Les "clients" : le spot de ZéroMacho en ligne. Abolissons la prostitution.
Les "clients" from Black Moon productions on Vimeo.
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"Nous raisonnons et cependant les peuples multiplient, nous raisonnons et cependant les enfants naissent, nous raisonnons et cependant un avenir horrible se prépare, nos maîtres continuent de gouverner au jour le jour, ils prêchent la morale et la morale n’ayant d’autre but que de multiplier les hommes, les conséquences les effrayent, mais ils refusent de toucher aux causes.
Famille, travail, patrie ont plus de pouvoir que jamais, la régularité des mœurs dépasse tout ce que l’on imagine et l’on s’étonne de trouver trois milliards où l’on croyait en avoir laissé deux, l’on sera bientôt quatre et cinq et six, l’on boira l’eau des mers, l’on soupera d’algues bouillies et l’on écoutera les sermons de morale.
Des gouvernants et de leurs gouvernés l’on se demande lesquels seraient les plus stupides ?"
Albert Carcaco, Semainier de l'an 1969
Le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes (HCEFH) recommande, dans un avis rendu public mardi 5 novembre, que le recours à une prostituée devienne un délit et non une contravention, contrairement à ce que propose une proposition de loi qui sera examinée à l'Assemblée fin novembre.
Le HCEFH, organisme consultatif, a rendu un avis "favorable" à la proposition de loi déposée le 10 octobre par le groupe socialiste et le groupe de la Gauche démocrate et républicaine (GDR).
La présidente du HCEFH, Danielle Bousquet, ancienne députée des Côtes-d'Armor auteure d'une résolution réaffirmant la position abolitionniste de la France en matière de prostitution, "salue et juge incontournable la cohérence globale du texte qui vise à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel tout en renforçant le soutien aux victimes".
"INVERSION DE LA CHARGE PÉNALE"
L'organisme se félicite notamment "de la volonté du législateur" de "procéder à une véritable inversion de la charge pénale", en abrogeant le délit de racolage public qui pénalise actuellement les prostituées, et en sanctionnant les clients qui ont recours à leurs services.
Mais, alors que la proposition de loi prévoit une contravention de 5e classe pour les clients (1 500 euros d'amende, doublée en cas de récidive), le Haut Conseil "appelle à revoir la nature de l'infraction, en faisant du recours à la prostitution un délit". "Sans que ce délit soit nécessairement assorti d'une peine de prison", nuance-t-il. "L'enjeu se situe en effet davantage en terme de nature de l'infraction" qu'au niveau de la peine, ajoute l'avis.
L'instauration d'une contravention de 5e classe "pose la question de l'échelle des peines", insiste le HCEFH, car le recours à la prostitution serait alors "puni de la même manière qu'un trouble à l'ordre public, tel le fait de déposer avec sa voiture des ordures en dehors des emplacements prévus à cet effet". Il serait même "moins puni que la répétition d'appels téléphoniques malveillants" par exemple, insiste l'organisme.
De plus, les auteurs de contravention étant renvoyés devant le tribunal de police, alors que les auteurs de délit sont renvoyés devant le tribunal correctionnel, "la valeur pédagogique du rappel à la loi serait affaiblie", insiste le Haut Conseil.
"STAGE DE RESPONSABILISATION À L'ACHAT D'UN ACTE SEXUEL"
Parmi 18 recommandations, le Haut Conseil suggère aussi que le "stage de sensibilisation aux conditions d'exercice de la prostitution", proposé également pour sanctionner les clients de prostituées, se transforme en "stage de responsabilisation à l'achat d'un acte sexuel".
Le texte salue par ailleurs "l'abrogation du délit de racolage" et appelle "à ce que les mentions concernant des condamnations antérieures à la loi pour délit de racolage soient effectivement effacées des casiers judiciaires".
En matière d'accompagnement et d'aide aux prostituées souhaitant sortir de la prostitution, le HCEFH préconise d'exclure de "l'attribution de l'agrément permettant aux associations de prendre en charge des 'parcours de sortie de la prostitution'" les associations non abolitionnistes, c'est-à-dire celles qui agissent auprès des prostituées sans pour autant défendre l'abolition de la prostitution. Cela pourrait ainsi exclure Médecins du Monde, par exemple.
La proposition de loi prévoit qu'une autorisation provisoire de séjour de six mois "peut être" délivrée aux prostituées étrangères victimes de proxénétisme et engagées dans un parcours de sortie de la prostitution sans qu'elles soient obligées de dénoncer leurs réseaux. Mais le HCEFH recommande que l'attribution de cette autorisation soit "extraite du pouvoir discrétionnaire du préfet lorsque les conditions d'attribution sont réunies".
Il préconise aussi "le renouvellement" de cette autorisation de séjour "tout au long du parcours de sortie et d'insertion socio-professionnelle", et suggère d'octroyer le RSA aux prostituées étrangères ayant dénoncé leur réseau.
Dès lors, il ne mérite pas le prix qu'on lui octroie.
L'éthique prime sur l'esthétique.
La liberté individuelle s'arrête là où commence celle des autres - des enfants en l'espèce.
Porter atteinte aux droits fondamentaux d'autrui, ce n'est pas exprimer sa liberté, c'est manifester son aliénation en aliénant l'autre.
Les artistes n'ont pas tous les droits par la seule vertu de leur talent (ou de leur absence de talent).
Ce sont, d'abord, des citoyens, et leur statut d'artiste ne les place pas au-dessus des lois ni des principes moraux fondamentaux.
Un jury qui décerne des prix à un pédophile cautionne la pédophilie.
