Romain
" Le seul endroit au monde où l'on peut rencontrer un homme digne de ce nom, c'est le regard d'un chien. "
ROMAIN GARY
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" Le seul endroit au monde où l'on peut rencontrer un homme digne de ce nom, c'est le regard d'un chien. "
ROMAIN GARY
Le "Vegan day", c'est quoi ?
En novembre 1944, Donald Watson, un Anglais, fonda la Vegan Society, 100 ans après la Vegetarian Society (eh oui, 100 ans après !). Depuis 1994, afin de fêter cette création, de nombreux pays (Allemagne, Angleterre, Suisse, Australie, Canada, USA…) célèbrent chaque 1er novembre le « vegan day » ou « journée végétalienne ».
En français, vegan désigne plutôt les végétarien(ne)s ou végétalien(ne)s boycottant au maximum* les produits issus de l'exploitation animale : le cuir, le lait, les œufs, les produits testés sur les animaux, les zoos… synonymes également de souffrance et de mort pour des milliards d’animaux dans le monde (plus d'infos ici).
Programme
Des discussions et réactions de passantEs lors d'actions antispécistes, mises en contrepoint avec des images d'élevages, d'abattoirs et de pêche. Ces images laissent entrevoir comment les arguments spécistes servent à justifier des positions confortables...
La face cachée de la viande - 15 min - 2003 - de Maria Giannina Mura
Nathalie et Jeff de l'Association pour l'Abolition de l'Exploitation Animale mènent une action politique de contre-information tous les week-ends dans les rues de Paris. Avec leur « Faunavision » (unité audiovisuelle portable), ils donnent à voir des documents vidéos sur la condition des animaux dans les élevages industriels, les abattoirs et les poissonneries. Des images qui choquent et qui interpellent les passantEs.
Mais aussi : présentation d'un extrait de Earthlings (film), Cows with guns (dessins animé), Steven the vegan (sketche)...
Et évidemment : le buffet végétalien ! Pâté campagnard, tartare d'algues, cookies, chocolat blanc, rochers coco et autres délices vous attendent, et que la bonne humeur coule à flots ! Si vous voulez amener une des vos spécialités**, n'hésitez pas !
* "Au maximum", car la liste des produits animalement non éthique est malheureusement tellement longue, qu'il est quasi impossible de boycotter à 100% les produits issus de l'exploitation animale, qu'il s'agisse des additifs de synthèse testés sur les animaux, des médicaments, de la gélatine dans les pellicules photos, de l'oeuf dans le vin ou les jus de fruits, etc..
Dans une société non spéciste, nous aurons enfin le choix ! Sur la question du boycott, lire le très intéressant Au sujet de la pureté de Françoise Blanchon.
** végétalienne, puisque c'est le Vegan Day, et afin que tout le monde puisse la partager.
Extrait de La Mondialisationdes industries du sexe. Prostitution, pornographie, traite des femmes et des enfants, éditions Interligne, 2004, p. 194-95, par Richard Poulin, professeur de sociologie à l'Université d'Ottawa.
« Les témoignages 'explicites' de 'hardeurs' ne sont certes pas nouveaux. [...] Mais le plus pathétique est sans doute celui de Linda Boreman (1981), alias Linda Lovelace, la star du film culte Deep Throat - Gorge profonde - produit en 1972. Deep Throat est l'histoire d'une femme qui n'arrive pas à obtenir de satisfaction sexuelle, jusqu'à ce qu'un médecin (après examen approfondi) découvre son clitoris enfoui dans le fond de sa gorge. La hardeuse explore au cours de tout le film les 'caresses sexuelles buccales'.
Gorge profonde a été un des premiers films pornographiques à obtenir une audience débordant les salles pornographiques. Il a défié les lois américaines sur l'obscénité et a été présenté dans des salles de cinéma 'ordinaires' ; il a ainsi participé à la 'libération' de la pornographie aux États-Unis et dans le reste du monde occidental. Il a fait de la pornographie un phénomène social acceptable qui ne pouvait être contesté que par des conservateurs, des groupes religieux et des femmes coincées. Près d'une décennie après la sortie du film, qui en a fait une vedette, la hardeuse publie son autobiographie, Ordeal (Épreuve).
