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Littérature, Philosophie - Page 30

  • Les "animaux de compagnie" (Francione)

    http://www.magazine-avantages.fr/data/photos/F0/7d918b166_chien.jpg

    Chers collègues,

    La question des « animaux de compagnie » est un sujet sensible avec beaucoup de défenseurs.

    Voici ce que j’ai écrit dans l’appendice de mon livre : Introduction aux Droits des Animaux: Votre Enfant ou le Chien ? :

    Question 3 : l’institution de la possession d’animaux de compagnie viole-t-elle le droit basique des animaux à ne pas être considérés comme des objets ?

    Réponse : oui.

    Les animaux de compagnie sont notre propriété.

    Les chiens, chats, hamsters, lapins, et autres animaux sont produits en masse comme des boulons dans une usine ou, dans le cas des oiseaux ou animaux exotiques, capturés dans la nature, transportés sur de longues distances, pendant lesquelles beaucoup d’entre eux meurent.

    Les animaux de compagnie sont commercialisés exactement de la même façon que d’autres commodités.

    Bien que certains d’entre nous traitent bien leurs compagnons, la plupart d’entre nous les traite mal.

    En Amérique, la majorité des chiens passent moins de deux ans dans un foyer avant d’être jetés dans une fourrière ou sinon transférés à un nouveau propriétaire ; plus de 70% des gens qui adoptent des animaux les donnent, les emmènent dans des refuges ou les abandonnent.

    Nous sommes tous conscients d’histoires horribles de chiens du voisinage vivant à l’attache et passant la majorité de leur vie seuls.

    Nos villes sont pleines de chiens et chats errant qui vivent misérablement, qui sont affamés ou souffrent du froid, qui succombent de maladies, ou  qui sont torturés par des humains.

    Des gens qui disent aimer leurs compagnons animaux les mutilent absurdement en leur faisant  couper les oreilles, la queue, ou arracher les griffes de façon à ce qu’ils ne grattent pas les meubles.

    Vous pouvez traiter votre compagnon comme un membre de votre famille et effectivement lui accorder une valeur intrinsèque ou le droit basique de ne pas être traité comme votre ressource.

    Mais le traitement de votre animal signifie vraiment que vous considérez votre propriété animale comme ayant une valeur supérieure à celle du marché ; si vous changiez d’avis et que  vous administriez quotidiennement des sévices corporels graves à votre chien à des fins disciplinaires ou que vous arrêtiez de nourrir votre chat pour le motiver davantage à attraper les souris dans le sous-sol de votre magasin,  ou que vous tuiez votre animal pour ne plus l’assumer financièrement, votre décision serait protégée par la loi.

    Vous êtes libre de donner la valeur que bon vous semble à votre propriété.

    Vous pouvez décider de lustrer souvent votre voiture ou de laisser l’érosion se faire.

    Le choix vous appartient.

    Tant que vous apportez le minimum d’entretien à votre voiture pour qu’elle passe le contrôle technique, toutes autres décisions prises avec respect envers le véhicule, y compris le donner au ferrailleur sont vos affaires.

    Tant que vous apportez un minimum de nourriture, d’eau et d’abris à votre animal, toutes autres décisions, à part de le torturer sans raison, sont vos affaires, y compris votre décision de l’abandonner dans le refuge le plus proche (où beaucoup d’animaux sont soit tués soit vendus pour la recherche), ou de le faire tuer par un vétérinaire complaisant.

    Il y a de nombreuses années, j’ai adopté un hamster par l’intermédiaire d’un camarade de fac de droit.

    Une nuit le hamster a été malade, et j’ai appelé les urgences vétérinaires.

    Le vétérinaire a dit que la somme minimale pour une urgence était de 50$ et m’a demandé si je voulais dépenser cette somme alors que je pouvais avoir un “nouveau” hamster dans n’importe quelle animalerie pour 3$.

    J’ai de toute façon emmené le hamster chez le vétérinaire, mais cet événement a été l’un des premiers à réveiller ma conscience au sujet du statut de commodités économiques que sont les animaux.

    En tant que personne vivant avec sept compagnons canins sauvés que j’aime tendrement, je ne prends pas ce sujet à la légère.

    Bien que je considère mes compagnons comme des membres de la famille, ils restent ma propriété et je pourrais décider demain de les tuer.

    J’ai beau aimer vivre avec des chiens, s’il n’en restait plus que deux dans le monde, je ne serais pas d’avis de les élever pour qu’il y ait plus “d’animaux de compagnie” et donc de perpétuer leur statut de propriété.

    En effet, quiconque se soucie réellement des chiens devrait visiter une “usine à chiots” - un endroit où les chiens sont élevés par centaines ou par milliers et ne sont traités que comme des commodités.

    Les chiennes reproduisent jusqu’à épuisement et sont soit tuées soit vendues pour la recherche.

    Nous devrions bien sûr arrêter de donner la vie à des animaux pour pouvoir les posséder comme animaux de compagnie.

    Dans ce second Commentaire de l’Approche Abolitionniste, nous étudierons tous les aspects de la question des “animaux de compagnie”.

    Gary L. Francione

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    http://www.abolitionistapproach.com/fr/2009/08/12/les-animaux-de-compagnie/

  • Une note sur la notion de "schizophrénie morale" (Francione)

    http://www.benjerry.fr/blog/wp-content/uploads//vache-chien.jpg

    Cher collègues,

    Dans mon livre Introduction aux Droits des Animaux : Votre Enfant ou le Chien ? publié par Temple University Press en 2000, j’introduisais la notion de "schizophrénie morale".

    J’ai reçu de nombreux commentaires par rapport à mon utilisation de ce terme, et ces commentaires se répartissent en deux groupes.

    Certaines personnes m’accusent de confondre la schizophrénie morale avec le dédoublement de personnalité.

    Lorsque je parle de schizophrénie morale, je cherche à décrire la manière délirante et confuse que nous avons de penser aux animaux d’un point de vue social / moral.

    Cette confusion peut, bien entendu, inclure des façons contradictoires ou incompatibles de percevoir les animaux (certains sont des membres de la famille, d’autres des repas) mais cela ne signifie pas que je décris un classique dédoublement de personnalité.

    Notre schizophrénie morale, qui implique que nous nous faisions des illusions à propos de la sensibilité des animaux et des similitudes entre les humains et les autres animaux, ainsi qu’une quantité énorme de confusions sur le statut moral des non-humains, est un phénomène qui est assez complexe et qui comporte de nombreux aspects différents.

    Certaines personnes pensent qu’en utilisant le terme, je stigmatise ceux qui souffrent de schizophrénie clinique car cela implique que ces personnes soient des personnes immorales.

    Je suis sincèrement désolé si quelqu’un a interprété le terme de cette manière, ce n’est certainement pas ce que je voulais dire.

    La schizophrénie est une maladie reconnue qui se caractérise pas des pensées confuses et délirantes.

    Dire que nous sommes délirants et confus lorsqu’il s’agit de questions morales ce n’est pas dire que ceux qui souffrent de schizophrénie clinique sont immoraux.

    Il s’agit seulement de dire que beaucoup d’entre nous réfléchissent aux questions morales importantes de manière complètement confuse, délirante et incohérente.

    Je ne dis certainement pas que ceux qui souffrent de schizophrénie clinique sont immoraux.

    Dire que la schizophrénie morale stigmatique les schizophrènes cliniques c’est comme dire que parler du fait que "les drogues se propagent comme un cancer" stigmatise les victimes de cancer.

    J’espère que cela clarifie ce que je veux dire lorsque je parle de notre schizophrénie morale quand il s’agit de l’éthique animale.

    J’espère également qu’il est clair que je n’utilise pas ce terme d’une manière qui fait ou est destinée à véhiculer l’idée que les schizophrènes cliniques sont immoraux.

    Gary L. Francione

    http://www.abolitionistapproach.com/fr/2009/08/12/une-note-sur-la-schizophrenie-morale/

  • "Pornographie : de la liberté à la servitude sexuelle", par Yves-Charles Zarca

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    La pornographie est l’exhibition et la mise en scène de corps ou de parties des corps dans l’exercice d’actes sexuels, principalement en vue de produire une excitation d’un tiers spectateur.

    La posture du tiers voyeur est évidemment essentielle.

    La pornographie se trouve ainsi prise entre un hyperréalisme des gestes et des actes exercés (pénétration, fellation, sodomie, zoophilie, etc.) et la représentation pour le tiers.

    Elle est une étrange hyperréalité qui n’existerait pas sans le voyant virtuel et réel.

    La scène pornographique des corps diversement saisis, agencés, superposés, pénétrés, c’est-à-dire marqués, ne relève nullement de la comédie.

    Elle ne connaît pas le paradoxe de l’être et du ne-pas-être qui fait le comédien, parce qu’il n’y a pas de comédien sur cette scène.

    Il y a certes de la simulation des gestes, des postures et des expressions du plaisir, mais cette simulation n’a rien à voir avec la comédie : elle est la transformation du réel en hyper-réel ou, plus exactement, la négation du réel dans l’hyper-réel [1].

    Simulation de l’excitation ; brutalité des postures, des gestes et des mouvements.

    Mais cette définition de la pornographie est insuffisante.

    On n’y a souligné que le marquage des corps, la simulation du plaisir et la posture du tiers. Il manque une dimension décisive : la domination.

    La pornographie est la sexualité réduite au sexe comme vecteur d’un rapport de domination/soumission.

    Précisons : la sexualité n’est pas uniquement le sexe [2].