Il faut retirer le prix Renaudot Essai 2013 attribué à Gabriel Matzneff pour Séraphin, c'est la fin !
http://www.petitions24.net/retirer_le_prix_renaudot_a_gabriel_matzneff_militant_pro_pedophil
https://www.change.org/fr/p%C3%A9titions/membres-du-jury-du-prix-renaudot-essai-2013-retirez-le-prix-renaudot-essai-2013-attribu%C3%A9-%C3%A0-gabriel-matzneff-pour-s%C3%A9raphin-c-est-la-fin
PPL : proposition de loi
La prostitution est un fait de société qui concerne directement les rapports entre les femmes et les hommes, et la construction du genre dans les mentalités.
Selon si un pays autorise ou combat ouvertement le fait d’acheter les corps des femmes (en grande majorité) pour satisfaire les besoins sexuels des hommes, les nouvelles générations n’auront pas la même vision de la sexualité. Un petit garçon qui nait dans une ville où on voit des femmes derrière des vitrines, ou sur des trottoirs, n’a pas la même image des rôles des femmes et des hommes que s’il nait dans un pays où on lui dit que ce n’est pas envisageable.
Dans le monde
98% des prostituées sont des femmes et des fillettes (l’OIT).
75% ont entre 13 ans et 25 ans.
L’âge d’entrée moyen dans la prostitution est de 14 ans. C’est-à-dire que la plupart sont plus âgées, ou plus jeunes !
Le nombre d’enfants prostitués augmente d’un million chaque année (UNICEF).
Une prostituée procurerait en moyenne 107 000 euros par an à son proxénète (INTERPOL).
En France
80% des prostituées sont étrangères (OCRTEH – Office central de la répression de la traite des êtres humains).
Entre 85 et 90% des personnes prostituées sont sous le joug du proxénétisme (enquête de Richard Poulin – 2005).
La quasi totalité des clients sont des hommes : 37% sont en couple, 29% cadres, 25% ouvriers (Enquête de 2004 de Claudine Legardinier et Saïd Bouamama).
Chaque prostituée rapporte entre 300 et 800 euros par jour à son proxénète et environ 50 euros lui seraient laissés (OCRTEH).
Extrait : « Le livre noir de la prostitution » d’Elizabeth Coquart et Philippe Huet (Albin Michel, 2000, p.36) :
« Une prostituée sur deux a eu des contacts avec la prostitution dès son enfance et un tiers a eu une mère ou une parente prostituée. [...] Un tiers des prostituées mineures enquêtées a été victime de viol par des adultes connus d’elle entre l’âge de trois ans et de quinze ans… [...] 80% des prostituées a subi des abus sexuels au cours de l’enfance. »
On retient de ces chiffres que nous avons affaire à un commerce très lucratif ; qui s’exerce très majoritairement sur des femmes, dont une écrasante majorité ne l’a pas choisi ; pour des clients qui ne sont quasi que des hommes ; et qui touche les populations les plus vulnérables, pauvres, jeunes, immigrées ou victimes de violences.
Les Prohibitionnistes
La prostitution est interdite dans les pays prohibitionnistes. Ce sont surtout les personnes prostituées qui sont inquiétées pour atteinte à l’ordre public. Cette politique misogyne et hypocrite n’existe plus en Europe. Elle n’a pour conséquences que l’exercice clandestin et la criminalisation des prostituées qui encourent condamnation et autres violences.
Les Réglementaristes
Cette théorie est née dans les années 1830, avec les analyses du médecin Alexandre Parent-Dûchatelet. Nous tenons à souligner la philosophie initiale de ce courant dont le théoricien confère à la prostitution une utilité sociale, et la considère comme un élément indispensable à la sexualité masculine normale. Nous sommes dans le mythe de la sexualité irrépressible des hommes à laquelle il faut trouver un débouché pragmatique.
Ça aura pour conséquence la création de lieux clos contrôlés par l’administration médicale et policière. Ce modèle sera étendu en Europe par le Code Napoléon dès 1804. Il s’applique aujourd’hui aux Pays-Bas ou en Allemagne.
Aux Pays-Bas, le constat n’est pas brillant : Le maire d’Amsterdam a reconnu en 2004 que la Tipplezone était devenue un refuge pour les trafiquants et un danger pour les femmes. On a vu la multiplication par 3 du nombre d’enfants prostitués en cinq ans, et une même multiplication des femmes prostituées émigrées des pays d’Europe centrale.
En Allemagne, on compte 400 000 prostituées et une augmentation de 70% du trafic d’être humains en huit ans de 2002 à 2010, selon l’Enquête d’Elise Guiraud en 2010.
Depuis, la loi légalise les bordels (Eros center), considère les proxénètes comme des entrepreneurs, et les femmes se retrouvent dans les bonnes vieilles maisons closes. Il est extrêmement rare qu’elles bénéficient de contrats. Le profil-type d’une femme prostituée en Allemagne est une jeune de 18-20 ans, roumaine, issue du trafic d’êtres humains.
Le pays est devenue une destination de tourisme sexuel et une plaque tournante des proxénètes, qui sont des "entrepreneurs" comme les autres.
Les Abolitionnistes
Ce courant tolère la prostitution, mais interdit le proxénétisme, les maisons closes et le racolage. En France, il se traduit par la loi Marthe Richard (1946) qui interdit les maisons closes, supprime le fichage et punit les proxénètes.
Ses principes sont reconnus en 1949 par la convention de Genève pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui. « La prostitution et le mal qui l’accompagne, à savoir la traite des êtres humains en vue de la prostitution, sont incompatibles avec la dignité et la valeur de la personne humaine ». Texte signé par plus de 70 pays, dont la France en 1960.
La France est considérée comme un état abolitionniste. Mais aucune réflexion n’a été menée pour arriver à une réelle abolition de la prostitution.
