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Humanitaire - Page 7

  • "Nous sommes tous des charlots", Nicolas-Jean Brehon (Le Monde)

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    Par Nicolas-Jean Brehon, initiateur du parcours du « Paris arabe historique »

    Nous sommes tous des Charlie ? Ah oui, vraiment ? Personne n’est Charlie. Charlie avait une audace, une irrévérence, une liberté dont j’use et abuse aujourd’hui, mais dont personne n’est à la hauteur. Car si c’était le cas, toute la presse, nationale, européenne, mondiale, devrait publier les fameuses caricatures qui, sans nul doute, ont été à l’origine de la vengeance meurtrière. Mais qui osera ?

    Certes, on va tous se réunir pour une minute de silence, on va tous porter notre badge Je suis Charlie. Le fameux soir, des textos circulaient pour mettre des bougies aux fenêtres. Mêmes les Américains sont des Parisiens, pour l’heure, et les symboles de cette bonne conscience hypocrite, en publiant des dessins floutés. Ces gestes de compassion ne doivent pas faire illusion. Non seulement, Charlie a été lâché par de nombreux politiques, en son temps, mais, demain, qui osera dire, écrire, dessiner comme ces assassinés ? Maintenant que tout le monde sait que le premier qui le fait sera buté. Un jour. Même dix ans après.

    Ce n’est pas faire d’amalgame que dire qu’il existe un terrorisme islamique. C’est au contraire faire le partage entre le bon grain et l’ivraie, entre les hommes de bonne volonté et l’ivresse religieuse. J’espère faire partie des premiers. Mais j’ai peur.

    Qui dira les mots ?

    Peur de la terreur bien sûr, mais peur de nos faiblesses surtout. Tellement limpides à l’examen des propos convenus des officiels. « Acte terroriste », « Neutraliser les criminels », qui relèvent de la psychiatrie, ajoutent même certains. L’affaire est traitée comme s’il s’agissait d’une attaque de bijouterie ou d’un attentat dans la rue, voire d’une maladie mentale. Alors qu’il s’agit d’une explosion d’un pilier de la démocratie. Il faut voir les choses en face. Seul Philippe Val, l’ancien patron de Charlie Hebdo, a eu les mots justes sur BFM : « Il faut apprendre à ne plus parler de la même façon de tout ça. »

    Mais qui dira les mots ? Qui redessinera ? Puisque la terreur, ou pire, l’auto-contrôle, s’est imposée dans nos têtes. Il y a deux façons de lire cet événement. L’intellectuelle et la déjantée.

    La liberté de la presse est au fronton de la Déclaration des droits de l’homme de 1789. Elle a été assassinée en 2015. Le 7 janvier 2015 à 11 h 28. A cette heure, des Français ont tué ce que la France de 1789 avait su créer. Les auteurs du massacre avaient sans doute d’autres lumières en tête et avaient pour ressort un sens du sacré qui fait leur folie mais aussi leur force. Face à une société qui n’en a plus.

    Et puis, il y a la façon Charlie. Cette tuerie a été commise par des pieds nickelés grotesques qui n’ont aucune idée de ce que veut dire la liberté de la presse. Grotesques – qui perdent leur carte d’identité ! – d’identité ? – mais armés. Rien à faire ce matin, tiens, si on allait buter Cabu ?

    Une idée pour conclure, : changer le nom de la rue Nicolas-Appert en rue Cabu ou en rue Charlie-Hebdo. Un nom de rue, ça conserve.

    En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/01/10/nous-sommes-tous-des-charlots_4553569_3232.html#P8RLytG0zo5E8syZ.99
  • "Un Mai 68 de la sensibilité ", Jacques Julliard (Le Monde)

    A Paris le 11 janvier.

    Par Jacques Julliard

    Wolinski se serait largement esclaffé si on lui avait dit que les cloches de Notre-Dame sonneraient le glas à l’annonce de sa mort.

    Cabu se serait étranglé de rire à l’idée que tous les beaufs de France s’apprêtaient à lui rendre un hommage éploré.

    Charb aurait crié au fou si on lui avait annoncé que le président de la République viendrait saluer sa dépouille mortelle.