    Elle est aussi une histoire consciente et inconsciente où se jouent des relations entre le désir et l’interdit, la rencontre et la perte, le plaisir et la loi, le rêve et la réalité, l’amour et la mort. Elle est encore une part d’imaginaire qui constitue une dimension de sa réalité.

    Elle est intimité et retrait.

    Elle est également langage : non seulement paroles qui la disent ou la font, mais aussi paroles qui traversent les paroles ordinaires d’information ou d’usage pour les surdéterminer érotiquement.

    Cela veut dire que la sexualité se fixe, s’éprouve et s’atteint dans le rapport à l’autre, même s’il s’agit d’un autre manquant : rencontre, attente, séduction, consentement ou refus, etc.

    En somme, la sexualité, c’est la subjectivité, où il y va d’un rapport à soi dans le désir ou l’aversion, le plaisir ou la peine, l’aveu ou le déni.

    Ce n’est pas un hasard si l’histoire de la sexualité de Michel Foucault s’est déployée en une réflexion sur l’usage des plaisirs et le souci de soi pour aboutir à une herméneutique du sujet.

    Le sexe, c’est autre chose.

    Partie des corps, déplacement des corps, imbrication des corps, excitation des corps... et, pourquoi pas, mutilation des corps.

    Le sexe n’est pas subjectif [3]. Il est essentiellement physique et, pour cette raison même, susceptible d’être exhibé, photographié, filmé dessus, dessous, dedans, à côté.

    Le sexe ne connaît pas l’altérité.

    Il ne connaît que le nombre : 1, 2, 3, 10, 20, 40, etc.

    Il s’excite par des gestes spécifiques ou des images et se dé-existe.

    Les limites du sexe sont des limites physiques : l’épuisement, la répugnance.

    Il y a des performances sexuelles comme il y a des performances sportives.

    Les premières peuvent être diversement représentées comme les secondes.

    La pornographie est directement liée à cette représentabilité du sexe.

    Elle veut donner à voir tout le visible, ce que l’on peut voir ordinairement, et surtout ce qui échappe à cette vision ordinaire.

    Ne rien manquer de l’acte sexuel, rendre sa transparence au sexe, serait sa devise.

    Le sexe sans rapport à soi, sans intimité, sans sujet, c’est cela l’objet de la pornographie.

    Mais les actes sexuels seraient tout à fait insuffisants, s’ils n’enveloppaient autre chose : une relation de domination et une jouissance du pouvoir.

    Ainsi la sexualité est-elle prise entre deux dispositifs : celui de la subjectivité et celui du pouvoir.

    La référence à Foucault au sujet de la subjectivité doit évidemment se doubler d’une seconde référence au même Foucault sur le pouvoir.

    La première phase de son histoire de la sexualité, La volonté de savoir, est un traité du pouvoir.

    Mais on ne saurait se contenter de dire que le pouvoir assujettit et que c’est dans cet assujettissement que le sujet se forme.

    Du reste, Foucault, qui s’était arrêté d’abord sur cette idée, l’a ensuite remise en question.

    Le sujet, la subjectivité ne sauraient être définis comme le produit de l’efficience du pouvoir, même lorsqu’on les considère non comme des formes permanentes mais dans leur histoire.

    L’herméneutique du sujet chez Foucault est une réflexion sur l’autoconstitution historique du sujet [4]. Pour ma part, je dirai que le lieu d’exercice du pouvoir est celui où la subjectivité s’absente ou se destitue (se résigne).

    Ce que montrait déjà Hobbes, le plus grand penseur du pouvoir : la subjectivité, c’est la résistance.

    Mais c’est une autre histoire.

    Les deux dispositifs de la sexualité : subjectivité et pouvoir, ne sont pas absolument distincts.

    On ne saurait définir, autrement que comme des cas limites, d’un côté une relation purement érotique et de l’autre une relation de domination.

    La relation amoureuse par exemple comporte les deux dimensions selon des proportions diverses : elle est pour une part effusion des subjectivités et pour une part affrontement.

    Or la pornographie représente précisément ce cas limite où la domination prévaut à l’exclusion de toute subjectivité.

    La jouissance pornographique est une jouissance du pouvoir dont le vecteur ou l’instrument est le sexe (masculin, ce qui ne veut pas dire nécessairement celui d’un homme) et dont le lieu d’application est également le sexe (féminin, ce qui ne veut pas dire nécessairement celui d’une femme).

    Le corps est en effet le lieu où le pouvoir peut se manifester ou s’exercer : attitudes de soumission, d’humiliation, d’entière disponibilité à la volonté d’un ou plusieurs maîtres, expressions d’acceptation de cette infériorité et du plaisir éprouvé à un tel ravalement.

    Le corps peut être l’objet d’une maîtrise dont ne sont aucunement susceptibles l’esprit, la pensée ou la croyance qui échappent à toute maîtrise externe : on peut obliger quelqu’un à obéir ou à se soumettre, mais non à croire ce que l’on veut qu’il croie.

    C’est le sexe qui est le lieu privilégié dans le corps-lieu où le pouvoir s’exerce : le lieu des marquages du corps.

    Comme la jouissance pornographique est une jouissance du pouvoir, il s’ensuit deux conséquences :

    1 / l’objet de cette domination peut être, en principe, indifféremment une femme, un enfant, un homme voire un animal.Mais c’est bien sûr le corps de la femme qui a été traditionnellement le lieu de marquage du pouvoir ;

    2 / Les lieux corporels de marquage sont multiples ; le sexe est, je l’ai dit, le lieu privilégié, mais il peut y en avoir d’autres : blessures, mutilations, infirmités diverses peuvent servir de substituts sexualisés [5].

    La pornographie s’étend ainsi, au-delà des actes sexuels proprement dits, à des tortures, des sévices de toutes sortes, jusqu’à... la mort en direct, comme dans les snuff movies. C’est en ce sens et en ce sens seulement que la sexualité est mortifère.

    Que reste-t-il des délires sur la libération pornographique qui aurait eu pour effet de nous arracher à deux mille ans d’hypocrisie morale et religieuse ?

    Que reste-t-il du mythe du libre consentement des « acteurs » porno ?

    Rien, ou plutôt rien d’autre que la servitude volontaire que l’on donne pour de la libre adhésion.

    Que reste-t-il du sentiment de liberté du moi dans l’usage et le maniement sexuel (par d’autres) de son corps entièrement maîtrisé ?

    Un sujet vide et un corps nu, qui n’est plus un corps propre (mon corps), mais un corps-objet, sans doute vivant, mais si peu.

    Il faudrait retracer le cheminement qui, dans le rapport occidental à la sexualité, a rendu possible cette réduction du corps à un lieu de marquage du pouvoir et qui, aujourd’hui, se diffuse à travers l’industrie pornographique partout dans le monde, et à travers toutes les générations.

    Il ne m’est pas possible de le faire ici.

    Ce serait pourtant indispensable pour comprendre ce que d’autres excès et d’autres terreurs symétriques nous disent dans d’autres civilisations : la femme soumise au voile, interdite sous prétexte de pudeur.

    Les modes de marquage des corps sont susceptibles de nous apprendre beaucoup de choses sur l’histoire du pouvoir, en Occident comme ailleurs.

    Ici et maintenant, nous sommes loin de l’idéologie de la libération sexuelle des années 1970 : plutôt dans la servitude sexuelle ; pis, dans la destruction pornographique de la sexualité.

    NOTES

    [1] Cf. ci-dessous l’étude de Michela Marzano, « La pornographie et l’escalade des pratiques : corps, violence et réalité ».

    [2] Cf. Patrick Baudry, La pornographie et ses images, Paris, Armand Colin, 1997 ; Pocket, 2001, p. 13 sq.

    [3] Cf., ci-dessous, l’étude de Lubomira Radoilska, « La sexualité à mi-chemin entre l’intimité et le grand public », et celle de Pascale Molinier, « La pornographie “en situation” ».

    [4] Michel Foucault, L’herméneutique du sujet, (Cours au Collège de France, 1981-1982), Paris, Gallimard-Le Seuil, 2000.

    [5] Cf. ci-dessous l’article d’Alain Giami, « Pornographie et handicap ».

    http://www.cairn.info/revue-cites-2003-3-page-3.htm

    *****

    Yves Charles Zarka, Directeur de recherche au CNRS où il dirige le Centre d’histoire de la philosophie moderne et le Centre Thomas-Hobbes.

    Il enseigne également la philosophie politique moderne et contemporaine à l’Université de Paris I - Panthéon-Sorbonne.

    Il est notamment l’auteur de : La décision métaphysique de Hobbes. Conditions de la politique (Paris, Vrin, 1987 ; 2e éd., 1999) ; Hobbes et la pensée politique moderne (Paris, PUF, 1995 ; 2e éd., 2001) ; Philosophie et politique à l’âge classique (Paris, PUF, 1998) ; La questione del fondamento nelle dottrine moderne del diritto naturale (Naples, Editoriale Scientifica, 2000) ; L’autre voie de la subjectivité (Paris, Beauchesne, 2000) ; Figures du pouvoir : études de philosophie politique de Machiavel à Foucault (Paris, PUF, 2001 ; 3e éd., 2001) ; Quel avenir pour Israël ? (en collab. avec S. Ben-Ami et al., Paris, PUF, 2001, 2e éd. en poche, « Pluriel », 2002) ; Hobbes. The Amsterdam Debate (débat avec Q. Skinner), Olms, 2001. Il a, également, récemment publié : Raison et déraison d’État (Paris, PUF, 1994) ; Jean Bodin : nature, histoire, droit et politique (Paris, PUF, 1996) ; Aspects de la pensée médiévale dans la philosophie politique moderne (Paris, PUF, 1999) ; Comment écrire l’histoire de la philosophie ? (Paris, PUF, 2001) ; Machiavel, le Prince ou le nouvel art politique (Paris, PUF, 2001) ; Penser la souveraineté (2 vol.), Pise-Paris, Vrin, 2002, Les fondements philosophiques de la tolérance (3 vol.), Paris, PUF, 2002.

    http://www.sos-sexisme.org/hommes/liberteservitude.htm

  • En finir avec Sade

    http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/4/44/Marquis_de_Sade_portrait.jpg/220px-Marquis_de_Sade_portrait.jpg

    Interview Michel Onfray* « Sade est le dernier philosophe féodal »

    Le Point : Comment expliquez-vous la fascination autour de Sade ?