Elle y narre l'histoire du film et celle de son rapport avec son ancien mari et souteneur, Jack Traynor. Ce récit n'est pas une apologie de la liberté sexuelle, du sexe gratuit et du porno chic, mais celui de l'humiliation, de l'esclavage et de l'abus sexuel. Loin d'être consentante, Lovelace est la victime d'un mari proxénète brutal, qui, après l'avoir droguée et prostituée, la place devant les caméras sous la menace d'une arme à feu et la frappe sans la moindre hésitation.
Afin de réussir les fellations du film sans s'étouffer, elle a dû subir un entraînement pour apprendre à avaler entièrement un pénis. Pendant les mois qui ont suivi, de nombreuses femmes ont été hospitalisées aux États-Unis, victimes de viols de la 'gorge' du fait que leurs petits amis ont tenté de leur faire réitérer à la maison l'exploit de Lovelace, dans un état second et sous la menace.
Deep Throat a été tourné en 17 jours en Floride et a coûté 26000 dollars américains à réaliser. Il a rapporté à ses producteurs 600 millions de dollars, dont 100 millions en argent comptant. Linda Lovelace est vite devenue la première superstar du show-biz pornographique, le symbole sexuel de la femme 'libérée'. En fait, c'est un viol à répétition qui a permis à la pornographie de sortir de son ghetto.
Et son souteneur de mari ne lui a jamais versé un seul dollar pour ses 'prestations'. »
http://www.socialsciences.uottawa.ca/soc/fra/profdetails....
***
Inside Deep Throat, diffusé samedi 21 octobre sur Canal + à 23h25, la chaîne porno- et tauromaniaque.
« Après trente ans de distanciation critique, nous étions en droit d'attendre d'un documentaire sur le fameux film Deep Throat qu'il donne à penser le pornographique comme paradigme de la violence exercée sur les femmes, la porno n'en étant jamais, en effet, que l'exacerbation spectaculaire.
Or ce film est une exaltation continue de l'idéologie qui a permis de produire Deep Throat sans que jamais soit interrogée la logique du système qui l'a rendue possible. Sous le masque de la neutralité, divers intervenants racontent, avec une grivoiserie satisfaite, comment ils ont - avec un film à petit budget et sans acteurs professionels - contribué à la "libération sexuelle" des années 70.
Nous, en tant que sujets sexués au féminin, n'entendons pas le concept de libération ainsi qu'il nous est montré dans ce documentaire : tout entier voué à la célébration de la sexcision* et de la sexualisation* sous les formes les plus appréciées des spectateurs .
Le "génie" réalisateur du célèbre film est un ancien coiffeur convaincu du malheur sexuel des femmes condamnées, selon les confidences des clientes de son salon, à la triste position du missionaire dans l'amour ! Lorsqu'on lui offre une caméra, notre coiffeur se met en tête de LIBÉRER la sexualité de ces femmes. Il s'arroge le droit de décider de ce qui manque aux femmes : de l'audace, encore de l'audace, toujours de l'audace, à savoir découvrir et pratiquer la fellation.
Et c'est ici qu'entre en jeu l'héroïne de Deep Throat, l'actrice Linda Lovelace dotée, par le génie créateur de notre coiffeur, d'un clitoris artificiel au fond de la gorge lui permettant non seulement de jouir mais d'instruire le bon peuple américain de l'existence dudit organe (inconnu jusqu'alors des spectateurs, nous disent les sauveurs des femmes) et de l'orgasme clitoridien (inconnu aussi en 70). Bref, voici notre lascar propulsé au zénith par la grâce d'une gorge et d'un vit sucé ainsi qu'on ne le vit jamais (en tout cas sur écran géant).
Le documentaire prend le spectateur(trice) à la gorge (pardon pour cet involontaire jeu de mots...) en le sommant de se ranger, soit du côté du joyeux drille qui a inventé "le plaisir" pour tous au prix d'un billet de cinéma ou du côté des affreux censeurs à la Nixon qui ont interdit le film pour obscénité.