    Tignous aurait cligné des deux yeux s’il avait appris que Le Figaro allait lui consacrer sa « une ».

    Et Bernard Maris serait demeuré ahuri de voir son ami Michel Houellebecq traîné au banc d’infamie d’« islamophobie », comme hier Charlie Hebdo, pour des raisons semblables.

    Tous auraient pris pour une blague de potache l’unanimité qui se fait aujourd’hui autour d’eux chez les bien-pensants de tous bords. Autrement dit, il faut saluer ces martyrs du journalisme, dans l’esprit qui fut toujours le leur, jusque dans la mort, et se rappeler que l’humour est le nom de presse de la liberté.

    Que s’est-il donc passé ? Une chose toute simple, mais à la vérité fort inattendue : tout d’un coup, les Français en ont eu assez de se déprécier et de se mépriser. Ils n’en pouvaient plus de cette autodérision qui depuis quelque temps leur tenait lieu de lucidité et les dispensait de courage. Le hasard, ou si l’on veut le destin, qui, lui, ne manque jamais d’humour, leur offrit, pour célébrer leur bonne conscience retrouvée, l’holocauste de l’équipe qui depuis si longtemps symbolisait la mauvaise ; et, pour en finir avec l’autodérision qui les minait, d’exalter le journal satirique dont c’était la raison d’être. Oui, c’est l’actualité elle-même qui depuis mercredi a pris la forme d’une « une » de Charlie Hebdo et transformé le « bal tragique à Colombey » en un Grand-Guignol sanglant dans le 11e arrondissement.

    Dans une nasse hermétique

    Il n’est pas jusqu’à la valse-hésitation autour de Marine Le Pen, invitée à l’Elysée, mais non au cortège, qui ne souligne l’ambiguïté essentielle de l’événement : pour dénoncer dimanche 11 janvier le djihadisme et le terrorisme, c’est-à-dire l’intolérance, on se voit acculé à en exclure celle et ceux qui s’en font chaque jour les dénonciateurs professionnels et intéressés. Les partis politiques se sont mis, à leur corps défendant, dans une nasse hermétique : ou bien, en acceptant Marine Le Pen, ils lui confèrent la respectabilité républicaine qui lui manque ; ou bien, en la récusant, ils font d’elle la victime de l’intolérance.

    Qu’est-ce à dire ? Que les partis, tous les partis, du Front national au Front de gauche en passant par l’arc gouvernemental en entier, sont rigoureusement incapables de percevoir, de véhiculer ou de gérer tout changement brusque dans la sensibilité populaire. La France avait déjà connu cela en Mai 68, où, du jour au lendemain, les plus grands des partis se trouvèrent moins influents que le plus petit des groupuscules, et se trouvèrent soudain dépossédés de toute autorité sociale. A la question piège de la participation ou non-participation du Front national, il n’y a qu’une réponse républicaine : c’est le peuple qui défile, et non pas les partis : ceux-ci ne sont pas chargés d’encarter les émotions.

    J’ai parlé de Mai 68. Au vu et au su de ce qui se passe depuis quelques jours, c’est bien à quelque chose d’analogue que nous assistons : des inconnus se parlent, se prennent par la main, se donnent rendez-vous, se rassemblent spontanément. Des gens réputés indifférents aux affaires publiques prennent la parole… et la gardent. La parole politique échappe à ses professionnels et envahit la rue, charriant avec elle la bassesse et le sublime, l’ineptie et l’intelligence, le sursaut du courage et les infiltrations de la trouille.

    Carnavals de la parole

    La France est une grande abonnée à ces carnavals de la parole, à ces saturnales de la politique, où tous les signes, tous les symboles se trouvent inversés pour un temps limité. On a connu cela en Mai 68, en mai 1936, en février 1848, en mai 1789, et auparavant dans ces mouvements de foule que l’Ancien Régime appelait justement « les émotions populaires ». La France est l’ennemie des progressions uniformes et la championne des mutations brusques. Qu’en subsistera-t-il à plus long terme, quand se produira le reflux de la parole ? Sans doute une prise plus directe sur les problèmes que la classe politique met toute son étude à escamoter.