Les Néo-abolitionnistes (c’est nouuuus !)
Le modèle suédois pénalise le client, pas la prostituée. Ce pays a enregistré une baisse de 50% de la prostitution de rue, un recul net de la traite et un recul de 80% des clients. Outre la pénalisation des clients, beaucoup d’autres mesures ont été mises en œuvre :
Côté Éducation Nationale : une réelle éducation à l’égalité et à la sexualité. La liberté sexuelle ne va pas de soi. Considérer que les corps des femmes peuvent être achetés par des hommes renforce deux idées essentialistes : la libido irrépressible des hommes pour laquelle la société doit prévoir un réservoir de femmes sexuellement disponibles ; et le fait que les corps des femmes, qui auraient une sexualité sociale, généreuse, soumise aux initiatives masculines, doivent être mis à la disposition des pulsions sexuelles masculines.
Des mesures sociales ambitieuses ont été mises en œuvre vu le lien évident entre prostitution et précarité, via des moyens financiers pour accompagner les principales intéressées.
Pas de dérive sécuritaire : En Suède, les clients doivent écoper de 6 mois de prison, mais aucune peine de prison n’a été prononcée. L’état s’est à chaque fois contenté d’une amende. C’est l’effet normatif qui est recherché.
1. Pour la dignité
L’acte qui consiste à vivre des pénétrations et autres pratiques sexuelles sans désir, à subir des relations à répétition, provoque des séquelles physiques et psychologiques très profondes. La violence sexuelle n’a pas le même impact que la violence tout court, sinon on punirait le viol comme n’importe quelle agression physique. Le viol est un crime car nous savons, combien même il serait moins douloureux que des coups, qu’il est psychologiquement beaucoup plus ravageur.
Beaucoup de prostituées développent le symptôme de décorporalisation. Les rapports sexuels non désirés sont d’une telle violence que ces femmes s’anesthésient psychologiquement. Quand elles sont couvertes de bleus en rentrant chez elles, elles sont incapables de se souvenir de qui les a frappé. Elles ne vont plus chez le médecin quand elles tombent malades etc.
2. Contre la marchandisation
Notre monde libéral nous le rappelle sans cesse, le client est roi ! C’est lui qui choisit tout : la prostituée, le service, les positions. Dans le cadre de ce métier, la prostituée ne peut que se plier à des pratiques intimes commandées par le client.
L’argent, c’est le pouvoir, souvent décisionnel. Qui détient l’argent ? Les hommes. Les femmes détiennent 1% des richesses et des capitaux mondiaux (ONU). La prostitution n’est pas un luxe de riches, elle existe dans toutes les sociétés. Dans les pays pauvres, les prostituées sont tout simplement moins chères.
3. Pour l’égalité et l’émancipation :
La liberté sexuelle, c’est la réciprocité du désir et du plaisir, la liberté de choisir son partenaire et ses pratiques sexuelles. La prostitution est un bastion d’une longue histoire du patriarcat où le désir de l’homme a toujours primé (mariages arrangés, droit de cuissage, viols et viol conjugal). Historiquement, l’idée du plaisir masculin unilatéral est une normalité.
Nous sommes pour une société où le désir est réciproque, où le plaisir est partagé. La sexualité sous contrainte, par la violence, par nécessité via la marchandisation des corps, ne sera jamais vectrice de ce plaisir et de cette émancipation. Tout n’est pas à vendre, on ne peut pas tout acheter. Il est des usages de la société archaïque patriarcale qu’il va falloir enfin dépasser.
4. Pour un autre projet de société :
Quel est le projet de société que nous voulons ? Acceptons-nous que la prostitution devienne un métier comme un autre, à savoir que dans les pays qui la légalisent, on voit des campagnes publicitaires affichant des soldes sur les prostituées, ou des menus « un repas, une chambre et une prostituée » ?
Le projet abolitionniste va, en effet, restreindre une certaine liberté. Les sociétés ont toujours fixé des limites, dans tous les domaines. On l’a fait pour la majorité sexuelle, pour le temps de travail légal, et même pour la liberté d’expression ! Les propos négationnistes ou appelant à la haine raciste sont interdits et punis. L’égalité des citoyens se définit aussi par la restriction d’une totale liberté, comme pour la réduction de temps de travail légal (35h, 10h par jour, travail de nuit, travail le dimanche), la laïcité etc.
L’idée n’est pas de prétendre qu’une prostituée consentante est forcément aliénée, mais peut-on, au nom du désir de cette minorité de femmes qui vivent bien la prostitution, justifier la mise sur le marché de la sexualité ? Avec tout ce qui va avec : Pression de la concurrence, marketing, logiques économiques, exploitation etc. NON ! Elles n’ont pas à disposer d’une telle norme et trancher des questions aussi fondamentales que : Est-ce que la sexualité s’achète ? Doit-elle obéir aux lois du marché ? Est-ce que c’est le même type de débat que pour la vente d’organes, la GPA, les lancers de nains etc.?
Ce manifeste appelle le gouvernement à ne pas se mêler du système prostitueur. Il nie l’Etat de droit et préfère s’en remettre à la loi du plus fort, du plus riche, du plus vieux, du plus médiatique, et surtout à celle des hommes.
Les 343 salauds revendiquent la liberté des clients à avoir un accès marchand aux corps des femmes, à extorquer le consentement des personnes qui n’ont pas les moyens de leur dire non.
Ce manifeste souffre d’une contradiction majeure : Il met de côté la souffrance de la grande majorité des « forçates » de l’industrie du sexe, tout en condamnant les réseaux proxénètes, qui en sont les pourvoyeurs. Pour maquiller cette contradiction, il se range du côté d’une petite minorité de prostituées qui proclame ouvrir ses jambes à la demande, plusieurs fois par jour, avec plaisir.
