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Humanitaire - Page 14

  • PROSTITUTION : L’abolitionnisme pour les nulLEs (Les Effrontées)

    abo

    PPL : proposition de loi

    Pourquoi sommes-nous abolitionnistes ?

    La prostitution est un fait de société qui concerne directement les rapports entre les femmes et les hommes, et la construction du genre dans les mentalités.

    Selon si un pays autorise ou combat ouvertement le fait d’acheter les corps des femmes (en grande majorité) pour satisfaire les besoins sexuels des hommes, les nouvelles générations n’auront pas la même vision de la sexualité. Un petit garçon qui nait dans une ville où on voit des femmes derrière des vitrines, ou sur des trottoirs, n’a pas la même image des rôles des femmes et des hommes que s’il nait dans un pays où on lui dit que ce n’est pas envisageable.

    C’est moins glamour en chiffres :

    chiffres_

    Dans le monde

    • 98% des prostituées sont des femmes et des fillettes (l’OIT).

    • 75% ont entre 13 ans et 25 ans.

    • L’âge d’entrée moyen dans la prostitution est de 14 ans. C’est-à-dire que la plupart sont plus âgées, ou plus jeunes !

    • Le nombre d’enfants prostitués augmente d’un million chaque année (UNICEF).

    • Une prostituée procurerait en moyenne 107 000 euros par an à son proxénète (INTERPOL).

    En France

    • 80% des prostituées sont étrangères (OCRTEH – Office central de la répression de la traite des êtres humains).

    • Entre 85 et 90% des personnes prostituées sont sous le joug du proxénétisme (enquête de Richard Poulin – 2005).

    • La quasi totalité des clients sont des hommes : 37% sont en couple, 29% cadres, 25% ouvriers (Enquête de 2004 de Claudine Legardinier et Saïd Bouamama).

    • Chaque prostituée rapporte entre 300 et 800 euros par jour à son proxénète et environ 50 euros lui seraient laissés (OCRTEH).

    Extrait : « Le livre noir de la prostitution » d’Elizabeth Coquart et Philippe Huet (Albin Michel, 2000, p.36) :

    « Une prostituée sur deux a eu des contacts avec la prostitution dès son enfance et un tiers a eu une mère ou une parente prostituée. [...] Un tiers des prostituées mineures enquêtées a été victime de viol par des adultes connus d’elle entre l’âge de trois ans et de quinze ans… [...] 80% des prostituées a subi des abus sexuels au cours de l’enfance. »

    On retient de ces chiffres que nous avons affaire à un commerce très lucratif ; qui s’exerce très majoritairement sur des femmes, dont une écrasante majorité ne l’a pas choisi ; pour des clients qui ne sont quasi que des hommes ; et qui touche les populations les plus vulnérables, pauvres, jeunes, immigrées ou victimes de violences.

    Petit tour des législations :

    Loi

      • Les Prohibitionnistes

    La prostitution est interdite dans les pays prohibitionnistes. Ce sont surtout les personnes prostituées qui sont inquiétées pour atteinte à l’ordre public. Cette politique misogyne et hypocrite n’existe plus en Europe. Elle n’a pour conséquences que l’exercice clandestin et la criminalisation des prostituées qui encourent condamnation et autres violences.

      • Les Réglementaristes

    Cette théorie est née dans les années 1830, avec les analyses du médecin Alexandre Parent-Dûchatelet. Nous tenons à souligner la philosophie initiale de ce courant dont le théoricien confère à la prostitution une utilité sociale, et la considère comme un élément indispensable à la sexualité masculine normale. Nous sommes dans le mythe de la sexualité irrépressible des hommes à laquelle il faut trouver un débouché pragmatique.

    Ça aura pour conséquence la création de lieux clos contrôlés par l’administration médicale et policière. Ce modèle sera étendu en Europe par le Code Napoléon dès 1804. Il s’applique aujourd’hui aux Pays-Bas ou en Allemagne.

    Aux Pays-Bas, le constat n’est pas brillant : Le maire d’Amsterdam a reconnu en 2004 que la Tipplezone était devenue un refuge pour les trafiquants et un danger pour les femmes. On a vu la multiplication par 3 du nombre d’enfants prostitués en cinq ans, et une même multiplication des femmes prostituées émigrées des pays d’Europe centrale.

    En Allemagne, on compte 400 000 prostituées et une augmentation de 70% du trafic d’être humains en huit ans de 2002 à 2010, selon l’Enquête d’Elise Guiraud en 2010.

    Depuis, la loi légalise les bordels (Eros center), considère les proxénètes comme des entrepreneurs, et les femmes se retrouvent dans les bonnes vieilles maisons closes. Il est extrêmement rare qu’elles bénéficient de contrats. Le profil-type d’une femme prostituée en Allemagne est une jeune de 18-20 ans, roumaine, issue du trafic d’êtres humains.

    Le pays est devenue une destination de tourisme sexuel et une plaque tournante des proxénètes, qui sont des "entrepreneurs" comme les autres.

      • Les Abolitionnistes

    Ce courant tolère la prostitution, mais interdit le proxénétisme, les maisons closes et le racolage. En France, il se traduit par la loi Marthe Richard (1946) qui interdit les maisons closes, supprime le fichage et punit les proxénètes.

    Ses principes sont reconnus en 1949 par la convention de Genève pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui. « La prostitution et le mal qui l’accompagne, à savoir la traite des êtres humains en vue de la prostitution, sont incompatibles avec la dignité et la valeur de la personne humaine ». Texte signé par plus de 70 pays, dont la France en 1960.

    La France est considérée comme un état abolitionniste. Mais aucune réflexion n’a été menée pour arriver à une réelle abolition de la prostitution.

      • Les Néo-abolitionnistes (c’est nouuuus !)

    Le modèle suédois pénalise le client, pas la prostituée. Ce pays a enregistré une baisse de 50% de la prostitution de rue, un recul net de la traite et un recul de 80% des clients. Outre la pénalisation des clients, beaucoup d’autres mesures ont été mises en œuvre :

    Côté Éducation Nationale : une réelle éducation à l’égalité et à la sexualité. La liberté sexuelle ne va pas de soi. Considérer que les corps des femmes peuvent être achetés par des hommes renforce deux idées essentialistes : la libido irrépressible des hommes pour laquelle la société doit prévoir un réservoir de femmes sexuellement disponibles ; et le fait que les corps des femmes, qui auraient une sexualité sociale, généreuse, soumise aux initiatives masculines, doivent être mis à la disposition des pulsions sexuelles masculines.

    Des mesures sociales ambitieuses ont été mises en œuvre vu le lien évident entre prostitution et précarité, via des moyens financiers pour accompagner les principales intéressées.

    Pas de dérive sécuritaire : En Suède, les clients doivent écoper de 6 mois de prison, mais aucune peine de prison n’a été prononcée. L’état s’est à chaque fois contenté d’une amende. C’est l’effet normatif qui est recherché.

    Pourquoi sommes-nous abolitionnistes ?

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      • 1. Pour la dignité

    L’acte qui consiste à vivre des pénétrations et autres pratiques sexuelles sans désir, à subir des relations à répétition, provoque des séquelles physiques et psychologiques très profondes. La violence sexuelle n’a pas le même impact que la violence tout court, sinon on punirait le viol comme n’importe quelle agression physique. Le viol est un crime car nous savons, combien même il serait moins douloureux que des coups, qu’il est psychologiquement beaucoup plus ravageur.

    Beaucoup de prostituées développent le symptôme de décorporalisation. Les rapports sexuels non désirés sont d’une telle violence que ces femmes s’anesthésient psychologiquement. Quand elles sont couvertes de bleus en rentrant chez elles, elles sont incapables de se souvenir de qui les a frappé. Elles ne vont plus chez le médecin quand elles tombent malades etc.

      • 2. Contre la marchandisation

    Notre monde libéral nous le rappelle sans cesse, le client est roi ! C’est lui qui choisit tout : la prostituée, le service, les positions. Dans le cadre de ce métier, la prostituée ne peut que se plier à des pratiques intimes commandées par le client.

    L’argent, c’est le pouvoir, souvent décisionnel. Qui détient l’argent ? Les hommes. Les femmes détiennent 1% des richesses et des capitaux mondiaux (ONU). La prostitution n’est pas un luxe de riches, elle existe dans toutes les sociétés. Dans les pays pauvres, les prostituées sont tout simplement moins chères.

      • 3. Pour l’égalité et l’émancipation :

    La liberté sexuelle, c’est la réciprocité du désir et du plaisir, la liberté de choisir son partenaire et ses pratiques sexuelles. La prostitution est un bastion d’une longue histoire du patriarcat où le désir de l’homme a toujours primé (mariages arrangés, droit de cuissage, viols et viol conjugal). Historiquement, l’idée du plaisir masculin unilatéral est une normalité.

    Nous sommes pour une société où le désir est réciproque, où le plaisir est partagé. La sexualité sous contrainte, par la violence, par nécessité via la marchandisation des corps, ne sera jamais vectrice de ce plaisir et de cette émancipation. Tout n’est pas à vendre, on ne peut pas tout acheter. Il est des usages de la société archaïque patriarcale qu’il va falloir enfin dépasser.

      • 4. Pour un autre projet de société :

    Quel est le projet de société que nous voulons ? Acceptons-nous que la prostitution devienne un métier comme un autre, à savoir que dans les pays qui la légalisent, on voit des campagnes publicitaires affichant des soldes sur les prostituées, ou des menus « un repas, une chambre et une prostituée » ?

    Le projet abolitionniste va, en effet, restreindre une certaine liberté. Les sociétés ont toujours fixé des limites, dans tous les domaines. On l’a fait pour la majorité sexuelle, pour le temps de travail légal, et même pour la liberté d’expression ! Les propos négationnistes ou appelant à la haine raciste sont interdits et punis. L’égalité des citoyens se définit aussi par la restriction d’une totale liberté, comme pour la réduction de temps de travail légal (35h, 10h par jour, travail de nuit, travail le dimanche), la laïcité etc.

    L’idée n’est pas de prétendre qu’une prostituée consentante est forcément aliénée, mais peut-on, au nom du désir de cette minorité de femmes qui vivent bien la prostitution, justifier la mise sur le marché de la sexualité ? Avec tout ce qui va avec : Pression de la concurrence, marketing, logiques économiques, exploitation etc. NON ! Elles n’ont pas à disposer d’une telle norme et trancher des questions aussi fondamentales que : Est-ce que la sexualité s’achète ? Doit-elle obéir aux lois du marché ? Est-ce que c’est le même type de débat que pour la vente d’organes, la GPA, les lancers de nains  etc.?

