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Humeurs - Page 23

  • Halte à l'esclavage sexuel ! (Taslima Nasreen pour Le Monde)

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    LE MONDE | 28.11.2013 à 09h32 • Mis à jour le 28.11.2013 à 14h57 |

    Taslima Nasreen (Ecrivaine)

    Pour moi, comme pour la plupart des féministes, la prostitution, c'est-à-dire l'esclavage sexuel, doit disparaître. Etonnamment, cette affirmation et mon soutien apporté à la loi qui en Suède pénalise les clients m'ont valu des critiques nombreuses et enflammées, notamment de libres-penseurs, d'athées, de laïques, d'humanistes et de rationalistes.

    Ces réactions, qui se drapent dans le choix et la liberté de la prostitution, m'oppressent. Je me demande combien de personnes, parmi ceux qui assurent que des femmes se prostituent par choix, encourageraient leurs filles bien-aimées à se prostituer. Les prostituées elles-mêmes ne le souhaitent pas à leurs filles. Elles rêvent désespérément de pouvoir les scolariser, pour qu'elles aient une éducation et un métier correct.

    SE NOURRIR ET NOURRIR LEURS ENFANTS

    Des chercheurs qui ont travaillé sur le sujet montrent que, pour la plupart des prostituées, cela n'a pas été un choix. Elles n'ont pas décidé de devenir prostituée plutôt que médecin, ingénieure ou avocate. Leur « choix » » est plus généralement celui de trouver suffisamment d'argent pour se nourrir et nourrir leurs enfants.

    Quand on les interroge, ces femmes répondent dans une proportion constante d'environ 90 % qu'elles souhaitent sortir immédiatement de la prostitution, mais cette décision ne leur appartient pas : elle appartient à leur proxénète, à leur mari, au propriétaire de leur logement, à leurs addictions, au ventre de leurs enfants.

    Une étude menée auprès des femmes se livrant à la prostitution de rue à Toronto (Canada) a ainsi établi qu'elles étaient près de 90 % à vouloir en sortir, sans y parvenir. Selon des travaux conduits dans cinq pays, 92 % des femmes, des hommes et des transgenres qui se prostituent souhaitaient bénéficier sans délai d'une aide pour en sortir. Face à tous ces êtres qui veulent en sortir, comment affirmer que se maintenir dans la prostitution relève d'un choix ?

    Certes, un petit nombre de femmes disent se prostituer par choix, mais surtout dans un contexte public, orchestré par l'industrie du sexe. Je serais très curieuse de savoir en quoi elles aiment ces viols quotidiens. Qui les pousse à penser que c'est un bon moyen de gagner de l'argent ?

    Chaque jour, des pères vendent leurs petites filles à des maisons de prostitution. Chaque jour, des petits amis, des maris, des voisins, des connaissances vendent des jeunes femmes à des maisons de prostitution. Chaque jour, des filles et des femmes pauvres tombent sous la coupe de réseaux d'exploitation sexuelle. Je me suis rendue dans des bordels, en Inde et en Suède. Dans le pays riche comme dans le pays en développement, j'y ai vu des êtres livrés à un sort terrible.

    DÉNONCER LES VIOLENCES

    Voilà pourquoi je soutiens la proposition de loi portée par Najat Vallaud-Belkacem visant à pénaliser les clients de la prostitution, tout comme j'ai soutenu la loi qui, en Suède, porte ses fruits en dissuadant le consommateur (la prostitution y a diminué de moitié), mais aussi en autorisant les prostituées à dénoncer les violences qui leur sont faites.

    Il est faux de dire que la pénalisation des clients conduira les prostituées à quitter la rue pour travailler depuis Internet et à s'exposer à des violences accrues. La violence de la prostitution n'a lieu ni sur Internet ni dans la rue, elle est dans le lit. Grâce à cette loi, une prostituée peut prendre un client, le laisser assumer ce risque, mais le dénoncer si elle change d'avis. Enfin un choix, un vrai, que ce type de législation offre aux victimes d'exploitation sexuelle.

    Traduit de l'anglais par Julie Marcot

  • "Refusons le puritarisme et la déraison" (Caroline Fourest - Le Monde)

    Le féminisme se démocratise. Il suffit de voir le nombre de personnes se disant féministes pour mieux soutenir le port du voile et la prostitution. La très grande vitalité de l'industrie mafieuse et la très grande générosité de l'économie qatarie ne peuvent, à elles seules, expliquer un tel engouement. Il existe de vraies divergences de points de vue entre différents féminismes, d'un sujet à l'autre.

    Le Strass (Syndicat du travail sexuel) ne voit aucune difficulté à militer pour le port du voile et la prostitution en même temps. Les réseaux de l'industrie du sexe diffusent volontiers une affiche appelant à un « 8 mars pour toutes », où l'héroïne arbore un sigle féministe dans la main et un voile sur la tête.

    UNE VISION DU DROIT DE CHOISIR

    En retour, les réseaux pro-islamistes et pro-voile soutiennent leurs camarades pro-putes. Au nom d'une vision du droit de choisir bien théorique, déconnectée de tout désir de transformation sociale. Comme si tous les choix se valaient, comme si le féminisme n'avait rien à dire sur les rapports de force pesant sur ces « vocations » de femmes. Au choix, être la vierge ou la prostituée. Si possible les deux.

    Pour les signataires de l'appel « Féministes, donc contre la pénalisation des clients », qui rassemble des proches des Indigènes de la République et Act-Up en passant par les Indivisibles, toute loi portant sur la sexualité est vécue comme répressive et non émancipatrice. Même s'il s'agit non pas d'enfermer des transsexuels ou des homosexuels… mais de dissuader des clients de les acheter.