    Michel Onfray : C'est un symptôme des années 70.

    Tous les grands biographes de Sade ont donné dans l'hagiographie.

    Relisez Annie Le Brun, Gilbert Lely ou Jean-Jacques Pauvert et vous serez estomaqué par la complaisance avec laquelle ils décrivent la vie d'un individu qui n'était ni plus ni moins qu'un délinquant sexuel.

    Voilà un homme qui prend des femmes en otages, les menace de mort, les torture, leur inflige les pires sévices, et il faudrait en faire un parangon libertaire et le héraut de la parole bâillonnée ?

    Tout cela est sidérant, surtout lorsqu'on ajoute qu'il est le premier des philosophes modernes, alors que je crois qu'il est bien plutôt le dernier philosophe féodal.

    On ne peut pas dire non plus que tout le monde est à genoux devant Sade ?

    Heureusement !

    Il est par exemple rassurant de constater que deux penseurs de premier plan tels que Hannah Arendt ou Albert Camus ne sont pas tombés dans le panneau du marquis.

    Lorsqu'on a écrit Les Origines du totalitarisme ou L'Homme révolté, il faut dire aussi qu'il est difficile de souscrire à une oeuvre telle que Les 120 journées de Sodome.

    On y rase des gens, on leur tatoue des numéros, on les avilit, on les tue...

    Ça ne vous rappelle rien ?

    Avec Sade, on subit le diktat d'une littérature qui aurait tous les droits alors que je suis convaincu qu'être écrivain, c'est surtout avoir des devoirs.

    Mais alors, quoi, on jette tout chez Sade ?

    Non, bien évidemment.

    Mais il faut arrêter de célébrer sans cesse un écrivain dont la postérité est aussi due au crédit que lui ont apporté Apollinaire ou Breton.

    Il faut lire et relire les pages où Sade fait l'éloge de la sodomie, car elle est à son sens le seul moyen de ne pas engendrer.

    Relire aussi sa manière de désigner la chair des femmes comme une putréfaction totale.

    Moi, je ne suis pas client.

    Propos recueillis par Albert Sebag

    http://www.lepoint.fr/culture/2009-07-23/interview-michel-onfray-sade-est-le-dernier-philosophe-feodal/249/0/363796

  • Livre : "L'Animal est-il une personne ?" d'Yves Christen (Flammarion)

    http://multimedia.fnac.com/multimedia/images_produits/ZoomPE/2/7/8/9782081224872.jpg

    Yves Christen L’Animal est-il une personne ?
    Flammarion 2009 / 24 € - 157.2 ffr.537 pages
    ISBN : 978-2-08-122487-2
    FORMAT : 15cm x 24cm

    L'auteur du compte rendu : Alain Romestaing est maître de conférences en Littérature française à l’IUT Paris Descartes. Il est membre de l’équipe de recherche EA 4400 – « Écritures de la modernité » de l’Université Sorbonne Nouvelle-Paris 3, au sein de laquelle il travaille notamment sur les problématiques littéraires du corps, sur l’œuvre de Jean Giono (Jean Giono. Le corps à l’œuvre, Honoré Champion, 2009) et sur l’animalité (équipe du programme transversal de recherches : « Animalittérature »).

    Yves Christen est à la fois un scientifique (biologiste spécialisé dans les domaines de la génétique et des neurosciences) et un vulgarisateur (il a été rédacteur en chef de la revue La Recherche et responsable de la rubrique scientifique du Figaro Magazine).

    Il a en outre introduit en France la sociobiologie (L’Heure de la sociobiologie, Albin Michel, 1979).

    Enfin, il s’est également fait connaître pour son intérêt à la fois scientifique et affectif pour des léopards dans Le Peuple léopard. Tugwaan et les siens (Michalon, 2000).

    Toutes ces caractéristiques nourrissent son dernier ouvrage, L’Animal est-il une personne ?, qui est une somme passionnée et passionnante sur l’état des connaissances scientifiques (éthologie, génétique, neurosciences, primatologie, zoologie…) concernant des qualités découvertes chez les animaux (léopards donc, mais aussi éléphants ou baleines, araignées sauteuses ou labres nettoyeurs, chimpanzés, bonobos, gorilles, chiens, chèvres, corbeaux…) alors même qu’elles ont été ou sont encore désignées comme des «propres» de l’homme.

    L’auteur opère donc une vaste récapitulation des données concernant ce qui est censé faire défaut aux animaux (la deuxième partie énumère ces supposés manques : de raison, de socialité, d’émotion, de langage, de « théorie de l’esprit » c'est-à-dire de l’aptitude de se mettre mentalement à la place d’un autre, de culture...) ou ce que les humains sont censés avoir en plus (la troisième partie s’attaque à l’anthropocentrisme et à l’idée d’une supériorité génétique, cérébrale, ou en matière de liberté, de droits).

    Cette double récapitulation est encadrée par une première partie en guise d’introduction (à moins que celle-ci ne se réduise au très court prologue sur l’ambivalence du mot « personne » entre « autoglorification » et « insignifiance ») et une dernière partie synthétisant les apports des études précédemment décrites pour (continuer de) répondre à la question de l’ouvrage telle qu’elle est modulée par le prologue : « personne ou personne ? »

    La problématique n’est donc pas très rigoureusement définie, au prétexte que l’auteur « confesse un bien piètre goût pour les discussions sans fin sur » le sens précis du mot «personne» !

    Citant le biologiste moléculaire Francis Crick, Yves Christen pense qu’on « ne gagne pas de bataille en débattant à perte de vue sur ce qu’on entend par le mot bataille » (pp.19-20).

    C’est là quasiment une clé méthodologique : de l’action et des faits !

    Si la première partie dit clairement ce que l’auteur entend par « personne animale », elle insiste surtout sur le constat d’une nouvelle attitude à la fois scientifique et populaire par rapport aux animaux, se caractérisant par une plus grande sensibilité, voire par de l’amour (p.17), et sur l’enjeu intellectuel de ce changement : « la relation à ces autres vivants mérite de nouvelles analyses, qui les prennent en compte en tant que sujets » (p.19).

    De même, les enjeux éthiques précis concernant la reconnaissance du statut de personne animale seront régulièrement abordés et développés, notamment à propos de l’expérimentation sur les animaux ou de leurs droits…

    En d’autres termes, le titre de l’ouvrage est une interrogation oratoire plus qu’une question soulevant une problématique : Yves Christen répond par l’affirmative dès le début.

    L’objet du livre est bien davantage de montrer comment « l’approche scientifique et expérimentale », notamment de ces dernières années, « semble ruiner l’absurde vision de l’insignifiance de la bête » (prologue).

    À partir de là, le livre est en effet un impressionnant recensement des observations, expérimentations, découvertes permettant de dépasser la pauvreté de la notion d’instinct quand on parle des comportements animaux, recensement dont se dégagent les positions épistémologiques actuelles, les polémiques, et même certains changements dans les a priori des scientifiques : l’auteur, en historien des sciences, fait malicieusement remarquer que les expérimentateurs toujours soucieux de se démarquer du sens commun découvrent que les animaux nous comprennent, mais avec une réticence telle qu’« on se demande si certains expérimentateurs d’aujourd’hui […] n’auraient pas a priori tendance à favoriser l’hypothèse d’une compétence mathématique plutôt que celle d’une captation de la pensée d’autrui » (p.183) !

    Ce genre de remarque fondée sur une connaissance à la fois intellectuelle et concrète du monde scientifique fait souvent le sel d’un essai au ton très personnel : l’auteur n’hésite pas à nous présenter des personnes, qu’il s’agisse d’évoquer le divorce d’un couple de chercheurs et du changement consécutif de leurs objets de recherche (p.112) ou de plaisanter sur l’apparence d’un collègue (« Sapolsky est un drôle de chercheur. Allure de hippie de la bonne époque, mais rien à voir avec un marginal. Il enseigne à Stanford […] », p.265).

    De même, il racontera son vécu, ses rencontres, sa position par rapport aux animaux (« faire une personne [de la bête] ne revient pas à la considérer comme une personne humaine », p.410) [et pourquoi donc ?] ou par rapport à l’expérimentation animale (on ne peut y renoncer [FAUX, M. Christen !] mais il faut la soumettre à l’inconfort d’une réflexion éthique « en situation complexe », p.411).

    Enfin il expose sa conviction intime, « contre l’avis de la plupart des spécialistes », « que la théorie de l’esprit comme la conscience doivent être largement répandues dans le monde vivant » (p.179).