Derrière ce manifeste, se cache un pied de nez face aux récents acquis féministes : Les patriarcaux nous disent : « Les femmes sont aujourd’hui plus libres ; elles peuvent dire non ; ne subissent plus de mariages forcés ; de droits de cuissages ; peuvent refuser telles pratiques ou en réclamer ? Qu’à cela ne tienne ! Puisque c’est comme ça, nous irons aux putes. » La pute, c’est l’épouse d’antan, celle que je paye et qui n’a plus son mot à dire. De même que dans le cadre d’un mariage arrangé, la relation sexuelle se passe sous contrat.
Françoise Héritier (anthropologue) : « Dire que les femmes ont le droit de se vendre, c’est masquer que les hommes ont le droit de les acheter. »
60 associations signataires de l’Appel Abolition 2012.
111 associations de lutte contre les violences engagées pour l’abolition.
200 associations issues de 27 Etats membres de l’UE signataires de l’Appel de Bruxelles.
55 EurodéputéEs signataires de l’Appel de Bruxelles.
Des hommes qui militent pour le désir et le plaisir partagés et contre la prostitution.
Depuis le 29 octobre a lieu la commission spéciale qui examine la PPL. Les 70 membres sont en grande partie abolitionnistes. Les amendements peuvent être déposés jusqu’au 15 novembre.
Le 19 novembre, la commission se réunira pour voter les amendements.
La PPL est inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée Nationale. Elle sera examinée le 27 novembre, de 16h à 1h du matin.
23 novembre : manifestation annuelle contre les violences faites aux femmes, cette année spécial Abolition.
Nous sommes donc à la veille de l’examen de la PPL n°1437 (des députées Maud Olivier et Catherine Coutelle) renforçant la lutte contre le système prostitutionnel. C’est la 3ème fois en deux ans qu’un consensus entre député-e-s de toutes étiquettes s’accorde sur ce point.
Rapport parlementaire Bousquet-Geoffroy de 2011
Vote d’une résolution à l’Assemblée Nationale réaffirmant la position abolitionniste de la France (décembre 2011)
Rapport adopté à l’unanimité de la délégation aux droits des femmes à l’Assemblée Nationale, pour renforcer la lutte contre la prostitution (17 septembre 2013)
La Grande cause nationale de 2010 et le Plan interministériel de lutte contre les violences faites aux femmes (2011-2013) reconnaissent également la violence inhérente à l’achat de tout acte sexuel.
La Convention des Nations Unies du 2 décembre 1949 et la résolution du Parlement européen du 6 février 2013 considèrent que la prostitution constitue une violation des droits humains et une atteinte à la dignité de la personne.
Pourtant, en France, la prostitution est la dernière violence faite aux femmes pour laquelle les victimes sont pénalisées, au titre du délit de racolage, alors que ses auteurs demeurent impunis.
Seule une politique très volontariste pourra lutter contre le système prostitueur qui s’attaque aux femmes les plus vulnérables.
Bilan suédois :
Prostitution de rue divisée par deux.
Sur internet, il n’y a pas d’énormes difficulté à pister des clients.
70% de la population est aujourd’hui satisfaite de la loi (contre 30% au moment de son vote). Le chiffre est plus élevé chez les jeunes, qui considèrent qu’acheter un acte sexuel n’est pas normal.
Les trafiquants ne s’intéressent plus au marché suédois, vu qu’on s’est attaqué à la demande.
Autres phénomènes :
Le client s’empresse de payer l’amende pour éviter de recevoir une convocation au tribunal à son domicile.
Les personnes prostituées ont un accès automatique aux associations. On peut informer les étrangères sur leurs droits (notamment les aides, ce dont les proxénètes se gardent de les informer).
Le contenu de la PPL française est encore modeste, surtout la dernière version. Côté pénalisation, il n’y a de délit qu’en cas de récidive. Dans tous les cas, il n’y a pas de peine de prison. Juste une amende de 1500 euros, 3000 en cas de récidive.
Dans cette version, il n’y a plus de RSA, mais 330 euros pour les étrangères avec un titre de séjour de 6 mois, qui n’apparaît plus comme renouvelable.
La PPL intègre quatre axes forts:
Renforcer les moyens de lutte contre le proxénétisme et la traite,
Améliorer la protection des victimes de la prostitution et créer un parcours de sortie de la prostitution,
Développer des actions d’éducation et d’information pour prévenir le recours à la prostitution,
Sanctionner l’achat d’acte sexuel,
Timide pénalisation des clients :
La loi propose donc de pénaliser les clients via une amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe, 1500 euros. Nous sommes pour une amende à hauteur de 3750 euros (montant d’une amende délictuelle) pour des raisons juridiques et symboliques.
• Raisons juridiques :
La création d’une contravention de 5ème classe relève du pouvoir réglementaire (Constitution Française, articles 34 et 37) et non du domaine législatif.
Nous proposons la création d’un délit de recours à la prostitution. Sont des délits les infractions que la loi punit d’une peine d’emprisonnement ou d’une peine d’amende supérieure ou égale à 3 750 euros.
• Raisons symboliques :
Le recours à la prostitution est une atteinte grave à la personne humaine. La sanction ne peut se limiter à une peine contraventionnelle.
Cette mesure pénalise-t-elle aussi les personnes prostituées ?
Non ! La pénalisation des clients est la mesure pragmatiquement la plus protectrice.
Plusieurs clients tentent d’obtenir des rapports sans préservatifs, ou des pratiques qui rebutent les personnes prostituées. Lorsqu’ils seront sous le coup de la loi, les personnes prostituées pourront soit accepter l’acte sexuel tarifé dans le respect des conditions qu’elles ont fixé, soit menacer de dénoncer le client.