Faux dilemme et habileté remarquable du documentariste : choisir la liberté définie par qui détient les codes sexuels de la représentation ou refuser cette expression-là de la liberté au nom d'une idéologie puritaine. En dehors de cette apparente antinomie, point de salut. L'assujettisement sexuel du corps féminin et sa spécularisation anatomique ne sont jamais que l'autre visage de l'interdit d'exister du corps sensuel de la femme (toujours déjà rangée maman ou putain.)
La manifestation la plus évidente du faux dilemme est le traitement réservé aux discours féministes sur le film et sur la vie de Linda Lovelace, laquelle est l'auteur d'un ouvrage, Ordeal, relatant les sévices qui ont accompagné le tournage du film. Tel est le piège de la neutralité voulue : réduire le discours critique et politique de la porno par de célèbres féministes comme Steinem et les faire basculer dans le camp des censeurs obtus aux côtés de Nixon et de quelque procureur hanté par l'obscénité.
On peut se demander si la fonction de ce documentaire n'est pas d'empêcher toute réflexion sur la substance nourricière de la porno, à savoir un système où le phallus détient la production de la voix : la gorge de la femme ne servant qu'à recevoir le semen et le sémantique. Le film donne à voir ici dans sa littéralité comment le phallus produit l'aphonie des femmes.
Les vétérans autosatisfaits de la "libération sexuelle" (ils ont osé montrer une pipe, osé filmer du cul, etc.) se trouvent fort marris d'avoir été censurés par les tenants de la moralité puritaine américaine. N'ont-ils pas tout fait pour leurs concitoyens ? Et dès lors ne sont-ils pas victimes, d'une part de la censure puritaine de la droite conservatrice, d'autre part de la pègre qui leur a pris tous leur sous, via les mafias diverses du capitalisme qui les ont réduits au silence.
Le film porno était à l'origine, dans les années 70 - nous disent les protagonistes du documentaire - une innocente plaisanterie (où chacun et chacune aurait trouvé son compte) avant de devenir par la disgrâce de la globalisation, de la multiplication des vidéos, DVD et des circuits en tous genres, une industrie d'où feraient défaut le talent, l'invention, le dialogue et surtout l'esthétique. Qu'on se le dise !
Soigneusement gommée du documentaire, la violence du viol (pourtant soulignée par Linda Lovelace à plusieurs reprises). On ne retiendra que les larmes de l'amie d'enfance qui, voyant Deep Throat au cinéma, comprend la déchéance de Linda, à jamais stigmatisée comme "gorge à bite".
Ce documentaire fait apparaître comment la neutralité est nécessairement une adhésion à la source même de la domination (telle la Suisse qui, neutre pendant la guerre, garde l'or des nazis). »
Michèle Causse, écrivaine, Contre le sexage, Paris, Balland, 2000.
Katy Barasc, philosophe.
THE STORY OF BRITCHES AS TOLD BY A BRITISH SCIENTIST WHO WAS ONCE A WITNESS TO ANIMAL EXPERIMENTATION
The second case concerned Britches, a newborn stumptail macaque monkey. Ungainly, with large sticky-out ears, he was nevertheless beautiful. Like any other baby macaque, he would have had huge round eyes and would have spent the early months, even years of his life clinging to his mother. Neither of those things applied to Britches because immediately after birth at the University of California’s research centre at Riverside, Los Angeles, in 1985, he was removed from his mother and his eyelids were stitched together.
The stitches which blinded him were not even the neat, surgical sutures of experience but huge crude stitches with thick twine, the stitches of indifference, the equivalent of stitching a human’s eyes with string.
So desperate was this little creature for comfort that he would cling on to and hug anything placed in his cage - a blanket, a small cuddly toy, anything. But, deprived of all comfort, all maternal care, and kept in a sterile and barren cage without stimulation, he was mostly allowed only a padded cylinder to cling to.
Watching one animal inflict such intense suffering on another, particularly one so innocent and uncomprehending is, undoubtedly, the worst sight I have ever seen in my life. And the reason for this experiment? To determine the effect of blindness on children. The vivisectors at the University of California excused their use of the monkey by saying that the daily routine of children’s lives made it too difficult to work with them.
What type of mind could have conceived of this and, perhaps more importantly, could have carried it out?