    Bien sûr, la question de l'efficacité de la loi mérite d'être débattue. Ceux qui détestent la « morale sexuelle » et militent pour la prévention du sida soulignent légitimement le risque de pousser les prostituées à négocier leurs tarifs loin des regards et donc des travailleurs sociaux pouvant les aider à se « protéger ».

    Le risque étant de glorifier une prostitution de rue guère enviable et peu protectrice, et de passer à côté de l'essentiel : celles et ceux qui se prostituent aiment tellement leur « job » qu'ils refusent souvent de prendre soin de leur corps déshumanisé et peuvent à tout moment accepter d'être consommés sans capote.

    C'est la prostitution en soi qui détruit la majorité des prostituées. Il faudrait la légaliser, l'encourager ? La pénalisation du racolage passif, tout le monde au moins est d'accord dessus, était absurde. Une double peine idiote faisant porter le délit sur la personne qui se vend, à la fois victime et coupable. Le fait de pénaliser les clients a au moins le mérite de pénaliser celui qui achète. Mais surtout soyons clair, très peu de clients seront arrêtés s'ils ne sont pas dénoncés par les prostituées, qui disposeront d'une arme pour équilibrer le rapport de force.

    DES PROSTITUÉES EN DANGER

    Car c'est bien au moment de passer à l'acte et non au moment de négocier, dans la rue ou sur Internet, qu'une personne prostituée est en danger. Quand elle n'est pas victime de chantage, de violences et de séquestration de la part des réseaux qui l'exploitent. Un trafic d'êtres humains et des passes à la chaîne constituent l'essentiel de la prostitution. N'en déplaise à ceux qui confondent l'industrie du sexe avec l'industrie du luxe, version escort girl, les professions libérales et libres sont bien rares. La loi n'est pas faite pour elles, mais pour le prolétariat esclavagisé.

    De même que la loi sur les signes religieux à l'école publique n'est pas faite pour celles qui préfèrent faire passer leurs convictions religieuses avant l'instruction publique, mais pour toutes celles qui voudraient bien finir leurs études sans se faire traiter de salopes parce qu'elles vont à l'école sans voile.

    Bien des femmes choisissent de se voiler. Elisabeth Badinter ne pense pas pour autant que le voile soit un choix à soutenir en tant que féministe. En revanche, la pénalisation des clients équivaut, selon elle, à « une déclaration de haine » envers « la sexualité masculine ». Au nom d'une vision libertaire du féminisme, ou plutôt libérale, qui laisse entendre que la sexualité masculine se caractérise par son consumérisme.

    A l'opposé, des féministes d'inspiration plus anticapitalistes, comme Osez le féminisme, n'hésitent pas à se dire abolitionniste, et même anti-gestation pour autrui, par principe. Comme si les services liés au corps ne pouvaient jamais être monnayés sans porter atteinte à la dignité humaine.

    Le féminisme, décidément, épouse des priorités bien différentes selon qu'il soit libéral ou anticapitaliste, tiers-mondiste ou antitotalitaire. Il devrait tout de même se garder de verser dans le puritanisme absolu ou, à l'inverse, dans la déraison feignant de confondre l'oppression avec un choix éclairé. A moins de perdre son sens émancipateur, qui est un peu son cœur.

    Caroline Fourest (Essayiste et journaliste)

    http://abonnes.lemonde.fr/idees/article/2013/11/28/refusons-le-puritarisme-et-la-deraison_3521320_3232.html

  • "L’égalité passe par la pénalisation du client" (Christine Delphy, Françoise Héritier, Yvette Roudy - Le Monde)

    La simple cohérence veut qu'après le droit de cuissage et le harcèlement sexuel (accès sexuel obtenu par le pouvoir), après le viol (obtenu par la force), ce séculaire droit masculin conféré par l'argent, l'achat d'acte sexuel, soit à son tour remis en cause.

    Dès les années 1980, les études du sociologue suédois Sven Axel Mansson débusquaient, dans la prostitution, un système fortement conservateur, un « espace homosocial libéré des exigences égalitaires des femmes » « l'ordre ancien est restitué ». En 2004, la seule enquête nationale jamais menée en France mettait au jour un imaginaire sexuel souvent fondé sur la domination, la violence et la chosification de l'autre.

    « REMETTRE LES FEMMES À LEUR PLACE »

    Manifestations sportives, signatures de contrats, fins de soirée arrosées… Au nom d'une idée – datée – de la virilité, le client achète le pouvoir d'imposer son bon plaisir à des femmes qui se voient ainsi retirer le droit, pourtant chèrement conquis, de lui dire non. En se dédouanant d'un billet, il exprime son appartenance à un monde masculin traditionnel qui entend « remettre les femmes à leur place ».

    Ce qui le caractérise, c'est l'indifférence morale. « Quand je mange un bifteck, je ne me demande pas si la vache a souffert », dit l'un d'entre eux, interrogé sur le risque d'exploiter une victime de la traite. « Tu n'as que ça ? », lance un autre à la tenancière d'un bar à hôtesses. Le huis clos prostitutionnel est le lieu emblématique du mépris, voire de la haine des femmes, qui s'expriment sur les forums des sites d'« escort » où les commentaires rivalisent de sexisme et de racisme.