    De quoi les 343 salauds sont-ils révélateurs ?

    connards

    Ce manifeste appelle le gouvernement à ne pas se mêler du système prostitueur. Il nie l’Etat de droit et préfère s’en remettre à la loi du plus fort, du plus riche, du plus vieux, du plus médiatique, et surtout à celle des hommes.

    Les 343 salauds revendiquent la liberté des clients à avoir un accès marchand aux corps des femmes, à extorquer le consentement des personnes qui n’ont pas les moyens de leur dire non.

    Ce manifeste souffre d’une contradiction majeure : Il met de côté la souffrance de la grande majorité des « forçates » de l’industrie du sexe, tout en condamnant les réseaux proxénètes, qui en sont les pourvoyeurs. Pour maquiller cette contradiction, il se range du côté d’une petite minorité de prostituées qui proclame ouvrir ses jambes à la demande, plusieurs fois par jour, avec plaisir.

    Derrière ce manifeste, se cache un pied de nez face aux récents acquis féministes : Les patriarcaux nous disent : « Les femmes sont aujourd’hui plus libres ; elles peuvent dire non ; ne subissent plus de mariages forcés ; de droits de cuissages ; peuvent refuser telles pratiques ou en réclamer ? Qu’à cela ne tienne ! Puisque c’est comme ça, nous irons aux putes. » La pute, c’est l’épouse d’antan, celle que je paye et qui n’a plus son mot à dire. De même que dans le cadre d’un mariage arrangé, la relation sexuelle se passe sous contrat.

    Françoise Héritier (anthropologue) : « Dire que les femmes ont le droit de se vendre, c’est masquer que les hommes ont le droit de les acheter. »

    Notre mouvement :

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    La loi, >> ses manques <<

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    AGENDA :

    • Depuis le 29 octobre a lieu la commission spéciale qui examine la PPL. Les 70 membres sont en grande partie abolitionnistes. Les amendements peuvent être déposés jusqu’au 15 novembre.

    • Le 19 novembre, la commission se réunira pour voter les amendements.

    • La PPL est inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée Nationale. Elle sera examinée le 27 novembre, de 16h à 1h du matin.

    • 23 novembre : manifestation annuelle contre les violences faites aux femmes, cette année spécial Abolition.

    La France est un pays abolitionniste:

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    Nous sommes donc à la veille de l’examen de la PPL n°1437 (des députées Maud Olivier et Catherine Coutelle) renforçant la lutte contre le système prostitutionnel. C’est la 3ème fois en deux ans qu’un consensus entre député-e-s de toutes étiquettes s’accorde sur ce point.

    • Rapport parlementaire Bousquet-Geoffroy de 2011

    • Vote d’une résolution à l’Assemblée Nationale réaffirmant la position abolitionniste de la France (décembre 2011)

    • Rapport adopté à l’unanimité de la délégation aux droits des femmes à l’Assemblée Nationale, pour renforcer la lutte contre la prostitution (17 septembre 2013)

    La Grande cause nationale de 2010 et le Plan interministériel de lutte contre les violences faites aux femmes (2011-2013) reconnaissent également la violence inhérente à l’achat de tout acte sexuel.

    La Convention des Nations Unies du 2 décembre 1949 et la résolution du Parlement européen du 6 février 2013 considèrent que la prostitution constitue une violation des droits humains et une atteinte à la dignité de la personne.

    Pourtant, en France, la prostitution est la dernière violence faite aux femmes pour laquelle les victimes sont pénalisées, au titre du délit de racolage, alors que ses auteurs demeurent impunis.

    Ne pas en rester aux vœux pieux :

    images

    Seule une politique très volontariste pourra lutter contre le système prostitueur qui s’attaque aux femmes les plus vulnérables.

    Bilan suédois :

    • Prostitution de rue divisée par deux.

    • Sur internet, il n’y a pas d’énormes difficulté à pister des clients.

    • 70% de la population est aujourd’hui satisfaite de la loi (contre 30% au moment de son vote). Le chiffre est plus élevé chez les jeunes, qui considèrent qu’acheter un acte sexuel n’est pas normal.

    • Les trafiquants ne s’intéressent plus au marché suédois, vu qu’on s’est attaqué à la demande.

    Autres phénomènes :

    • Le client s’empresse de payer l’amende pour éviter de recevoir une convocation au tribunal à son domicile.

    • Les personnes prostituées ont un accès automatique aux associations. On peut informer les étrangères sur leurs droits (notamment les aides, ce dont les proxénètes se gardent de les informer).

    Le contenu de la PPL française est encore modeste, surtout la dernière version. Côté pénalisation, il n’y a de délit qu’en cas de récidive. Dans tous les cas, il n’y a pas de peine de prison. Juste une amende de 1500 euros, 3000 en cas de récidive.

    Dans cette version, il n’y a plus de RSA, mais 330 euros pour les étrangères avec un titre de séjour de 6 mois, qui n’apparaît plus comme renouvelable.

    Ce que la loi propose :

    plume

    La PPL intègre quatre axes forts:

    • Renforcer les moyens de lutte contre le proxénétisme et la traite,

    • Améliorer la protection des victimes de la prostitution et créer un parcours de sortie de la prostitution,

    • Développer des actions d’éducation et d’information pour prévenir le recours à la prostitution,

    • Sanctionner l’achat d’acte sexuel,

    • Timide pénalisation des clients :

    La loi propose donc de pénaliser les clients via une amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe, 1500 euros. Nous sommes pour une amende à hauteur de 3750 euros (montant d’une amende délictuelle) pour des raisons juridiques et symboliques.

    • Raisons juridiques :

    La création d’une contravention de 5ème classe relève du pouvoir réglementaire (Constitution Française, articles 34 et 37) et non du domaine législatif.

    Nous proposons la création d’un délit de recours à la prostitution. Sont des délits les infractions que la loi punit d’une peine d’emprisonnement ou d’une peine d’amende supérieure ou égale à 3 750 euros.

    • Raisons symboliques :

    Le recours à la prostitution est une atteinte grave à la personne humaine. La sanction ne peut se limiter à une peine contraventionnelle.

    Cette mesure pénalise-t-elle aussi les personnes prostituées ?

    Non ! La pénalisation des clients est la mesure pragmatiquement la plus protectrice.

    Plusieurs clients tentent d’obtenir des rapports sans préservatifs, ou des pratiques qui rebutent les personnes prostituées. Lorsqu’ils seront sous le coup de la loi, les personnes prostituées pourront soit accepter l’acte sexuel tarifé dans le respect des conditions qu’elles ont fixé, soit menacer de dénoncer le client.

    • Un stage de sensibilisation des clients.

    La PPL suggère (article 17) que les clients "encourent également l’obligation d’accomplir un stage de sensibilisation aux conditions d’exercice de la prostitution".

    Un sondage TNS Sofres indique que la solution préférée par les Français pour responsabiliser les clients est "un stage d’une semaine pour comprendre les méthodes des proxénètes et le trafic des êtres humains" :

    Nous sommes pour la création d’une infraction pénale ET d’un stage. D’ailleurs, en droit français, la seconde disposition est indissociable de la première.

    Ex : Le stage de sensibilisation à la sécurité routière, aux dangers de l’usage de stupéfiants, de responsabilité parentale etc. ont été créés par le code pénal et personne ne demande spontanément à en bénéficier, sans avoir commis au préalable une infraction pénale.

    • Droits des étrangères (attention, là c’est un peu technique) :

    Sur la question des titres de séjour pour les victimes sans papiers, il faut modifier le Code de l’entrée et du séjour et du droit d’asile (CESEDA).

    La PPL ne modifie pas le premier alinéa qui dit « une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" peut (lui) être délivrée ». La décision est soumise au pouvoir discrétionnaire du préfet. Remplacer peut par doit.

    La PPL introduit (après le premier alinéa) : « La carte de séjour est renouvelée pendant toute la durée de la procédure pénale, et sous réserve que les conditions prévues pour sa délivrance continuent d’être satisfaites. »

    1. La PPL prévoit une autorisation provisoire de séjour d’une durée de seulement 6 mois pour les personnes qui ne peuvent déposer plainte et veulent sortir de la prostitution. Et après l’APS, il se passe quoi ?

    2. La PPL dit que la CST est renouvelée “pendant la durée de la procédure pénale”. Et une fois qu’elle est terminée ?

    Nous voulons que cette délivrance soit de plein droit. Nous réclamons que « l’autorité administrative délivre dans les plus brefs délais ». Il faut utiliser la même formulation que pour les femmes victimes de violences bénéficiaires d’une ordonnance de protection (article L316-3 CESEDA) : « le titre de séjour arrivé à expiration de l’étranger qui bénéficie d’une ordonnance de protection (…) est renouvelé »

    Ce qu’on veut, au final :

    feministes

    Protection des personnes prostituées :

    • Suppression de toute forme de répression à leur encontre (racolage),

    • Plan national d’envergure d’alternatives à la prostitution (moyens conséquents),

    • Régularisation immédiate de toutes les personnes victimes de la prostitution,

    • Accès au soin, à des logements et à des formations pour leur insertion professionnelle et sociale,

    • informer dès le plus jeune âge (campagnes de communication) sur les conséquences de la prostitution, éduquer au fait qu’on n’achète pas les corps,

    Fin de l’impunité des clients prostitueurs :

    • Interdiction de l’achat d’acte sexuel dans le code pénal,

    • Renforcement des moyens visant à la prévention et à l’éducation à l’égalité,

    Renforcement des moyens de lutte contre le proxénétisme, et l’accès à une réparation intégrale du préjudice subi par ses victimes.

    • L’arsenal juridique français est bon, mais doit être mieux utilisé, en confisquant systématiquement les biens des proxénètes, en plus des peines de prison.

    • Inclure le proxénétisme dans la liste des crimes les plus graves ouvrant le droit à une indemnisation (art 7 06-3 du Code de procédure pénale).

    • Combattre le proxénétisme par des politiques ambitieuses conduites au niveau européen et international.

    • Mettre en conformité les législations européennes dans un sens abolitionniste.

    Désintox

    TOP 5 des arguments de nos pourfendeurs :

    mauvaise-foi

    • L’ARGUMENT LIBERTAIRE : Les abolitionnistes refusent de prendre en compte le consentement de ceux qui choisissent de se prostituer.

    FAUX : Nos associations accompagnent quotidiennement des personnes qui restent dans la prostitution, voire le revendiquent (surtout quand aucune alternative ne leur est offerte). En revanche, nous estimons que l’addition de quelques consentements individuels ne fait pas un projet de société.

    Certaines personnes consentent librement à travailler pour moins que le SMIC, à se séparer d’un organe, à se prostituer. Dans les deux premiers cas, la loi condamne le patron et non le travailleur, l’acheteur d’organe et non celui qui s’en est séparé. De même, la loi doit condamner le client, et non celle qui marchandise son corps par nécessité.