Un stage de sensibilisation des clients.
La PPL suggère (article 17) que les clients "encourent également l’obligation d’accomplir un stage de sensibilisation aux conditions d’exercice de la prostitution".
Un sondage TNS Sofres indique que la solution préférée par les Français pour responsabiliser les clients est "un stage d’une semaine pour comprendre les méthodes des proxénètes et le trafic des êtres humains" :
Nous sommes pour la création d’une infraction pénale ET d’un stage. D’ailleurs, en droit français, la seconde disposition est indissociable de la première.
Ex : Le stage de sensibilisation à la sécurité routière, aux dangers de l’usage de stupéfiants, de responsabilité parentale etc. ont été créés par le code pénal et personne ne demande spontanément à en bénéficier, sans avoir commis au préalable une infraction pénale.
Droits des étrangères (attention, là c’est un peu technique) :
Sur la question des titres de séjour pour les victimes sans papiers, il faut modifier le Code de l’entrée et du séjour et du droit d’asile (CESEDA).
La PPL ne modifie pas le premier alinéa qui dit « une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" peut (lui) être délivrée ». La décision est soumise au pouvoir discrétionnaire du préfet. Remplacer peut par doit.
La PPL introduit (après le premier alinéa) : « La carte de séjour est renouvelée pendant toute la durée de la procédure pénale, et sous réserve que les conditions prévues pour sa délivrance continuent d’être satisfaites. »
La PPL prévoit une autorisation provisoire de séjour d’une durée de seulement 6 mois pour les personnes qui ne peuvent déposer plainte et veulent sortir de la prostitution. Et après l’APS, il se passe quoi ?
La PPL dit que la CST est renouvelée “pendant la durée de la procédure pénale”. Et une fois qu’elle est terminée ?
Nous voulons que cette délivrance soit de plein droit. Nous réclamons que « l’autorité administrative délivre dans les plus brefs délais ». Il faut utiliser la même formulation que pour les femmes victimes de violences bénéficiaires d’une ordonnance de protection (article L316-3 CESEDA) : « le titre de séjour arrivé à expiration de l’étranger qui bénéficie d’une ordonnance de protection (…) est renouvelé »
Protection des personnes prostituées :
Suppression de toute forme de répression à leur encontre (racolage),
Plan national d’envergure d’alternatives à la prostitution (moyens conséquents),
Régularisation immédiate de toutes les personnes victimes de la prostitution,
Accès au soin, à des logements et à des formations pour leur insertion professionnelle et sociale,
informer dès le plus jeune âge (campagnes de communication) sur les conséquences de la prostitution, éduquer au fait qu’on n’achète pas les corps,
Fin de l’impunité des clients prostitueurs :
Interdiction de l’achat d’acte sexuel dans le code pénal,
Renforcement des moyens visant à la prévention et à l’éducation à l’égalité,
Renforcement des moyens de lutte contre le proxénétisme, et l’accès à une réparation intégrale du préjudice subi par ses victimes.
L’arsenal juridique français est bon, mais doit être mieux utilisé, en confisquant systématiquement les biens des proxénètes, en plus des peines de prison.
Inclure le proxénétisme dans la liste des crimes les plus graves ouvrant le droit à une indemnisation (art 7 06-3 du Code de procédure pénale).
Combattre le proxénétisme par des politiques ambitieuses conduites au niveau européen et international.
Mettre en conformité les législations européennes dans un sens abolitionniste.
L’ARGUMENT LIBERTAIRE : Les abolitionnistes refusent de prendre en compte le consentement de ceux qui choisissent de se prostituer.
FAUX : Nos associations accompagnent quotidiennement des personnes qui restent dans la prostitution, voire le revendiquent (surtout quand aucune alternative ne leur est offerte). En revanche, nous estimons que l’addition de quelques consentements individuels ne fait pas un projet de société.
Certaines personnes consentent librement à travailler pour moins que le SMIC, à se séparer d’un organe, à se prostituer. Dans les deux premiers cas, la loi condamne le patron et non le travailleur, l’acheteur d’organe et non celui qui s’en est séparé. De même, la loi doit condamner le client, et non celle qui marchandise son corps par nécessité.
Les libéraux et autres libertaires préfèrent la loi de la jungle au contrat social. Sans loi, dans les trois situations citées, ce sont les plus vulnérables qui sont spoliés. Le spectre du consentement va de « adhérer à » jusque « se résigner à ». Le consentement ne vaut pas liberté quand le consentement est vicié.
L’ARGUMENT INCRÉDULE : l’abolitionnisme est une utopie !
FAUX : Abolir ne signifie pas éradiquer.
Les viols, les meurtres, la pédophilie sont interdits par la loi. Pourtant, ils existent encore et existeront toujours. Mais ils existeront d’autant moins qu’on les combat et qu’on les reconnaît comme étant des violences.
L’ARGUMENT LIBERTIN : Vous êtes des puritains, des moralistes et vous n’aimez pas le sexe.
FAUX : Les abolitionnistes mènent un combat pour la libération sexuelle : une sexualité libérée de l’ordre moral, des archaïsmes patriarcaux et de l’emprise du marché.
Payer pour obtenir un rapport sexuel revient à l’imposer, à contourner la condition du désir réciproque de la partenaire via une compensation financière. L’achat d’un acte sexuel est la négation même du désir de l’autre, puisqu’il s’agit de le remplacer par cette compensation.
L’ARGUMENT ANTI-PROHIBITIONNISTE : Vous voulez interdire la prostitution.
FAUX : Les abolitionnistes exigent de supprimer le délit de racolage, et toute mesure répressive à l’encontre des personnes prostituées.