    Ce qu'achète le client prostitueur, c'est le droit d'échapper aux règles et aux responsabilités qui fondent la vie en société. Dans la prostitution, il trouve le dernier espace qui le protège du devoir de répondre de ses actes : un territoire d'exception où les violences et humiliations qu'il exerce sont frappées de nullité, au prétexte qu'il a payé. Il est pourtant, comme le montrent toutes les enquêtes, le premier auteur des violences subies par les personnes prostituées : insultes, agressions, viols et même meurtres. Et les travaux actuels montrent qu'il est à la source d'atteintes graves à leur santé physique et psychologique.

    Ces mises au jour progressives n'empêchent pas ce consommateur de plus en plus décomplexé de faire son marché dans un vivier de femmes dont les parcours sont marqués par la précarité, les violences, les proxénètes et les réseaux. Faut-il rappeler que le protocole de Palerme (Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée, 2000) comme la Convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains, dite de Varsovie (2005) demandent aux Etats de « décourager la demande » qui est à l'origine de la traite des êtres humains ? Ces textes invitent à adopter des mesures sociales, culturelles, éducatives, mais aussi législatives pour y parvenir.

    EXIGENCE DE COHÉRENCE

    Inévitablement, les résistances sont nombreuses. Pour s'opposer à la remise en cause de ce droit séculaire sont invoqués les risques de clandestinité (l'aveu même de la dangerosité du tête-à-tête avec le client !) ou encore le pragmatisme.

    Pénaliser les clients n'obéit pas à un goût pour la répression, mais à une exigence de cohérence. Comment se satisfaire du statu quo ? Des personnes prostituées considérées comme des délinquantes, des clients comme des innocents, des étrangères exposées à la menace de l'expulsion quand il faudrait les protéger des réseaux qui les exploitent…

    Comment avancer dans la prévention de la prostitution et la création d'alternatives si aucune sanction ne vient responsabiliser ceux qui en sont les moteurs ? A quoi bon multiplier les incantations sur la lutte contre les violences ou l'égalité entre les filles et les garçons, si le droit de les fouler au pied reste préservé dans la prostitution ?

    Seule une politique courageuse pourrait faire reculer cet archaïsme indigne de nos démocraties et libérer la sexualité, non seulement de l'ordre moral et de la violence, mais aussi du carcan du marché. Cette révolution culturelle permettrait de mesurer enfin la volonté des hommes de considérer les femmes comme des égales, de leur reconnaître des désirs, le même droit qu'eux au plaisir et une place à égalité dans la société.

    Christine Delphy (Sociologue)
    Françoise Héritier (Anthropologue)
    Yvette Roudy (Ancienne ministre des droits des femmes)

    Cette tribune est également signée par:

    Olympia Alberti, écrivaine ; Eva Darlan, comédienne, écrivaine ; Claudine Legardinier, auteure, en collaboration avec Saïd Bouamama, du livre " Les Clients de la prostitution, l'enquête " (Presses de la Renaissance, 2006) ; Florence Montreynaud, historienne ; Coline Serreau, cinéaste

    http://abonnes.lemonde.fr/idees/article/2013/11/28/l-egalite-passe-par-la-penalisation-du-client_3521324_3232.html

  • "Halte à l'esclavage sexuel ! Mettons à l'abri les victimes" (Taslima Nasreen - Le Monde)

    Pour moi, comme pour la plupart des féministes, la prostitution, c'est-à-dire l'esclavage sexuel, doit disparaître. Etonnamment, cette affirmation et mon soutien apporté à la loi qui en Suède pénalise les clients m'ont valu des critiques nombreuses et enflammées, notamment de libres-penseurs, d'athées, de laïques, d'humanistes et de rationalistes.

    Ces réactions, qui se drapent dans le choix et la liberté de la prostitution, m'oppressent. Je me demande combien de personnes, parmi ceux qui assurent que des femmes se prostituent par choix, encourageraient leurs filles bien-aimées à se prostituer. Les prostituées elles-mêmes ne le souhaitent pas à leurs filles. Elles rêvent désespérément de pouvoir les scolariser, pour qu'elles aient une éducation et un métier correct.

    SE NOURRIR ET NOURRIR LEURS ENFANTS

    Des chercheurs qui ont travaillé sur le sujet montrent que, pour la plupart des prostituées, cela n'a pas été un choix. Elles n'ont pas décidé de devenir prostituée plutôt que médecin, ingénieure ou avocate. Leur « choix » » est plus généralement celui de trouver suffisamment d'argent pour se nourrir et nourrir leurs enfants.

    Quand on les interroge, ces femmes répondent dans une proportion constante d'environ 90 % qu'elles souhaitent sortir immédiatement de la prostitution, mais cette décision ne leur appartient pas : elle appartient à leur proxénète, à leur mari, au propriétaire de leur logement, à leurs addictions, au ventre de leurs enfants.

    Une étude menée auprès des femmes se livrant à la prostitution de rue à Toronto (Canada) a ainsi établi qu'elles étaient près de 90 % à vouloir en sortir, sans y parvenir. Selon des travaux conduits dans cinq pays, 92 % des femmes, des hommes et des transgenres qui se prostituent souhaitaient bénéficier sans délai d'une aide pour en sortir. Face à tous ces êtres qui veulent en sortir, comment affirmer que se maintenir dans la prostitution relève d'un choix ?

    Certes, un petit nombre de femmes disent se prostituer par choix, mais surtout dans un contexte public, orchestré par l'industrie du sexe. Je serais très curieuse de savoir en quoi elles aiment ces viols quotidiens. Qui les pousse à penser que c'est un bon moyen de gagner de l'argent ?

    Chaque jour, des pères vendent leurs petites filles à des maisons de prostitution. Chaque jour, des petits amis, des maris, des voisins, des connaissances vendent des jeunes femmes à des maisons de prostitution. Chaque jour, des filles et des femmes pauvres tombent sous la coupe de réseaux d'exploitation sexuelle. Je me suis rendue dans des bordels, en Inde et en Suède. Dans le pays riche comme dans le pays en développement, j'y ai vu des êtres livrés à un sort terrible.

