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Société - Page 95

  • Environnement : la filière de l'or, opaque de la mine à la vitrine

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    Sur une moyenne de 2 500 tonnes de métal jaune extrait chaque année par des firmes transnationales polluantes, seuls quelques kilos issus de l’orpaillage en Colombie peuvent revendiquer à ce jour le label d’or « propre », respectueux de l’environnement.

    La filière de l’or reste opaque par excellence. Même en France, où les écologistes viennent pourtant de remporter une petite victoire.

    Exemple en Guyane

    Gilles Labarthe / DATAS

    Or propre : métal précieux qui a été extrait dans le respect des populations locales et de l’environnement, par opposition à « l’or du sang » (provenant de zones dévastées par des conflits armés) ou à « l’or sale » (extrait au moyen de procédés hautement toxiques, comme le mercure ou le cyanure)…

    Pour une enseigne de luxe qui voudrait miser sur une ligne de bijoux « éthiques et responsables », se procurer de « l’or propre » représente encore un défi hors du commun.

    D’abord, parce que si l’on tient compte de critères écologiques, il faudrait disqualifier d’office la plupart des grandes multinationales d’extraction, accusées de pollution sur quatre continents (lire encadré).

    Où trouver de l’or propre ?

    En France, qui applique des réglementations très contraignantes, après avoir fermé le site polluant de Salsigne (lire ci-dessous) ?

    « La France se positionne à la fois comme pays producteur (sites aurifères de Guyane) et pays consommateur (grandes enseignes de la joaillerie internationale basées à Paris) », rappelait en mars 2007 une action commune de mouvements écologistes[1], qui proposait de lancer une campagne intitulée « D’où vient l’or de la place Vendôme ? ».

    Problème : même le gouvernement français n’arrive pas à assurer une traçabilité de la filière.

    Sur environ 10 tonnes d’or officiellement exportées de Guyane, moins de 4 tonnes sont déclarées à la production.

    Et les propositions de créer une commission d’enquête sur ce sujet sensible n’ont jamais abouti devant l’Assemblée nationale.

    La même opacité règne autour des conditions réelles d’extraction.

    Les lois françaises sont pourtant très strictes.

    L’usage du mercure pour séparer les paillettes d’or du minerai est officiellement interdit.

    Mais les ravages causés par l’orpaillage clandestin sont toujours d’actualité : en visite en Guyane la semaine dernière, le président Nicolas Sarkozy l’a encore publiquement dénoncé, annonçant qu’une « opération exceptionnelle de sécurisation du territoire de la Guyane va débuter ».

    S’attaquer aux garimpeiros (orpailleurs illégaux brésiliens, responsables de pollution au mercure de la forêt tropicale guyanaise[2]) est une chose, mais peut-on citer aujourd’hui une seule multinationale aurifère sur place qui soit vraiment respectueuse de l’environnement ?

    Contacté par téléphone, Patrick Monier, président d’Attac-Guyane, n’en voit aucune.

    « Vaut mieux arrêter d’extraire de l’or », conclut en substance Patrick Monier, qui reste très dubitatif sur le concept d’ « or propre ».

    Quel que soit son mode de traitement, le métal jaune engendrerait de toute manière un cortège de nuisances.

    Sa valeur est arbitraire.

    Autant s’en passer, selon lui.

    Autre danger : celui que le concept d’or propre soit récupéré par des firmes transnationales, qui pointent du doigt les dégâts commis par l’orpaillage traditionnel et l’utilisation du mercure, pour se profiler comme seules garantes d’une extraction industrielle effectuée « dans les règles de l’art ».

    Le lobby industriel minier semble très actif dans ce domaine.

    « Nos entreprises s’engagent sur la voie de l’or propre », déclarait en 2004 Jean-Paul Le Pelletier, Président de la Chambre de Commerce et d’Industrie de la Guyane (CCIG).

    Pour savoir lesquelles, nous avons joint en France le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), qui fait autorité au niveau international en matière d’études géologiques et des répercussions du traitement des minerais sur l’environnement.

    Au BRGM, Valérie Laperche s’interroge.

    A l’extraction, elle n’a connaissance d’aucun site dans le monde qui serait encadré par une coopération internationale pour améliorer ses standards environnementaux et produire de « l’or propre ».

    Et pour la transformation en lingots, elle ne peut signaler aucune société de raffinage française travaillant exclusivement, ou partiellement, à partir d’or propre.

    La spécialiste nous renvoie à Jean-François Thomassin, chargé de mission filière minière en Guyane, qui apporte une assistance technique aux entreprises et aux mineurs, au sein de la CICG : il connaîtrait une firme « qui travaille très bien ».

    Surprise : la seule firme « qui travaille très bien » que Jean-François Thomassin recommande est précisément CBJ Caïman, une filiale de la multinationale canadienne Iamgold, accusée de pollution mortelle au Mali[3].

    Joint à Cayenne, Jean-François Thomassin présente l’extraction par cyanuration comme l’un des procédés les plus modernes et les plus « corrects » qui soient.

    Il défend le projet de CBJ Caïman, qui entend exploiter au cyanure une mine à ciel ouvert à deux pas de la montagne de Kaw, importante réserve naturelle… un projet décrié depuis longtemps par les milieux écologistes, qui ont bataillé ferme pour informer et sensibiliser les élus locaux sur les risques encourus.

    Les défenseurs de ce sanctuaire de la biodiversité peuvent enfin respirer : le gouvernement français vient de dire « non » au projet d’extraction de CBJ Caïman fin janvier 2008, quelque mois après le « Grenelle de l’environnement ».

    Pour les écologistes guyanais, la vigilance reste de mise.

    Leur inquiétude se porte sur d’autres sociétés privées, comme la française Auplata, qui travaille avec un traitement du minerai par gravimétrie (table à secousses) et revendique une production d’or « responsable » [4].

    Les multinationales minières, principales productrices d’or dans le monde et soutenus par les puissants lobbies du milieu bancaire, ont appris à communiquer sur leur « responsabilité sociale et environnementale ».

    Mais ce qu’elles affirment sur le papier est vite contredit dans la pratique.

    « Auplata, la société minière cotée à la Bourse de Paris, est dans le collimateur de la DRIRE (Directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement) en Guyane et du MEDAD à Paris (Ministère de l’écologie, du développement et de l’aménagement durables).

    En Guyane, l’administration chargée du respect de l’environnement a relevé pas moins de vingt-sept infractions au code de l’Environnement », informait en octobre 2007 un service d’information économique des Antilles françaises.

    Affaires à suivre.

    Gilles Labarthe / DATAS

    [1] WWF, Kwata, Gepog, Sepanguy.
    [2] Lire à ce sujet le reportage d’Axel May, Guyane française, l’or de la honte, éditions Calmann-Lévy, Paris, 2007.
    [3] Sur les engagements d’Iamgold, voir leur site : http://www.iamgold.com/social.php
    [4] Idem pour Auplata : http://www.auplata.fr/engagements.php

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    Salsigne : visite de la dernière mine d’or en Europe

    C’était la dernière mine d’or en Europe.

    A une dizaine de kilomètres de Carcassonne, dans le sud-ouest de la France, le complexe minier avoisinant Salsigne (département de l’Aude) était il y a quelques années encore l’un des plus importants lieux d’exploitation aurifère du continent.

    Le minerai extrait était transporté par camion à La Combe du Saut, près d’une rivière (l’Orbiel), pour y être traité au cyanure et « rincé » à l’eau.

    Robert, un ancien responsable syndical CGT qui a travaillé vingt ans à la mine, propose une visite.

    Nous partons en voiture direction du nord, sur la départementale D111, qui serpente entre bruyères et châtaigniers.

    En dépassant le village de Salsigne, on atteint très vite un plateau gris et dénudé, avec au loin d’imposants remblais de roches stériles.

    Le site, avec son ancienne carrière à ciel ouvert, a été fermé en 2001.

    Robert, qui a participé à « l’assainissement », explique comment des milliers de tonnes de résidus toxiques - intransportables - ont été « confinés », enfouis sur plusieurs hectares de « stockage » recouverts de terre et « végétalisés ».