    Les libéraux et autres libertaires préfèrent la loi de la jungle au contrat social. Sans loi, dans les trois situations citées, ce sont les plus vulnérables qui sont spoliés. Le spectre du consentement va de « adhérer à » jusque « se résigner à ». Le consentement ne vaut pas liberté quand le consentement est vicié.

    • L’ARGUMENT INCRÉDULE : l’abolitionnisme est une utopie !

    FAUX : Abolir ne signifie pas éradiquer.

    Les viols, les meurtres, la pédophilie sont interdits par la loi. Pourtant, ils existent encore et existeront toujours. Mais ils existeront d’autant moins qu’on les combat et qu’on les reconnaît comme étant des violences.

    • L’ARGUMENT LIBERTIN : Vous êtes des puritains, des moralistes et vous n’aimez pas le sexe.

    FAUX : Les abolitionnistes mènent un combat pour la libération sexuelle : une sexualité libérée de l’ordre moral, des archaïsmes patriarcaux et de l’emprise du marché.

    Payer pour obtenir un rapport sexuel revient à l’imposer, à contourner la condition du désir réciproque de la partenaire via une compensation financière. L’achat d’un acte sexuel est la négation même du désir de l’autre, puisqu’il s’agit de le remplacer par cette compensation.

    • L’ARGUMENT ANTI-PROHIBITIONNISTE : Vous voulez interdire la prostitution.

    FAUX : Les abolitionnistes exigent de supprimer le délit de racolage, et toute mesure répressive à l’encontre des personnes prostituées.

    L’abolition n’a rien à voir avec l’interdiction ou la prohibition, qui ne changent rien à la société. Elles ne qualifient pas la violence et ne situent pas la responsabilité des clients, puisque tous les acteurs, clients et prostituées, sont condamnés au même titre.

    La prohibition ne permet ni politique de prévention, ni d’alternatives, puisque les personnes prostituées ne sont pas présentées comme victimes du système, mais comme coresponsables.

    A l’inverse, l’abolitionnisme permet de qualifier la violence du système prostitueur et d’engager des mesures en faveur de ses victimes et contre ses auteurs.

    • L’ARGUMENT INCRÉDULE (BIS) : Le modèle suédois est un échec : la pénalisation du client accroît l’exercice clandestin de la prostitution. La prostitution passera de la rue à internet, aux appartements planqués, aux salons de massage etc.

    FAUX : Aujourd’hui, la prostitution n’a lieu ni dans la rue, ni sur Internet.

    « La rue » et « Internet » ne sont que des modalités d’entrée en contact du client avec la personne prostituée. L’acte prostitutionnel est TOUJOURS caché, et la personne prostituée TOUJOURS vulnérable.

    Au moment où elles montent dans la voiture du client, qu’elles ouvrent la porte de leur appartement ou de la chambre d’hôtel, les personnes prostituées sont seules face au client. Dans ce face à face, si le client risque une amende, il lui sera beaucoup plus difficile d’imposer un acte sexuel sans préservatif ou rebutant.

    Un cadre institutionnel qui reconnaît la violence du système prostitutionnel, qui donne aux prostituées un statut de victimes, leur permet aussi d’exercer clandestinement dans un certain espace de sécurité. En Suède, grâce à ce cadre, les policiers, magistrats et travailleurs sociaux sont formés à les soutenir, à écouter leur parole, à recevoir leurs plaintes.

    A l’inverse, les personnes prostituées « visibles » des bordels hollandais, dont les proxénètes sont des entrepreneurs reconnus, ne peuvent dénoncer un système où elles sont présumées consentantes.

    Les proxénètes ne recherchent pas le crime pour le crime, mais le crime pour l’argent. Quand on pénalise les clients, on attaque la demande, on attaque leurs bénéfices. Les réseaux se détournent de la Suède car l’investissement y est moins rentable.

    Enfin, un Etat qui ne considère pas la prostitution comme une violence ne mettra jamais en place de véritables alternatives à la prostitution et des mesures de protection pour les personnes prostituées. Car il n’y a pas lieu : la prostitution étant un métier comme un autre.

    autocollant

  • Gabriel Matzneff, écrivain distingué, n'en reste pas moins un pédophile et un apôtre de la pédophilie

    http://www.leoscheer.com/blog/images/gabriel%20matzneff.jpg

    Dès lors, il ne mérite pas le prix qu'on lui octroie.

    L'éthique prime sur l'esthétique.

    La liberté individuelle s'arrête là où commence celle des autres - des enfants en l'espèce.

    Porter atteinte aux droits fondamentaux d'autrui, ce n'est pas exprimer sa liberté, c'est manifester son aliénation en aliénant l'autre.

    Les artistes n'ont pas tous les droits par la seule vertu de leur talent (ou de leur absence de talent).

    Ce sont, d'abord, des citoyens, et leur statut d'artiste ne les place pas au-dessus des lois ni des principes moraux fondamentaux.

    Un jury qui décerne des prix à un pédophile cautionne la pédophilie.

    Il faut retirer le prix Renaudot Essai 2013 attribué à Gabriel Matzneff pour Séraphin, c'est la fin !

    http://www.petitions24.net/retirer_le_prix_renaudot_a_gabriel_matzneff_militant_pro_pedophil

    https://www.change.org/fr/p%C3%A9titions/membres-du-jury-du-prix-renaudot-essai-2013-retirez-le-prix-renaudot-essai-2013-attribu%C3%A9-%C3%A0-gabriel-matzneff-pour-s%C3%A9raphin-c-est-la-fin

    A lire : http://www.slate.fr/culture/80167/matzneff :

    De même que nous nous étions émus, à Slate, de voir que Gabriel Matzneff, qui affiche clairement ses rapports sexuels avec des mineurs, parfois des enfants de moins de 10 ans, puisse recevoir le prix Renaudot essai (essai, pas roman), des pétitions se sont élevées pour lui voir retirer ce prix.

    L’écrivain en est mécontent.

    Il l’écrit dans Le Point – dont il est le collaborateur régulier, et dont le directeur, Franz-Olivier Giesbert, fait partie des jurés du prix Renaudot:

    «Juger un livre, un tableau, une sculpture, un film non sur sa beauté, sa force d'expression, mais sur sa moralité ou sa prétendue immoralité est déjà une spectaculaire connerie, nos amis italiens diraient una stronzata megagalattica, mais avoir en outre l'idée malsaine de rédiger ou de signer une pétition s'indignant du bel accueil que des gens de goût font à cette oeuvre, une pétition dont l'unique but est de faire du tort à l'écrivain, au peintre, au sculpteur, au cinéaste, est une pure dégueulasserie.»

    (Pour rappel, cet homme qui emploie les mots «idée malsaine» et «dégueulasserie», c’est le même qui écrit :

    «Les petits garçons de onze ou douze ans que je mets ici dans mon lit sont un piment rare.»)

    Il poursuit:

    «Les délateurs ont toujours existé, et sous l'occupation allemande les lettres de dénonciation s'entassaient sur les bureaux de la Gestapo ou de la Milice.»

    (Matzneff est friand des points Godwin).

    Et encore:

    «Ces misérables sycophantes ne sont pas tous idiots, ils savent aussi bien que moi qu'en art, et notamment en littérature, tout est sujet, qu'il n'y a pas de grands et de petits sujets, de sujets nobles et de sujets ignobles; qu'un écrivain, c'est une sensibilité modelée par une écriture, un univers soutenu par un style. Que l'art n'a rien à voir avec la morale, absolument rien. […] Ces zozos citent des extraits "scandaleux" de mes livres, toujours les mêmes, qu'ils ont sans doute dénichés sur Internet, mais je ne crois pas qu'ils aient mes livres dans leur bibliothèque; je crois qu'ils n'ont pas de bibliothèque, qu'ils n'aiment ni la beauté, ni la liberté, ni l'art. Ce qu'ils aiment, c'est haïr, c'est dénoncer, c'est ameuter les foules anonymes d'Internet contre un homme seul.

    J'ignore quelle tronche peuvent avoir ces brûleurs de livres. Je les imagine assez bien sous le trait du type qui a tiré au fusil sur un photographe de Libération […]»

    D’abord je voudrais rassurer Matzneff : j’ai une bibliothèque.


    Ça c'est celle de ma chambre.

    Ensuite je voudrais qu'il se souvienne de la différence entre délation et dénonciation.

    Outre le fait que dénoncer les juifs pendant la guerre, c'était les promettre aux camps de concentration et à la mort, et que dénoncer le Renaudot remis à Matzneff ne porte à aucune conséquence (on va dire que je pinaille, mais j'ai le sentiment que la distinction n'est pas si mince), il n'y a rien dans la dénonciation des écrits de Matzneff de secret, de caché, de sournois.

    Matzneff revendique ses goûts pour les enfants.

    Les pétitions s'en indignent.

    Les articles sur le sujet sont signés.

    Surtout, je voudrais comprendre cet argument selon lequel «l'art n'a rien à voir avec la morale».

    Qui dit le contraire aujourd’hui ?

    Qui dit qu’une œuvre, pour être belle, devrait être conforme à une idéologie ?

    Personne ne dit : Polanski a été accusé d’abus sexuel sur mineur, donc Le Pianiste est un film horrible.

    Cantat a été condamné pour homicide involontaire, ses chansons sont devenues affreuses.

    Mais ce n’est pas parce qu’un artiste écrit/chante/réalise des œuvres d’importance, que son rôle de citoyen en est diminué.

    Et que respecter la loi n’est pas impératif pour lui.

    On écrit parfaitement bien depuis les prisons françaises.

    Les éditeurs peuvent venir chercher des textes au parloir, rien ne les empêche de les publier.

    Les jurés littéraires ne sont pas obligés de les honorer.

    Céline, l’antisémite primé

    J’aime quand on brandit Céline comme argument :

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    Mais le Renaudot qui vient d’être attribué à Matzneff n’a rien à voir.

    Il récompense un livre, un essai, qui contient des passages odieux sur la pédophilie.

    Le Renaudot remis à Céline en 1932 pour Voyage au Bout de la Nuit ne couronnait pas un essai antisémite.

    Mais un roman, qui ne l’était pas.

    Et aucun doute n’existait sur l’idéologie de Céline, qui a été condamné par la justice française.

    Par ailleurs, mais c’est un autre problème, Céline est indispensable à la littérature française.

    Gabriel Matzneff ne l’est pas.

    La pédophilie, une question de point de vue

    Dans sa tribune du Point, Matzneff se plaint d’être cloué au pilori pour ses mœurs.