    DÉNONCER LES VIOLENCES

    Voilà pourquoi je soutiens la proposition de loi portée par Najat Vallaud-Belkacem visant à pénaliser les clients de la prostitution, tout comme j'ai soutenu la loi qui, en Suède, porte ses fruits en dissuadant le consommateur (la prostitution y a diminué de moitié), mais aussi en autorisant les prostituées à dénoncer les violences qui leur sont faites.

    Il est faux de dire que la pénalisation des clients conduira les prostituées à quitter la rue pour travailler depuis Internet et à s'exposer à des violences accrues. La violence de la prostitution n'a lieu ni sur Internet ni dans la rue, elle est dans le lit. Grâce à cette loi, une prostituée peut prendre un client, le laisser assumer ce risque, mais le dénoncer si elle change d'avis. Enfin un choix, un vrai, que ce type de législation offre aux victimes d'exploitation sexuelle.

    Traduit de l'anglais par Julie Marcot

    Taslima Nasreen (Ecrivain)

    http://abonnes.lemonde.fr/idees/article/2013/11/28/halte-a-l-esclavage-sexuel_3521323_3232.html

  • Demain 29/11, rassemblement à Paris pour l'abolition de la prostitution

    Demain après-midi sera enfin examiné le projet de loi d'abolition du système prostitueur en séance plénière de l'Assemblée Nationale.

    Venez nombreuses et nombreux demain midi, sur votre pause déjeuner, pour montrer notre détermination aux député-e-s!

    Ce rassemblement est important car il permettra de montrer aux principaux concernés que l'abolition de la prostitution est un projet de société porté par ce nombreuses et nombreux citoyen-nes.

    Nous votons
    « Abolition de la prostitution » 

     
       RASSEMBLEMENT 
     
    Vendredi 29 novembre
     
    12h30 à 13h30
     
    Place Edouard Hériot - Métro Solférino
  • L’égalité passe par la pénalisation du client (Le Monde)

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    LE MONDE | 28.11.2013 à 09h19 • Mis à jour le 28.11.2013 à 10h09 |

    Christine Delphy (Sociologue), Françoise Héritier (Anthropologue) et Yvette Roudy (Ancienne ministre des droits des femmes)

    La simple cohérence veut qu'après le droit de cuissage et le harcèlement sexuel (accès sexuel obtenu par le pouvoir), après le viol (obtenu par la force), ce séculaire droit masculin conféré par l'argent, l'achat d'acte sexuel, soit à son tour remis en cause.

    Dès les années 1980, les études du sociologue suédois Sven Axel Mansson débusquaient, dans la prostitution, un système fortement conservateur, un « espace homosocial libéré des exigences égalitaires des femmes » « l'ordre ancien est restitué ». En 2004, la seule enquête nationale jamais menée en France mettait au jour un imaginaire sexuel souvent fondé sur la domination, la violence et la chosification de l'autre.

    « REMETTRE LES FEMMES À LEUR PLACE »

    Manifestations sportives, signatures de contrats, fins de soirée arrosées… Au nom d'une idée – datée – de la virilité, le client achète le pouvoir d'imposer son bon plaisir à des femmes qui se voient ainsi retirer le droit, pourtant chèrement conquis, de lui dire non. En se dédouanant d'un billet, il exprime son appartenance à un monde masculin traditionnel qui entend « remettre les femmes à leur place ».

    Ce qui le caractérise, c'est l'indifférence morale. « Quand je mange un bifteck, je ne me demande pas si la vache a souffert », dit l'un d'entre eux, interrogé sur le risque d'exploiter une victime de la traite. « Tu n'as que ça ? », lance un autre à la tenancière d'un bar à hôtesses. Le huis clos prostitutionnel est le lieu emblématique du mépris, voire de la haine des femmes, qui s'expriment sur les forums des sites d'« escort » où les commentaires rivalisent de sexisme et de racisme.

    Ce qu'achète le client prostitueur, c'est le droit d'échapper aux règles et aux responsabilités qui fondent la vie en société. Dans la prostitution, il trouve le dernier espace qui le protège du devoir de répondre de ses actes : un territoire d'exception où les violences et humiliations qu'il exerce sont frappées de nullité, au prétexte qu'il a payé. Il est pourtant, comme le montrent toutes les enquêtes, le premier auteur des violences subies par les personnes prostituées : insultes, agressions, viols et même meurtres. Et les travaux actuels montrent qu'il est à la source d'atteintes graves à leur santé physique et psychologique.

    Ces mises au jour progressives n'empêchent pas ce consommateur de plus en plus décomplexé de faire son marché dans un vivier de femmes dont les parcours sont marqués par la précarité, les violences, les proxénètes et les réseaux. Faut-il rappeler que le protocole de Palerme (Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée, 2000) comme la Convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains, dite de Varsovie (2005) demandent aux Etats de « décourager la demande » qui est à l'origine de la traite des êtres humains ? Ces textes invitent à adopter des mesures sociales, culturelles, éducatives, mais aussi législatives pour y parvenir.

    EXIGENCE DE COHÉRENCE

    Inévitablement, les résistances sont nombreuses. Pour s'opposer à la remise en cause de ce droit séculaire sont invoqués les risques de clandestinité (l'aveu même de la dangerosité du tête-à-tête avec le client !) ou encore le pragmatisme.