    D’abord, au-delà des émotions, du sang-froid, un refus de l’amalgame. Faire porter sur la communauté musulmane le poids de la responsabilité collective du terrorisme serait une grande erreur et un grand crime : il semble que presque tout le monde l’ait compris. Ensuite une approche plus directe du problème que les politiciens s’efforcent de dissimuler comme les réalités du sexe à l’ère victorienne. Car enfin, c’est parmi les musulmans que se recrutent les islamistes. De sorte qu’il n’y a pas de solution à la question du terrorisme sans une participation active de l’ensemble des musulmans. Nous sommes engagés dans une lutte de longue haleine, que les djihadistes conçoivent comme une guerre inexpiable à l’Occident et à ses valeurs. Ne disons pas trop vite « plus jamais ça » ! Il y aura, hélas, d’autres « ça ». Nous l’avons vu dans cet autre épisode tragique où une policière et des otages ont péri, victimes d’une rage meurtrière qui décourage toute interprétation rationnelle. Chaque mois, chaque semaine, la police déjoue des projets d’attentat de plus ou moins grande ampleur. Sans la collaboration active de l’ensemble des musulmans français, la démocratie française sera exposée demain à des risques considérables.

    Il y faudra aussi du courage. Les journalistes de Charlie Hebdo étaient non seulement des hommes de l’humour, mais des hommes du courage. L’intolérance islamiste, ils l’ont appelée par son nom. Faute de l’avoir fait assez clairement, nous portons tous une part de responsabilité dans leur mort. Ils se sont battus seuls. Ils sont morts seuls. La France réussit très bien les grands enterrements en forme de repentance tardive. S’il est une tradition qu’on voudrait voir abandonnée, c’est bien celle-là.

    Journaliste et écrivain, Jacques Julliard a notamment publié La Gauche et le Peuple, avec Jean-Claude Michéa, Flammarion, 2014

    En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/01/10/un-mai-68-de-la-sensibilite_4553567_3232.html#BBGkI6fCv9me4pll.99
  • Lé 7 janvier 2015, la cause animale a perdu quelques-uns de ses plus fidèles défenseurs

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  • Gloire à nos illustres pionniers !

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    Charlie Hebdo est mort parce qu'il incarnait cet esprit de résistance, cet esprit de fronde qui fait tant défaut aux médias actuels, tous soumis à la loi du spectacle et du politiquement correct.
     
    Charlie est mort de ne pas avoir été soutenu par bon nombre de politiques et de journalistes français, il y a deux ans, au moment des caricatures.
     
    Charlie est mort pour avoir osé être libre dans sa parole et sa pensée, pour avoir osé se foutre publiquement des culs-bénis mahométans, les frères jumeaux de nos propres réactionnaires catho-fachos si haïs par la gauche - cette gauche qui a soutenu pourtant les réactionnaires islamo-fachos au nom de l'Autre sacralisé et de l'antiracisme dévoyé.
     
    Nous payons aujourd'hui, et paierons demain, le prix d'un tel soutien naïf et aveugle au pire, à très large échelle.
     
    Charlie est mort.
     
    Vive Charlie !
     
    Méryl Pinque
     
  • "Contre le mantra de l’amalgame", par Guillaume Bidot (Le Monde)

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    En réponse au massacre à Charlie Hebdo, politiques, experts et journalistes ont appelé à éviter « tout amalgame ». Ce mantra entend protéger les musulmans en France que pourtant nul ne menace. Qui s’en prend à l’islam dans notre pays ? Combien de manifestations appelant au meurtre des musulmans dénombre-t-on sur notre sol ? Cette attitude qui consiste à dédouaner une religion que personne n’accuse est aberrante.

    Si un fanatique juif ou catholique avait vidé son chargeur à la sortie d’une mosquée, aurait-on entendu la même litanie visant à ne pas jeter l’opprobre sur les juifs ou sur les chrétiens ? Non. Si une telle horreur s’était produite, tout ce que la France compte de voix catholiques ou juives aurait alors exprimé sa compassion vis-à-vis des victimes et son dégoût vis-à-vis des brebis galeuses.