    Mais Matzneff n’est pas vilipendé pour ses mœurs, ni son «style de vie».

    La pédophilie n’est pas un style de vie.

    Comme nous le rappelions sur Slate : l'abus sexuel sur mineur comprend toute relation sexuelle entre un adulte et un mineur de quinze ans, que ce dernier se dise consentant ou non et que «la contrainte morale peut résulter de la différence d'âge existant entre une victime mineure et l'auteur des faits et de l'autorité de droit ou de fait que celui-ci exerce sur cette victime».

    Matzneff revendique ses actes pédophiles.

    Il ne s’agit pas, pour ses détracteurs, de faire preuve comme il le prétend de «ringardise venimeuse» en le lui reprochant.

    La ringardise est du côté de ceux qui croient que la pédophilie n’est pas si grave.

    Que les enfants restent ces «petits pervers polymorphes» décrits par Freud et qu’à ce titre, il n’y a pas d’âge pour leur mettre un pénis dans le cul.

    Mais si, il y en a un.

    Déterminé par la loi française, et non la morale populaire.

    C.P.

  • "La violence contre les femmes a des proportions épidémiques" (magazine Nature, USA)

    woman sitting a table holding her head down

    The first global survey of domestic violence reveals the staggering extent of the problem. Image: Susanne Borges/A.B./Corbis


    Violence against Women at Epidemic Proportions

    Multicountry analyses spotlight a dark problem

    Three in ten women worldwide have been punched, shoved, dragged, threatened with weapons, raped, or subjected to other violence from a current or former partner. Close to one in ten have been sexually assaulted by someone other than a partner. Of women who are murdered, more than one in three were killed by an intimate partner.

    These grim statistics come from the first global, systematic estimates of violence against women. Linked papers published today in The Lancet and Science assess, respectively, how often people are killed by their partners and how many women experience violence from them. And an associated report and guidelines from the World Health Organization (WHO) in Geneva, Switzerland, along with the London School of Hygiene and Tropical Medicine and the South African Medical Research Council in Pretoria, estimates how often women suffer sexual violence from someone other than a partner, gauge the impact of partner and non-partner violence on women’s health and advise health-care providers on how to support the victims.

    “These numbers should be a wake-up call. We want to highlight that this is a problem that occurs in all regions and it’s unacceptably high,” says Claudia García-Moreno, a physician at WHO who coordinates research on gender violence and worked on all the publications.

    According to the WHO report, 42% of women who experienced violence were physically injured by their partners. But violence harms women in ways beyond injury. Violent partners may prevent women from visiting health clinics or from accessing medicine or contraception. Women who experienced violence from a partner are more likely to be infected with HIV or other sexually transmitted diseases, to have an abortion, to give birth to underweight and premature babies, and to attempt suicide. They are also more likely to use alcohol and are twice as likely to experience depression — factors which can be both cause of and be caused by a partner's violence. In addition, the authors point out, raised stress levels are implicated in a range of health problems, including chronic pain, diabetes, heart disease and gastrointestinal disorders.

    Such figures mean that violence should be considered alongside 'mainstream' health risks such as smoking and alcohol use, says Kristin Dunkle, a social epidemiologist at Emory University in Atlanta, Georgia, who was not involved in the studies. “This is the moment where we say ‘no one is allowed to have their head in the sand, and no one is addressing women's health if they aren't addressing violence’.”

    On the scientific agenda

    The data came from a concerted effort over many years to develop and disseminate methods to measure gender-related violence, says Rachel Jewkes, head of the South African Medical Research Council in Pretoria. “By saying ‘we're going to measure it,’ we've put it on the scientific agenda.”

    As recently as 15 or 20 years ago, she says, governments generally considered domestic violence as something that was private and inevitable — something that governments could do little to address, she says. Having global figures puts violence on the radar of “global bodies that are looking for one number to show that violence is an issue”.

    To compile their estimates, each report combed through the peer-reviewed literature as well as the so-called 'grey literature', such as statistics and reports compiled by government agencies. To estimate the prevalence of violence against women across global regions and age ranges, for example, dozens of researchers searched more than 25,000 abstracts, says Karen Devries, a social epidemiologist at the London School of Hygiene and Tropical Medicine, who worked on the reports.

    Devries team sought studies that assessed the prevalence of violence across entire countries or large regions within them. They also performed or requested additional analyses of four large international surveys. In total, their estimates were based on data from 141 studies in 81 countries, with 80% of the estimates based on what are considered gold-standard methods — private one-on-one interviews in which women are asked about specific acts of violence, including slaps, kicks, use of weapons and rape over their lifetime.

    Global variation

    Studies were adjusted for differences in design and methodological quality. The highest rates of partner violence, estimated between 54% and 78%, were found in central sub-Saharan Africa, but even high-income regions in Asia, North America and western Europe had rates above 15%. These jump considerably when sexual non-partner violence is factored in.

    The studies still have gaps. For example, data about partner violence from central sub-Saharan Africa, East Asia, and southern Latin America, and for women over 49, were scarce. In addition, the studies did not assess emotional violence, and though estimates did not consider partners’ gender, most research studies solicited information only on male partners. In addition, many homicide reports do not include information about perpetrators’ relationships to their victims.

    Nonetheless, the data that have been pulled together will enable researchers to conduct cross-country and regional comparisons and help generate hypotheses about how social conditions and policies may influence prevalence, says Victoria Frye, a social epidemiologist at Columbia University in New York. “We really did not have that capacity previously.”

    And by establishing baseline figures for violence, governments and social researchers are better placed to develop and assess interventions, says Jewkes. “I want to see us in a situation where we are tracking the global decline of women being hit by partners and experiencing rape.”

    This article is reproduced with permission from the magazine Nature. The article was first published on June 20, 2013.

    http://www.scientificamerican.com/article.cfm?id=violence-against-women-at-epidemic-proportions&WT.mc_id=SA_WR_20130626

  • Rosen : "Je me suis autodétruite. Si j'avais continué, je serais morte".

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    Rosen a longtemps défendu l’idée d’un statut et cru en la nécessité de rouvrir des maisons closes.

    Aujourd’hui, elle se bat aux côtés du Mouvement du Nid pour la pénalisation des « clients ».

    Elle raconte son long cheminement et revient sur l’arme de destruction qu’est la prostitution, en particulier sur le plan de la santé.

    Retrouvez tous nos témoignages ici et le Tour de France de l’Abolition.

    La prostitution, je devais y rester trois semaines, un mois. Au bout de 22 ans, j’y étais toujours. Et toujours avec les mêmes problèmes financiers. Une chose est sûre, on finit rui- née. Ce qui m’a fait plonger, je ne sais pas : une dépression, la peur du porte-monnaie vide… on y entre, on ne se rend pas compte.

    Je parle en mon nom mais aussi au nom des jeunes femmes dans les salons et sur les trottoirs. Pendant 22 ans, j’ai vécu des agressions et des viols répétés. Quand on y est, on n’est pas consciente de la gravité de ce que l’on vit. La seule chose qui compte, c’est l’argent. Un jour après l’autre. On fait semblant d’aller bien, on montre quelque chose de soi qui n’est pas réel. Tout devient du mauvais théâtre, la vie avec les enfants, les amis, les clients. C’est violent.

    Il y a 22 ans, si la prévention avait existé, ces 22 ans n’auraient pas eu lieu. S’il y avait eu une loi, en 1988, pour interdire l’achat de service sexuel, ces 22 années n’auraient pas existé pour moi. 22 années de gâchis, que je ne pourrai jamais reconstruire. 22 années marquées « sans emploi ». Sans emploi et sans existence. Aujourd’hui, je demande aux éluEs de mettre en place une politique de prévention pour que les jeunes ne tombent pas là-dedans ; mais aussi des aides pour pouvoir en sortir et une formation des psys pour libérer la parole des femmes.

    Des clients prédateurs

    Le client est coupable. Il sait ce qu’il achète ; il consomme.

    Un homme qui achète une fellation dans une cave doit être condamné. Je demande que tout soit fait – et c’est urgent – pour protéger ces jeunes filles. Les clients, ils mentent, ils s’inventent un monde. La prostitution, c’est un gigantesque mensonge ; la prostituée ment, le client ment. L’ouvrier devient patron, le mari célibataire. On a envie de leur dire que ce sont des abrutis mais on est obligée de leur faire des compliments. De devoir supporter ces types, ça me prenait aux tripes. J’aurais pu en tuer un. Je me voyais avec un couteau.

    Tous repartent frustrés. La prostitution, c’est une frustration généralisée. Ils viennent chercher ce qu’ils ne pourront jamais trouver ; ce qui n’existe pas. Pour certains, c’est une forme d’addiction : il me les faut toutes, en payant ou pas, peu importe. Ça peut être une petite bonne femme de 55 ans, je me souviens d’une dans un bar qui travaillait plus que nous qui étions jeunes. Ça peut être une femme de 150 kilos. Ils ont le pouvoir d’humilier. Les clients sont tous des prédateurs.

    Une santé détruite

    Dans la prostitution, j’ai eu énormément de problèmes de santé. En 1990, j’ai fait un ulcère à l’estomac, grave, j’ai même été dans le coma. En 1995, j’ai eu de gros problèmes de vue. Je sentais que je dépérissais. Je prenais des médicaments. J’avais des aigreurs d’estomac à hurler, j’avalais des verres d’huile pour me calmer. Et la fatigue ! Les dernières années, j’aurais dormi vingt heures sur vingt quatre si j’avais pu. J’étais incapable de définir ce que j’avais : épuisement mental, douleurs… Pendant des années, j’ai cherché des causes médicales. Les médecins m’ont détecté une maladie orpheline. Et à un moment, j’ai même cru que j’avais un cancer.

    Quand j’ai pris la décision d’arrêter la prostitution, je ne tenais plus debout. J’étais arrivée à un tel point de fatigue que j’avais l’impression d’être en train de mourir. Et j’avais tout le temps faim : une fringale ingérable, incontrôlable. Quand je sortais de mon salon de massage, je voyais trouble. Je mettais des lunettes de soleil et je les gardais jusque dans mon lit !

    Et puis j’ai arrêté. Et j’ai mis des mois à réaliser. Je ne suis plus fatiguée. Je n’ai plus de douleurs à l’estomac, je n’ai plus envie de dormir. J’ai l’impression que mes yeux se sont rouverts tout grands. Avant, j’avais une masse qui pesait sur mes paupières. C’est un soulagement immense : comme si quelque chose en moi revivait. Et je n’ai plus aucune gêne avec ma maladie orpheline, au point que je commence même à la mettre en doute. Je pense que c’est moi qui ai créé tout ça. Mes yeux qui voyaient trouble, je pense que c’est parce que je ne voulais plus voir le monde.