L’abolition n’a rien à voir avec l’interdiction ou la prohibition, qui ne changent rien à la société. Elles ne qualifient pas la violence et ne situent pas la responsabilité des clients, puisque tous les acteurs, clients et prostituées, sont condamnés au même titre.
La prohibition ne permet ni politique de prévention, ni d’alternatives, puisque les personnes prostituées ne sont pas présentées comme victimes du système, mais comme coresponsables.
A l’inverse, l’abolitionnisme permet de qualifier la violence du système prostitueur et d’engager des mesures en faveur de ses victimes et contre ses auteurs.
L’ARGUMENT INCRÉDULE (BIS) : Le modèle suédois est un échec : la pénalisation du client accroît l’exercice clandestin de la prostitution. La prostitution passera de la rue à internet, aux appartements planqués, aux salons de massage etc.
FAUX : Aujourd’hui, la prostitution n’a lieu ni dans la rue, ni sur Internet.
« La rue » et « Internet » ne sont que des modalités d’entrée en contact du client avec la personne prostituée. L’acte prostitutionnel est TOUJOURS caché, et la personne prostituée TOUJOURS vulnérable.
Au moment où elles montent dans la voiture du client, qu’elles ouvrent la porte de leur appartement ou de la chambre d’hôtel, les personnes prostituées sont seules face au client. Dans ce face à face, si le client risque une amende, il lui sera beaucoup plus difficile d’imposer un acte sexuel sans préservatif ou rebutant.
Un cadre institutionnel qui reconnaît la violence du système prostitutionnel, qui donne aux prostituées un statut de victimes, leur permet aussi d’exercer clandestinement dans un certain espace de sécurité. En Suède, grâce à ce cadre, les policiers, magistrats et travailleurs sociaux sont formés à les soutenir, à écouter leur parole, à recevoir leurs plaintes.
A l’inverse, les personnes prostituées « visibles » des bordels hollandais, dont les proxénètes sont des entrepreneurs reconnus, ne peuvent dénoncer un système où elles sont présumées consentantes.
Les proxénètes ne recherchent pas le crime pour le crime, mais le crime pour l’argent. Quand on pénalise les clients, on attaque la demande, on attaque leurs bénéfices. Les réseaux se détournent de la Suède car l’investissement y est moins rentable.
Enfin, un Etat qui ne considère pas la prostitution comme une violence ne mettra jamais en place de véritables alternatives à la prostitution et des mesures de protection pour les personnes prostituées. Car il n’y a pas lieu : la prostitution étant un métier comme un autre.
Multicountry analyses spotlight a dark problem
These grim statistics come from the first global, systematic estimates of violence against women. Linked papers published today in The Lancet and Science assess, respectively, how often people are killed by their partners and how many women experience violence from them. And an associated report and guidelines from the World Health Organization (WHO) in Geneva, Switzerland, along with the London School of Hygiene and Tropical Medicine and the South African Medical Research Council in Pretoria, estimates how often women suffer sexual violence from someone other than a partner, gauge the impact of partner and non-partner violence on women’s health and advise health-care providers on how to support the victims.
“These numbers should be a wake-up call. We want to highlight that this is a problem that occurs in all regions and it’s unacceptably high,” says Claudia García-Moreno, a physician at WHO who coordinates research on gender violence and worked on all the publications.
According to the WHO report, 42% of women who experienced violence were physically injured by their partners. But violence harms women in ways beyond injury. Violent partners may prevent women from visiting health clinics or from accessing medicine or contraception. Women who experienced violence from a partner are more likely to be infected with HIV or other sexually transmitted diseases, to have an abortion, to give birth to underweight and premature babies, and to attempt suicide. They are also more likely to use alcohol and are twice as likely to experience depression — factors which can be both cause of and be caused by a partner's violence. In addition, the authors point out, raised stress levels are implicated in a range of health problems, including chronic pain, diabetes, heart disease and gastrointestinal disorders.
Such figures mean that violence should be considered alongside 'mainstream' health risks such as smoking and alcohol use, says Kristin Dunkle, a social epidemiologist at Emory University in Atlanta, Georgia, who was not involved in the studies. “This is the moment where we say ‘no one is allowed to have their head in the sand, and no one is addressing women's health if they aren't addressing violence’.”
On the scientific agenda
The data came from a concerted effort over many years to develop and disseminate methods to measure gender-related violence, says Rachel Jewkes, head of the South African Medical Research Council in Pretoria. “By saying ‘we're going to measure it,’ we've put it on the scientific agenda.”
As recently as 15 or 20 years ago, she says, governments generally considered domestic violence as something that was private and inevitable — something that governments could do little to address, she says. Having global figures puts violence on the radar of “global bodies that are looking for one number to show that violence is an issue”.
To compile their estimates, each report combed through the peer-reviewed literature as well as the so-called 'grey literature', such as statistics and reports compiled by government agencies. To estimate the prevalence of violence against women across global regions and age ranges, for example, dozens of researchers searched more than 25,000 abstracts, says Karen Devries, a social epidemiologist at the London School of Hygiene and Tropical Medicine, who worked on the reports.
Devries team sought studies that assessed the prevalence of violence across entire countries or large regions within them. They also performed or requested additional analyses of four large international surveys. In total, their estimates were based on data from 141 studies in 81 countries, with 80% of the estimates based on what are considered gold-standard methods — private one-on-one interviews in which women are asked about specific acts of violence, including slaps, kicks, use of weapons and rape over their lifetime.
Global variation
Studies were adjusted for differences in design and methodological quality. The highest rates of partner violence, estimated between 54% and 78%, were found in central sub-Saharan Africa, but even high-income regions in Asia, North America and western Europe had rates above 15%. These jump considerably when sexual non-partner violence is factored in.