    Pénaliser les clients n'obéit pas à un goût pour la répression, mais à une exigence de cohérence. Comment se satisfaire du statu quo ? Des personnes prostituées considérées comme des délinquantes, des clients comme des innocents, des étrangères exposées à la menace de l'expulsion quand il faudrait les protéger des réseaux qui les exploitent…

    Comment avancer dans la prévention de la prostitution et la création d'alternatives si aucune sanction ne vient responsabiliser ceux qui en sont les moteurs ? A quoi bon multiplier les incantations sur la lutte contre les violences ou l'égalité entre les filles et les garçons, si le droit de les fouler au pied reste préservé dans la prostitution ?

    Seule une politique courageuse pourrait faire reculer cet archaïsme indigne de nos démocraties et libérer la sexualité, non seulement de l'ordre moral et de la violence, mais aussi du carcan du marché. Cette révolution culturelle permettrait de mesurer enfin la volonté des hommes de considérer les femmes comme des égales, de leur reconnaître des désirs, le même droit qu'eux au plaisir et une place à égalité dans la société.

     Cette tribune est également signée par

    Olympia Alberti, écrivaine ; Eva Darlan, comédienne, écrivaine ; Claudine Legardinier, auteure, en collaboration avec Saïd Bouamama, du livre " Les Clients de la prostitution, l'enquête " (Presses de la Renaissance, 2006) ; Florence Montreynaud, historienne ; Coline Serreau, cinéaste.

    http://abonnes.lemonde.fr/idees/article/2013/11/28/l-egalite-passe-par-la-penalisation-du-client_3521324_3232.html?xtmc=le_monde_violence_femmes&xtcr=2

  • A propos de la pétition de 30 Millions d'Amis "Pour un nouveau STATUT JURIDIQUE de l'animal"

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    Commençons par donner l'exemple nous-mêmes : si nous "aimons" les animaux, si vraiment nous les respectons, si réellement nous ne les prenons pas pour des meubles mais comme des êtres sentients, alors cela suppose précisément de les reconnaître pour ce qu'ils sont : des personnes pourvues de droits fondamentaux en vertu de cette sentience même, et qui n'ont pas à être utilisées de quelque manière que ce soit pour satisfaire nos propres fins.

    Ne pas utiliser autrui, cela signifie ne consommer AUCUN produit d'origine animale.

    Le traitement n'est pas le problème : c'est l'utilisation qui l'est.

    DEVENONS VEGANS.

    Si nous ne sommes pas végans, inutile de signer cette pétition, qui émane elle-même - c'est un comble d'hypocrisie - de non-végans :

    http://www.30millionsdamis.fr/agir-pour-les-animaux/petitions/signer-petition/pour-un-nouveau-statut-juridique-de-lanimal-22.html

  • L'"élite" française

    Jocelyn Mafféis, élève à l'Ecole des mines de Paris, est mort quelques jours après sa première rentrée.
    Hommage à Jocelyn Mafféis

    Mourir aux Mines

    LE MONDE | 22.11.2013 à 17h41 • Mis à jour le 24.11.2013 à 10h43 | Par Nathalie Brafman et Pascale Krémer

    Les cours avaient à peine commencé. Mercredi 18 septembre, dix jours seulement après sa rentrée en première année à l'Ecole des mines de Paris, et quelques heures avant un départ en week-end d'intégration qu'il appréhendait, Jocelyn Mafféis, 19 ans, est tombé du septième étage de la résidence étudiante de cette école. Il est mort six jours plus tard à l'hôpital.

    Etait-ce un suicide, un accident ? Après enquête préliminaire, l'affaire a été classée sans suite par le parquet le 25 octobre, pour absence d'infraction. Ses parents, qui veulent comprendre, envisagent de porter plainte contre X. Ils dénoncent la légèreté de l'enquête menée par le commissariat du 5e arrondissement parisien. Le téléphone portable et la clé USB de Jocelyn leur ont été rendus au lendemain de sa chute sans aucune analyse. Ils ont eux-mêmes récupéré l'ordinateur dans la chambre d'étudiant. « On ne sait rien de ses dernières connexions Internet, regrettent-ils. L'analyse de sang s'est limitée à une recherche d'alcoolémie. Et le policier chargé de l'enquête a découvert, en nous le rendant, le contenu du sac de Jocelyn. » A l'intérieur, ses lunettes, qu'une myopie profonde l'obligeait à porter constamment, étaient cassées.

    Qui résoudra, par ailleurs, le mystère des fenêtres de la Maison des Mines et des Ponts ? Selon la direction de l'école, ces larges ouvertures en PVC, dangereuses car placées à mi-hauteur dans l'escalier, sont fermées, poignées ôtées. Comment Jocelyn Mafféis a-t-il pu, alors, se jeter ou tomber de l'une d'elles ? Aucun élève n'a, semble-t-il, été témoin de la scène. « Peut-être Jocelyn a-t-il forcé une fenêtre ? », suppute le directeur adjoint de l'école, Jérôme Adnot. A mains nues, pourtant, la manoeuvre semble très difficile. A moins que « quelqu'un d'autre ne l'ait ouverte ?, poursuit Jérôme Adnot. Le personnel aère à certaines heures… ».

    S'ils doutent de la thèse du suicide et malgré l'absence d'alcool dans le sang de Jocelyn ce jour-là, ses parents n'en dénoncent pas moins le contexte de bizutage et d'alcoolisation qui pourrait avoir conduit au drame. Le soir de son installation à la Maison des Mines, le 8 septembre, Jocelyn Mafféis participe à une soirée « Petit Pont » organisée par le bureau des élèves (BDE) dans un restaurant du quartier Saint-Michel. Soirée à laquelle il eût été malvenu de ne pas paraître. Dès la fin du mois d'août, il avait reçu moult mails insistants du président du BDE, Paul le Floch. « C'est ton premier pas dans le monde de la Mine, alors sois présent (et en forme). »

    UN BROC ENTIER DE PUNCH !