    Avant, je me levais courbée ; c’est fini. Je me surprends tous les jours. Je n’arrivais même plus à me laver ; je n’avais plus de plaisir à rien. Faire le plein, les courses, tout était devenu surhumain. Infranchissable. Même mettre une paire de chaussures. Mon corps était épuisé, mon cerveau encore plus. Moi qui avais perdu toute énergie, je me retrouve. Je suis redevenue la femme que je n’étais plus. Maintenant, je fais des rapprochements. Je comprends que mon corps tirait le signal d’alarme. Mon médecin ne comprenait pas. En fait je me suis autodétruite. Si j’avais continué, je serais morte.

    C’est un processus subtil ; parce qu’il y avait aussi des douleurs qui avaient disparu et qui se réveillent. En 1996, j’avais eu un bras cassé dans un accident et j’en avais gardé une grave arthrose. Cette arthrose, je ne la sentais jamais. Pour se prostituer, il faut anesthé- sier son corps. Et j’avais anesthésié les douleurs réelles. On s’anesthésie tellement qu’on finit par s’endormir. C’est le début d’une mort.

    Arrêter, mais comment ?

    Pour m’en sortir, il m’a fallu des rencontres. Et puis il y a eu cette fatigue, ce ras le bol, ce burn out.

    J’ai publié un livre [1] et cela m’a permis de rencontrer beaucoup de gens. Certains étaient pour la prostitution, d’autres contre. J’ai pris tous ces mots et j’ai réfléchi. Je me suis posé la question : le conseillerais-tu à une autre femme ? La réponse était évidente. C’était non.

    Au moment où j’ai écrit ce livre [Où Rosen défend l’idée d’un cadre légal pour la prostitution « volontaire », ndlr] j’étais entourée de gens qui me disaient : tu n’emmerdes personne. C’est sûr, c’est moi que j’emmerdais ! Maintenant, je me rends compte que les gens qu’on fréquente, dans ce contexte, tirent tous plus ou moins profit de notre prostitution : clients, commerçants… donc, ils nous confortent dans notre situation.

    J’ai passé des nuits entières à réfléchir, à analyser. Et j’ai vécu tant de choses dans mon corps ! Dans la prostitution, on arrive à un stade où on ne pense plus. Est-ce parce que j’ai pris de la cortisone, mais j’ai été boostée, j’ai bien réfléchi et j’ai décidé d’arrêter tout : le traitement et la prostitution.

    Quand je relis ce que j’ai pu écrire avant, je me choque toute seule. Mais j’étais où ? Maintenant, je sais que c’était une étape et qu’elle était indispensable à ma guérison. Mais je sentais bien que quelque chose n’allait pas. Un jour, je me suis réveillée. Mais quand on se réveille, on a mal. Donc, on peut ne pas en avoir envie.

    Des appels au secours permanents

    Pendant toutes ces années, j’ai vu des psys, je suis allée aux Alcooliques Anonymes (je buvais pas mal). Mais je trouvais des excuses bidon, des faux problèmes parce que je ne pouvais pas dire que j’étais prostituée. En fait, je me rends compte maintenant que je lançais des appels au secours en permanence. Mais les réponses, les aides, on ne les obtient pas parce qu’on ne peut pas dire l’essentiel. Il n’y a personne pour les com- prendre, pour les déchiffrer.

    Mes réflexions ont duré en tout une huitaine d’années. Il aurait fallu que je sois entendue par les bonnes personnes. Mais ce n’était pas possible, à cause du tabou.

    Témoigner, et à visage découvert

    Aujourd’hui, je témoigne à visage découvert. Pour désarmer l’ennemi. Mais avant…
    Il fallait vivre avec l’idée : à un moment ou à un autre, mes enfants sauront. C’était invivable.

    Pour leur dire, j’ai utilisé les grands moyens : témoigner dans une émission de Jean-Luc Delarue sur les non-dits et les secrets de famille. J’avais accepté en me faisant violence mais il fallait que ma vie change. Je voulais me libérer, c’était trop lourd. J’ai donc prononcé ces mots, sur le plateau : je me prostitue. Après, je me suis passé le DVD en boucle pour m’écouter le dire. Bon, personne ne m’a donné de médaille, le cap a été dur à passer. Mais mes enfants ont compris. Les grands s’en doutaient, d’ailleurs. Et moi je n’avais plus à avoir peur ; cette peur affreuse qu’ils l’apprennent de quelqu’un. Je m’étais libérée, je pouvais passer à autre chose, ouvrir des cadenas.

    Mais j’avais pris des risques. J’ai des problèmes de retards de loyer, et j’ai été menacée d’expulsion par mon office de HLM. Des gens ont raconté que j’avais des activités de prostitution dans mon appartement, alors que je ne recevais jamais personne. C’est très dur à vivre. Je n’aurais jamais imaginé que les HLM allaient s’en servir pour tenter de me détruire. Tout est un combat. Et une personne du recouvrement à qui j’ai dit que j’avais été prostituée n’a rien trouvé d’autre à me répondre que : Mais alors, vous avez de l’argent ! Elle n’a rien compris. Si on avait de l’argent, on n’irait pas se prostituer. Aujourd’hui, je suis à la ramasse financièrement. Mais je n’y retournerai pas. C’est irréversible. Je réapprends à vivre. Je travaille, je suis contente de toucher un salaire. Je gagnais en deux jours ce que je gagne en deux semaines, je vis avec le minimum mais je suis en accord avec moi-même.

    Publié dans Prostitution et Société numéro 176.

    [1] Rosen, une prostituée témoigne. Pour une prostitution choisie, non subie, éd Bordessoules, 2009.

  • Des hommes féministes répondent aux "343 salauds"

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    En réponse au manifeste des « 343 salauds », des hommes partisans de la prostitution, Zéromacho a diffusé le texte (ci-dessous) « 1 881 hommes contre la prostitution », et en quelques heures le nombre de signataires de notre manifeste est passé à 1 928 !

    « En réponse à cette pétition, explique la dépêche de l’AFP, le collectif Zéromacho, qui revendique 1.881 hommes "engagés contre le système prostitueur", dénonce dans un communiqué des "ringards (qui) s'amusent à défendre une cause machiste perdue". »

    À l’approche du vote de la loi contre le système prostitueur à l’Assemblée nationale, le débat public s’est enflammé.

    Voici une revue de presse et de tweets dressée par Christine Le Doaré :


    Ci-dessous, quelques articles citant Zéromacho :

    http://www.femmeactuelle.fr/actu/news-actu/343-salauds-la-petition-provoc-pour-la-prostitution-16231

    http://www.humanite.fr/fil-rouge/tribune-343-salauds--343-reacs-sexistes-et-machistes-laurence-cohen--pcf

    (en anglais) http://www.abc.net.au/news/2013-10-31/french-prostitutes-prostitution-hookers-france-girls-whores/5059494

    et aussi un excellent texte sur le modèle suédois :

    http://www.slate.fr/tribune/78774/abolition-prostitution-suede-modele

    Vous trouverez bien d’autres liens sur le site http://www.abolition2012.fr/ , collectif groupant 55 associations engagées contre le système prostitueur et dont Zéromacho fait partie.

    Si vous avez besoin d’arguments dans les débats avec votre entourage, nous vous invitons à consulter l’argumentaire mis au point par Zéromacho, sur la page http://zeromacho.wordpress.com/textes/

    Cordialement,

    L’équipe de Zéromacho

    ***

    Communiqué de presse   30 octobre 2013

    Zéromacho, des hommes contre la prostitution et pour l’égalité femmes-hommes

    1 881 hommes contre la prostitution

    Des ringards s’amusent à défendre une cause machiste perdue.

    Dans le débat en cours sur l’abolition du système prostitueur, quelques hommes médiatisés ont l’indécence de singer le courageux combat des femmes pour le droit d'avorter (1971) en lançant une pétition intitulée « Les 343 salauds ».

    Qu'est-ce qui les pousse à faire de l’humour à propos de l'esclavage de millions de femmes, d'hommes et d'enfants ?

    Dans le sous-titre « Touche pas à ma pute ! », décalque ignoble du combat anti-raciste (1985), l’adjectif possessif traduit leur mépris pour les femmes dans la prostitution.

    Cette pétition réac prétend que la volonté d'abolir la prostitution serait « une guerre faite contre les hommes ».

    C’est tout le contraire : nous, Zéromachos, hommes engagés contre le système prostitueur, affirmons que le combat pour l'abolition de la prostitution est avant tout un combat pour l'Égalité.

    Cette lutte progressiste, à la suite de femmes courageuses et aussi d'hommes tels Zola, Hugo ou Jaurès, nous libère d'un diktat qui a amené des générations d’hommes à se comporter en « salauds ».

    Que certains se revendiquent encore de ce machisme ne les honore pas. Ils perpétuent ainsi des comportements dégradants et archaïques.

    Nous, Zéromachos, voulons un autre avenir ; nous exprimons notre désir de liberté et de plaisir sexuel pour les hommes et aussi pour les femmes, oubliées de la « libération sexuelle ».

    Aussi disons-nous à ces quelques hommes : « Vous voulez retourner à l’époque de l’esclavage ?  Pas nous ! »

    Car, avec des femmes et des hommes lucides, nous travaillons à l’avènement d’un monde sans esclavage, sans viol, sans prostitution.

    Pour que celle-ci disparaisse, il faudra du temps.

    À condition que les « salauds » pétitionnaires comprennent l’analyse de Françoise Héritier : « Dire que les femmes ont le droit de se vendre, c'est masquer que les hommes ont le droit de les acheter. »

    Nous répondrons aux « 343 salauds » par un spot vidéo qui montrera la violence des « clients » prostitueurs.

    Il sera mis en ligne le 7 novembre à minuit.

    Responsables : Gérard Biard, Patric Jean et Frédéric Robert

    Facebook : @Zéromacho  Twitter @Zeromacho

  • Tristes salops

    http://343connards.fr/images/thumbs/8.jpg

    Des têtes connues, de près ou de loin...

    Je m'étonne que certains, dans le lot, aient signé ce lamentable, honteux et grotesque torchon.

    J'ai choisi de mettre Caubère l'aficionado en photo : se délecter de la torture des uns et de l'esclavage des autres, rien que de très "normâle" décidément.

    Tristes salops.

    Tou-te-s derrière l'initiative http://343connards.fr/ !

    "Réponds à ton connard ! Alors clique !

    Nous offrons la possibilité d'une sorte de droit de réponse à ce qui entend s'instituer comme une offense permanente à la dignité des femmes, prostituées ou non.

    Nous nous révoltons de voir que des hommes usent de leur stature publique pour faire parler d'eux contre la cause des femmes et nous entendons leur montrer que, nous aussi, citoyens, citoyennes, nous avons le droit d'être entendus.

