoise. Lorsque j'entends et lis tous ces journalistes, animateurs, chroniqueurs et autres intervenants qui se sont aujourd'hui donné le mot pour tabasser en choeur un homme et son œuvre [Paul Watson, activiste de la Sea Sheperd Society], qui s'amusent à désinformer et à traîner dans la boue tous les animalistes, quand j'entends ou lis tous ces petits commentateurs qui se réclament fièrement du côté des « bien pensants », qui endossent les lois comme si elles étaient toutes nécessairement légitimes, sans se questionner deux secondes sur le bien fondé de certaines d'entre elles, je ressens de la colère et de l'indignation, pour ne pas dire une exaspération profonde. »
Il est impensable que les fortunes bâties sur l’exploitation des animaux et des ressources de la planète (pêche, chasse, vivisection, élevage) laisse le champ médiatique libre aux idéologies alternatives risquant de changer le statu quo et d’affecter l’économie présente.
Les médias de masse, au service du pouvoir, du capitalisme, de la société marchande, érodent le peu de démocratie dont nous jouissons, en filtrant les idées radicales, en tamisant les visions alternatives du monde, en affaiblissant nos capacités de raisonnement afin d’en neutraliser leurs contenus révolutionnaires.
Les acteurs démocratiques doivent se battre pour qu’existent des médias libres et contestataires, dans lesquels les points de vue minoritaires sont représentés de manière objective, à l’abri des distorsions, des manipulations des caricatures, de l’irrationalité et du spectacle.
Bref, c’est aux militants de veiller à ce que la dictature douce et tranquille ne s’installent pas aux commandes des esprits.
Quels conseils peut-on donner au citoyen-militant et à l’activiste-démocrate pour que sa cause existe dans l’opinion et en ce qui nous concerne, pour que la cause animale devienne un enjeu majeur de progrès social ?
J’en vois au moins deux.
Comme le disait Henri Thoreau, poète américain, naturaliste, en évoquant la désobéissance civile comme vecteur de progrès social :
« I say, break the law » (Je dis, viole la loi).
Il faut ne pas se laisser impressionner par la loi et ses représentants.
En effet, la loi change et reflète les attitudes et les mœurs des hommes d’une époque et d’un lieu.
Un véritable démocrate fait fi de la loi, s’il la trouve répréhensible, immorale et qu’elle conduit à l’injustice.
La loi, si elle est utile et nécessaire au fonctionnement et à l’amélioration d’une société, elle peut être un dangereux handicap à l’évolution morale de cette société.
De plus, la loi est trop souvent le produit et l’instrument des puissants pour contraindre et contrôler la masse des plus vulnérables et des plus faibles.
L’autre avantage de la désobéissance civile, c’est qu’elle peut retenir l’attention des médias en quête de confrontations et d’agitation sociale.
En outre, il est important de répondre aux accusations, aux allégations, et aux tentatives de diffamations.
Il ne faut pas laisser le champ médiatique au mensonge et aux représentations erronées d’un mouvement.
Certains journalistes ou chroniqueurs, ou même des gouvernements, ont la prétention de penser qu’ils ne risquent ni le ridicule, ni un procès en publiant des attaques contre des activistes, des arguments souvent infondés et des assertions diffamantes.
Force est de constater, qu’en écrivant des réponses rationnelles, bien documentées et en offrant une argumentation difficilement réfutable, les invectives des salles de rédaction finissent par se faire plus discrètes.
Plus qu’à l’élite médiatique et politique, l’espace public appartient au citoyen ; à lui d’en reprendre possession pour faire grandir, dans les cœurs et les esprits, la cause qu’il défend.
Bibliographie :
L'objet du scandale : Stéphane Simon s'exprime sur le scandale de la corrida
http://www.tele7.fr/tv/news-tele/l-objet-du-scandale-stephane-simon-s-exprime-sur-le-scandale-de-la-corrida/(gid)/775074
La fédération des luttes pour l’Abolition des corridas
http://www.flac-anticorrida.org/
Le traitement part la BBC du débat entre les antivivisectionnistes et le pro-vivisection.
http://www.safermedicines.org/news/bbcfinding.shtml
Analysis of Animal Enterprise Terrorism Act
http://www.greenisthenewred.com/blog/media-blackout-on-green-scare-legislation/147/
Karen Pickett | The Green Scare
http://www.truthout.org/article/karen-pickett-the-green-scare
The AETA and the Green Scare: Making McCarthy proud
http://animalrights.change.org/blog/view/the_aeta_and_the_green_scare_making_mccarthy_proud
The green scare
http://www.guardian.co.uk/environment/2008/apr/03/greenbuilding.ethicalliving
Animal rights v science: battle over new vivisection lab at Oxford turns violent
http://www.guardian.co.uk/uk_news/story/0,3604,1264083,00.html
Médias et démocratie : Les médias contribuent-ils au débat démocratique
Gingras, Médias et démocratie: le grand malentendu. Presse de l’Université du Québec (2006)
Henry Thoreau, Civil Disobedience (1849).