    En fait de verdure, sur ces larges collines artificielles, seules de rares brindilles sèches sortent de terre.

    Chemin faisant, Robert pointe du doigt des galeries, qui ont été bouchées, condamnées.

    En longeant ce paysage désolé, lunaire, il remet en place dans sa mémoire les bâtiments industriels qui ont été détruits.

    Disparues, les usines de La Caunette et de l’Artus.

    A la hauteur du puits Castan, les imposantes installations de concassage ont aussi été rasées.

    Seul le chevalement du puits a été préservé, « en témoignage des activités passées ».

    On sent bien que l’ancien mineur regrette la perte de son « outil de travail », comme il l’appelle.

    Dans la vallée de l'Orbiel, certains habitants hésitent encore à reconnaître les ravages causés par la pollution durable des eaux et des sols.

    L’or donnait du travail.

    Pour extraire les précieux 20 grammes ou plus d’or par tonne de minerai, il fallait concasser, finement broyer les minéraux aurifères, ce qui générait « 99,9% de déchets soufrés et riches en arsenic et métaux lourds appelés les stériles », rappelle une fiche pédagogique de l’Académie de Montpellier, qui énumère la longue liste des pollutions et maladies engendrées dans la région à la suite de ces activités industrielles extractives : empoisonnements à l’arsenic par contamination de l’eau potable, dermatoses, troubles gastro-intestinaux chez les habitants avoisinants ; mortalité par cancers (respiratoires chez les hommes, digestifs chez les femmes) largement supérieur à la moyenne nationale ; empoisonnement de vaches laitières…

    Après les inondations de novembre 1996, puis de 1999, des arrêtés ministériels interdisent même la vente des salades et de thym contaminés à l’arsenic par l’eau de l’Orbiel.

    Robert s’énerve encore en parlant des années qu’il a fallu pour que l’arsenic soit reconnu comme étant à l’origine du cancer bronchique, maladie professionnelle des mineurs.

    Le service de pneumologie de l’hôpital de Carcassonne, s’occupant des ouvriers de la mine, ne pouvait l’ignorer.

    Salsigne aimerait aujourd’hui se défaire de sa triste réputation : c'est l’un des plus grands chantiers de dépollution en France.

    « Plus de 10 0000 personnes vivant dans un rayon dépassant les 15 kilomètres autour du site sont touchées ; la contamination s’est propagée par l’air et l’eau », souligne une enquête épidémiologique.

    Un constat qui ne plaît pas à Robert : selon lui, les riverains auraient souvent « exagéré » l’étendue des dégâts.

    En attendant, le résultat est là : Salsigne, comme la plupart des petits villages avoisinants (de 100 à 400) habitants, se dépeuple, faute d’emploi.

    Les petits commerces de proximité ferment boutique…

    L’extraction de l’or, conjointe à d’autres minerais, a laissé place à un grand chantier de réhabilitation, dont les inspections de surveillance sont loin d’être terminées.

    Maître d'ouvrage : l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), qui estime la masse totale des déchets inventoriés sur le site à 15 millions de tonnes.

    Coût des travaux, qui s’étaleront en définitive sur plus de 10 ans : environ 55 millions d’euros, payés par le gouvernement français.

    « C’est la plus coûteuse de toutes les opérations de réhabilitation des sites et sols pollués à la charge de l’Etat », explique un rapport de la Cour des comptes, en précisant que la facture pourrait s’allonger : on a déjà largement dépasse les 30 millions initialement prévus sur 5 ans, après la mission d’inspection menée en 1998.

    En un siècle, la mine de Salsigne aura produit quelques 120 tonnes d’or.

    Gilles Labarthe / DATAS

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    L’or propre : un concept encore trop nouveau ?

    Discrète par excellence, la filière commerciale de l’or reste opaque à tous les étages.

    On sait pourtant où l’or termine sa course : les chiffres du World Gold Council, principal lobby du monde de l’or, mentionnent qu’environ 80 % du métal jaune extrait dans le monde est utilisé pour la bijouterie et l’horlogerie de luxe ; 15 % environ finiraient en pièces ou en lingots, dans les coffres des banques et chez des privés ; le reste servant à des applications industrielles (circuits imprimés dans les téléphones portables ou les ordinateurs, etc.) ou dentaires.

    La Suisse, qui importe plus de 1000 tonnes d’or par an - plus du tiers de la production mondiale - est particulièrement concernée.

    Dans les boutiques de luxe à Genève-Aéroport, chez les grands bijoutiers de la place Vendôme à Paris, chez leurs collègues d’Aix-les-Bains ou dans les comptoirs d’achat d’or avoisinant la Bourse à Bruxelles, j’ai demandé s’il était possible d’acheter une bague en or propre.

    Partout, le même regard interloqué des vendeurs.

    « Ce que j’ai ici, ça vient d’Anvers. Mais l’origine de l’or, c’est une question que l’on ne pose pas », conclut un joaillier belge du boulevard Anspachlaan, avant de retourner derrière son guichet terminer son frites-kebab.

    La démarche semble incongrue.

    On apprendra tout au plus qu’à Genève, Cartier se procure des plaques d’or chez le raffineur suisse Metalor, qu’une autre enseigne achète puis fait fondre des lingots achetés à la Banque nationale suisse ; tel autre encore s’approvisionne depuis longtemps en lingots sur le marché de Londres, qui écoule la production sud-africaine.

    A la question de l’origine de l’or, UBS et Crédit Suisse nous renvoient à leurs fournisseurs, les multinationales d’affinage suisses.

    Et ces dernières, aux trois grandes sociétés transnationales d’extraction aurifère, qui produisent à elles seules le quart de l’or au niveau mondial, avec des méthodes présentant des risques de pollution considérables.

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    Un projet de filière à Genève

    Difficile de proposer une définition de « l’or propre » : pour des ONGs suisses travaillant dans coopération humanitaire, le concept semble « trop nouveau ».

    Rêve d’alchimiste, ou réalité qui ne demande qu’à être encouragée ?

    Depuis l’instauration du processus de Kimberley en 2003 pour la certification des diamants bruts, une enquête montrait que 15% au moins des diamantaires aux USA se souciaient de l’origine de leurs gemmes.

    Pour l’or, hormis de rarissimes exceptions, c’est 0 %.

    Depuis Genève, un projet de filière d'or propre se met pourtant en place, suscitant entre autres l'intérêt d’Amnesty International, déjà bien engagée contre les « diamants de la guerre ».

    Le mérite de cette initiative revient à Transparence SA, société récente basée à Dardagny, qui entend commercialiser des bijoux en « or équitable ».

    Pour sa directrice Veerle Van Wauve, qui travaillait auparavant pour l’un des plus grands diamantaires d’Anvers, le chemin est encore long.

    « En Europe, il n’y a que deux possibilités d’obtenir de l’or certifié « propre », à ma connaissance : EcoAndina et Oro Verde », nous explique-t-elle.

    La première est une fondation qui encourage des principes d’orpaillage écologiques en Argentine, avec une production écoulée notamment vers une association d’orfèvres en Allemagne.

    La coopérative Oro Verde (« or vert ») travaille à Choco (Colombie).

    Les quelques kilos extraits par année sont destinés à une enseigne de bijouterie de luxe à Londres : CRED, qui vend des bijoux « éthiques ».

    L’Angleterre aurait une longueur d’avance dans ce domaine.

    Elle pourrait faire école, tout comme les tentatives actuelles d’ARM (Association for responsible mining), qui mène des projets pilotes dans le domaine de l’or propre, avec un label équitable prévu pour l’horizon 2009. I

    l resterait à reproduire l’expérience, et à trouver des partenaires en Suisse.

    Un sacré « challenge » pour Veerle Van Wauve : il faudra sensibiliser le milieu de la bijouterie, de l’horlogerie de luxe, mais aussi des raffineries et des banques suisses.

    « J’aimerais bien que l’industrie progresse plus vite, avec plus d’engagement, sur ces points.