    Enfin, nous défendons le fait de pouvoir appeler connards ceux qui se sont eux-mêmes érigés en "salauds" sans pour autant faire appel à la haine.

    Lassés du machisme ordinaire chronique, nous avons décidé de ne plus le laisser passer.

    Dans les médias, dans la publicité, en politique.

    Ce site est une nouvelle pierre, il y en aura d'autres."

    http://www.huffingtonpost.fr/2013/10/31/manifeste-343-salauds-connards-repondre_n_4180491.html

  • Prostitution : les "salauds" de part et d'autre du Rhin ne sont pas les mêmes

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    Alors qu'un mensuel français ultra conservateur (Causeur), et parfois "border-line" publie "Touche pas à ma pute", un "manifeste des 343 salauds", un autre magazine, allemand celui-là (Emma), lance un appel de 90 personnalités pour l'abolition de la prostitution dans leur pays.

    Et cela, alors même qu'une proposition de loi vient d'être déposée au bureau de l'Assemblée nationale à Paris par quelques député(e)s de la majorité de gauche visant à pénaliser les clients des prostitué-es, tandis qu'en Allemagne, des Flatrate-Bordell (bordels à forfait) ouvrent tous les jours, dans ce pays où il s'agit d'une profession comme les autres, réglée et encadrée. 

    Les deux systèmes, la pénalisation des clients ou la réglementation de cette activité visent toutes deux, les un-es et les autres le jurent, à protéger les "professionnel-les de la profession", en particulier celles qui sont transformées en bêtes de somme, envoyées à l'abattage pour soulager les hommes après les autres.

    [...]

    Je voudrais juste que les filles de joie si peu joyeuses pour elles-mêmes, venues de l'Est ou du Sud, puissent être arrachées aux trottoirs de Barbès ou aux routes nationales d'une France si peu douce aux miséreuses.

    Je voudrais juste aussi que les hommes, en se revendiquant des quelques hôtesses de charme, libertines, bourgeoises esseulées ou curieuses, à la façon Bunuel de Belle de Jour, cessent de parler à la place de ces femmes-là, celles qui écartent les jambes, les fesses ou les mâchoires cinquante fois par jour, pour proclamer que "chacun a le droit de vendre librement ses charmes - et même d'aimer ça." 

    Et ils ajoutent : "Qu'il nous arrive ou pas de payer pour des relations charnelles, nous ne saurions sous aucun prétexte nous passer du consentement de nos partenaires".

    Et ils portent en étendard les prostituées (peu nombreuses) qui manifestent pour dire qu'elles sont "putes et fières de l'être".

    Et l'on ne voit alors que ce mot : consentement.

    Comment peuvent-ils réellement savoir si ces "partenaires" sont "consentantes" ?

    Alors qu'elles apprennent d'abord et avant tout à simuler et à faire l'article, comme une comédienne dans un film porno, ou encore tel le commerçant du coin qui vous expliquera que vous ne trouverez pas mieux et moins cher ailleurs.

    Ce texte se veut drôle, paraît-il.

    L'ironie est à la mode sur ce sujet.

    Dans le quotidien français Libération du 22 octobre, l'éditorialiste Luc Le Vaillant pensait être drôle en imaginant, dans une fiction intitulée "Najat, son gigolo et la pénalisation des client(e)s", Najat Vallaud Belkacem, ministre des Droits des femmes qui soutient la proposition de loi visant à pénaliser les clients des prostitué-e-s, "cédant aux sirènes d'un gigolo aux tarifs aussi gonflés que les biceps." Et cela afin que "le gouvernement PS cesse de faire assaut de puritanisme et que les projets de loi punisseurs des client(e)s de la prostitution regagnent le fond des tiroirs qu’ils n’auraient jamais dû quitter, et que les relations tarifées entre adultes consentants et autonomes puissent voir le jour dans des bordels d’Etat pour hommes et femmes."

    Il ne semble pas avoir fait rire beaucoup de personnes, en tout cas ni moi, ni Thalia Breton, (qu'il apostrophe "d'ancienne porte-parole de mes chères amies d’Osez le féminisme"), et qui lui a répondu une semaine plus tard, dans le même journal, par une autre imagination (lien payant) "Luc se prostitue" :

    "Quand Luc se lève le matin, il a mal aux jambes et aux mâchoires. Il a aussi mal à l'estomac, un peu tout le temps. Il a envie de dormir, d'oublier. (.../...) Luc ment pour faire croire aux clients qu'il a toujours envie, qu'il consent, qu'il est d'accord…" .

    Les mâles (mais aussi des femmes) adeptes des 'échanges commerciaux ainsi consentis entre adultes émancipés' peuvent compter sur des soutiens féminins éminents : Elisabeth Levy, directrice de la rédaction du Causeur, à l'origine du manifeste des 343 salauds, et Elisabeth Badinter (cela rapprocherait-il de s'appeler Elisabeth ?).

    L'appui enthousiaste de la première n'étonnera plus personne, intellectuelle passée de la gauche presque radicale au flirt avec le nationalisme façon Marine Le Pen.

    L'engagement de la deuxième laisse perplexe.

    Figure féministe éminente - et on se régala en son temps de sa biographie de l'une des premières scientifiques françaises, Emilie du Châtelet -, cette combattante du droit à l'avortement - ce droit même qui émergea grâce au manifeste des 343 (ces 343 courageuses qui reconnaissaient s'être fait avortées appelées ensuite salopes par Charlie Hebdo par provocation) publié en avril 1971, cinq ans avant la Loi Veil, le vrai manifeste celui-ci et pas cet avatar publicitaire , détourné façon hold-up par par Elisabeth Levy -, entend batailler pour la légalisation de la prostitution au nom du droit absolu des femmes à disposer de leur corps.

    Un droit qu'elle n'entend cependant pas défendre quand il s'agit de celui des musulmanes à se voiler la tête dans l'espace public français.

    Virage à 180° et franchissement du Rhin, nous voici à Cologne, au sommet d'une tour qui domine le fleuve si large à cet endroit.

    Alice Swhartzer continue de régner sur l'un des fleurons de la presse féministe initiée au mitan des années 70.

    Emma était alors un hebdomadaire qui tirait à des dizaines de milliers d'exemplaires et étendait son influence bien au delà des frontières allemandes.

    Le magazine survit vaille que vaille, sa périodicité est plus aléatoire (tous les deux mois), mais son écho bien plus fort que sa diffusion réelle, grâce aussi à la présence médiatique de sa directrice emblématique.

    Et donc, dans ce numéro du mois de novembre, ce ne sont pas 343 hommes, exclusivement blancs, qui signent un appel, mais 90 personnalités, femmes et hommes, des origines les plus diverses, à l'image de la multiplicité terrienne, qui réclament à leur gouvernement d'en finir avec la prostitution.

    L'Allemagne, comme sa voisine helvète, considère, depuis 2002, que vendre son corps pour un service sexuel est un métier comme un autre, inscrit au registre du commerce ou à celui du travailleur indépendant.

    Mais en mai 2013 l'hedomadaire Der Speigel consacrait, sous le titre "Le bordel allemand" un dossier à ce choix législatif pour en pointer toutes les défaillances, à commencer par la condition de ces dizaines de milliers de femmes venues principalement de l'Est pour alimenter les eros center.

    La députée qui avait promu cette organisation étatique de la prostitution est elle-même revenue sur sa décision (à lire en français ici).

    Les transactions, les prix, se négocient dans des boutiques éclairées pour les piétons, des parkings à sexe ou des centre commerciaux sur plusieurs étages, servez-vous, tous nos articles sont garantis…

    Les signataires notent que cette loi (de 2002) qui "était censée profiter aux quelque 700.000 prostituées recensées, a dans la réalité engraisser les trafiquants et leurs lobbyistes. Depuis lors, l'Allemagne est devenue la plaque tournante de l'Europe pour le trafic de femmes et un paradis pour les touristes sexuels en provenance des pays voisins."

    Et que proposent-ils pour sortir de cette indignité : "ostraciser, voire mettre à l'amende les clients potentiels, puisque sans eux, ce marché n'existerait pas."

    Nous soumettons donc aux futurs 343 salauds et leurs émules hexagonaux, les questions posées par nos 90 cousins germains, certainement bien trop coincés dans leur intimité aux yeux de nos flamboyantes lumières de la pensée et de la liberté :

    "La prostitution est " le plus vieux métier du monde » ? La prostitution est « un métier comme un autre » ? La prostitution existera toujours, parce que son abolition est utopique ? Faux. Aussi faux que lorsque l'abolition de l'esclavage était, il n'y a pas si longtemps encore, une utopie. Et même si l'esclavage n'a pas complètement disparu de notre monde, il serait impensable aujourd'hui dans tout Etat éclairé ou démocratique".

    On attend le retour des copies le plus rapidement possible...

    http://blogs.tv5.org/caravane/2013/10/les-salauds-de-part-et-dautre-du-rhin-ne-sont-pas-les-m%C3%AAmes.html

  • L'appel "Touche pas à ma pute" humilie les femmes (Anne Zelensky pour Le Monde)

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    « Touche pas à ma pute », tel est l'intitulé d'une pétition qui sera publiée dans Causeur de novembre. Elle est le porte-étendard du « Manifeste des 343 salauds ». Voilà un acte militant inédit : les hommes n'avouent pas aisément fréquenter les putes. Et se préoccupent plus d'utiliser ces dames que de les défendre.

    Mais ce manifeste va encore plus loin, et se réclame paradoxalement d'un autre manifeste célèbre : celui des « 343 salopes », publié en avril 1971 dans Le Nouvel Observateur, pour défendre la liberté d'avorter (« Je déclare avoir avorté »). Je suis, avec d'autres, à l'origine de ce manifeste. Une précision utile : nous n'avions pas choisi de nous appeler « salopes », ce qualificatif nous est venu du dehors, de Charlie Hebdo. Si on comprend bien, le terme de « salope » désignerait donc toute femme qui enfreint les règles de la bienséance féminine officielle, pute ou féministe.

    Dans le manifeste « Touche pas à ma pute », les signataires eux, ont choisi le terme de « salaud » par référence aux « salopes » de 1971. C'est là que je m'interroge. Quelle filiation peut-il bien y avoir entre nous, les « salopes » qui réclamions la liberté interdite de disposer de notre corps, et ces « salauds » qui réclament aujourd'hui la liberté de disposer contre rémunération et sans pénalité du corps de certaines femmes ? Dans le premier cas, il s'agit de lever une oppression, dans le second, de la reconduire. Et ce au nom du même concept : la liberté. Où est la faille ?