    En dehors de Dalil Boubakeur, issu d’un courant minoritaire, et des fortes paroles de l’iman de Drancy, combien d’autorités religieuses musulmanes en France fustigent ces « satans » ? Espérons qu’elles soient innombrables. Plutôt que d’appeler les détracteurs de Mahomet désormais menacés de mort à ne pas faire d’amalgame, il eût été plus judicieux d’appeler les imams de France à prier pour les morts et à « excommunier » les djihadistes. C’est à la deuxième religion de France de rejeter tout amalgame avec des fous assoiffés de sang. Et non à la France de parler à la place de l’islam français ?

    Ceux qui veulent à tout prix mettre l’islam hors du coup cherchent à exorciser un mal qu’ils connaissent : car s’ils sont une infime minorité, les islamistes criminels existent et bénéficient de la sympathie d’une frange minoritaire, mais réelle des musulmans de France. Sommes-nous certains que les islamistes les plus radicaux sur notre territoire soient si peinés d’apprendre que des mécréants ayant caricaturé Mahomet l’aient payé de leur vie ?

    Réalité complexe

    Cachez ce hijab (voile) que je ne saurais voir, voilà ce qu’exprime ce rejet pavlovien de l’amalgame. Cet acharnement à prévenir l’amalgame dissimule une réalité complexe, mais cette complexité ne revêt pas le sens que l’on voudrait lui donner : il n’y a aucune paroi étanche entre l’islam dit « modéré » et l’islamisme djihadiste, mais un immense dégradé. Et s’il est fort exact qu’une écrasante majorité des musulmans vomissent les criminels de Charlie Hebdo, une minorité radicale, sans être pour autant prête à prendre les armes, voire qui en condamne l’usage, se dit que les blasphémateurs ne l’ont pas volé.

    C’est pour tenter de recouvrir cette effarante réalité que nos médiacrates appellent au rejet de l’amalgame. Or, ils le font pour éviter de jeter de l’huile sur le feu. C’est bien mal connaître l’islam dans ce qu’il peut avoir de plus intransigeant : le Coran recommande au croyant, confronté à une loi plus forte que la charia, de composer avec elle et de faire profil bas. Les pro-djihad doivent sentir qu’ils n’ont rien à attendre du peuple français qu’un ostracisme implacable.

    Un Français musulman qui n’est pas prêt à stigmatiser les tueurs de Charlie Hebdo n’est plus un compatriote. Voilà la vérité qu’il faut avoir le courage de proclamer.

    Guillaume Bigot est l’auteur du Jour où la France tremblera, terrorisme islamiste, les vrais risques pour l’Hexagone, Ramsay, 2005.

    http://abonnes.lemonde.fr/idees/article/2015/01/09/contre-le-mantra-de-l-amalgame_4552843_3232.html

  • "La gauche radicale a eu tort d’attaquer la prétendue islamophobie de Charlie Hebdo", par Christophe Ramaux (Le Monde)

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    C'était finalement un testament. Dans un article de l’ensemble de sa rédaction publié le 20 novembre 2013 (dans Le Monde), Charlie s’élevait contre le procès en islamophobie intenté depuis longtemps par certains, en particulier à la gauche de la gauche. Un islamophobe, et il y en a, est un raciste. Un bouffeur de religions, et Charlie en était, n’est pas raciste. Il maudit toutes les religions et c’est bien son droit. Cibler uniquement l’islam, c’est cibler derrière lui certaines populations, les Arabes au premier chef. La rédaction de Charlie avait raison : en les accusant d’islamophobie, c’est un procès en racisme que d’aucuns s’autorisaient à son encontre. Une salissure ignoble pour ces dessinateurs et écrivains qui ont toujours eu l’antiracisme chevillé à la plume.

    Comment en est-on arrivé là ? Comment expliquer que des dirigeants d’Attac, du NPA, des journalistes de Politis et d’autres – les uns et autres ont organisé avec les Indigènes de la République et Mediapart une Journée contre l’islamophobie le 13 décembre 2014 – aient pu alimenter cette infamie ? Comment expliquer que certains animateurs des Economistes atterrés aient rejeté la collaboration de Charb au prétexte qu’il était islamophobe ? Les Economistes atterrés – dont le spectre va bien au-delà de la gauche radicale – ont heureusement remis les pendules à l’heure et rendu ainsi hommage à Bernard Maris, leur oncle à tous. Leur collectif d’animation a décidé, après débats et contre l’avis de certains irréductibles, de publier un communiqué où il est fait explicitement mention de la laïcité.