    La création de CRJP (Council for Responsible Jewellery Practices, organisation internationale sans but lucratif regroupant les principaux acteurs sur le marché de l’or et du diamant, encourageant depuis 2006 des pratiques « transparentes et responsables », ndlr) en est un exemple.

    Depuis plusieurs années ils souhaitent améliorer les conditions.

    Malheureusement, nous attendons encore des résultats concrets », regrette Veerle Van Wauve.

    Interrogé à ce sujet, un responsable d’UBS nous a dit être « très sceptique » sur l’avenir de « l’or propre », invoquant les contraintes du « business ».

    En attendant que le travail de prise de conscience porte ses fruits, Transparence SA distribue les bijoux de CRED.

    Gilles Labarthe / DATAS

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    Multinationales de l’or : la course en avant

    Depuis septembre 2001, l’empêtrement de l’armée US au Moyen-Orient, la baisse du dollar et la récente crise des sub-primes, l’envolée des cours de l’or accélère les méga-fusions de sociétés transnationales privées, sur un marché déjà très concentré.

    Dans le secteur de l’or, trois compagnies (AngloGold Ashanti, Newmont Mining et Barrick Gold, épaulées financièrement par des banques suisses) produisent presque 600 tonnes par an, soit le quart de la production mondiale.

    Toutes trois sont accusées par des ONGs et représentants de la société civile de pollution, sur quatre continents : le traitement massif du minerai au cyanure, pour détacher les particules d’or, demeure l’un des procédés les plus nocifs qui soient, surtout quand les rejets toxiques dans la nature sont mal maîtrisés.

    Il faut traiter plus de 30 tonnes de minerai au cyanure pour obtenir l’équivalent d’une seule bague en or ; plus de 300 tonnes pour un lingot d’un kilo.

    La majorité des projets aurifères en cours sur le contient noir concerne des « mines à ciel ouvert, cinquante fois plus dommageables pour la planète que des exploitations souterraines qui produiraient la même quantité d’or. », affirme un spécialiste de Greenpeace, Jed Greer.

    Nombre de mouvements écologistes militent pour un arrêt immédiat de ce type d’exploitation, d’autant que l’industrie extractive représente l’une des principales causes de pollution liée au changement climatique (gaz à effet de serre).

    Elle consomme aussi énormément d’énergie (pour les travaux de forage, pour concasser les roches renfermant de l’or, pour faire tourner les broyeuses) et d’eau (pour rincer le minerai) qu’elle restitue polluée.

    Dans les mines d’or des pays du Sud, l’extraction signifie souvent cadences éprouvantes imposés aux ouvriers, peu ou pas d’équipements de protection, une exposition constante à des produits toxiques et à des nuages de poussière.

    Pour les mineurs, l’extraction à échelle industrielle reste l’une des activités les plus dangereuses, les plus meurtrières qui soient.

    Les récents événements tragiques en Chine (qui vient de devenir le premier producteur mondial d'or, selon institut londonien GFMS, avec 276 tonnes du précieux métal en 2007) ou la catastrophe évitée de justesse en octobre 2007 en Afrique du Sud (environ 3 000 mineurs coincés sous terre dans une mine d'or près de Johannesburg) le rappellent.

    Dans les galeries sud-africaines, plus de 500 mineurs mourraient chaque année dans les années 1980, pendant le régime d’apartheid.

    199 mineurs ont encore succombé en 2006 dans des accidents ou à la suite de chutes de rochers, selon les chiffres publiés par le Conseil de sécurité et de santé des mines, qui dépend du gouvernement de Pretoria.

    Gilles Labarthe / DATAS

    http://www.datas.ch/article.php?id=513

  • "La grande tribu des hommes petits : retour sur le meurtre de Sohane Benziane" (Méryl Pinque)

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    LA GRANDE TRIBU DES HOMMES PETITS :

    retour sur le meurtre de Sohane Benziane

     

    « Vos femmes sont pour vous un champ de labour : allez à votre champ comme vous le voudrez. » (II, 223)

    «  Les hommes sont supérieurs aux femmes [...]. Vous réprimanderez celles dont vous avez à craindre la désobéissance ; vous les relèguerez dans des lits à part, vous les battrez. » (IV, 38)

    « Abaissez un voile sur leur visage. » (XXXIII, 57)

    Le Coran


    « Le poil est une trace, un marqueur, un symbole. De notre passé d'homme des cavernes, de notre bestialité, de notre virilité. De la différence des sexes. Il nous rappelle que la virilité va de pair avec la violence, que l'homme est un prédateur sexuel, un conquérant. »

    Éric Zemmour


    « Ben quoi, ils ont juste cramé une fille. »

    Un jeune des cités


    « La "proclamation phallique" est un signe de désarroi, d'anxiété et d'incertitude. Alors que toutes les valeurs s'effondrent, jouir est une certitude qui vous reste. [...] Plus l'intelligence se sent impuissante à résoudre et à s'imposer, et plus le coït devient l’ersatz de solution. »

    Romain Gary

     

    Le 5 octobre 2002, un jeune homme aux mains calcinées se présentait aux portes de l’hôpital Pitié-Salpêtrière.

    Parmi les infirmières de garde présentes ce jour-là, il en fut une, admirablement perspicace, qui ne tarda pas à établir le rapprochement entre ce patient et le criminel dont toute la presse parlait depuis vingt-quatre heures, qui se serait brûlé la veille en immolant - banal plaisir tôt voué au frelatage, le point d’inévitabilité éjaculatoire étant sans cesse différé sous l’action conjuguée de la pornographie et de l’ultraviolence omniprésentes - une jeune fille dans un local à poubelles de Vitry-sur-Seine.

    Ayant fourni son signalement à la police, l’infirmière fut accusée de délation par sa hiérarchie et sommée de comparaître devant le Conseil de service pour non respect du secret professionnel.

    Le jour même où Sohane Benziane fut brûlée vive, un autre crime, raciste celui-là, avait lieu à Dunkerque, mobilisant cette fois l’ensemble de la classe politique.

    Les « délateurs » furent, ici, chaudement félicités. Quant à notre infirmière, elle s’en sortit sans autre dommage, mais cette anecdote reste emblématique du malaise national.

    Ainsi la France condamna-t-elle, unanime, Joël Damman, le meurtrier de Mohamed Meghara, fauché, comme Sohane, en pleine jeunesse, à dix-sept ans.

    Rien de plus normal, dira-t-on, que cette saine réaction devant l’abject.

    L’on était cependant en droit d’attendre, au nom de nos beaux principes républicains, de notre attachement viscéral au Bien, de notre foi inébranlable en notre insurpassable espèce, laquelle, n’en doutons pas, finira par triompher d’elle-même et renaître de ses cendres puisque, selon l’unique formule sacrée ornant les frontispices de nos cités, elle le vaut bien, au moins autant de vert courroux, de fraternelle communion, de franc sursaut civilisateur de la part de ces nobles âmes en révolte, de ces vigilances du cœur armé, de ces chœurs pathétiques si prompts à s’émouvoir, face au meurtrier de Sohane, j’ai nommé Jamal Derrar, alias « Nono », digne fleuron de certaine mâle jeunesse des quartiers dont on attend tout désormais, y compris qu’ils nous consument, qu’ils revirilisent, ensemencent et peuplent la France à venir d’un même puissant et solide coup de reins.

    Nono, un homme un vrai, le sauveur de ces messieurs en débandade, le messie zemmourien, que l’on ne saurait élire tout à fait mais sur lequel on louche, quand même, avec envie, dans nos solitudes d’homoncules frustrés, parce que ce sera toujours, bêtement, de pouvoir qu’il s’agira.

    Nono, qui savait se faire respecter des femmes forcément inférieures, là-bas, sur les rivages des banlieues proches et lointaines, aussi magnifiques, barbares et fascinantes que les jungles d’émeraude de Kurtz, à la force du vit, de l’allumette et du poing.