    Cette dimension personnelle du livre et la conscience de « l’évolution de notre sensibilité et de nos représentations médiatisées de l’animal » auraient pu permettre, cependant, plus de compréhension sur les certitudes anciennes, fussent-elles philosophiques et fondées sur un humanisme ayant « placé l’homme sur un piédestal en vertu de l’ignorance des époques passées » (p.412).

    Descartes en effet, coupable d’avoir réduit l’animal à une machine (et bien qu’il ait contribué à fonder la démarche scientifique moderne au nom de laquelle Yves Christen le condamne), en prend pour son grade, ainsi que nombre de philosophes de la singularité humaine, de Heidegger à Luc Ferry.

    De manière plus générale, il est dommage que les sciences humaines soient négligées, notamment quand il s’agit de se poser la question de la vie sociale des animaux (chap. 5), l’auteur réduisant le débat sur la question à ce qu’il présente comme un dialogue de sourds entre lui et Antoine Spire sur France Culture (p.80).

    On peut s’étonner notamment de l’absence de toute référence au travail de Jean-Marie Schaeffer (La Fin de l’exception humaine, Gallimard, 2007) dont le discours critique concernant la thèse de la singularité de l’être humain prévalant encore dans les sciences humaines émane donc de ces mêmes sciences humaines et rencontre bien des analyses d’Yves Christen !

    Mais ce dernier, répugnant, comme on l’a vu, « aux discussions sans fin », préfère par tempérament et par formation s’appuyer sur des « savoirs certes encore fragmentaires, mais objectifs », reposant sur « des découvertes empiriques menées dans la nature et en laboratoire » (p.412).

    On ne saurait trop lui en vouloir, ces savoirs étant présentés avec clarté, précision et vivacité et mis en perspective aussi bien par rapport à l’histoire des sciences de l’animal que par rapport au futur : de façon assez surprenante (et peut-être un peu contre-productive du point de vue de l’argumentation en faveur de la personne animale), Yves Christen établit un court rapprochement final entre « le mouvement de personnalisation » concernant les animaux et l’autonomisation des robots conçus selon le « modèle des vivants fabriqués par la sélection naturelle » (p.408).

    Il se projette même dans le dernier chapitre en pleine science-fiction.

    L’expérience du Néerlandais Willie Smits qui a mis des Webcams à la disposition des grands singes dont il s’occupe conduit en effet l’auteur à imaginer que « demain tous les orangs du monde […] se trouvent interconnectés et échangent des idées » (p.413).

    Alors, on ne pourra plus douter « qu’il faille les traiter comme des personnes » !

    Mais alors, il ne s’agit plus d’objectivité scientifique : « à force de […] pousser [cette « grosse pierre au sommet d’une colline » que sont le livre de Christen et l’initiative de Willie Smits], à coup sûr elle va dégringoler la pente. Nul ne sait où elle aboutira, mais quelque chose va se passer qu’il ne sera pas possible d’interrompre » (p.414).

    Peut-être n’est-il pas si mal que des philosophes, des sociologues, des écrivains ou des psychologues continuent de penser la singularité de la personne humaine aussi bien que celle de la personne animale…


    Alain Romestaing

    http://www.parutions.com/index.php?pid=1&rid=85&srid=428&ida=11211

    A lire également sur parutions.com:

  • Krzysztof Warlikowski : "(A)pollonia, mosaïque de l'espèce humaine" (Le Monde)

    http://images.telerama.fr/medias/2008/05/media_28639/M8390.jpg

    Voilà le choc qu'Avignon attendait sans doute, après les récits rassembleurs de Wajdi Mouawad, l'artiste associé de ce festival : un choc esthétique et réflexif, lancé avec calme, au soir du 16 juillet, par le metteur en scène polonais Krzysztof Warlikowski, pour son entrée dans la Cour d'honneur du Palais des papes.

    Un spectacle dérangeant, aussi : (A)pollonia a décontenancé et troublé une partie du public par sa capacité à déplacer les perspectives sous lesquelles est généralement envisagée l'histoire du XXe siècle, un peu comme Jonathan Littell l'a fait avec Les Bienveillantes.

    (A)pollonia, c'est un voyage dans l'espèce humaine, telle que l'a révélé l'expérience des camps de la mort, voyage que guideraient les héros de la tragédie grecque.

    Résumé ainsi, évidemment, cela peut faire peur. Ou fuir.

    Mais la gravité du sujet est tenue par une forme constamment juste, y compris dans ce qui peut apparaître par moments comme "mode" ou provoquant, et qui permet au spectateur de faire son chemin, loin de tout pathos.

    Ce spectacle qui procède par montage, par frottements, par tamponnements, commence par une scène magnifique, située dans le ghetto de Varsovie, en juillet 1942.

    C'est une représentation théâtrale d'un conte de Rabindranath Tagore, Amal ou la lettre du roi, la mise en abyme de l'enfermement d'un enfant qui va vers la mort, et rêve de l'au-delà des montagnes.

    Warlikowski fait ensuite entrer dans le jeu L'Orestie d'Eschyle, avec la cascade sanglante provoquée par le sacrifice d'Iphigénie, sacrifice consenti par son père pour sauver sa patrie.

    A l'intérieur, le metteur en scène introduit un des passages les plus célèbres des Bienveillantes de Littell, qu'il met dans la bouche d'Agamemnon : le fameux monologue du bourreau, rouage de la machinerie nazie, qui se termine par ces mots :

    "Je suis un homme comme les autres, je suis un homme comme vous. Allons, puisque je vous dis que je suis comme vous !"

    Nouvelle pièce du puzzle, avec Alceste, tragédie méconnue d'Euripide, qui voit Admète, qui a attiré sur lui la colère des dieux, envoyer au sacrifice sa bien-aimée, pour sauver sa propre vie.

    Pièce qui entre en correspondance avec une autre, toujours d'Euripide : La Folie d'Héraclès, où le héros grec tue ses enfants dans un accès de démence.

    (A)pollonia glisse ensuite à l'histoire de cette femme qui donne son titre au spectacle, et que raconte l'écrivain polonaise contemporaine Hanna Krall : pendant la guerre, Apollonia Machczynska cachait des juifs, tandis que son mari était maquisard dans la Résistance.

    Dénoncée, exécutée, elle n'avait réussi à sauver "que" Ryfka Goldfinger, que l'on retrouve soixante ans plus tard, à Jérusalem, où Apollonia se voit décerner la médaille des Justes de Yad Vashem.

    Son fils vient la recevoir en son nom.

    Il n'a jamais accepté ce sacrifice, qui l'a privé de sa mère.

    Confronté à la survivante, il demande : "L'homme n'a-t-il pas le droit de sauver sa vie ?"

    Krzysztof Warlikowski ajoute en dernier élément de la mosaïque un texte incroyablement fort et dérangeant de J. M. Coetzee : l'écrivain sud-africain, par la bouche de son héroïne Elisabeth Costello, qui donne son titre au livre, s'y permet la comparaison entre l'abattage des animaux de boucherie et le crime contre l'humanité que représentent les camps.

    [...]

    Mais c'est au coeur du questionnement que souhaite susciter Warlikowski.

    Qu'est-ce qui fait qu'on devient un bourreau ou un juste ?

    Qu'est-ce qui arrête le cycle infernal de la vengeance ?

    Dans la tragédie grecque, c'est la justice des dieux qui finit par rompre l'enchaînement fatal.

    Mais ici, dans le monde des hommes du début du XXIe siècle ?

    Quelle valeur accorder au sacrifice ?

    La matière ici est tellement riche qu'il reste peu de place pour parler de la forme de ce voyage légèrement hypnotique : le dialogue entre les images filmées, les gros plans de visages, notamment, et le jeu sur le plateau, la présence de ces trois poupées, comme des fantômes, la scénographie propre à laisser s'exprimer l'intime.

    Et évidemment, comme toujours chez le metteur en scène polonais, le jeu extraordinairement intense des comédiens.

    Ce tissage, où Warlikowski ne laisse jamais s'insinuer la moindre émotion facile, fait éclore une floraison de questions que la nuit ne clora pas, loin de là.

    Une nuit dans laquelle on emporte cette dernière histoire : en Australie, nous conte J. M. Coetzee, il existe, dans une région où se succèdent des pluies torrentielles et des sécheresses torrides, une espèce de petites grenouilles qui, à la saison sèche, s'enterrent au plus profond, en une sorte de petite mort.

    Les pluies revenues, elles se réveillent, grattent la croûte de boue molle, et ressurgissent à l'air libre. Le théâtre de Krzysztof Warlikowski est un art de résurrection.


    Avignon - Envoyée spéciale : Fabienne Darge.

    (A)pollonia d'après Euripide, Eschyle, Hanna Krall, Jonathan Littell, J. M. Coetzee... Mise en scène de Krzysztof Warlikowski. Festival d'Avignon, Cour d'honneur du Palais des papes, les 17, 18 et 19 juillet à 22 heures. De 13 € à 38 €.. Durée : 4 h 30. En polonais surtitré. Puis du 6 au 12 novembre au Théâtre national de Chaillot, à Paris.

    http://www.lemonde.fr/culture/article/2009/07/17/a-pollonia-mosaique-de-l-espece-humaine_1219968_3246.html

  • "Expérimentation animale : un mal nécessaire ?" (Florence Burgat)

    http://41.img.v4.skyrock.net/41d/stop-vivisection/pics/161567969_small.jpg

    Le numéro 1 de la Revue semestrielle de droit animalier vient de paraître.

    Ce numéro compte 230 pages.