    Attac a décidé l’inverse. Son communiqué se refuse sciemment à mentionner la laïcité. On en est là : certains ont commis un précédent en accusant Charlie d’islamophobie. Après le massacre de la rédaction, ce précédent de trop appelait un sursaut. Nombreux dans la gauche de la gauche en sont conscients. D’autres s’acharnent dans l’aveuglement, en refusant de nommer la laïcité, ce pourquoi ceux de Charlie sont tombés. Ils proclament qu’ils sont « tous Charlie ». Au ciel, les principaux intéressés, fidèles à eux-mêmes, doivent en rire, mais en jaune amer. Comment expliquer cette dérive ?

    Les musulmans peuvent-ils être réactionnaires ?

    La réponse est dans le testament de Charlie. Sa rédaction s’interrogeait : au nom de quoi « la religion musulmane […] devrait, elle, être épargnée. Pourquoi diable ? Quel est le rapport, autre qu’idéologique, essentialiste au fond, entre le fait d’être arabe par exemple et l’appartenance à l’islam ? » C’est bien là le cœur du problème. Sans craindre le racisme pervers qui se niche ici, certains ne conçoivent pas que des musulmans, des immigrés ou enfants d’immigrés puissent être totalement réactionnaires, et même fascistes, au même titre que certains catholiques, protestants, juifs ou agnostiques. Plus de mille départs en Syrie, cela devrait alerter ceux qui n’ont pu envoyer que quelques dizaines de guérilleros en Amérique latine ou ailleurs.

    Ceux-là continuent néanmoins à nier qu’une frange extrêmement minoritaire, mais signifiante, de la jeunesse trouve sa cause dans le fascisme djihadiste. Nommer la chose serait favoriser « l’islamophobie ». Comme si la masse des musulmans n’avait pas besoin d’être soutenue dans la lutte sans merci de « tous ensemble » contre le fascisme vert. Selon Edwy Plenel, grand contempteur de l’islamophobie, la question qu’il convient de poser est « pourquoi notre société produit-elle ces enfants-là » ? Juste question de prime abord. Oui le capitalisme néolibéral, l’austérité, engendre comme toujours, chômage, précarité et désespérance sociale. Mais cela ne suffit pas. La politique ne peut être rabattue sur l’économie et la sociologie. Elle a son autonomie, sa consistance propre. Les mêmes conditions sociales ne produisent pas les mêmes trajectoires. Les êtres humains ont d’abord une tête, vivent de représentation. Ils ont leur autonomie, leur responsabilité.

    Dénier la responsabilité de ceux qui adhèrent à l’intégrisme radical, n’est-ce pas les nier un peu plus ? Et n’est-ce pas un narcissisme lui aussi pervers que de laisser entendre que « nous » sommes « aussi » responsables de cela ? La dite « société » n’est-elle qu’à accabler ? Aussi perfectible soit-elle, et elle l’est grandement, ne doit-elle pas aussi être défendue dans ses fondements mêmes – les valeurs républicaines dont la laïcité justement – face à ceux qui la violentent ? Au rassemblement de mercredi soir à Paris seuls « Charlie, Charlie » et « liberté d’expression » ont percé le silence de l’effroi. Quels seront les mots d’ordre des prochaines manifestations ? « Non à tous les fascismes dont celui des djihadistes » : c’est la seule trame susceptible de rendre véritablement hommage à la profondeur du combat de Charlie.

    Contre le fascisme brun donc, mais aussi – et explicitement – contre le fascisme vert, car le déni de ce dernier nourri le premier. La gauche radicale reprendra-t-elle cette trame ? Espérons-le. Il y aura bien d’autres chantiers à défricher pour elle ensuite : celui du rapport à l’Etat, à la nation, à la démocratie y compris représentative, au pouvoir justement, à l’intérêt général, à la société même.