    Nono, la résurgence d’un très vieux fantasme, un rêve de pierre, de sperme et de sang, un berserk ressuscité poussé à l’ombre des barres grises, un mec qui avait « des couilles » enfin, puisque tout semble se réduire à ça.

    Bref, un dur, qui détenait peut-être, allez savoir, intact, le principe de cette virilité fabuleuse toujours-déjà menacée, sans cesse à prouver, à reconduire, à valider en un mouvement perpétuel de surenchère, jusqu’à remettre au goût du jour de vieux usages perdus, par exemple, la condamnation des femmes au bûcher[1].

    Nono, ou l’islam au secours du mâle occidental. Foi de Malek Chebel :

    « Je suis toujours surpris par la force de conviction des chrétiens convertis à l’islam. Qu’est-ce qu’ils y trouvent ? Une virilité et une sécurité qu’il n’y a plus dans le christianisme[2]. »

    Mais cela, pour qui maîtrise son sujet – et je me targue de le connaître assez bien - n’est hélas qu’évidence.

    Et Sohane dans tout cela ?

    Le spectacle qu’offrit la France au lendemain du drame est éloquent.

    Robert Badinter, d’abord, qui ne trouva rien de mieux que d’opérer devant Alain Duhamel une gradation abjecte des meurtres qui venaient d’être commis (mais il faut dire qu’il est, avec Élisabeth déroutée[3], à bonne école), jugeant, après avoir évoqué l’assassinat de la jeune fille, « plus important encore » le crime raciste, sans seulement voir, puisque enfin l’on est tenu désormais d’ajouter quelque épithète consacrée, qu’il faut encore mettre celle-ci partout, et qualifier donc le meurtre de Sohane de sexiste, comme le souligna avec force l’avocat général  Jean-Paul Content.

    Jean-Pierre Raffarin, ensuite, alors Premier ministre, auteur d’un vibrant hommage à la mémoire du jeune Meghara suivi d’une minute de silence à la mosquée de Dunkerque, pendant que Sarkozy réunissait autour de lui les principaux représentants de la communauté musulmane.

    C’est en vain que l’on attendit, pour Sohane, pareil déploiement de sympathie.

    Le petit monde médiatique enfin, qui ne s’en sortit pas mieux : un journal télévisé de l’époque consacra dix minutes à l’agression du maire de Paris[4], cinq à Meghara, trente secondes à Benziane.

    Certes, et c’est terrible à dire, la valeur d’une femme reste toujours moindre que la valeur d’un homme, y compris dans notre bel Occident démocratique pétri de principes humanisants.

    « Ce n’est rien, ce n’est qu’une femme qui se noie », pouvait écrire ainsi La Fontaine, dont l’amende honorable (« ce sexe vaut bien que nous le regrettions, puisqu'il fait notre joie ») fleure plus encore cette misogynie bon teint qui s’épanouit partout.

    Les plus grands esprits, lorsqu’ils se mettent à parler des femmes, ou, pis, de la femme, en bien ou en mal d’ailleurs, comme s’il s’agissait de quelque espèce à part, vile ou idéale, à la lisière de l’humanité toujours, où l’une serait peu ou prou la copie conforme de l’autre (il est vrai que Pygmalion fabrique Galatée à la chaîne), excepté quelques différences anatomiques extensivement détaillées, deviennent ces non-esprits creux, vulgaires et radoteurs, ces parfaits clones dénués du plus petit atome d’intelligence, condamnés aux poncifs, aux théorèmes vaseux et aux plaisanteries de caserne.

    Pourtant ces matamores pathétiques, qui ont aujourd’hui pour nom Eric Zemmour ou Alain Soral (je ne cite que les plus médiatiques d’entre eux) sont sûrs de remporter, comme hier, tous les suffrages.

    Zemmour. Soral.

    Les mâles alpha.

    Les frères ennemis.

    Nos glorieux hommes de demain.

    La particule et l’antiparticule élémentaires, dont j’attends avec quelle impatience qu’elles s’autodétruisent lors de ces Ragnarök ultimes que l’Occident féminisé ne leur permet plus de mener, sinon le long des pages ineptes du Figaro Madame, des méandres de leurs cervelles délirantes et des tréfonds abyssaux de la sitosphère.

    De fameux agitateurs ma foi, de fiers brasseurs de bière surie, des amateurs de pissat d’âne bâté dont la vertu ne dépasse seulement pas le demi-nanomètre carré.

    Des lutteurs de foire dûment récompensés, parions-le, par trois douzaines de houris pour services rendus à la Virilité chancelante.

    Comparer le féminisme au totalitarisme, quel flair et quelle bravoure.

    Hitler et Staline doivent s’en frotter les mains, à l’heure qu’il est.

    Ainsi que tous les Derrar de la terre, et l’on sait combien ils sont nombreux.

    N’en doutons plus : le devoir de mémoire est bel et bien passé à la trappe, avec quelques autres principes substantiels, et la reductio ad hitlerum n’est donc plus seulement l’apanage de la gauche boboïsante.

    Rien ne semble devoir effrayer ces cuistres passés maîtres dans l'art de la forfaiture et du raccourci médiatique dès qu’ils abordent, la peur au bas-ventre, le dossier femmes, et surtout pas le ridicule, s’égosillant comme coqs en déroute sur leurs tas de fientes androestampillées, forts d’une souveraineté que je qualifierais, puisque je n’ai jamais dédaigné d’employer quelque mot rare, fût-ce pour qualifier l’ordinaire, d’achondroplasique.

    C’est contre de telles mauvaises fois, qui partout pullulent, que les meilleures volontés finissent toujours par buter, et qui s’avance les bras chargés de roses doit s’attendre à s’en voir fouetter le visage avec les épines, à rendre compte de chaque bonté exactement, perlée, fourbie par l’âme.

    La force, c’est de ne point lâcher les roses et de continuer sa route, mais en ayant désormais, fichée au coin du cœur, la conscience de son échec à créer des liens avec et entre les hommes.

    On ne pacifie pas tout un monde en guerre simplement parce que, brave petit soldat, on a décidé un jour de passer outre et de croire à nouveau, de tendre la main à l’ennemi imbécile, après l’avoir combattu, dans un pieux désir de fraternité.

    Seulement il est bien vrai que nous sommes seule à désirer la paix, que nous n’avons qu’une seule enfance et que le monde meurt avec elle.

    Etrange impression que la mienne, tandis que je rédige ces lignes, celle de me soustraire une seconde fois, de retourner à ma vie fantomatique et comme superposée, au lieu que j’avais désiré renaître par la grâce d’une enfance seconde, luxueuse et illusoire, et de même qu’il n’y a point tout à fait de hasard en ce monde, de même les idées s’enchaînant les unes aux autres finissent-elles par trouver leur cohérence et leur lieu d’élection.

    Me voici donc apparemment aussi éloignée de mon sujet que l’austère Sedna du soleil, et cependant je me trouve aussi proche du soleil qu’on peut l’être, puisque la vérité a toujours le tragique éclat du feu.

    Aussi vois-je, aggravés encore par la parfaite lucidité du soir, les hommes franchir les arceaux du temps avec le même front débile, et cette odieuse constance, autrement dit cet arrêt au cœur même du mouvement apparent, est bien le signe de quelque damnation irrémédiable.

    C’est néanmoins désespérément sereine (et cela confirme la ténuité de ma présence) que je referme cette courte parenthèse incandescente, et que je m’en vais poser une seconde explication à l’odieuse hiérarchie des meurtres à l’œuvre.

    Il faut y voir, bien sûr, l’influence pernicieuse de la tribu dominante des petits hommes (mais les petits hommes ne sont-ils pas partout ?) et de leurs innombrables sacculines régnant en maîtres et censeurs sur la parole vraie, condamnée dès lors à l’in-pace ainsi que ceux qui la profèrent, qui adjoignent à force de sentences moralisatrices de relativiser tout crime dont l’auteur est un jeune habitant des cités, reléguant le principe de responsabilité dans quelque obscur cul-de-basse-fosse, quand « être homme, c’est précisément être responsable[5] ».