    Jocelyn Mafféis, qui boit rarement, subit la pression du groupe. Peu avant minuit, il adresse ce SMS à sa mère : « Il y a beaucoup d'alcool mais ne t'inquiète pas, je suis encore à peu près conscient. » « On nous remplissait le verre dès qu'il était fini, se souvient un camarade de promotion . Il est tout à fait possible qu'il se soit senti obligé de boire. » Quand l'une des tables réunissant des premières années ne montrait pas assez de zèle, relate Jocelyn à ses parents le week-end suivant, la sanction tombait : et un bizuth de désigné pour boire un broc entier de punch ! Jocelyn Mafféis en fait les frais. Expérience qu'il assure ne pas vouloir revivre, quitte à se marginaliser. « Il pensait qu'au fil du temps cela s'arrangerait, témoigne sa mère. Mais je l'ai senti un peu déçu par l'école, et inquiet. »

    Car il sait qu'il sera malaisé de résister. Remise à tous les admissibles, la brochure « Abatage 2013 », conçue par le BDE avec le concours de l'école, annonce clairement la couleur, décrivant la campagne 2012 du BDE, « 89,5 litres de vodka écoulés le dimanche soir », et la « Fosse aux ours », sous-sol de la Maison des Mines, où est installé un bar, L'Octo, géré par le BDE, qui sert bière, pastis et whisky « pour t'abreuver jusqu'à plus soif », « à un prix défiant toute concurrence ». L'Octo dispose-t-il d'une licence IV ? Le directeur de la résidence, Jean-Pascal Guilpart, et son président, délégué général de la Fondation Mines-ParisTech, Antoine Battistelli, disent n'en rien savoir. Sur les murs du bar, en tout cas, rien n'est affiché.

    Après le « Petit Pont », deux autres soirées sont prévues, tout aussi « strictement incontournables », selon le BDE, pour devenir de vrais Mineurs. Jeudi 12 septembre, en boîte de nuit. Lundi 16 septembre, à la « Fosse aux ours », où, « dans une ambiance jungle, il te faudra réveiller l'animal qui sommeille en toi ». Jocelyn Mafféis décide de ne pas y aller. Avant cela, il a déjà renoncé, le 10 septembre, à la première « soirée Biéro » de L'Octo (tous les mardis, des litres de bière y sont éclusés, à 2 euros la pinte) et, le 11 septembre, au cocktail avec champagne à volonté de L'Oréal, venu présenter ses métiers aux Mineurs.

    A cette énumération, Jérôme Adnot s'agace. « Si vous me dites qu'il y a présence d'alcool à la Maison des Mines, je vous dis oui. Il doit même y avoir de la drogue. » Mais le directeur adjoint de l'école réfute un lien avec la mort de Jocelyn Mafféis, et juge même « inacceptable » de laisser penser qu'on ait pu le forcer à boire. « Dans ces soirées, la moitié des filles et 20 % des garçons ne boivent pas… »

    Dans la nuit suivant sa chute du 7e étage de la Maison des Mines, Jocelyn Mafféis devait partir pour quatre jours en week-end d'intégration, sous la coupe du BDE – quoique avec une surveillance de l'école. Un mail l'avait averti : « Un week-end dont vous ne vous souviendrez pas, mais que vous n'oublierez jamais. » « Cela ne l'emballait pas du tout », se souvient sa mère. Il le redoutait, même, a confié à la police son compagnon de chambrée. Au retour suivrait le stage de géologie de deux semaines, où, le soir, « tu navigues de bar en bar perdu au fin fond des Alpes », selon la brochure du BDE. Puis deux semaines de « parrainage » avec « une liste de défis tous plus barrés les uns que les autres ».

    « Des beuveries à n'en plus finir, avec vomis dans la chambre, déguisements, bains dans les fontaines publiques, tout cela s'appelle du bizutage », rappelle Marie-France Henry, présidente du Comité national contre le bizutage, avec laquelle les parents de Jocelyn Mafféis ont pris contact. Pratique désormais interdite. Depuis la loi du 17 juin 1998, le « fait, pour une personne, d'amener autrui, contre son gré ou non, à subir ou à commettre des actes humiliants ou dégradants lors de manifestations, ou de réunions liées aux milieux scolaires et socio-éducatifs » est puni de six mois de prison et de 7 500 euros d'amende. Depuis cette loi, le terme bizutage a disparu du vocabulaire. Désormais, on parle d'« intégration ». Dans certaines écoles, des chartes de bonne conduite ont été mises en place, dans d'autres, l'alcool a été banni pour éviter les dérapages. Mais des excès perdurent. Marie-France Henry s'interroge. « Jocelyn a-t-il ressenti une overdose de tout cela ? Il est fréquent que des jeunes gens avec de vraies valeurs, qui ont tant travaillé pour intégrer une école, ressentent dans ces moments une grande déception, et en soient fragilisés. »

    S'il s'est suicidé, Jocelyn Mafféis ne l'avait pas prémédité. Il avait acheté la chemise à carreaux requise pour le week-end d'intégration. Prévu d'assurer le samedi 12 octobre une permanence à son club de go. Le matin de sa chute, il avait même promis à un camarade de l'y emmener plus tard. « Il s'était inscrit au club de basket et de littérature, voulait développer la pratique du jeu de go à l'école. Le matin même, il faisait preuve d'un esprit travailleur en réussissant son test d'informatique, note le directeur adjoint. Inexplicable… »

    UNE RÉFÉRENCE, QUELQU'UN DE SOLIDE...