    Cette revue est à conseiller tant à ceux qui travaillent sur des campagnes/thèmes dans des associations animalistes qu'à ceux qui s'intéressent à la question animale dans le cadre de travaux universitaires ou d'un travail d'édition, ou qui sont simplement désireux de s'informer.

    Cette revue est éditée par l'université de Limoges (faculté de droit et des sciences économiques), dirigée par le professeur Jean-Pierre Marguénaud.

    Elle peut être téléchargée à cette adresse : http://www.unilim.fr/omij/rubriques/index.php?rubrique=42

    Ce numéro contient un gros dossier thématique (pages 161 à 230) sur l'expérimentation animale, dirigé par Florence Burgat (par ailleurs auteur d'un des articles).

    Dossier qui aborde le sujet sous l'angle éthique, scientifique, juridique, historique.

    http://florianelia.over-blog.com/article-33901736.html

    ***

    Parmi les formes d’utilisation des animaux, l’expérimentation semble occuper une place à part.

    En effet, lorsqu’il s’agit de soupeser la légitimité morale de chacune d’elles, on apprécie les avantages qui en sont retirés à l’aune d’un calcul qui met en balance les coûts pour l’animal et les bénéfices pour l’homme ; les fins ne sont donc pas toutes jugées systématiquement bonnes.

    Au regard de cette évaluation utilitariste, la fin justifie les moyens et les intérêts individuels sont subordonnés à ceux du plus grand nombre.

    De cette mise à l’épreuve, la chasse, la corrida, le port de fourrure ou la consommation de foie gras, notamment, devraient sortir vaincus puisqu’ils n’ont que le plaisir comme critère, au contraire de l’expérimentation animale qui relèverait d’un plus noble dessein : produire de la connaissance, dont une partie peut être utile à la santé humaine, voire animale dans certains cas.

    Mais un tiers de son domaine à peine pourrait tirer parti d’un tel calcul, car l’expérimentation est loin de se cantonner à la recherche médicale ; le recours aux animaux n’est pas une exception, il constitue au contraire la règle généralisée et systématique, comme l’énumération des domaines où ils sont convoqués en convainc.

    Quoique déséquilibrée et viciée dans son principe, puisque celui qui souffre subit en pure perte pour lui maux et plaies dont il ne réchappera pas, cette balance conduit à qualifier l’expérimentation de « mal nécessaire ».

    On élimine ainsi la question portant sur la légitimité de l’expérimentation et on l’élève dans le même temps au rang d’une pratique désormais « éthique ».

    Toute interrogation sur les fondements est donc d’avance tranchée et l’« éthique » cantonnée à la déontologie des bonnes pratiques : tu ne feras point souffrir inutilement les animaux de laboratoire.

    Du reste, prendre vraiment au sérieux l’injonction du « respect » dû aux animaux de laboratoire ne laisserait pas indemne leur statut, et un tel risque ne saurait être pris.

    On tente donc (c’est ce que je voudrais montrer), de manière très contrôlée et à des fins dilatoires, de mobiliser l’attention en direction de la seule procédure : un vocabulaire outrancièrement éthique est mis en place, tandis que la notion de « modèle animal » constitue le moment culminant et le piège profond de l’abstraction.

    Continuité et discontinuité : le paradoxe expérimental

    L’expérimentation sur les animaux est un mal nécessaire, dit-on.

    Est ainsi admis le double principe selon lequel les animaux sont au service des fins de l’homme et selon lequel on ne peut se passer d’eux pour faire progresser la recherche.

    Tout se passe par ailleurs comme si la reconnaissance du mal pardonnait la faute à demi.

    On présente comme une nécessité ce qui relève en réalité d’une décision métaphysique, morale et politique, sinon d’un pur pragmatisme cynique : puisque la continuité psycho-biologique entre les animaux et l’homme est établie, profitons-en !

    Il est à plusieurs égards sophistique de caractériser l’expérimentation animale comme un « mal nécessaire » : entreprise planifiée et routinière, elle est fondée sur le choix délibéré qu’une partie des organismes servira à la compréhension d’autres organismes, les premiers ne valant que biologiquement, les seconds valant moralement, et métaphysiquement aux yeux de certains.

    Aussi une continuité forte, voire une identité, entre l’animal et l’homme est-elle requise, et affirmée, pour valider l’expérimentation sur le plan scientifique, tandis qu’une discontinuité, d’un tout autre ordre et jamais clairement définie, intervient à pour permettre l’exploitation sereine de la continuité biologique préalablement posée.

    Un dualisme interne à l’homme vient prêter main-forte à cette logique : le corps humain est qualifié d’« animalité organique », de sorte que cette part vile peut être réparée par du vil (substances ou organes animaux ou, sur un plan plus abstrait, connaissances provenant de l’expérimentation animale) sans que son porteur en soit lui même avili.

    Mais qu’en est-il de la vie mentale, qu’il va donc falloir naturaliser à l’extrême et distinguer de toute « intériorité », qu’on réservera à l’homme ?

    C’est là, dans le cas de la modélisation des psychopathologies, que les limites du fondement analogique sur lequel repose l’expérimentation sont les plus manifestes.

    C’est aussi là qu’apparaît avec le plus de force le paradoxe de l’expérimentation : l’animal de laboratoire ne présente pas seulement l’avantage d’être un « organisme entier » : il a une vie psychique que l’on peut détraquer à loisir.

    On soumet des rats à une lumière intense, au bruit, à des chocs, à des traumatismes en tout genre qui sont censés reproduire le « stress de la vie moderne », et l’on teste leur résistance à tout ceci grâce aux antidépresseurs, anxiolytiques, etc.

    On évoquera le « test de la nage forcée » : lorsque les animaux comprennent qu’il n’ont aucune possibilité de cesser de nager, on regarde si le groupe auquel l’antidépresseur a été administré résiste mieux que l’autre à une situation sans issue.

    Ne doit-on pas, par parenthèse, s’interroger sur la psychologie de ceux qui ont conçu ces tests ?

    Plaques chauffantes ou réfrigérantes, piscines destinées à la nage forcée, et différents modèles de guillotines, pour en finir !

    La vue de ces équipements déniaise le candide, qui appréciera aussi l’humour du fabriquant : sur la plaque réfrigérante, un rat à la Walt Disney est déguisé en skieur, mais il a à proximité sa « bouée canard », car la neige fond à haute température !

    La similitude psychophysiologique entre les espèces, requise par l’extrapolation et sans laquelle l’expérimentation perd toute pertinence scientifique, rend du même coup vaine l’invocation de différences propres à tracer entre l’homme et les animaux une ligne de partage bien nette.

    Il faut trouver une différence ineffable.

    Le recours explicite à « l’éminente dignité métaphysique de l’homme » pour rendre raison des maux infligés aux animaux dans les laboratoires n’est plus guère de mise.

    On reconnaît de plus en plus volontiers que l’expérimentation animale constitue un mal que seule la recherche de remèdes aux « terribles maladies » qui accablent l’homme peut justifier.

    Mais l’argument se ne détruit-il pas de lui-même puisqu’il s’agit d’infliger à des animaux ces mêmes terribles maladies — identité sans laquelle la recherche d’un remède pour l’homme serait nulle et non avenue ?

    S’il n’est en effet pas moral d’introduire dans un œil humain des substances corrosives pour évaluer les dégâts qu’elles y causent, on voit mal — œil pour œil — pour quelles raisons il est moral de faire subir la même chose à un animal.

    Les tenants de l’expérimentation animale la déclare morale au motif que ce qui ne l’est pas, c’est ne de pas tout tester sur les animaux, aussi longtemps et sur autant d’espèces qu’il le faudra.

    L’argument de la maladie et de la souffrance humaines ne vaut pourtant que si les souffrances dont on afflige les animaux ne sont, elles, ni terribles ni réelles.

    Par quel tour de passe-passe le cancer de la souris, dont le développement doit permettre d’élaborer un traitement sur l’homme, est-il moins terrible et moins douloureux pour elle que pour « nous », la terreur induite d’un animal rendu fou de peur moins pénible pour lui que pour « nous » ?

    « Qui, nous ? ».

    Il faudrait prolonger cette remarque par une réflexion sur la solitude radicale de l’animal de laboratoire qui, dépourvu des armes de la compréhension et de la distanciation, ne peut prendre aucun recul à l’égard d’un mal qui l’accapare tout entier, sans espoir ni consolation d’aucune sorte.

    L’animal est encore, selon le constat (non pas désolé mais au contraire rassuré) de François Dagognet, « un vivant qui ne peut pas s’opposer ».

    Alors que la notion de consentement éclairé est au cœur de la bioéthique, l’animal de laboratoire est ce double de l’homme d’autant plus parfait qu’il est à tous égards impuissant à s’opposer aux traitements qu’on lui fait subir.

    Au fondement du consentement se tient le caractère indisponible du corps, en tant qu’il se confond avec l’individu selon une adhérence primitive, de sorte qu’il est impossible d’avoir un corps sans être en même temps ce corps.

    C’est ce qu’un dualisme persistant, et si utile ici, ne veut pas voir.

    On pourrait ajouter à ces premières raisons qui mettent en question l’évidence de l’expérimentation sur les animaux, le fait qu’elle cultive l’insensibilité.

    Songe-t-on en effet suffisamment à ce dont se nourrit le geste expérimental : nuire ?

    La notion de « modèle animal » ou le moment culminant de l’abstraction

    Toute une série d’opérations contribuent à déréaliser les animaux : ils ont été mis au monde, élevés, parfois « préparés », pour servir la recherche ; ils deviennent des « animaux d’expérience », et une fois entrés dans cette catégorie, ils ne sont plus regardés autrement ; aussi apparaissent-ils dans la rubrique « matériel et méthode » des articles scientifiques.