    La France multiculturaliste, pétrie de jésuitisme et de naïveté fausse, est atteinte d’un haut mal : le déni du réel, entraînant à son tour l’euphémisme généralisé.

    C’est ainsi qu’un crime devient une incivilité, qu’un homicide volontaire se transmue, au mieux, comme dans l’affaire qui nous occupe, en « actes de torture et de barbarie ayant entraîné la mort sans intention de la donner », au pire en fait divers.

    C’est ainsi que, doucement, l’on donne raison au pire, et qu’après les voitures, on laisse brûler les femmes, sans que cela génère autre chose que de lénitifs rapports dans les médias, lesquels, comme l’AFP, prennent soin de ne pas mentionner la religion des assassins, alors que l’islam et sa haine des femmes sont précisément au cœur de telles affaires[6].

    On ouvre des tribunes aux barbares parce qu’on préfère perdre du terrain que d’affronter la réalité en face.

    Et l’on sait où mène ce genre d’aveuglement volontaire : à ce pire, justement, dont personne ne veut, à cette entière récupération du problème par une certaine droite extrême dénuée de toute subtilité.

    Tant que nous nous dissimulerons la vérité pour mieux continuer de dormir dans le meilleur des mondes possibles, ceux d’en face en profiteront pour aller toujours plus loin.

    De même que nous souffrons du syndrome du colonisateur, les banlieues souffrent du complexe du colonisé.

    Ce sont là deux folies parallèles, qui sont la folie même de la France.

    On objectera que Derrar, le 8 avril dernier, écopa de vingt-cinq années de réclusion pour son acte abominable, soit sensiblement la même peine que Joël Damman.

    Certes, mais outre que ce n’est point là cette perpétuité absolue que pareil crime eût méritée, ce fut bien le vent de la peur qui souffla sur la France au lendemain du drame.

    Il parut alors plus prudent, plus stratégique, plus politiquement correct à la classe dirigeante de mettre l’accent sur l’affaire Meghara, puisque enfin, disons-le tout net, le meurtrier avait pour prénom Joël et non Jamal, au risque, conscient, soupesé, accepté, de relativiser l’affaire Benziane, afin d’éviter tout nouvel incident - euphémisme cher à l’époque - dans des banlieues toujours à cran.

    Preuve supplémentaire, s’il était besoin, les trois années de patience qu’il fallut à la famille et aux associations féministes pour obtenir du maire (communiste) de Vitry qu’une stèle soit érigée à la mémoire de la victime.

    Une stèle qui sera profanée, non pas une, non pas deux, mais plusieurs fois, avec l’odieuse régularité d’une horloge, sans que cela soulève d’indignation particulière.

    Le mot d’ordre, ensuite, fut de ne point transformer Derrar en bouc émissaire.

    Aussi ce dernier n’a-t-il, à en croire la Cour, jamais eu l’intention d’assassiner Sohane.

    Seulement, à moins que ce jeune homme – dont personne ne doutera de la démoniaque candeur - ignorât tout encore des vertus combustibles de l’essence, que peut-on bien vouloir faire avec un briquet allumé près d’une fille préalablement arrosée d’un semblable liquide ?

    Parler avec elle ?

    Mais peut-être est-ce la nouvelle façon de faire la cour aux femmes, dans les banlieues, auquel cas nous serions, n’en déplaise aux cuistres, en pleine hypervirilisation française.

    Chaque homme tue ce qu’il aime, c’est bien connu.

    Le mal à l’œuvre, dans cette affaire, était autant dans le local à ordures, dansant son rituel de mort un briquet à la main, que partout autour.

    Il était autant en Derrar qu’en Tony Rocca, 23 ans, alias « Pyro » en référence à son amour des engins explosifs, un amour qui lui valut la perte de deux doigts et, détail touchant, d’un testicule.

    Rocca, petite frappe au nom tout droit sorti du ghetto italien d’East Harlem, qui maintint la porte du local fermée afin que l’autre puisse tranquillement achever son « truc de ouf » (sic) et qui, contrairement à Derrar, ne baissa nullement la tête lors du procès, mais ne cessa d’adresser des clins d’œil à sa bande.

    Le mal était en chacun de ces imbéciles hurlants, acéphales, qui, lors de la reconstitution du meurtre certain 25 mars 2003, et avec le lyrisme qu’on leur connaît, acclamèrent les bourreaux aux cris de « Pyro, Nono, on vous aime », « Nono poto pour toujours », « Nono à jamais », ou encore (légère variante) : « T'inquiète pas, on va pas t'oublier ».

    Le mal était enfin du côté de tous ceux qui ne dirent rien.

    Détail surréaliste : le sacrifice de Sohane eut lieu cité « Balzac ».

    C’est donc là-bas que nous n’oublierons pas que la France fut grande - littérairement parlant - et qu’elle donna au monde des noms illustres dont elle ne fait plus rien, jusqu’à les recycler dans des barres d’immeubles où croît l’engeance violente qui va définitivement la mettre à bas.

    Jamal Derrar, comme tous ses frères, grandit dans le mépris de l’autre sexe.

    Un mépris savamment distillé par la culture islamique (l’islam n’est-il pas « la religion masculine par excellence », dixit Chebel ?) et, indirectement, la société française, y compris par ceux qui s’érigent en sauveurs des valeurs occidentales tout en pactisant avec l’ennemi sur le dos des femmes : il est vrai que ce mépris-là reste la chose la mieux partagée du monde.

    Derrar reçut donc une éducation machiste avalisée par deux Frances pourtant farouchement antagonistes, et ces Frances-là, qui se donnent mutuellement les leçons de morale qu’elles n’appliquent pas elles-mêmes, ont le sang de Sohane sur les mains.

    J’attends, pour ma part, l’avènement d’une troisième France, une France éthique qui obéirait enfin à ses principes républicains.

    De cet éternel défaut de civilisation Sohane a payé le prix fort, elle qui mourut autant de fois qu’on salit sa mémoire.

    Qu’on s’en souvienne, lorsqu’un jour nos pas nous mèneront à Vitry-sur-Seine, et qu’alors nous foulerons le gazon pauvre qui entoure la stèle commémorative, pas très loin de cet anonyme et sinistre bâtiment « H » où mourut la jeune fille.

    Qu’on s’en souvienne, lorsque des fleurs cent fois profanées surgira la voix suppliciée, et qu’elle demandera : « Comment ce pays a-t-elle pu laisser pareille chose advenir ? »

    Que Zemmour, Soral et tous les petits hommes qui leur ressemblent s’en souviennent, au crépuscule de leur vie, s’ils sont jamais capables du moindre honneur.

    Quant à votre serviteur, elle s’en va tranquillement reprendre, après quelque candeur délibérée où elle avait posé ce si léger fardeau à ses pieds, ses vieilles hardes de misanthrope (je n’écris point misandre), abandonnant à la place quelque autre faix plus lourd qu’elle avait cru pouvoir supporter, le temps d’une confiance, parce qu’il faut bien parfois faire halte et boire, réinventer ce monde en le rêvant, bref, croire à la vertu des dialogues transversaux, même s’ils échouent toujours, pour rejoindre son propre chemin d’étoiles et de poussière, des brassées de roses entrenouées aux veines, et les yeux grands ouverts.


    Méryl Pinque (2006)

     


    [1] La dernière « sorcière » fut brûlée en terre d’Occident en 1695.

    [2] Le Point, 22 septembre 2005.

    [3] Élisabeth Badinter commit en 2003 Fausse route, piètre livre tissé d’incohérences volontaires, dénué parfaitement de rigueur analytique, monument de mauvaise foi mâtinée de malveillance à l’égard d’un féminisme qu’elle dénature pour mieux l’invalider.

    [4] On se souvient que Delanoë reçut un coup de couteau lors de la très festivissime « Nuit blanche » du 5 au 6 octobre.

    [5] Antoine de Saint-Exupéry, Terre des hommes.