The wide-ranging work I did on vivisection led me to conclude that most vivisectors fall into one of two categories. To the first, all that matters is cause and effect. They have absolutely no concept of suffering and no conscience about what they do. They storm into the laboratory, administer the injections or shocks or force feeding, storm out again and await the results. They are, in its truest interpretation, the psychopaths of science.
The second type is the sadist. We have been brought up with a belief, repeated and reinforced every time a vivisector talks about their work, that they partake in it unwillingly and in our best interests. It’s nonsense. Many of these people obviously get a buzz out of the torture they administer and the name of the game is power. There is not a shadow of doubt in my mind that they would do these same things to humans without a second thought if it were given legitimacy. There was no shortage of scientists and doctors eager to carry out unspeakable experiments on humans at Buchenwald and other concentration camps. Perhaps even more frightening, there were almost no lengths to which British and US security forces would not go in order to spirit these people out of Germany at the end of the war and save them from trial in order to have access to their knowledge. This sadistic breed of scientists did not suddenly appear from nowhere and live only in Nazi Germany. They exist everywhere."
The story of Britches has a happier ending than most vivisection victims. He was released from his misery when still a young baby, the stitches removed from his eyes and the long and painful process of trying to repair the acute psychological damage undertaken. It would be nice to think that this compassionate response was initiated by the vivisectors responsible for his pain - but it wasn’t. It was made possible only because the Animal Liberation Front (ALF) broke into the laboratories and released him, finding a loving and caring refuge where he would be safe.
It’s quite difficult for me when asked by journalists about my views on the ALF. The question is usually posed in conjunction with alleged ALF violence against humans and I know that any vaguely supportive response will be used as a stick with which to beat me and my organization, particularly as I work so much with young people. Of course I don’t support any action that endangers human life or safety. But when I look at footage of Britches’ abysmal life at the hands of his vivisectors and then a few months after his rescue, my heart goes out to those who were brave enough to risk their own liberty to release him from such a squalid existence.
« Les animaux sont mes amis… et je ne mange pas mes amis », disait George Bernard Shaw. Non seulement ça semble logique, mais c’est logique ; ça ne signifie ni plus ni moins que la chose suivante : les amis des animaux doivent devenir végétariens ! Souvent, on entend cette objection : « Ne pas manger de viande est sans doute un bon principe. Mais, si l’individu que je suis deviens végétarien, cela ne changera pas le cours des choses ; cela n’aura aucun impact. » Celui qui dit ça devrait songer aux remarques qui suivent :
Chaque jour, des milliers d’êtres humains sont assassinés de par le monde. Cela ne changerait donc fondamentalement pas grand-chose si j’en assassinais un de plus. Pourtant, ce n’est ni notre manière de penser ni notre manière d’agir.
L’industrie de la viande n’est pas le seul domaine où se produisent des choses que nous condamnons sans que nous puissions dans le moment influer directement sur elles. C’était le cas par exemple à l’époque de la course aux armements. Qu’ont fait les gens qui s’opposaient à cela ? Ils ont manifesté. Devenir végétarien est aussi une manière de manifester. En devenant végétarien, on manifeste que l’on trouve injuste de torturer et de tuer des êtres sensibles dans un objectif aussi futile que nos goûts culinaires.
Qui plus est, le végétarisme n’est pas n’importe quelle manière de manifester ; c’est la plus essentielle et la plus urgente qui soit. On ne peut convaincre personne du bien-fondé de quelque chose que l‘on ne met pas soi-même en pratique. Aucun des mouvements contre l’injustice et l’oppression, par exemple contre l’esclavage, le racisme ou le sexisme, n’aurait pris corps ni encore moins triomphé si les militants avaient attendu d’être certains de la victoire avant de s’engager.