    Ce sont des modèles biologiques, et c’est peut-être ici que l’opération d’abstraction atteint son point culminant.

    Car le modèle n’est qu’un outil explicatif ; c’est là sa seule valeur.

    Le « modèle animal » se réduit à ce qu’il doit exprimer, mettre en évidence ; il se confond avec la maladie, le symptôme ou le comportement qu’il doit développer.

    Le paradoxe interne à l’expérimentation tient en ceci : ce qui la rend possible en fait sur un plan l’invalide en droit sur un autre plan.

    En effet, on affirme une nécessaire proximité psychophysiologique entre l’homme et les animaux, de sorte que l’un vaut pour l’autre, mais il faut la nier dans le même temps pour fonder une relation sans réciprocité.

    La notion de modèle constitue la résolution, si l’on peut dire, de cette difficulté, dans la mesure où le modèle dit à la fois la proximité avec les objets dont il permet l’explicitation, le caractère interchangeable de ses représentants (l’animal de laboratoire est un spécimen) et de ce fait sa pauvreté ontologique : il permet en effet l’intelligibilité de ce qui importe sans importer lui-même.

    Avec le modèle biologique, d’artificiel (maquette) le modèle devient naturel (un individu vaut pour un autre).

    Notons encore que l’analogie est au fondement de l’activité de modélisation : continuités analogiques, mais discontinuités ontologiques.

    L’animal va au laboratoire comme spécimen, mais aussi suppléant de l’homme : sa singularité est doublement niée.

    De chaque affection humaine, on cherche le meilleur modèle animal (le singe modèle de ceci, le chien modèle de cela, tandis que sur les rongeurs, comme l’écrit élégamment François Lachapelle, « on fait le gros du travail »).

    Le « bon modèle » est celui qui développe bien la maladie.

    La notion de modèle animal contient, au deux sens du terme, le paradoxe de l’expérimentation : le révèle et le retient.

    Le révèle puisqu’il pose une identité sur un plan (psychophysiologique) entre l’homme et les animaux, le retient par le sous-entendu d’une différence radicale (métaphysique ?) sur un autre plan.

    N’y a-t-il pas alors quelque chose d’insupportable dans cette manière d’opposer les souffrances, de juger certaines dignes d’être prises en considération, tandis que d’autres sont ravalées au rang de moyens ?

    Depuis quel sommet parle-t-on pour déclarer la souffrance animale moralement nulle et non avenue, quand elle n’est pas mise en doute dans sa réalité même ?

    Souffrance aux hommes, nociception aux animaux.

    Notons que la validité scientifique de l’extrapolation est de plus en plus contestée.

    « Aucune espèce animale n’est le modèle d’une autre », assènent certains scientifiques.

    Le caractère minoritaire, et courageux, de leur prise de position les ont amenés à s’associer.

    Ce doute jeté sur la validité de l’extrapolation, et par conséquent sur la fiabilité des résultats qui en sont issus, se fait jour dans les revues scientifiques, y compris de vulgarisation.

    Les objections à l’expérimentation proviennent donc pour une part de scientifiques qui discréditent la pertinence de l’extrapolation de l’animal à l’homme.

    Puisque les animaux vont au laboratoire comme suppléants de l’homme, expérimenter sur eux n’est jamais qu’un pis-aller, et c’est la raison pour laquelle le chercheur est, au cas par cas, en quête du meilleur modèle.

    Cette méthode, qui répond à une compréhension réductionniste des organismes vivants, bloque l’avancée de connaissances fondées sur d’autres conceptions de la maladie et de ses causes, néglige une véritable réflexion sur les modes de vie, dédaigne la prévention, est, enfin, prête à tout puisque tout est testé et méprise la mise au point de méthodes substitutives à l’expérimentation animale offertes par les méthodes d’investigation les plus avancées.

    La réponse déontologique : encadrement et bonnes pratiques

    Une fois engloutie la possibilité d’un jugement sur le fond, la place peut être entièrement occupée par l’injonction des « bonnes pratiques de laboratoire », parfois appelées, pour leur donner un peu de relief, les « devoirs de l’homme à l’égard des animaux de laboratoire », incluant des considérations sur leur « bien-être », leur « dignité », le « respect qui leur est dû ».

    Partout, il fait état d’« éthique de l’expérimentation », et celle-ci s’honore désormais d’une charte, dont l’article 1 est intitulé Respect de l’animal et dans lequel il est déclaré :

    « L’éthique de l’expérimentation animale est fondée sur le devoir qu’a l’Homme de respecter les animaux en tant qu’êtres vivants et sensibles ».

    On notera le traitement typographique différentiel : grand H pour l’homme, petit a pour les animaux !

    Cet article ne saurait fournir meilleur exemple du procédé qui vise à mobiliser l’attention du côté de ce qui n’est en réalité qu’un rappel élémentaire de la déontologie.

    Par la remarquable inflation de ce vocabulaire, par la création de comités d’éthique (en très large majorité composés de personnes favorables à l’expérimentation), on veut convaincre tout un chacun de la conscience aiguë, douloureuse nous dira-t-on bientôt, que le chercheur a de faire le mal — mais pour un bien — et de la responsabilité qui pèse sur ses épaules.

    Est aussitôt évoqué le spectre des maux humains, brandi pour convaincre, c’est-à-dire emporter l’adhésion par la peur (dont on connaît la puissance de tout faire admettre) et pour donner à croire que c’est en tuant les uns que l’on sauvera les autres, selon un principe qui n’est peut-être pas dépourvu d’une certaine dimension sacrificielle.

    Comme si ce sombre calcul nous rassurait.

    Comme si on se trouvait toujours face à la fameuse alternative – votre chien ou votre bébé – et qu’il fallait forcément se résoudre à choisir l’un contre l’autre.

    Si les défenseurs de l’expérimentation reprochent aux défenseurs des animaux de « jouer sur les émotions », ceux-ci n’ont rien à envier à ceux-là, mais les premiers font appel à l’égoïsme de chacun d’entre nous, tandis que les autres font appel à la compassion en chacun d’entre nous, voire au sentiment de justice.

    La rhétorique lénifiante du « bien-être animal », émanant de chercheurs soucieux de pérenniser une pratique de plus en plus controversée, emboîte le pas à l’effort du législateur pour encadrer l’expérimentation, tandis que Claude Bernard se contentait de dire qu’il faisait des vivisections pour voir.

    Ils promettent que tout est mis en œuvre pour « limiter les souffrances inutiles » et s’en tenir « aux cas de stricte nécessité », selon les termes de la loi.

    On prendra la mesure de cette stricte nécessité en considérant les finalités de l'expérimentation sur les animaux, fixées par le L’article R214-87 :

    « Sont licites les expériences ou recherches pratiquées sur des animaux vivants à condition, d'une part, qu'elles revêtent un caractère de nécessité et que ne puissent utilement y être substituées d'autres méthodes expérimentales et, d'autre part, qu'elles soient poursuivies aux fins ci-après :

    1° Le diagnostic, la prévention et le traitement des maladies ou d'autres anomalies de l'homme, des animaux ou des plantes ;

    2° Les essais d'activité, d'efficacité et de toxicité des médicaments et des autres substances biologiques et chimiques et de leurs compositions, y compris les radioéléments, ainsi que les essais des matériels à usage thérapeutique pour l'homme et les animaux ;

    3° Le contrôle et l'évaluation des paramètres physiologiques chez l'homme et les animaux ;

    4° Le contrôle de la qualité des denrées alimentaires ;

    5° La recherche fondamentale et la recherche appliquée ;

    6° L'enseignement supérieur ;

    7° L'enseignement technique et la formation professionnelle conduisant à des métiers qui comportent la réalisation d'expériences sur des animaux ou le traitement et l'entretien des animaux ;

    8° La protection de l'environnement ».

    Parvient-on à cette lecture à se représenter la quantité et le type d’expériences effectuées, dont le champ est véritablement infini ?

    Rien de ce que nous touchons, inhalons, mangeons, nos maladies et leurs remèdes, nos armes (nucléaires, chimiques, bactériologiques), jadis nos voitures (singes occupant la place du conducteur pour tester les chocs violents) n’échappe au contrôle par l’animal.

    On peut douter de l’impact de cette orientation réformiste pour deux types de raisons.

    Le premier porte sur les limites effectives de la réponse déontologique.

    Limites de l’encadrement juridique : les domaines d’application sont sans bornes ; une liberté totale est laissée au chercheur dans l’évaluation de la « nécessité » de l’expérience et dans sa conduite ; l’éventuel contrôle par les services vétérinaires ne porte que sur l’animalerie et les conditions d’hébergement des animaux ; l’évaluation des protocoles ne peut guère rencontrer d’obstacles, tant il a été veillé à ce que les comités d’éthique ne comportassent pas d’opposants à l’expérimentation ; notons enfin l’immobilisme de la structure européenne de validation des méthodes alternatives (ECVAM) qui entretient un cercle vicieux, car le législateur recommande de ne recourir aux animaux que si aucune autre méthode n’est disponible, or tout semble mis en œuvre pour que ces alternatives ne voient pas le jour.

    Quant à la formation, j’ai appris par une communication personnelle que les techniciens ne savaient tout simplement pas quels étaient les anesthésiants et les analgésiques adaptés à une chèvre ou un cochon, l’enseignement ne portant que sur les rongeurs !