The studies still have gaps. For example, data about partner violence from central sub-Saharan Africa, East Asia, and southern Latin America, and for women over 49, were scarce. In addition, the studies did not assess emotional violence, and though estimates did not consider partners’ gender, most research studies solicited information only on male partners. In addition, many homicide reports do not include information about perpetrators’ relationships to their victims.
Nonetheless, the data that have been pulled together will enable researchers to conduct cross-country and regional comparisons and help generate hypotheses about how social conditions and policies may influence prevalence, says Victoria Frye, a social epidemiologist at Columbia University in New York. “We really did not have that capacity previously.”
And by establishing baseline figures for violence, governments and social researchers are better placed to develop and assess interventions, says Jewkes. “I want to see us in a situation where we are tracking the global decline of women being hit by partners and experiencing rape.”
This article is reproduced with permission from the magazine Nature. The article was first published on June 20, 2013.
Rosen a longtemps défendu l’idée d’un statut et cru en la nécessité de rouvrir des maisons closes.
Aujourd’hui, elle se bat aux côtés du Mouvement du Nid pour la pénalisation des « clients ».
Elle raconte son long cheminement et revient sur l’arme de destruction qu’est la prostitution, en particulier sur le plan de la santé.
Retrouvez tous nos témoignages ici et le Tour de France de l’Abolition.
La prostitution, je devais y rester trois semaines, un mois. Au bout de 22 ans, j’y étais toujours. Et toujours avec les mêmes problèmes financiers. Une chose est sûre, on finit rui- née. Ce qui m’a fait plonger, je ne sais pas : une dépression, la peur du porte-monnaie vide… on y entre, on ne se rend pas compte.
Je parle en mon nom mais aussi au nom des jeunes femmes dans les salons et sur les trottoirs. Pendant 22 ans, j’ai vécu des agressions et des viols répétés. Quand on y est, on n’est pas consciente de la gravité de ce que l’on vit. La seule chose qui compte, c’est l’argent. Un jour après l’autre. On fait semblant d’aller bien, on montre quelque chose de soi qui n’est pas réel. Tout devient du mauvais théâtre, la vie avec les enfants, les amis, les clients. C’est violent.
Il y a 22 ans, si la prévention avait existé, ces 22 ans n’auraient pas eu lieu. S’il y avait eu une loi, en 1988, pour interdire l’achat de service sexuel, ces 22 années n’auraient pas existé pour moi. 22 années de gâchis, que je ne pourrai jamais reconstruire. 22 années marquées « sans emploi ». Sans emploi et sans existence. Aujourd’hui, je demande aux éluEs de mettre en place une politique de prévention pour que les jeunes ne tombent pas là-dedans ; mais aussi des aides pour pouvoir en sortir et une formation des psys pour libérer la parole des femmes.
Le client est coupable. Il sait ce qu’il achète ; il consomme.
Un homme qui achète une fellation dans une cave doit être condamné. Je demande que tout soit fait – et c’est urgent – pour protéger ces jeunes filles. Les clients, ils mentent, ils s’inventent un monde. La prostitution, c’est un gigantesque mensonge ; la prostituée ment, le client ment. L’ouvrier devient patron, le mari célibataire. On a envie de leur dire que ce sont des abrutis mais on est obligée de leur faire des compliments. De devoir supporter ces types, ça me prenait aux tripes. J’aurais pu en tuer un. Je me voyais avec un couteau.
Tous repartent frustrés. La prostitution, c’est une frustration généralisée. Ils viennent chercher ce qu’ils ne pourront jamais trouver ; ce qui n’existe pas. Pour certains, c’est une forme d’addiction : il me les faut toutes
, en payant ou pas, peu importe. Ça peut être une petite bonne femme de 55 ans, je me souviens d’une dans un bar qui travaillait plus que nous qui étions jeunes. Ça peut être une femme de 150 kilos. Ils ont le pouvoir d’humilier. Les clients sont tous des prédateurs.
Dans la prostitution, j’ai eu énormément de problèmes de santé. En 1990, j’ai fait un ulcère à l’estomac, grave, j’ai même été dans le coma. En 1995, j’ai eu de gros problèmes de vue. Je sentais que je dépérissais. Je prenais des médicaments. J’avais des aigreurs d’estomac à hurler, j’avalais des verres d’huile pour me calmer. Et la fatigue ! Les dernières années, j’aurais dormi vingt heures sur vingt quatre si j’avais pu. J’étais incapable de définir ce que j’avais : épuisement mental, douleurs… Pendant des années, j’ai cherché des causes médicales. Les médecins m’ont détecté une maladie orpheline. Et à un moment, j’ai même cru que j’avais un cancer.
Quand j’ai pris la décision d’arrêter la prostitution, je ne tenais plus debout. J’étais arrivée à un tel point de fatigue que j’avais l’impression d’être en train de mourir. Et j’avais tout le temps faim : une fringale ingérable, incontrôlable. Quand je sortais de mon salon de massage, je voyais trouble. Je mettais des lunettes de soleil et je les gardais jusque dans mon lit !
Et puis j’ai arrêté. Et j’ai mis des mois à réaliser. Je ne suis plus fatiguée. Je n’ai plus de douleurs à l’estomac, je n’ai plus envie de dormir. J’ai l’impression que mes yeux se sont rouverts tout grands. Avant, j’avais une masse qui pesait sur mes paupières. C’est un soulagement immense : comme si quelque chose en moi revivait. Et je n’ai plus aucune gêne avec ma maladie orpheline, au point que je commence même à la mettre en doute. Je pense que c’est moi qui ai créé tout ça. Mes yeux qui voyaient trouble, je pense que c’est parce que je ne voulais plus voir le monde.