Après chaque grand crime de l’histoire de l’humanité, les gens impliqués se sont justifiés rétrospectivement de la manière suivante : « Seul, que pouvais-je faire ? Ça ne dépendait pas de moi. » Et si, justement, ça dépend de chaque individu. Tant qu’on ne devient pas un élément constituant de la résolution d’un problème, on reste partie intégrante de ce problème. Cela est particulièrement vrai en ce qui concerne la consommation de viande. Que l’on se représente quelle différence il y a entre une vie de mangeur de viande et une vie de végétarien ! Concrètement parlant, les consommateurs de viande sont responsables de la mort de six moutons, huit vaches, vingt-cinq lapins, trente-trois cochons, trois cent quatre-vingt-dix poissons, sept cent vingt poules et maints autres animaux. C’est en effet le nombre d’animaux que les êtres humains mangent en moyenne durant leur vie.
Mais chacun a le pouvoir d’arrêter à tout moment de participer à ce massacre envers les animaux. Chacun a le pouvoir de cesser immédiatement de participer à cette guerre contre ces êtres innocents et sans défense.
Extrait du livre le plus récent de Helmut F. Kaplan, Der Verrat des Menschen an den Tieren (La Trahisondes hommes envers les animaux), Vegi-Verlag, ISBN 3-909067-06-9, 260 pages, 15 E chez l'Association Suisse pour le Végétarisme (AVS) asv@vegetarisme.ch - www.vegetarisme.ch
Un néologisme vient de se tailler une place, de façon fracassante, sur notre scène politique : " islamophobie ".
Ce mot, proche, phonétiquement, de " xénophobie ", est autant destiné à faire peur - en évoquant, de manière subliminale, la haine, les persécutions, les discriminations - qu'à culpabiliser.
Quelques-uns voudraient le voir devenir synonyme de " racisme " et symétrique d'" antisémitisme ", deux monstres qui ne dorment que d'un œil.
Son usage, pourtant, est-il en adéquation avec la double exigence républicaine : sauvegarder la laïcité et combattre le racisme ?
N'engendre-t-il pas des amalgames aux résultats ruineux pour la République, ses valeurs et son héritage ?
Une enquête, réalisée par Caroline Fourest et Fiammetta Verner dans leur livre Tirs croisés [1], sur ses origines et son histoire, réserve des surprises, donnant à voir les intentions de ses concepteurs.
Il n'est pas innocent que le vocable d'" islamophobie " ait été forgé initialement (dans les années 1970) par des islamistes radicaux s'attaquant aux féministes.
La guerre contre les femmes est le berceau de ce terme ; ainsi, Kate Millet, célèbre militante du mouvement de l'émancipation féminine, fut violemment insultée, puis traitée d'islamophobe pour avoir incité les iraniennes au refus de porter le voile.
C'est à nouveau autour de la question de l'apartheid des femmes - foulard à l'école, dans des institutions, dans la rue, auto-ségrégation dans des piscines - que se concentre la crispation, et que l'accusation d'islamophobie menace quiconque s'élève contre la tentative d'officialisation de cet apartheid.
Dans les années 1990 le terme d'" islamophobie " a été diffusé plus largement par les islamistes londoniens dans le cadre des campagnes anti-Rushdie.
L'écrivain et les défenseurs de la liberté de penser et de publier se trouvaient accusés du crime d'islamophobie tout en étant menacés de mort.
Le concept d' " islamophobie " est originairement une arme forgée par les islamistes dans le but d'imposer leur vision totalitaire du monde.
Il plonge ses racines dans le plus sordide obscurantisme. Au départ, " islamophobie " était donc un mot de combat - et chacun se souvient de la formule du poète révolutionnaire Maïakovski, " les mots sont des balles " !
En le réutilisant naïvement, de sincères amis de la liberté se placent sur le terrain de ses adversaires.
Peut-on, comme le souhaitent les islamistes, identifier l'islamophobie avec un racisme et l'équivaloir avec l'antisémitisme ?
L'amalgame entre l'islamophobie et le racisme est destiné à se retourner contre toute critique de la religion, si importante dans notre culture depuis Bayle et Voltaire, si importante aussi dans l'élaboration de l'idée républicaine.
Est-il " raciste " de refuser les exactions qui se pratiquent, de la Mauritanie jusqu'au Pakistan, au nom de l'islam ?
De refuser la charia, les lapidations, les mutilations, l'esclavage (encore vivace dans des sociétés musulmanes), la criminalisation de l'homosexualité, le statut inférieur des femmes, etc ?