    Il est minuit moins le quart pour la « génération » de mai 68. Charlie a été l’étendard le plus échevelé de cette génération. Qui l’eut cru ? Qui eut cru que ce soit par Charlie que cette « génération » fasse enfin le deuil de ses impasses ? Qui eut cru que Charlie soit élevé au rang de cause nationale, de deuil national, que résonnent par lui la rose et le réséda ? L’histoire prochaine de notre pays sera-t-elle aussi facétieuse que Charlie l’était ? Nous sommes peut-être « minoritaires » indiquait tragiquement le testament de Charlie. Pas sûr…

    En savoir plus sur : http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/01/09/la-gauche-radicale-a-eu-tort-d-attaquer-la-pretendu-islamophobie-de-charlie_4552848_3232.html#Zx6FFfLTuuDLK38b.99
  • Charlie Hebdo : un deuil français

    La guerre est bien là, entre nos murs, à cause de la lâcheté du PS et de l'UMP depuis 40 ans, qui ont laissé LE problème de l'islamisme aux mains du seul FN.

    Cette lâcheté, cette coupable naïveté, ont fait le jeu des terroristes et des barbares, qui prospèrent.

    ***

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  • La citation du jour : Jean-Paul Sartre

    "Etre libre, ce n'est pas pouvoir faire ce que l'on veut,

    mais c'est vouloir ce que l'on peut."

    Jean-Paul Sartre

    *

    Alors soyez libres : devenez végans.

    Maintenant.

  • Economie, littérature, même invisibilité des femmes

    lire

    Comment les femmes voient-elles le monde ? Peu nous chaut, semblent dire des magazines économiques et littéraires.


    Sur « les 20 livres qui ont changé votre vie » seulement deux sont écrits par des femmes : le Journal d'Anne Franck et Harry Potter. Voilà la réponse à la question posée par l’émission « La grande librairie » de France 5 à ses téléspectateurs et téléspectatrices (voir le palmarès ici). Bien sûr c’est un vote du public. Mais si les femmes qui écrivent étaient plus visibles, plus facilement éditées et moins caricaturées, les fidèles de l’émission auraient découvert leur talent, les auraient aimées avant ce vote…

    Cache-sexe contre l’oubli

    N’oublions pas que George Sand a préféré prendre un nom d’homme pour éviter que son œuvre ne tombe dans les oubliettes de la littérature et que l’éditeur de Harry Potter a conseillé en un premier temps à son auteure, JK Rowling, de n’inscrire que les initiales de son prénom sur le livre et de rester discrète jusqu’au succès de ses romans. A ce moment-là les fans ont découvert qu’elle était une femme. Il a fallu cacher son sexe pour que les critiques la prennent au sérieux.

    Même invisibilité dans le magazine « Lire ». La rédaction a organisé le prix des 20 meilleurs livres de l’année… et n’a choisi qu’un seul ouvrage écrit par une femme : « Réparer les vivants » de Maylis de Kerangal.

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    Héritières, compassionnelles ou décoratives

    Côté presse économique, c’est le magazine Challenges qui atteint des sommets cette semaine avec une couverture consacrée à 15 patrons auxquels le magazine a demandé de faire des propositions contre le chômage. Sur les 15, une seule femme… et 14 hommes parmi lesquels certains ont quelques casseroles et autres retraites chapeau. Et cette désagréable impression de mépris se confirme au fil des pages où les femmes sont d’une discrétion à toute épreuve. On y voit ici ou là une héritière, une femme primée pour son action compassionnelle, une DRH en photo format timbre-poste et une PDG qui a l’air d’être là par accident.

    Et à la fin du journal, nouveau club de vieux garçons : un sujet sur « les vrais pilotes de la croissance ». Comme le classement est fait sur les patrons des entreprises du CAC 40, aucune chance d’y voir une femme. Et le magazine se referme sur une page de publicité pour un parfum avec une belle femme habillée en sirène. Sirène oui, dirigeante non.