Avant, je me levais courbée ; c’est fini. Je me surprends tous les jours. Je n’arrivais même plus à me laver ; je n’avais plus de plaisir à rien. Faire le plein, les courses, tout était devenu surhumain. Infranchissable. Même mettre une paire de chaussures. Mon corps était épuisé, mon cerveau encore plus. Moi qui avais perdu toute énergie, je me retrouve. Je suis redevenue la femme que je n’étais plus. Maintenant, je fais des rapprochements. Je comprends que mon corps tirait le signal d’alarme. Mon médecin ne comprenait pas. En fait je me suis autodétruite. Si j’avais continué, je serais morte.
C’est un processus subtil ; parce qu’il y avait aussi des douleurs qui avaient disparu et qui se réveillent. En 1996, j’avais eu un bras cassé dans un accident et j’en avais gardé une grave arthrose. Cette arthrose, je ne la sentais jamais. Pour se prostituer, il faut anesthé- sier son corps. Et j’avais anesthésié les douleurs réelles. On s’anesthésie tellement qu’on finit par s’endormir. C’est le début d’une mort.
Pour m’en sortir, il m’a fallu des rencontres. Et puis il y a eu cette fatigue, ce ras le bol, ce burn out.
J’ai publié un livre [1] et cela m’a permis de rencontrer beaucoup de gens. Certains étaient pour la prostitution, d’autres contre. J’ai pris tous ces mots et j’ai réfléchi. Je me suis posé la question : le conseillerais-tu à une autre femme ? La réponse était évidente. C’était non.
Au moment où j’ai écrit ce livre [Où Rosen défend l’idée d’un cadre légal pour la prostitution « volontaire », ndlr] j’étais entourée de gens qui me disaient : tu n’emmerdes personne
. C’est sûr, c’est moi que j’emmerdais ! Maintenant, je me rends compte que les gens qu’on fréquente, dans ce contexte, tirent tous plus ou moins profit de notre prostitution : clients, commerçants… donc, ils nous confortent dans notre situation.
J’ai passé des nuits entières à réfléchir, à analyser. Et j’ai vécu tant de choses dans mon corps ! Dans la prostitution, on arrive à un stade où on ne pense plus. Est-ce parce que j’ai pris de la cortisone, mais j’ai été boostée, j’ai bien réfléchi et j’ai décidé d’arrêter tout : le traitement et la prostitution.
Quand je relis ce que j’ai pu écrire avant, je me choque toute seule. Mais j’étais où ? Maintenant, je sais que c’était une étape et qu’elle était indispensable à ma guérison. Mais je sentais bien que quelque chose n’allait pas. Un jour, je me suis réveillée. Mais quand on se réveille, on a mal. Donc, on peut ne pas en avoir envie.
Pendant toutes ces années, j’ai vu des psys, je suis allée aux Alcooliques Anonymes (je buvais pas mal). Mais je trouvais des excuses bidon, des faux problèmes parce que je ne pouvais pas dire que j’étais prostituée. En fait, je me rends compte maintenant que je lançais des appels au secours en permanence. Mais les réponses, les aides, on ne les obtient pas parce qu’on ne peut pas dire l’essentiel. Il n’y a personne pour les com- prendre, pour les déchiffrer.
Mes réflexions ont duré en tout une huitaine d’années. Il aurait fallu que je sois entendue par les bonnes personnes. Mais ce n’était pas possible, à cause du tabou.
Aujourd’hui, je témoigne à visage découvert. Pour désarmer l’ennemi. Mais avant…
Il fallait vivre avec l’idée : à un moment ou à un autre, mes enfants sauront.
C’était invivable.
Pour leur dire, j’ai utilisé les grands moyens : témoigner dans une émission de Jean-Luc Delarue sur les non-dits et les secrets de famille. J’avais accepté en me faisant violence mais il fallait que ma vie change. Je voulais me libérer, c’était trop lourd. J’ai donc prononcé ces mots, sur le plateau : je me prostitue
. Après, je me suis passé le DVD en boucle pour m’écouter le dire. Bon, personne ne m’a donné de médaille, le cap a été dur à passer. Mais mes enfants ont compris. Les grands s’en doutaient, d’ailleurs. Et moi je n’avais plus à avoir peur ; cette peur affreuse qu’ils l’apprennent de quelqu’un. Je m’étais libérée, je pouvais passer à autre chose, ouvrir des cadenas.
Mais j’avais pris des risques. J’ai des problèmes de retards de loyer, et j’ai été menacée d’expulsion par mon office de HLM. Des gens ont raconté que j’avais des activités de prostitution dans mon appartement, alors que je ne recevais jamais personne. C’est très dur à vivre. Je n’aurais jamais imaginé que les HLM allaient s’en servir pour tenter de me détruire. Tout est un combat. Et une personne du recouvrement à qui j’ai dit que j’avais été prostituée n’a rien trouvé d’autre à me répondre que : Mais alors, vous avez de l’argent ! Elle n’a rien compris. Si on avait de l’argent, on n’irait pas se prostituer. Aujourd’hui, je suis à la ramasse financièrement. Mais je n’y retournerai pas. C’est irréversible. Je réapprends à vivre. Je travaille, je suis contente de toucher un salaire. Je gagnais en deux jours ce que je gagne en deux semaines, je vis avec le minimum mais je suis en accord avec moi-même.
Publié dans Prostitution et Société numéro 176.
[1] Rosen, une prostituée témoigne. Pour une prostitution choisie, non subie, éd Bordessoules, 2009.
"Aller voir une prostituée, c'est dégrader l'amour, les femmes et soi-même."
Olivier Jean Fifty Films