    Tout est fait dans les discours et dans les textes pour conforter le credo du « oui, mais sans souffrance » ; il ne résiste pas à l’examen le plus élémentaire.

    Le second type de raisons tient dans l’injonction contradictoire qui consiste à conserver aux animaux leur statut d’animal de laboratoire tout en invoquant le « respect qui leur est dû » : à quoi, exactement doit-on du respect, dès lors que l’animal que l’on a sous la main va souffrir délibérément sous sa puissance ?

    S’il était vraiment « respectable », serait-il sur la paillasse ?

    On voit mal comment, dans le cadre réglementaire que nous avons décrit, une activité pourrait changer de statut tout en conservant son caractère routinier.

    Comme le souligne Jean-Pierre Marguénaud, on ne peut espérer voir appliqués les textes actuellement en vigueur dans le Code pénal, où se fait jour le souci de l’animal pour lui-même, dans un contexte où ce dernier possède le statut de bien dans le Code civil.

    Le problème est ici exactement le même : comment, dans un contexte où l’animal est – de fait – un matériel expérimental espérer qu’il se dote tout à coup, sous la main des mêmes personnes, dans les mêmes laboratoires et en étant destinés aux mêmes fins, d’un statut tout autre ?

    On sait bien que l’expérimentation animale n’est possible que si l’animal est vu comme du matériel, certes précieux, certes vivant, ce qui nécessite de prendre des précautions pour qu’il ne meure pas avant d’avoir répondu à la question qui lui est posée ou pour que ses souffrances, qu’il faut alors alléger, ne brouillent ni le déroulement ni les résultats attendus de l’expérience.

    Dès lors que l’animal de laboratoire deviendrait ce fameux « être sensible auquel on doit le respect », c’en sera fini de l’expérimentation, car le déni sur lequel elle s’appuie sera déjoué.

    Nous ne sommes pas en train de minimiser l’importance qu’il y a à observer les règles les plus strictes ni de décourager les propositions destinées à encadrer cette pratique ; nous nous employons à dissocier clairement deux choses : la réponse déontologique à une pratique dont le principe est toujours déjà admis et la discussion portant sur ce principe lui-même.

    Au terme de ce bref examen, ne doit-on pas admettre que c’est un pur pragmatisme, que l’on tente d’habiller pour le rendre moins cynique, qui motive l’expérimentation animale ?

    Mais à pragmatisme, pragmatisme et demi : n’est-ce pas alors sur l’homme lui-même qu’il faudrait expérimenter et non sur des modèles approximatifs qui font perdre du temps à la science et la font parfois gravement errer ?

    Où mène en effet l’idée que la fin justifie les moyens ?

    Que l’on songe combien tout peut être défendable par ce biais, et combien le critère de l’utilité peut tout cautionner, dès lors que l’on a décidé de prendre le point de vue du bénéficiaire.

    Florence Burgat, INRA-RITME, Université de Paris I, EXeCO

  • Une révolution du coeur (Francione)

    http://3.bp.blogspot.com/_nGtw0-cHs0k/SjvrqBXhXYI/AAAAAAAABYg/7C4thfV--aA/s400/StopViolence.jpg

    Chères collègues et chers collègues,

    Plusieurs défenseurs des animaux supposent que nous avons besoin d’une organisation - quelque organisation que ce soit - afin de défendre les animaux nonhumains ; que nous avons besoin d’un dirigeant - quelque dirigeant que ce soit - pour nous indiquer la voie à suivre.

    À mon avis, c’est une mauvaise manière d’envisager les choses.

    Malheureusement, dans un monde où tout est traité comme une marchandise, la justice sociale, c’est un peu surprenant, est elle-même devenue une commodité et elle est vendue, en plusieurs saveurs, par des corporations qui se partagent le marché de la compassion.

    Ces compagnies ont fait un formidable travail pour nous convaincre que la participation à toutes les luttes morales, incluant particulièrement la lutte pour les animaux, signifie leur faire parvenir un chèque.

    Dans un monde où nous acceptons des milliers de hiérarchies sans même le remarquer et sans même remettre en question le concept même de hiérarchie, nous présupposons que nous avons besoin de dirigeants pour nous montrer la voie.

    Ces dirigeants sont généralement les cadres des compagnies de la compassion.

    Et être simplement en désaccord avec leurs déclarations vaut d’être étiqueté de « puriste », d’« élitiste », de « réfractaire » de « condescendant » ou encore d’être considéré comme « une personne qui ne se soucie pas de la souffrance animale », etc., etc., etc..

    Je crois que cette manière de penser fait obstacle à notre cheminement vers l’objectif qui nous anime.

    Nous n’arriverons nulle part en bricolant une prétendue solution à la surface du problème.

    Nous n’arriverons nulle part en faisant la promotion des œufs de poules élevées hors cage, de la « viande heureuse » ou du lait biologique.

    Nous n’arriverons nulle part en nous assoyant nus dans des cages en prétendant que nous cédons au sexisme qui corrode insidieusement notre culture « pour la cause animale ».

    Cette approche entière ne fait que renforcer l’idée que nous pouvons nous débarrasser des injustices en consommant ; que nous pouvons échanger un type d’exploitation pour un autre; que nous pouvons acheter la compassion.

    Nous ne le pouvons pas.

    Dans un monde où les femmes, les personnes de couleur, les enfants, les personnes âgées, les personnes handicapées mentalement, les pauvres et d’autres êtres humains sont traités comme des citoyens de deuxième classe (au mieux) par le patriarcat privilégié qui dirige tout, les animaux nonhumains sont, de plusieurs façons, les plus vulnérables d’entre tous.

    Nous pouvons non seulement les torturer et les tuer en toute impunité, mais on s’attend à ce que nous le fassions.

    Bien que la violence contre un autre humain puisse entrainer une sorte de critique sociale ou même une sanction criminelle, la violence à l’encontre des nonhumains est généralement considérée comme une vertu, particulièrement lorsqu’elle est dite « humaine ».

    Ceux qui refusent de participer au carnage sont perçus comme des anormaux, presque antisociaux par, et surtout par, les grandes organisations qui déclarent qu’éviter tous les produits animaux et promouvoir le véganisme comme principe moral de base est « extrême ».

    Il est mal de traiter les fermiers, les chercheurs qui pratiquent la vivisection ou les producteurs de fourrure d’« ennemis ».

    Ils ne font que répondre à la demande - la nôtre.

    Ils ne font que ce que nous leur demandons de faire.

    Ils ne sont pas le problème - nous le sommes.

    L’abolition de l’exploitation animale exige un changement de paradigme.

    Elle exige que nous rejetions la violence à sont niveau le plus fondamental.

    Elle exige que nous reconnaissions que la violence est mauvaise, de manière inhérente.

    L’abolition de l’exploitation animale exige une révolution non violente - une révolution du cœur.

    Cette révolution ne sera pas le résultat du travail d’un dirigeant.

    Elle ne peut qu’arriver en chacun de nous, autant que nous sommes.

    Et elle le peut, si nous le voulons bien.

    Nous n’avons pas besoin de dirigeants.

    Nous devons admettre que chacun de nous peut - et doit - devenir le dirigeant si nous voulons avoir quelque espoir de nous sortir de cette catastrophe que nous appelons le monde.

    Et cela commence par notre propre véganisme - pas à titre de « mode de vie flexible » - mais comme un engagement basique, fondamental et non négociable à la non violence.

    Le véganisme éthique représente notre engagement envers l’idée que nous n’avons aucune justification morale d’utiliser des animaux - peu importe que ce soit de manière « humaine » ou non - pour nos propres fins.

    Cela fait suite à nos efforts quotidiens pour éduquer les autres, de manière créative, positive et non violente à propos du véganisme - quelque chose que chacun de nous peut faire s’il le veut.

    Chaque jour, nous avons l’opportunité d’éduquer notre famille, nos amis, nos collègues de travail et les gens que nous rencontrons dans les magasins ou les autobus.

    Est-il plus facile de remettre un chèque à quelqu’un d’autre que de faire le travail soi-même ?

    Bien sûr que ce l’est.

    Mais ça ne fonctionnera pas.

    Pour arriver à la justice, nous n’avons pas besoin de corporation.

    En fait, plus nous nous appuyons sur elles, plus loin nous resterons de notre objectif.

    Nous avons besoin d’un mouvement sur le terrain qui exige la paix, de manière pacifique.

    Malheureusement, les organisations de défense des animaux sont devenues des vendeurs modernes d’indulgences, semblables à l’Église catholique médiévale.

    Plusieurs personnes - peut-être la plupart - se préoccupent de la question de l’exploitation animale.

    Plusieurs ressentent une culpabilité tenace à l’égard de la consommation de produits d’origine animale.

    Plusieurs aiment leurs animaux de compagnie et les traitent comme des membres de la famille, mais ils plantent leur fourchette dans le corps d’autres animaux et, à un niveau ou un autre, perçoivent le paradoxe moral.

    Mais il n’y a pas de souci à se faire.

    Faites un don et ces groupes s’occuperont d’améliorer les choses.

    Ils « minimiseront » la souffrance animale; ils « aboliront » les pires abus.

    Je soutiens que, tout comme acheter une indulgence de l’Église ne nous garde pas loin de l’enfer (si l’enfer existe), acheter quelques parts de la compassion à l’origine des « œufs de poules élevées sans cage » que vendent certains organismes ne gardera pas les animaux à l’extérieur de l’enfer qui existe très certainement pour eux et dans lequel ils souffrent et meurent chaque jour.