    Extrêmement brillant mais partageur de ses savoirs, et soucieux de préserver ses loisirs du week-end au plus fort de l'année de math spé, dans la classe « double étoile » des élèves les plus prometteurs. D'abord réservé mais ensuite liant, affable, aimant plaisanter. Une référence, quelqu'un de solide, optimiste, sûr de ses valeurs humanistes… Voilà le portrait que dressent de lui son professeur de mathématiques du très prestigieux lycée Louis-le-Grand à Paris (« Je n'ai jamais identifié chez lui une quelconque forme de fragilité psychologique, ce qui n'est pas le cas de tous les élèves »), la proviseure de son ancien lycée Marie-Curie de Sceaux, ainsi que ses nombreux camarades.

    « Cuit », comme tout le monde après ses deux années de classes préparatoires et les interminables concours d'entrée en école d'ingénieurs, Jocelyn Mafféis avait ensuite passé des vacances sereines, selon ses parents. Il regrettait d'avoir échoué au concours d'entrée à l'Ecole normale supérieure. Appréciait néanmoins à sa juste valeur son arrivée dans une autre école de haut niveau. « Mais il avait lu les mails, vu des vidéos sur l'intégration aux Mines, indique sa mère. Nous avons le sentiment qu'il était pris dans un vrai dilemme. Faire, ou non, ce qu'il réprouvait, pour s'intégrer. » Le suicide lui a-t-il permis d'échapper à ce dilemme ?

    Au milieu de la nuit du 18 au 19 septembre, quelques heures seulement après la chute de leur camarade, les 96 autres élèves de sa promotion sont partis en car faire la fête durant quatre jours. Jocelyn Mafféis n'était pas mort, justifie, gêné, le directeur adjoint de l'école : « Fallait-il laisser ces jeunes enfermés dans leur résidence étudiante ou leur permettre de partir, sous surveillance, partager une occasion de se connaître mieux en faisant leurs jeux stupides ? Nous leur avons conseillé de faire attention les uns aux autres, nous ne voulions pas d'épidémie… » Ensuite s'est installé le silence. Trois élèves seulement ont accepté de témoigner, requérant l'anonymat. Une dizaine était présente à l'enterrement. Le directeur de l'école n'a pas reçu les parents. Ils le regrettent. C'eût été l'occasion de lui faire part d'un souhait : que l'intégration aux Mines ne se résume plus à une longue beuverie.

    http://abonnes.lemonde.fr/societe/article/2013/11/22/mourir-aux-mines_3518991_3224.html?xtmc=mourir_aux_mines&xtcr=3

  • Prostitution : manifestation à Paris d'abolitionnistes favorables à la pénalisation des clients

    http://media.rtl.fr/online/image/2013/1123/7767212041_des-manifestants-contre-la-prostitution-a-paris-le-23-novembre-2013.jpg

    Entre 950 et plusieurs milliers de personnes ont manifesté samedi à Paris contre les violences faites aux femmes et pour le texte de loi qui prévoit la pénalisation des clients de prostituées.

    Avant de partir de la gare Montparnasse en début d'après-midi, les manifestants ont symboliquement déposé dans une urne des bulletins portant l'inscription "Prostitution Votez: abolition". 

    Plusieurs milliers de personnes, selon les organisateurs, 950 selon la police, ont manifesté samedi 23 novembre à Paris jusqu'à l'Assemblée nationale contre les violences faites aux femmes et pour la pénalisation des clients de prostituées, qui sera discutée prochainement par les députés.

    L'initiative, se tenant à l'avant-veille de la journée internationale contre les violences faites aux femmes, venait du Collectif national pour les Droits des femmes, qui regroupe des associations féministes, des syndicats et partis politiques.

    Les organisateurs comptabilisaient 3.000 personnes en fin de parcours.

    En tête de cortège, plusieurs femmes parlementaires, dont la députée PS Maud Olivier, co-auteure de la proposition de loi "renforçant la lutte contre le système prostitutionnel".

    Le texte, qui sera examiné la semaine prochaine et dont elle espère "très fortement un changement de mentalité et une responsabilisation des clients", propose de punir l'achat d'actes sexuels d'une amende de 1.500 euros.

    Il n'interdit pas la prostitution.

    Pour Suzy Rojtman, porte-parole du collectif, il marque "une avancée importante" mais "il faut aller plus loin" en faisant "de l'achat d'un acte sexuel un délit".

    Le collectif demande en outre "des financements conséquents" pour le fonds d'accompagnement des parcours de sorties de la prostitution, également prévu dans le texte, ainsi que des titres de séjour "pérennes" pour les prostituées étrangères déterminées à raccrocher.

    Il souhaite aussi que le projet de loi égalité femmes hommes du gouvernement, déjà voté au Sénat et qui sera examiné en janvier à l'Assemblée, soit "encore musclé", via notamment des mesures de protection de "toutes les femmes" victimes de violences, au-delà des violences conjugales et mariages forcés.

    Le nouveau plan triennal présenté vendredi par le gouvernement double les moyens consacrés à cette lutte.

    "Nous serons aussi vigilants à ce que les députés fassent sauter l'amendement du Sénat sur la résidence alternée, nous sommes totalement contre dans les cas de violences conjugales", a également rappelé Suzy Rojtman.