    Ce qui chiffonne mon sens de la logique en effet dans cette proclamation, ce n'est pas tellement qu'elle défende une forme de prostitution qui concerne une minorité de personnes, persuadées de l'avoir choisie. Ce n'est pas tellement qu'elle véhicule une contradiction majeure : elle met de côté la souffrance et l'humiliation de la majorité des « forçates » du sexe, tout en condamnant les réseaux proxénètes, qui en sont les pourvoyeurs.

    LIBERTÉ OU ASSERVISSEMENT ?

    Ce qui me chiffonne, c'est cette référence à la liberté. L'occasion est donnée une fois de plus de constater les dévoiements infligés à cette idée. Ce mot connaît depuis des décennies des accommodements qui reviennent à en faire le contraire de ce qu'elle est censée être. La doxa de notre temps s'incarne dans la trilogie : « liberté d'expression », sacralisée par la loi 1881 sur la liberté de la presse, le « touche pas à » (on est passé du pote à la pute) et le « c'est mon choix ». Le tout chapeauté par le credo : « Tout se vaut » (les arts, les cultures, les dominations) ou concept d'équivalence. Tels sont les piliers qui soutiennent l'édifice construit à la gloire de « ma » liberté. Qui ne connaît pas de limite.

    Et voilà comment la liberté de disposer de son corps, revendiquée dans le « Manifeste des 343 », se voit étendu à des pratiques -– liberté de se prostituer -– qui en constituent le contraire. Comment peut-on en effet revendiquer comme liberté ce qui en fait la bafoue ? La liste est longue dans l'histoire, de ceux et celles qui ont préféré leur esclavage à la liberté, tant sont fortes l'emprise du conditionnement et la fascination de la soumission. Des esclaves noirs affranchis qui ne voulaient pas quitter leur maître, à la fameuse héroïne d'Histoire d'O, qui consentait à être asservie, on n'en finirait pas d'énumérer les zélateurs de la « servitude volontaire ». Dans cette pétition « Touche pas à ma pute », par un tour de passe-passe pervers, la liberté est mise au service de la défense d'un esclavage de fait.

    Dans cette affaire de prostitution, personne n'est en fait libre : ni la pute ni le client. A part quelques rares exceptions, la majorité des personnes qui se prostituent le font par contrainte économique ou psychologique. Soyons sérieux : ce n'est pas une partie de plaisir d'ouvrir ses jambes à la demande, plusieurs fois par jour. Quant au client, il est pris dans un système de relation homme-femme, fondé sur le malentendu et la peur.

    Quoi de plus rassurant que le scénario prostitutionnel ? Tout y est prévu : il paye, elle exécute. Elle lui offre la satisfaction de ses fantasmes ; elle l'écoute ; elle ne le juge pas. La femme idéale en somme. Il peut régresser avec elle en toute innocence, larguer un moment tout ce qui le contraint à être un homme : les responsabilités, le sérieux, la maîtrise. Le pied, non ? Etre un homme n'est pas si facile, et on peut comprendre les délices de ce lâcher-prise. Qu'il soit inavouable est bien le signe qu'il est merveilleusement transgressif. Il faut en effet un certain goût de la provocation aux signataires du « Manifeste des salauds » pour reconnaître qu'ils vont chez les putes.

    Ce manifeste s'inscrit dans la guéguerre que se livrent les sexes. C'est la réponse du berger à la bergère. La revanche de certains hommes contre la libération des femmes passe sans doute par ce pied de nez. Tu as voulu être libre ? Eh bien, moi, ça ne m'empêchera pas d'aller chez les putes. Les femmes esclaves, j'aime. Au moins elles ne me demandent rien, elles me prennent comme je suis. Là est le hic. Le féminisme a introduit dans la bergerie des sexes le dangereux loup de la lucidité. Les femmes ne veulent plus faire semblant de prendre les hommes tels qu'ils sont, et elles en ont assez d'être prises pour ce qu'elles ne sont pas. Pouce ! Il faut inventer un autre jeu.

    Une proposition de loi visant à sanctionner par une amende les clients de prostituées et à abroger le délit de racolage public a été déposée le 14 octobre par le groupe socialiste de l'Assemblée et devrait être débattue fin novembre.

    http://abonnes.lemonde.fr/idees/article/2013/10/29/l-appel-touche-pas-a-ma-pute-humilie-les-femmes_3504547_3232.html

  • Abolition du système prostitueur : maintenant, la loi ! (pétition à signer)

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    Cette lettre a été écrite par le Collectif Féministe contre le Viol, le Collectif National Droits des femmes, la Fédération Nationale GAMS, Femmes Solidaires, le Mouvement du Nid, Osez le féminisme et Solidarité Femmes.

    Elle a été signée par plus de 100 associations féministes de nombreux départements. 

    Pour signer la lettre, cliquez ici.

    * * *

    Lettre ouverte à François Hollande de 111 associations locales et nationales luttant contre les violences faites aux femmes

    Monsieur le Président,

    Vous vous êtes exprimé à plusieurs reprises depuis votre élection pour affirmer votre volonté de tout mettre en œuvre pour lutter contre les violences faites aux femmes. Nos 111 associations, engagées partout en France pour faire reculer ces violences et soutenir les femmes victimes, vous appellent à transformer vos déclarations en actes.

    Fortes de nos expériences multiples, nous vous l’affirmons : il ne sera pas possible de faire reculer durablement les violences sexistes et sexuelles en France tant que nous tolèrerons que s’exerce en toute impunité l’une des plus insupportables d’entre elles : la prostitution.

    En ratifiant dès 1960 la Convention des Nations Unies du 2 décembre 1949 puis en adoptant en décembre 2011 une résolution parlementaire réaffirmant sa position abolitionniste, la France a solennellement affirmé que la prostitution constitue une atteinte majeure à la dignité de la personne humaine. Candidat à l’élection présidentielle de 2012, vous avez vous-même réaffirmé que la prostitution constitue non seulement une exploitation de toutes les précarités mais aussi une violence extrême, qui s’exerce en grande majorité sur les femmes les plus vulnérables.

    Des dizaines de milliers de personnes subissent chaque jour cette violence sans que les auteurs ne soient ni poursuivis, ni condamnés, ni même responsabilisés. Quel message envoyons-nous aux futurs citoyens et futures citoyennes de notre pays en tolérant que l’on puisse acheter le corps des femmes, exploiter leur situation de précarité sociale pour leur imposer un acte sexuel sans désir ?

    Nous ne vous demandons pas de faire disparaître du jour au lendemain un fait social qui existe depuis des millénaires. Il faut du temps et nous y travaillons. Votre responsabilité par contre est d’impulser un mouvement. Monsieur le Président nous attendons de vous que vous engagiez la France, ses citoyennes et ses citoyens dans une démarche de progrès inédite pour notre pays : celle d’affirmer que l’horizon de l’égalité est possible. Pour toutes et tous.

    Monsieur le Président, c’est un cri d’alerte que vous envoient nos associations.

    Nous travaillons sans relâche, avec des moyens insuffisants, pour prévenir, accueillir, accompagner, ou soigner, informer et former. Nous ne cessons de dénoncer toutes les violences : viol, harcèlement sexuel, violences conjugales, coups, insultes,  mariages forcés,  mutilations sexuelles, prostitution… . Si votre objectif, comme vous l’avez souvent affirmé, est d’en finir avec les violences sexistes et sexuelles, nous comptons sur vous pour faire en sorte que la France adopte une loi pour l’abolition du système prostitueur.

    Pour signer la lettre, cliquez ici.

    Associations signataires : Collectif Féministe contre le Viol, Collectif National Droits des femmes, Fédération Nationale GAMS, Femmes Solidaires, Mouvement du Nid, Osez le féminisme, Solidarité Femmes, Osez le féminisme Nice ! (06), Syndicat SUD Santé Sociaux Nice (06), Osez Le Féminisme Aube (10), SOLIDARITE FEMMES (10), Centre Evolutif Lilith (13), Forum Femmes Mediterranée (13), SOS FEMMES 13 (13), SOS VIOL (13), Osez le Féminisme! Calvados (14), Rupture (18), ZONTA CLUB de BOURGES (18), CPL (21), Mouvement Le CRI (21), Marche Mondiale des femmes.22 (22), Mouvement Le CRI (24), Bagdam Espace lesbien (31), Collectif Midi Pyrenéées des Droits des Femmes (31), Comité permanent de liaison assoc Abolitioinnistes (31), coordination de la Marche Mondiale des Femmes 31 (31), Femmes de Papier (31), Mouvement Le CRI (31), Osez le féminisme 31 (31), Zerose (31), Agir Contre les Violences Faites aux Femmes (33), Comité permanent de liaison assoc Abolitionnistes (33), Maison des Femmes de Bordeaux (33), mouvement le CRI (33), OSEZ LE FEMINISME 33 (33), SOLIDARITE FEMMES BASSIN (33), Osez le féminisme 34 (34), PSYC & GENRE (34), PSYC & GENRE (34), ZONTA CLUB de TOURS (37), Osez le féminisme 38! (38), femmes en détresse vignoble nantais (44), Mouvement Le CRI (47), Sortir du Silence (50), Osez le Féminisme 63 ! (63), Mouvement Le CRI (64), Osez le feminisme 67 (67), Mouvement Jeunes Femmes (69), Osez le Féminisme 69 (69), Regards de Femmes (69), Comité permanent de liaison assoc Abolitionnistes (71), Espace Femmes Geneviève D (74), Adéquations (75), Amicale du Nid (75), Assemblée des femmes (75), Centre National d’Information sur les Droits des Femmes et des Familles (75), Collectif de Pratiques et de Réflexions Féministes « Ruptures » (75), Coordination française pour le Lobby Européen des Femmes (75), Conseil National des Femmes Françaises (75), Elle’s IMAGINE’nt (75), Encore féministes ! (75), EQUIPES D’ACTION CONTRE LE PROXENETISME (75), Feminisme Enjeux théâtre de l’Opprimé (75), Femmes pour le dire, femmes pour agir (75), FIT, une femme, un toit (75), Fondation Scelles (75), Gender Company (75), Grand Chapitre Général Féminin de France (75), Halte aide aux femmes battues (75), Institut de Victimologie (75), Le Planning Familial Paris (75), Libres MarianneS (75), Marche Mondiale des Femmes (75), Mouvement jeunes femmes (75), Mouvement Le CRI (75), Mue Productions (75), Prévenance (75), Prévenance (75), Rajfire (75), Réseau Féministe « Ruptures » (75), resistances de femmes (75), Réussir l’égalité Femmes-Hommes (75), Zonta Club Paris III (75), Les efFRONTé-e-s (75), SOS Sexisme (75), Zonta 76 (76), zontarouen reine mathilde (76), Centre de Recherches Internationales et de Formation sur L’Inceste et la Pédocriminalité (78), Le Monde à Travers un Regard (78), ruptures (78), Mouvement Le CRI (79), FEMMES SOLIDAIRES de la Somme (80), Mouvement jeunes jemmes (81), Mouvement Le CRI (86), Centre d’Information sur les Droits des Femmes et des Familles de l’ Essonne (91), PAROLES de FEMMES (91), L’ESCALE (Solidarité Femmes) (92), Ligue du Droit International des Femmes (92), amicale du Nid 93 (93), Memoire Traumatique et Victimologie (94), Osez le féminisme ! (94), Comité permanent de liaison assoc Abolitionnistes (95), Du Côté Des Femmes (95), ASSOCIATION FEMMES 974 (97), Union des Femmes de la Martinique (97), Voix de Femmes (99), ZéroMacho (75)

    http://lettreouverteabolition.wordpress.com/2013/10/09/abolition-du-systeme-prostitueur-maintenant-la-loi/

  • Les carottes sont cuites pour l’industrie du sexe en Suède : voici pourquoi

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    Un article de Joan Smith pour The Independent.