    [6] « Une jeune femme a été hospitalisée dans un état jugé très sérieux dimanche après avoir été brûlée vive par son ancien ami à Neuilly-sur-Marne (Seine-Saint-Denis), a rapporté la police lundi. Selon les premiers éléments de l’enquête de la brigade criminelle, la jeune femme, âgée d’une vingtaine d’années, a été aspergée d’essence par le suspect dans une rue non loin de chez elle. Il a mis le feu et pris la fuite se brûlant au bras, selon des témoins. Le suspect, qui a agi par ‘dépit amoureux’, a été identifié et devait être interpellé ‘sans délai’, selon la source. La jeune femme a été admise à l’hôpital dans un état jugé très grave, a-t-on indiqué lundi. » AFP, 14 novembre 2005.

    La jeune femme en question est bien sûr Shéhérazade, 18 ans, brûlée vive le 13 novembre 2005 par un Pakistanais dont elle avait refusé les avances.

    On admirera avec quel art consommé le journaliste « noie le poisson », transmuant un meurtre sexiste en banale querelle amoureuse.

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  • Robert Redeker : "L'islamophobie, l'arme des islamistes contre la laïcité" (La Dépêche du Midi)

    http://www.guibord.com/Democracy/files-images/La_Liberte_guidant_le_peuple.jpg

    Un néologisme vient de se tailler une place, de façon fracassante, sur notre scène politique : " islamophobie ".

    Ce mot, proche, phonétiquement, de " xénophobie ", est autant destiné à faire peur - en évoquant, de manière subliminale, la haine, les persécutions, les discriminations - qu'à culpabiliser.

    Quelques-uns voudraient le voir devenir synonyme de " racisme " et symétrique d'" antisémitisme ", deux monstres qui ne dorment que d'un œil.

    Son usage, pourtant, est-il en adéquation avec la double exigence républicaine : sauvegarder la laïcité et combattre le racisme ?

    N'engendre-t-il pas des amalgames aux résultats ruineux pour la République, ses valeurs et son héritage ?

    Une enquête, réalisée par Caroline Fourest et Fiammetta Verner dans leur livre Tirs croisés [1], sur ses origines et son histoire, réserve des surprises, donnant à voir les intentions de ses concepteurs.

    Il n'est pas innocent que le vocable d'" islamophobie " ait été forgé initialement (dans les années 1970) par des islamistes radicaux s'attaquant aux féministes.

    La guerre contre les femmes est le berceau de ce terme ; ainsi, Kate Millet, célèbre militante du mouvement de l'émancipation féminine, fut violemment insultée, puis traitée d'islamophobe pour avoir incité les iraniennes au refus de porter le voile.

    C'est à nouveau autour de la question de l'apartheid des femmes - foulard à l'école, dans des institutions, dans la rue, auto-ségrégation dans des piscines - que se concentre la crispation, et que l'accusation d'islamophobie menace quiconque s'élève contre la tentative d'officialisation de cet apartheid.

    Dans les années 1990 le terme d'" islamophobie " a été diffusé plus largement par les islamistes londoniens dans le cadre des campagnes anti-Rushdie.

    L'écrivain et les défenseurs de la liberté de penser et de publier se trouvaient accusés du crime d'islamophobie tout en étant menacés de mort.

    Le concept d' " islamophobie " est originairement une arme forgée par les islamistes dans le but d'imposer leur vision totalitaire du monde.

    Il plonge ses racines dans le plus sordide obscurantisme. Au départ, " islamophobie " était donc un mot de combat - et chacun se souvient de la formule du poète révolutionnaire Maïakovski, " les mots sont des balles " !

    En le réutilisant naïvement, de sincères amis de la liberté se placent sur le terrain de ses adversaires.

    Peut-on, comme le souhaitent les islamistes, identifier l'islamophobie avec un racisme et l'équivaloir avec l'antisémitisme ?

    L'amalgame entre l'islamophobie et le racisme est destiné à se retourner contre toute critique de la religion, si importante dans notre culture depuis Bayle et Voltaire, si importante aussi dans l'élaboration de l'idée républicaine.

    Est-il " raciste " de refuser les exactions qui se pratiquent, de la Mauritanie jusqu'au Pakistan, au nom de l'islam ?

    De refuser la charia, les lapidations, les mutilations, l'esclavage (encore vivace dans des sociétés musulmanes), la criminalisation de l'homosexualité, le statut inférieur des femmes, etc ?

    Est-il raciste de rappeler que dans aucun pays musulman les droits de l'homme ne sont à l'honneur, pas plus d'ailleurs que la démocratie ?

    Est-il raciste d'estimer que des centaines de millions d'êtres humains vivent quotidiennement sous le joug imposé par cette religion ?

    Est-il raciste de s'inquiéter des exigences, dans notre société, d'une religion qui a aussi peu fait la preuve de sa capacité à intérioriser les valeurs issues des Lumières ?

    Est-il raciste de se poser la question: un islam à visage humain est-il possible, comme on se demandait naguère si un socialisme à visage humain est possible ?

    Si le racisme (par exemple: l'arabophobie) est absolument condamnable, le combat contre les empiétements du religieux sur la vie civique, combat dont sont issues les valeurs républicaines, ne l'est aucunement.

    L'islam est une religion - un ensemble d'idées, de mythes, de superstitions et de rites - pas une " race " (si ce mot a un sens) ni une ethnie.

    Il existe des musulmans de tous les types humains ; cette religion, semblablement au christianisme, vise à l'universalité.

    Etant une religion, l'islam est aussi une idéologie, comme le communisme et le libéralisme.

    Doit-on condamner l'antilibéralisme ou l'anticommunisme, le refus de leurs idéologies et de l'organisation du monde qu'elles impliquent, comme s'il s'agissait de racisme ?

    L'attitude accusée d'islamophobie n'est pas du racisme, dans la mesure où, loin d'être la haine de tel ou tel peuple, elle est le refus véhément de ce que certains prêchent et veulent imposer au nom de l'islam.

    Elle est le refus des aspects archaïques et incompatibles avec les valeurs républicaines, que véhicule une certaine interprétation de l'islam.

    L'antisémitisme, pour sa part, ne stigmatise pas une religion, mais un peuple.

    Or, il n'y a pas un peuple musulman comme il y a un peuple juif ; par suite, la mise en parallèle de l'islamophobie et de l'antisémitisme est abusive.

    L'islam est un attribut accidentel, applicable - du fait de sa nature prosélyte - à tout être humain, quelles que soient son ethnie et sa couleur de peau.

    Au contraire, Juif ne désigne qu'un seul peuple, à cause de son non-prosélytisme.

    Loin d'être le simple combat contre une religion, l'antisémitisme est la haine immotivée et inextinguible d'un certain peuple, le peuple juif.

    Les Juifs pourraient bien être athées, changer de religion, que l'antisémitisme persisterait.

    S'il existe des Juifs athées (parce que le mot " juif " énonce l'appartenance à un peuple, quelles que soient les idées de ceux qui sont ainsi indexés), la locution " musulman athée " s'avère absurde, (parce qu'être musulman signifie adhérer à une croyance).

    Les islamistes voient, dans la bataille du vocabulaire, un enjeu d'importance.

    Le terme d'islamophobie cache le piège tendu aux institutions laïques par les intégristes musulmans pour empêcher la critique de la religion, tout en soumettant des segments de l'existence sociale (spécialement celle des femmes) à une emprise totalitaire.

    Perdre la bataille sémantique, en réutilisant le vocabulaire mis en circulation par les islamistes, comme s'il allait de soi, est désastreux.

    Le mot " islamophobie " rabat, à faux titre, la défense de la liberté et de la laïcité sur l'intolérance et sur la haine.

    Il réussit à contraindre les valeurs républicaines à demeurer sur la défensive : ce sont elles, désormais, qui, mises en difficulté par la sophistique d'un tour de passe-passe lexical, se voient accusées d'intolérance et d'intégrisme.

    La prestidigitation de ce mot consiste à renverser la réalité en plaçant l'obscurantisme dans la position de la victime et la laïcité dans celle de l'agresseur.