    Au début du parcours, des jeunes du collectif "8 mars pour ToutES", qui pensent que la pénalisation des clients "précarisera encore plus les prostituées", ont tenté de perturber le cortège en tendant, de part et d'autre de la rue de Rennes, une banderole proclamant "clients pénalisés = putes assassinées", un slogan qu'ils ont crié au passage, sans heurt, du cortège.

    http://www.rtl.fr/actualites/info/article/prostitution-manifestation-a-paris-d-abolitionnistes-favorables-a-la-penalisation-des-clients-7767212111

  • De la violence comme « divertissement » (Gary Francione)

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    Grand Theft Auto 5, jeu interactif consistant à participer à toutes sortes de violences cybernétiques contre les humains, y compris l’homicide, la torture et le viol (ou peut-être s’agit-il « juste » de cannibalisme), mais également contre les non-humains, est apparemment devenu le produit de divertissement qui s’est vendu le plus rapidement de tous les temps.
     
    Quand j’ai émis un commentaire critique sur Facebook, toute une horde de joueurs est devenue furieuse à la simple suggestion que ce type de « jeux » nous encourageait à devenir insensibles à la violence. Ils insistaient sur le fait qu’on arrive à séparer le « jeu » de la réalité.
     
    Les images violentes qui sont pour nous synonymes de « divertissement » pourraient ne pas pousser directement les gens à agir de façon différente, mais elles provoquent, sans aucun doute, un durcissement de la société ; elles déforment notre perception morale. Elles transforment ces images violentes en quelque chose qui ne nous repousse plus. Et cela est incontestablement significatif.
     
    Vous voulez savoir pourquoi tant de « bonnes » personnes aux Etats-Unis ne se sont pas opposées à l’esclavage lié à la race ? Une des raisons en est qu’elles étaient entourées de nombreuses autres personnes qui soutenaient cette institution et considéraient « normal » le fait de posséder des Africains. Elles étaient insensibles à la violence de l’esclavage parce que cette violence les entourait. Elle ne les repoussait pas car elle faisait partie de la réalité morale qu’ils percevaient. Lorsque nous sommes cernés par une culture de violence et que nous nous y complaisons, nous devenons pareillement insensibles à la violence. Refuser de l’admettre est plus qu’absurde. Et c’est pour cela qu’au lieu de nous interposer et de venir en aide lorsque survient un incident violent dans la rue, nous restons là à ne rien faire, tout en filmant l’événement sur nos Smartphones.
     
    Il y a des années, feu la féministe Andrea Dworkin affirmait que la pornographie violente engendrait des agressions sexuelles contre les femmes. Qu’elle ait raison ou non à propos d’un quelconque lien causal n’est pas le sujet. Même si le fait d’érotiser la violence contre les femmes ne peut être mis directement en relation avec l’agression sexuelle d’une femme précise, ce type de « divertissement » nous rend nécessairement, en tant que société, plus insensibles à la violence envers les femmes. Et c’est peut-être cela qui cause l’épidémie de violence contre les femmes qui existe de nos jours.
     
    Alors, pouvons-nous séparer dans un sens le « divertissement » de la réalité ? Bien sûr. Mais pouvons-nous nier pour autant que le fait de considérer comme un « divertissement » l’imagerie violente impliquant des humains et des non-humains nous rend moralement insensibles ? Non, nous ne le pouvons pas. Et cela met la bonne foi à rude épreuve que de prétendre le contraire.
     
    Je suis d’accord avec ceux qui disent que nos divertissements ont toujours été violents. Mais il est absurde d’affirmer qu’il n’y a pas de différence qualitative entre le Dracula de Bela Lugosi et des films comme Saw et Hostel, ou encore les jeux vidéo comprenant une violence extrême et « participative » contre des humains et des animaux.
     
    Une des choses qui motivait l’opposition à la guerre du Viêt-Nam était les images d’enfants brûlés par le napalm. Après le Viêt-Nam, les reporters étaient « enfouis » pour éviter qu’ils continuent à diffuser ce genre d’images. Mais cela n’a plus d’importance de toute façon. Nous avons tellement l’habitude de voir des choses qui font que le napalm ressemble à une vraie partie de plaisir, que l’image d’un enfant en train d’en souffrir vraiment pourrait nous déranger, mais ne possède plus la force émotionnelle qu’elle avait à une époque et n’arrive plus à nous donner envie d’élever nos voix pour protester durablement.
     
    Comprenez bien que je ne suis pas en train de soutenir la censure de films, de jeux vidéo ou de toute autre chose par le gouvernement. Les gouvernements ont de mauvais antécédents en la matière. Et je ne conteste pas que nous soyons en mesure, à un certain niveau, de séparer le « divertissement » de la réalité, en ce que ceux qui trouvent la violence divertissante ne s’engagent pas tous dans la violence.
     
    En revanche, je suis pour le fait de nous demander pourquoi nous trouvons que les images d’extrême violence contre les humains et les non-humains ne sont pas repoussantes, et pourquoi nous les considérons, en effet, divertissantes.
     
    ****
     
    Si vous n’êtes pas végan, devenez-le s’il vous plaît. Le véganisme est une question de non-violence. C’est d’abord une question de non-violence envers les autres êtres sentients. Mais c’est aussi une question de non-violence envers la terre et envers vous-même.
     
    Et ne vous faites jamais avoir par cette idée insensée que nous devrions soutenir l’« exploitation heureuse » afin que les gens deviennent végans. C’est le contraire : l’industrie tout entière de l’ « exploitation heureuse » n’a qu’un seul but : faire en sorte que le public soit encore plus à l’aise avec l’exploitation animale.


    Gary L. Francione
    Professeur, Rutgers University
    ©2013 Gary L. Francione