Est-il raciste de rappeler que dans aucun pays musulman les droits de l'homme ne sont à l'honneur, pas plus d'ailleurs que la démocratie ?
Est-il raciste d'estimer que des centaines de millions d'êtres humains vivent quotidiennement sous le joug imposé par cette religion ?
Est-il raciste de s'inquiéter des exigences, dans notre société, d'une religion qui a aussi peu fait la preuve de sa capacité à intérioriser les valeurs issues des Lumières ?
Est-il raciste de se poser la question: un islam à visage humain est-il possible, comme on se demandait naguère si un socialisme à visage humain est possible ?
Si le racisme (par exemple: l'arabophobie) est absolument condamnable, le combat contre les empiétements du religieux sur la vie civique, combat dont sont issues les valeurs républicaines, ne l'est aucunement.
L'islam est une religion - un ensemble d'idées, de mythes, de superstitions et de rites - pas une " race " (si ce mot a un sens) ni une ethnie.
Il existe des musulmans de tous les types humains ; cette religion, semblablement au christianisme, vise à l'universalité.
Etant une religion, l'islam est aussi une idéologie, comme le communisme et le libéralisme.
Doit-on condamner l'antilibéralisme ou l'anticommunisme, le refus de leurs idéologies et de l'organisation du monde qu'elles impliquent, comme s'il s'agissait de racisme ?
L'attitude accusée d'islamophobie n'est pas du racisme, dans la mesure où, loin d'être la haine de tel ou tel peuple, elle est le refus véhément de ce que certains prêchent et veulent imposer au nom de l'islam.
Elle est le refus des aspects archaïques et incompatibles avec les valeurs républicaines, que véhicule une certaine interprétation de l'islam.
L'antisémitisme, pour sa part, ne stigmatise pas une religion, mais un peuple.
Or, il n'y a pas un peuple musulman comme il y a un peuple juif ; par suite, la mise en parallèle de l'islamophobie et de l'antisémitisme est abusive.
L'islam est un attribut accidentel, applicable - du fait de sa nature prosélyte - à tout être humain, quelles que soient son ethnie et sa couleur de peau.
Au contraire, Juif ne désigne qu'un seul peuple, à cause de son non-prosélytisme.
Loin d'être le simple combat contre une religion, l'antisémitisme est la haine immotivée et inextinguible d'un certain peuple, le peuple juif.
Les Juifs pourraient bien être athées, changer de religion, que l'antisémitisme persisterait.
S'il existe des Juifs athées (parce que le mot " juif " énonce l'appartenance à un peuple, quelles que soient les idées de ceux qui sont ainsi indexés), la locution " musulman athée " s'avère absurde, (parce qu'être musulman signifie adhérer à une croyance).
Les islamistes voient, dans la bataille du vocabulaire, un enjeu d'importance.
Le terme d'islamophobie cache le piège tendu aux institutions laïques par les intégristes musulmans pour empêcher la critique de la religion, tout en soumettant des segments de l'existence sociale (spécialement celle des femmes) à une emprise totalitaire.
Perdre la bataille sémantique, en réutilisant le vocabulaire mis en circulation par les islamistes, comme s'il allait de soi, est désastreux.
Le mot " islamophobie " rabat, à faux titre, la défense de la liberté et de la laïcité sur l'intolérance et sur la haine.
Il réussit à contraindre les valeurs républicaines à demeurer sur la défensive : ce sont elles, désormais, qui, mises en difficulté par la sophistique d'un tour de passe-passe lexical, se voient accusées d'intolérance et d'intégrisme.
La prestidigitation de ce mot consiste à renverser la réalité en plaçant l'obscurantisme dans la position de la victime et la laïcité dans celle de l'agresseur.
La laïcité doit maintenir le mot " islamophobie " hors du cercle des débats, tout en pourchassant le racisme, en particulier l'arabophobie.
R. Redeker (Ce texte a été publié dans La Dépêche du Midi le 21 octobre 2003.)
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[1] Titre complet : Tirs croisés : La Laïcité à l'épreuve des intégrismes juif, chrétien et musulman : voir sur le site d’Amazon. Le site Prochoix met en ligne les nombreuses recensions de cet ouvrage : voir sa Revue de Presse.