    Sur son site cependant, Challenges met en vedette Martine Aubry et Anne Hidalgo respectivement maire de Lille et maire de Paris. Elles s'opposent à la loi Macron. Mais le magazine ne peut s'empêcher de faire remarquer qu'elles sont des femmes avant d'être des responsables politiques. Le titre : "Hidalgo et Aubry jouent les Dames de pique" et, en photo d'appel : "les pétroleuses du dimanche soir"... Autant de symboles qui les ramènent à leur sexe. Le point de vue des femmes sur le monde n’intéresse pas ceux qui dirigent les journaux, l’économie, l’édition...

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    Pourquoi les femmes journalistes prennent la une

    Notre Editorial

    DOSSIER - Stéréotypes dans les médias, à l'école, dans les jouets, le sport...

    Dossier - Cherche femmes à l'antenne

    http://www.lesnouvellesnews.fr/index.php/cafouillage/66-sexisme-ordinaire/4101-economie-litterature-meme-invisibilite-des-femmes

  • Révélations sur les conversations des gendarmes lors de la mort de Rémi Fraisse (Le Monde)

    Le 2 novembre 2014, plusieurs milliers de personnes se sont réunies sur le site du projet de barrage de Sivens pour une marche blanche en hommage à Rémi Fraisse.

Photo: Ulrich Lebeuf / M.Y.O.P

    L'enquête sur la mort de Rémi Fraisse, le jeune manifestant de 21 ans, tué par une grenade offensive lancée par un gendarme lors des affrontements entre des opposants au projet de barrage de Sivens (Tarn) et des militaires, dans la nuit du 25 au 26 octobre, se révèle de plus en plus embarrassante pour les autorités.

    Selon des informations du Monde, les gendarmes ont tout de suite eu conscience de la gravité de la situation face à laquelle ils se trouvaient. C'est ce que révèle un procès-verbal daté du 29 octobre auquel nous avons eu accès, qui retranscrit les conversations des militaires sur place, enregistrées par la caméra d'un gendarme qui filme les affrontements.

    Lors de cette nuit, les militaires, équipés de jumelles à vision nocturne, voient un manifestant s'effondrer juste après le jet d'une grenade offensive, entre 1 h 40 et 1 h 50 du matin. A 1 h 53, un militaire ordonne : « Stop pour les F4 ! Il est là-bas le mec. OK, pour l'instant, on le laisse. » Les F4 désignent les grenades lacrymogènes instantanées (GLI), dont l'usage a été aussi suspendu depuis par Beauvau.

    « IL EST DÉCÉDÉ LE MEC ! LÀ, C'EST VACHEMENT GRAVE »

    Au milieu des cris, un autre gendarme tente de se rassurer : « C'est bon, il va se relever ! Il va se relever, c'est bon ! » Rémi Fraisse ne se relève pas. Sept minutes passent. A 2 heures, « On y va ! », un peloton fait une sortie pour récupérer le blessé. Sur procès-verbal, les enquêteurs de la section de recherches de Toulouse relèvent alors que le chef de l'unité demande à un de ses hommes « de soutenir ceux qui sont allés chercher le manifestant », sans préciser en quoi cela consiste.

    Les militaires ramènent le corps inerte de Rémi Fraisse. « Il respire ou quoi ? », s'inquiète le supérieur. L'infirmier de l'escadron tente alors les gestes de premiers secours. A 2 h 03, un gendarme s'écrie : « Il est décédé, le mec... Là, c'est vachement grave… Faut pas qu'ils le sachent... »

    Cette dernière phrase prononcée dans le feu de l'action vise les manifestants, selon la thèse avancée par le service de communication de la gendarmerie, contacté mardi 11 novembre. « Il fallait éviter que ceux qui agressaient les gendarmes ne redoublent d'ardeurs en apprenant la mort de Rémi Fraisse. » En aucun cas, affirme-t-on, il ne s'agirait d'une volonté d'étouffer l'affaire, la gendarmerie avançant pour preuve que le parquet a été avisé dans les minutes suivantes et une enquête judiciaire diligentée dans l'heure.

    Les rentranscriptions des conversations des gendarmes au moment du décès de Rémi Fraisse jettent cependant une nouvelle ombre dans un dossier où les autorités ont – au minimum – failli dans leur communication. Le ministre de l'intérieur, Bernard Cazeneuve, a notamment été critiqué pour être resté silencieux pendant plus de quarante-huit heures.

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