    Nous devons changer la manière dont les humains envisagent les nonhumains ; nous devons changer la manière dont les humains envisagent la violence.

    Que ce soit la guerre pour atteindre la paix, ou le sexisme pour obtenir l’égalité des genres ou la torture plus « humaine » pour sensibiliser à propos des animaux, nous devons nous débarrasser de l’idée que la violence peut être utilisée comme un moyen d’atteindre de nobles fins.

    S’il vous plait, notez que je ne suis pas en train de dire que ceux qui sont impliqués dans les groupes welfaristes et néo-welfaristes ne sont pas sincères.

    Pendant si longtemps, on nous a dit que c’était la seule voie, que c’était les réformes welfaristes ou rien.

    Je ne porte aucun jugement moral sur eux en tant qu’individus et j’espère qu’ils ne portent aucune jugement sur moi, même s’ils rejettent l’approche abolitionniste des droits des animaux que j’ai développée et défendue.

    Je suis simplement en désaccord avec eux et je soutiens que l’état actuel des choses est une preuve accablante que leur interprétation du problème ne fonctionne tout simplement pas.

    Si qui que ce soit considèrent ces remarques comme de la « diffamation » ou de la « diabolisation », sachez, je vous pris, que ce n’est pas mon intention.

    Gary L. Francione

    P.-S. : ceci est paru dans le Huffington Post aujourd’hui : « Quiconque pense aider les animaux est, je le soumets humblement, dans l’illusion. Nous n’arrêterons pas l’exploitation animale en faisant la promotion de l’exploitation des femmes. »

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    Article pertinent :

    1. Une autre « révolution » welfariste qui n’en était pas une

    http://www.abolitionistapproach.com/fr/2009/07/14/une-revolution-du-coeur/

  • La religion de la non-violence (Francione)

    http://pagesperso-orange.fr/monique.vincent/radjasthan_temple_jain.jpg

    Chères collègues et chers collègues,

    La fin de semaine dernière, JAINA, la Fédération des associations jaïnes de l’Amérique du Nord, a tenu sa 15e convention biennale. La Convention a eu lieu à Los Angeles, au Centre jaïn du sud de la Californie, qui est une des plus belles bâtisses que j’ai vues partout en Amérique.

    Le thème de la Convention était « Écologie : à la manière jaïne ».

    Le choix de ce thème reflète un des points centraux de la tradition jaïne : que toutes les formes de vie sont liées par la coopération et l’interdépendance.

    Le Jaïnisme est une tradition spirituelle peu connue par la plupart des Nord-américains et elle est très mal comprise en général.

    Essayer de présenter le Jaïnisme dans un blog aura nécessairement pour conséquence d’en donner une description naïve qui ne rendra guère justice à cette incroyablement riche tradition spirituelle qui a précédé le bouddhisme et l’hindouisme, et qui compte certainement parmi les plus vieilles traditions spirituelles.

    Je vais tout de même reproduire le texte d’une déclaration préparée et distribuée par le Jaïn Yogendra qui, en plus d’être le vice-président de JAINA, est responsable du site appelé JainLink :

    Le jaïnisme est une religion et un mode de vie.

    Depuis plusieurs milliers d’années, les Jaïns ont pratiqué le végétarisme, le yoga, la méditation et l’environnementalisme.

    Les Jaïns respectent trois grands principes :

    La non-violence, qui est la compassion et le pardon en pensés, en mots et en actions envers tous les êtres vivants. Pour cette raison, les Jaïns sont végétariens.

    Le non-absolutisme, qui consiste à respecter les vus d’autrui. Les Jaïns encouragent le dialogue et l’harmonie avec les autres types de foi.

    Le détachement, qui est l’équilibre des besoins et des désirs, détachés de nos possessions.

    Les Jaïns croient en l’existence d’une Âme - en chaque être vivant - qui est éternelle et divine.

    LE MODE DE VIE JAÏN (JWOL, pour « jain way of life ») respecte et honore tous les êtres vivants à travers la mise en application des principes de non-violence, non-absolutisme et de détachement.

    Nous sommes tous interdépendants et, en respectant un MODE DE VIE JAÏN (JWOL), nous pouvons amener de la paix et de la spiritualité dans notre propre vie et dans celles qui nous entourent.

    Cette déclaration, que Yogendra distribue sur des cartes de la taille des cartes d’affaires, ne se veut certainement pas complète ou exhaustive, mais simplement une brève description des trois principes centraux qui caractérisent le jaïnisme.

    Les Jaïns sont non absolutistes, mais ils ne sont pas relativistes ; c’est-à-dire qu’ils reconnaissent qu’il y a une vérité, mais que la vérité est souvent complexe.

    Une chose que les Jaïns considèrent comme évidente et comme une vérité absolue est le principe d’Ahimsa, ou de non-violence, qui est véritablement la plus importante des idées du jaïnisme.

    Plusieurs Jaïns réfèrent à leur religion comme à la « religion de la non-violence ».

    En raison de leur adhésion au principe d’Ahimsa, les Jaïns ne mangent pas de viande, de poisson, d’oeufs ou de miel.

    Il y a un mouvement incroyablement fort au sein du jaïnisme vers un végétarisme strict et vers le rejet de l’utilisation de tous les produits animaux pour l’habillement ou pour d’autres fins.

    Un des dirigeants les plus influents du jaïnisme est Gurudev Chitrabhanu, qui est un végan très strict.

    Il n’y a pas de tradition spirituelle qui focalise sur les animaux nonhumains autant que le fait le jaïnisme.

    Non seulement les Jaïns sont-ils des défenseurs du végétarisme (et, de plus en plus, du véganisme), mais ils constituent la force derrière l’activisme en faveur de la protection des animaux en Inde.

    J’ai eu l’immense honneur de donner le discours d’ouverture de la Convention cette année.

    Comme vous pouvez vous y attendre, j’ai parlé du véganisme et de la nécessité de reconnaître que le principe d’Ahimsa exige que nous évitions l’utilisation de tout produit d’origine animale.

    Il y avait plus de 2000 participants à la Convention et ils ont tous accueilli ma présentation et mes opinions à propos du véganisme avec un enthousiasme considérable.

    Au courant des quatre jours pendant lesquels j’étais là, j’ai parlé avec des centaines de personnes qui m’ont confié penser que le véganisme représentait la bonne façon d’interpréter le principe d’Ahimsa.

    Au moins une douzaine de gens m’ont dit qu’ils adhéraient au véganisme dès maintenant !

    Bien que la nourriture servie lors de l’évènement n’était pas complètement végane, elle était principalement végane et tous les végans étaient complètement et respectueusement accommodés.

    J’ai beaucoup aimé participer à cette Convention et j’accepte la version végane du mode de vie jaïn, bien sûr !

    Je vous encourage tous à explorer cette tradition spirituelle.

    Il existe un formidable site qui offre (gratuitement) les textes complets de plusieurs livres en anglais (et en d’autres langues).

    Pour ceux dont les vues à propos des droits des animaux et de l’abolition sont, comme moi, fondées sur la non-violence, vous êtes probablement déjà des Jaïns sans l’avoir encore réalisé.

    Gary L. Francione

    P.S. : Je continue à recevoir des courriels de la part de personnes qui ont assisté à la conférence et qui deviennent véganes.

    Un commentaire :

    "J’étais sceptique lorsque vous avez dit que le chaï peut être aussi bon avec du lait de soya qu’avec du lait de vache.

    J’ai 63 ans et je n’ai jamais bu de thé sans lait.

    J’ai essayé les produits que vous avez recommandé (le lait de soya Silk, dans la boîte rouge).

    C’était délicieux.

    Je peux maintenant être végan sans aucunement en souffrir (bien que je l’aurais fait de toute manière après vous avoir entendu)."

    P.P.S. : Des réactions positives des participants à la Convention continuent d’affluer.

    Les gens étaient manifestement ouverts au message végan.

    Si vous voulez voir une vidéo de la présentation, il y en a une qui vient d’être ajoutée et que vous pouvez visionner en cliquant « talk » dans le texte.

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    Articles portant sur des sujets connexes :

    1. On Vivisection and Violence
    2. Quelques commentaires à propos de l’éditorial de Kristof portant sur la « viande heureuse »
    3. Un commentaire à propos de la violence
    4. Plus sur la violence et les droits des animaux

    http://www.abolitionistapproach.com/fr/2009/07/07/la-religion-de-la-non-violence/

  • Whittier Law School (Californie) : université d'été à Toulouse sur les droits des animaux

    http://www.archetype-intl.com/images/Whittier%20Law%20School/Whittier%20Law%20School.jpg

    L'Université américaine "Whittier Law School" organise à Toulouse une université d'été qui abordera les droits des animaux du 6 au 31 juillet à l'Université de L'Arsenal (université de droit).

    Le professeur a indiqué qu'il y avait 10 étudiants américains et 2 français à son cours.

    http://www.law. whittier. edu/centers/ abroad/france/ sa-france. html

    International Animal Rights (Course #912)
    (2 units) Professor Thomas Kelch
    M-Th: 2:00 - 3:10 p.m.

    This class examines animal law issues from an international perspective emphasizing the relationship between the EU and the US and relevant
    provisions in GATT.

    The course will survey traditional animal law issues from a European perspective, such as property status of animals, damages recoverable for injury to animals, factory farming and anti-cruelty laws.

    Occasionally, we are able to supplement the course work with a field trip(s), i.e., bullfight or to a local humane association.