    La laïcité doit maintenir le mot " islamophobie " hors du cercle des débats, tout en pourchassant le racisme, en particulier l'arabophobie.

    R. Redeker (Ce texte a été publié dans La Dépêche du Midi le 21 octobre 2003.)

    --------------------

    [1] Titre complet : Tirs croisés : La Laïcité à l'épreuve des intégrismes juif, chrétien et musulman : voir sur le site d’Amazon.  Le site Prochoix met en ligne les nombreuses recensions de cet ouvrage : voir sa Revue de Presse.

    http://www.gaucherepublicaine.org/2,article,340,,,,,_L-islamophobie-l-arme-des-islamistes-contre-la-laicite..htm

  • Interview de Gary L. Francione par Lee Hall, de Friends of Animals (FoA) pour ActionLine (été 2002, extraits)

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    Professeur de Droit à l'Université de Rutgers, Faculté de Droit, sur l'état actuel du Mouvement Américain pour les Droits des Animaux (U.S. Animal Rights Movement)

    Interview menée par Lee Hall, Amis des Animaux (Friends of Animals / FoA) | pour ActionLine (Eté 2002)

    FoA : Que pensez-vous de l'état actuel du Mouvement pour les droits des animaux aux Etats-Unis ?

    Gary Francione : Il n'y a pas de mouvement pour les droits des animaux aux Etats-Unis.

    Il y a seulement un mouvement pour le bien-être des animaux qui essaie de mettre en avant une exploitation "humaine" des animaux.

    Pour pouvoir évoquer les droits des animaux, il est d'abord essentiel de comprendre les arguments de base, à la fois légaux et philosophiques, qui sous-tendent l'abolition.

    Logiquement, il n'est pas possible de réformer un système qui exploite les animaux :  c'est l'exploitation que nous devons abolir.

    La position abolitionniste défend l'idée qu'il est moralement injustifiable d'institutionaliser la "propriété" d'un animal, tout comme il était injustifiable de le faire pour l'homme via l'esclavage.

    Ceux qui militent pour une réforme de bien-être persistent à dire qu'il est acceptable d'utiliser les animaux si cela est fait "avec humanité".

    D'autres défendent les réformes de bien-être parce qu' ils croient que ces réformes vont éventuellement conduire à l'abolition.

    Je conteste ces deux approches pour deux raisons.

    D'abord, théoriquement, une réforme ne satisferait pas à l'éthique.

    Bien sûr, il est toujours préférable de diminuer la souffrance plutôt que de l'accroítre, mais la question véritable est de savoir si l'homme a le droit de faire souffrir un animal parce qu'il est sa propriété.

    Ainsi, les réformateurs du XIXe siècle prétendaient qu'il était préférable pour un propriétaire d'esclaves de les battre quatre fois par semaine plutôt que cinq.

    Les abolitionnistes, quant à eux, défendaient le fait qu'aucun être humain ne devait être la propriété d'un autre, car alors, l'être humain n'aurait eu aucune valeur sauf celle accordée par le maítre à l'esclave.

    La position abolitionniste s'érigeait contre le fait de battre les esclaves, parce que l'état d'esclave était en lui-même injustifiable et qu'il importait peu de savoir si l'esclave était traité "humainement".

    Un peu comme si accompagner les hommes sur le chemin des chambres à gaz (comme les nazis le firent pendant l'Holocauste) avec un quatuor à cordes avait pu rendre le chemin plus humain ...

    Si les animaux ont une signification morale, alors il faut abolir le droit de posséder des animaux.

    Nous devons arrêter d'élever ou de posséder des animaux domestiques ou d'utiliser des animaux sauvages pour atteindre nos objectifs.

    Mon opinion est que nous devons abolir l'esclavage animal et ne pas essayer de réformer un état de fait immoral.

    La deuxième raison pour laquelle je rejette le militantisme du bien-être est que, en pratique, ça ne fonctionne pas.

    Nous avons des lois régissant le bien-être des animaux dans les pays occidentaux depuis plus de cent ans maintenant et elles n'ont pu réduire de manière significative leur souffrance ; pas plus qu'elles n'ont induit l'abolition progressive de pratiques cruelles.

    Peter Singer disait récemment que l'accord donné par McDonald pour offrir un peu plus d'espace intérieur aux cages des batteries de poulets était l'avancée la plus significative pour les animaux de ferme depuis son livre La Libération Animale.

    Ainsi, 25 années de réformes pour le bien-être conduisent à un peu plus d'espace dans des cages...

    Peut-être que Peter trouve cela excitant ; pas moi.

    Ceci est une preuve de ce que je disais déjà il y a 10 ans : les réformes pour le bien-être sont inutiles.

    FoA : Pourquoi ne pas mettre vos idées en pratique sur le terrain ?

    Gary Francione : Avant d'entreprendre quoi que ce soit de concret, il doit exister une théorie qui sous-tend cette action.

    Ainsi, un mouvement social se doit d'avoir une base théorique avant d'agir.

    Malheureusement, la position du bien-être de Peter Singer domine actuellement le mouvement.

    Cette position affirme que les militants devraient défendre toutes les mesures qui visent à réduire la souffrance.

    En pratique, cette théorie a eu des résultats désastreux.

    Presque chaque changement proposé, comme, par exemple, donner un peu plus d'espace aux poulets dans les cages ou manger du veau élevé hors caisse est considéré comme réducteur de souffrance.

    La théorie de Singer permet ainsi à de grandes organisations pour le bien-être animal, rassemblant parfois plusieurs millions de dollars, de mener des campagnes de peu d'envergure en croyant que nous allons tous sauter dans le train simplement parce que la souffrance va être réduite !

    Si on suit la théorie de Singer, cela permettrait à ceux qui exploitent les animaux de faire des choses terribles sous couvert de réduire les souffrances et cela laisse la porte ouverte aux activistes.

    Or, c'est précisément ce que les exploiteurs font ( l'exemple de McDonald avec ses soi-disant améliorations le prouve).

    Et le "mouvement" y adhére simplement parce que Singer a déclaré que ces améliorations insignifiantes réduisaient la souffrance.

    Je pense que nous avons besoin d'une théorie de remplacement.

    Et je ne suis pas irréaliste.

    Je reconnais que, même si nous adoptions une théorie abolitionniste, l'abolition n'interviendrait pas immédiatement.

    Le changement serait nécessairement progressif.

    Mais je considère que notre but implicite doit être l'abolition et que celle-ci entraínera des changements progressifs.

    D'un autre côté, je pense - car cela n'est pas réaliste - qu'il ne faut pas s'attendre  à ce que les industries qui utilisent les animaux à des fins lucratives pourront s'auto-contrôler.

    Comme je l'ai souvent remarqué, les lois sur "l'abattage humain" sont difficiles à imposer et les réalités économiques de l'industrie de la viande plaident contre de tels standards d'auto-régulation.

    En sus, de telles lois accroissent la souffrance générale, car elles permettent au public d'avoir meilleure conscience de manger de la viande ou d'accepter tout autre utilisation légale des animaux.

    C'est le vice caché du militantisme pour le bien-être des animaux.

    Il y aura toujours des partisans du bien-être qui feront la promotion des attaches plus longues pour les esclaves et qui appelleront cela du changement progressif.

    Dans un livre récent, je démontre que la forme la plus importante de changement progressif est l'éducation du public face à cette nécessité de l'abolition.

    Nous n'en sommes pas là, car le mouvement américain a toujours été considéré comme assez radical.

    Nous ne voulons pas aller à contre-courant.

    Le problème est que le "courant" est pollué et donc que nous devons nous en éloigner.

    A ceux qui proclament que l'abolitionniste n'a pas de stratégie à mettre en pratique actuellement, j'ai longtemps soutenu le contraire.

    Imaginez ce qui se passerait si le mouvement international pour les animaux lançait une campagne soutenue et centralisée en faveur d'un régime purement vegan.

    Pensez à ce qui pourrait être fait si une partie importante de nos ressources pouvait être utilisée de telle sorte que les gens deviennent conscients du besoin de ne plus manger de produits animaux du tout.