    Lien sur l’article original : Why the game’s up for Sweden’s sex trade

    Traduction française de Martin Dufresne.

    Joan Smith

    « En Suède, des lois innovatrices en matière de prostitution criminalisent les prostitueurs et pas les prostituées. Le résultat: une baisse de 70 pour cent du chiffre d’affaires de l’industrie. Joan Smith a pris place à bord d’une voiture de patrouille de Stockholm pour savoir comment cela fonctionne – et si la Grande-Bretagne pourrait emboîter le pas. 

    Je suis assise à l’arrière d’une voiture de police banalisée sur la petite île de Skeppsholmen, juste à l’est du pittoresque Vieux-Stockholm. Nous sommes au pied du Musée d’art moderne de la ville, mais c’est une nuit sombre de février et nous ne sommes pas ici en quête de culture. «Ils se garent là-haut», me dit le détective assis sur la banquette avant, pointant du doigt un parking en haut de la colline. « Nous attendons quelques minutes, puis nous sortons de l’auto, grimpons la colline et ouvrons les portes. »

    Ce qui se passe ensuite est typique de la façon dont fonctionne en pratique la loi suédoise qui pénalise l’achat de sexe. Le conducteur de la voiture, qui a amené une femme prostituée sur l’île pour des relations sexuelles, est arrêté sur le champ. On lui laisse le choix : admettre l’infraction et payer une amende, proportionnelle à ses revenus, ou aller contester au tribunal et courir le risque d’être identifié publiquement. Quant à la femme, elle n’a violé aucune loi et se voit offrir l’aide des services sociaux si elle souhaite quitter la prostitution. Dans le cas contraire, elle est autorisée à repartir.

    « Acheter du sexe est l’un des crimes les plus honteux pour l’homme arrêté », explique le détective, Simon Haggstrom. Il est jeune, Noir, et son apparence – crâne rasé et jeans baggy – le fait plus ressembler à un cadre du monde de la musique qu’à un flic. Mais il est en charge de l’unité de la prostitution du Service de police du comté de Stockholm, et il est fier du fait qu’il a arrêté plus de 600 hommes en vertu de la loi suédoise: « Nous avons arrêté toutes sortes de gens, allant des toxicomanes aux politiciens. J’ai même déjà arrêté un prêtre, et il m’a dit que j’avais ruiné sa vie. Je lui ai répondu: « Ce n’est pas moi qui ai ruiné votre vie, mais vous-même. »

    La décision prise par la Suède de renverser des siècles de préjugés au sujet de la prostitution et de criminaliser les acheteurs de sexe a provoqué l’étonnement lorsque cette loi est entrée en vigueur en 1999. Alors que le débat faisait rage ailleurs à savoir si la prostitution devrait être légalisée, l’idée très simple du gouvernement suédois – on n’arrêtait pas les bonnes personnes – s’avérait nouvelle et controversée. La surintendante-détective Kajsa Wahlberg est rapporteure nationale pour la Suède sur la traite des êtres humains. Lorsque je la rencontre à son bureau de Stockholm, elle se remémore qu’un policier d’un autre pays a été jusqu’à accuser les Suédois de recourir à des « méthodes nazies ». Wahlberg reconnaît que de nombreux policiers suédois étaient également sceptiques. « Au début, il y avait de la frustration et de la colère au sein du service. On aurait cru qu’ils mâchaient des citrons », dit-elle avec un rire ironique.

    Tout cela a changé de façon spectaculaire depuis l’entrée en vigueur de la loi. « Le principal changement que je constate, en rétrospective, est le fait d’avoir obtenu l’adhésion des hommes », explique la surintendante Wahlberg. « C’est un problème sexospécifique. Des hommes achètent des femmes. L’un des facteurs-clés est la formation des agents de police. Quand ils et elles comprennent le contexte, le portrait devient clair. » Elle parle des diverses raisons qui amènent les femmes dans la prostitution, citant des recherches qui montrent souvent des antécédents d’abus sexuels dans l’enfance, aggravés par des problèmes de drogue et d’alcool.

    « Elles n’ont pas confiance en eux-mêmes. Elles ont été laissées de côté ou négligées et essaient d’obtenir toutes sortes d’attentions. On ne parle pas ici du choix d’une femme adulte. » Au cours des années 1990, le gouvernement suédois a graduellement accepté les arguments de groupes de femmes faisant valoir que la prostitution constituait un obstacle à l’égalité entre les sexes et une forme de violence contre les femmes.

    Ce qui est remarquable, c’est que l’opinion publique, hostile au départ, a viré bout pour bout et adopté ce point de vue ; aujourd’hui, 70 pour cent de la population est favorable à la nouvelle loi. « Nous avons changé la mentalité de la population suédoise », me dit Simon Haggstrom. Ce changement s’observe facilement parmi les vétérans de son unité.

    Un flic en civil, qui est policier depuis 37 ans, semble encore surpris quand il se souvient de ce qui s’est passé il y a 14 ans. « Quand la loi est entrée en vigueur, les rues se sont vidées pendant six mois », dit-il.

    Ces jours-ci, il est l’un des partisans les plus enthousiastes de la loi, ayant lui-même pu constater le déclin du nombre de femmes maintenues dans la prostitution de rue à Stockholm. Là où il y avait auparavant de 70 à 80 femmes qui vendaient du sexe à l’extérieur, de nos jours c’est entre cinq et 10 en hiver, et 25 en été. Quelques femmes font aussi les rues de Malmö et Göteborg, mais les statistiques suédoises demeurent bien inférieures à celles du Danemark, où la prostitution a été décriminalisée. Le Danemark ne compte qu’un peu plus de la moitié de la population suédoise, mais une recherche a indiqué que plus de 1 400 vendeuses de sexe se pressent dans les rues danoises.

    La loi a aussi apporté d’autres changements. Avant 1999, la plupart des femmes prostituées dans les rues de Stockholm étaient suédoises. Aujourd’hui, elles viennent des pays baltes ou d’Afrique, et ont déjà vendu du sexe dans d’autres pays aussi. Elles disent d’ailleurs aux policiers de l’unité du détective Haggstrom qu’elles sont beaucoup plus susceptibles d’être victimes de violences dans les pays où la prostitution a été légalisée.

    Les hommes suédois veulent des fellations et des coïts, rien de plus », me dit le flic en civil. «Ils savent qu’ils doivent bien se comporter ou ils peuvent être arrêtés. Ils se retiennent d’être violents. »

    C’est une observation fascinante parce que l’une des critiques adressées d’avance à la nouvelle loi était qu’elle allait rendre la prostitution plus dangereuse. Tous les policiers suédois à qui j’ai parlé m’ont bien dit qu’il s’agissait d’un mythe, tout comme l’idée que la prostitution allait devenir clandestine. « Si un acheteur de sexe peut trouver une femme prostituée dans un hôtel ou un appartement, la police peut le faire aussi », observe ironiquement Haggstrom.

    « Les proxénètes doivent annoncer », explique-t-il. Des agents ont été spécialement formés à surveiller l’internet et la police a également accès à des procédures d’écoute téléphonique, qui leur indique que les trafiquants ne considèrent plus la Suède comme un marché rentable. «Nous avons entendu sur écoute des proxénètes dire que la Suède ne les intéressait pas », continue Haggstrom. «Même s’ils échappent à l’arrestation, nous arrêtons leurs clients et leurs décisions ne sont fondées que sur les profits envisagés : c’est bien simple à comprendre. »

    Les statistiques sur la criminalité suédoise semblent étayer son argumentation. En 2011, seulement deux personnes ont été condamnées pour traite à des fins sexuelles et 11 autres pour proxénétisme lié à la traite. (Cette même année, 450 hommes ont été reconnus coupables et condamnés à une amende pour achat de sexe, y compris un certain nombre de touristes étrangers). En 2012, les chiffres ont été légèrement plus élevés: trois condamnations pour traite et 32 pour l’infraction connexe de proxénétisme. Mais 40 femmes, pour la plupart originaires de Roumanie, ont eu suffisamment confiance dans le système de justice pénale suédoise pour servir de témoins à charge contre les hommes qui les exploitaient.

    La législation suédoise pourrait-elle fonctionner dans d’autres pays? La Norvège et l’Islande ont toutes les deux adopté des lois interdisant l’achat de sexe, et le Royaume-Uni a amorcé certaines démarches en vue d’une éventuelle criminalisation des prostitueurs ; c’est déjà une infraction pénale que d’acheter du sexe à des personnes de moins de 18 ans ou à une adulte qui est exploitée par des proxénètes ou des trafiquants. Mais on compte encore très peu de condamnations, ce qui suggère que les policiers britanniques ne partagent pas les vigoureuses attitudes de leurs homologues suédois. Simon Haggstrom convient avec Kajsa Wahlberg que la loi à elle seule ne suffit pas: « Il vous faut des ressources pour l’appliquer. Il vous faut des agents qui sortent procéder à des arrestations. »

    Dans la voiture de patrouille, quelque chose arrive qui révèle la pleine mesure du changement de paradigme qui a touché les hommes et les femmes en Suède. Dans une rue brillamment éclairée, Haggstrom pointe du doigt deux femmes roumaines qui travaillent comme prostituées. Alors que je les imagine traverser le pont avec un parfait inconnu vers le triste parking de Skeppsholmen, Haggstrom se tourne vers moi et me dit à voix basse : « Avoir des relations sexuelles n’est pas un droit de la personne. ». »

    Source : Les carottes sont cuites pour l’industrie du sexe en Suède: voici pourquoi