    Au bout de 5 ans, nous n'aurions certainement pas atteint un véganisme mondial mais nous aurions probablement réduit considérablement la consommation de produits animaux , plus que si nous avions agi via des campagnes du type « Mangez du veau rose (rouge ?)».

    Et à quoi aurions-nous renoncé si nous avions poursuivi ce chemin ?

    Peter Singer pense que 5 cm d'espace en plus par cage est la meilleure amélioration que les animaux "d'élevage" aient connu au cours des 25 dernières années ; un autre argument serait de dire que 100 nouveaux vegans dans 5 ans réduiraient davantage la souffrance que cela.

    Alors, quand commencerons-nous ?

    Je sais bien sûr que beaucoup de personnes occupant des postes dirigeants ne sont pas véganes (ni même végétariennes).

    De ce fait, elles trouvent difficile d'adhérer à un mouvement dont l'axiome principal est le véganisme.

    Pourtant, le véganisme est l'objet même de ce mouvement.

    Le véganisme, c'est le principe de l'abolitionnisme appliqué à notre vie quotidienne.

    Celui qui prétend être un défenseur des droits des animaux et n'est pas vegan ne peut être pris au sérieux.

    FoA : Cela n'exclut-il pas un bon nombre de gens "bien-pensants" ?

    Gary Francione : Beaucoup de défenseurs disent qu'il est "élitiste" de considérer qu'il y a des causes morales comme le véganisme.

    Mais c'est comme de dire qu'il est élitiste que le féminisme rejette le viol.

    Il est donc tout simplement inepte de maintenir qu'il est possible de défendre les droits des animaux et de continuer à consommer des produits animaux.

    Beaucoup de défenseurs pensent que le véganisme est purement facultatif et que c'est une sorte de police du véganisme qui insisterait sur son adoption.

    Ce n'est pas très différent de dire, dans le cas de la défense des droits de l'enfant, que ceux qui condamnent la pédophilie sont une police pédophile.

    Si un défenseur des droits de l'enfant n'est pas membre de cette police pédophile, il n'est pas un défenseur des droits de l'enfant.

    FoA : Y a-t-il d'autres obstacles qui empêchent de sortir le mouvement du marasme ?

    Gary Francione : La position de la défense des droits des animaux est de dire que l'exploitation institutionnelle doit être abolie et pas seulement réglementée.

    Mais les différents groupes et institutions qui s'impliquent dans la défense des animaux sont conscients du fait que les perspectives abolitionnistes peuvent offenser certains donateurs.

    C'est pourquoi la politique de beaucoup de groupes est déterminée par les dollars des donateurs.

    http://www.payscotentin.net/terroir/photo/vache_veau_normande_g.jpg

    FoA : Et donc, s'ils n'agissent pas pour l'abolition du statut de propriété des animaux, nous nous trouvons dans une position des plus funestes...

    Gary Francione : Exactement.

    Et le bien-être des animaux - à la fois dans son contexte moral et dans son principe légal - demande en partie que nous contrebalancions les intérêts humains et non-humains pour déterminer si l'utilisation ou le traitement d'un animal en particulier est "nécessaire".

    Si l'intérêt humain est supérieur à l'autre, l'utilisation du traitement est considérée comme nécessaire et moralement ou légalement justifiable.

    Dans le cas inverse, l'utilisation est considérée comme inappropriée et donc moralement et légalement injustifiable.

    Jusqu'à ce qu'une révolution de l'esprit humain se mette en place, il y aura toujours exploitation de ce qui n'est pas considéré comme humain et cela ne se passera pas sans que des visionnaires essaient de changer le paradigme qui légitimise la violence patriarcale.

    Actuellement, le rôle du juriste, défenseur des droits des animaux, n'est pas d'être une force première de changement du système.

    En tant que juristes, nous faisons partie du système qui existe pour défendre les intérêts du droit à la propriété.

    William Kunstler, bien qu'il soit le plus éminent juriste en droit civil du XXe siècle, m'a même dit un jour que je ne devrais jamais penser que le juriste est la "star" d'un spectacle.

    Notre travail de juriste est de maintenir les activistes sociaux à l'abri du danger.

    De mon point de vue, un juriste utile à la défense des droits des animaux doit être aussi juriste en criminologie, aider les activistes qui se voient accuser de désobéissance civile.

    Il doit être aussi juriste en droit administratif, et aider les activistes à obtenir des autorisations pour manifester.

    Il doit être enfin juriste en droit constitutionnel, et aider les étudiants qui s'opposent à la vivisection dans les cours, ou aider les prisonniers qui désirent une nourriture végane.

    Ainsi le juriste peut servir et défendre le militant.

    C'est le militant qui aide à changer le paradigme.

    Sans des clients engagés qui reflètent un consensus social croissant, le juriste ne sert à rien.

    Mais bien que je maintienne l'idée d'une indispensable révolution, laissez-moi préciser ce que je veux dire.

    Je suis totalement et sans équivoque contre toute forme de violence à l'égard des humains ou de toute autre forme de vie.

    Je suis fermement engagé dans le principe de non-violence.

    La révolution que je souhaite est celle du coeur : j'essaie d'amener les êtres (et particulièrement les hommes) à réfléchir et à rejeter la violence.

    J'essaie de faire disparaítre cette idée que certains êtres, qu'ils soient blancs, ou riches, ou humains en général, ont plus de valeur que d'autres formes de vie.

    Si nous sommes sérieux dans notre action en faveur des droits des animaux, nous devons cesser de les utiliser pour nos propres besoins.

    Et cela est surtout valable pour les animaux domestiques.

    FoA : Nous nous sommes entretenus... [précédemment] sur vos opinions concernant la loi connue sous le nom de CHIMP Act.

    Malheureusement, vos mises en garde ne furent pas suivies.

    Comme vous l'aviez prédit, une loi qui favorisait le statut de propriété des grands singes était votée.

    Qu'est-ce que cela implique ?

    Gary Francione : Cette loi était soutenue par PeTA, la Société Nationale d'Anti-Vivisection, la Société Américaine d'Anti-Vivisection et des membres influents du Conseil de direction de la Société d'Anti-Vivisection de Nouvelle Angleterre.

    Un tel soutien était un signal clair pour les scientifiques qu'ils pouvaient poursuivre leurs recherches psychologiques et biologiques, et qu'ils ne seraient pas inquiétés, voire qu'ils seraient aidés, par des groupes qui auparavant les avaient attaqués.

    Nous voyons donc à présent que les pratiquants de la vivisection ont à leur côté PeTA, les groupes anti-vivisection et Jane Goodall.

    Qu'est-ce que cela signifie pour le futur ?

    Il est devenu clair que l'utilisation des animaux lors des expérimentations peut continuer sans critique majeure de la part des mouvements pour les animaux  ; en fait, le mouvement réduit son opposition à la vivisection.

    FoA : Nous devrions alors réveiller ce mouvement !

    Vous avez mentionné Peter Singer et PeTA comme ne soutenant pas l'idée d'abolir le droit de propriété.

    Mais tous deux semblent publiquement représentatifs de ce que le mouvement pour les droits des animaux peut faire.

    Peuvent-ils être considérés comme responsables de l'inefficacité du mouvement de défense ?

    Gary Francione : Ironiquement, Singer et PeTA ont littéralement privé de sa substance le mouvement pour les droits des animaux aux Etats-Unis.

    La présidente de PeTA, Ingrid Newkirk, nous a dit que Peter Singer est un intellectuel qui considère toutes les facettes d'une solution possible.

    Newkirk défendait ainsi un texte intitulé "Heavy Petting" dans lequel Singer n'avait rien contre l'idée d'avoir des relations sexuelles avec un veau ou de jeunes vaches.

    Textuellement :

    "Ils ont des pénis et des vagins comme nous, et le fait qu'un vagin de veau puisse être satisfaisant pour un homme montre combien leurs organes sont similaires".

    Ensuite, nous avons l'exemple de PeTA exhibant des exemplaires du magazine Playboy au Capitol Hill afin d'attirer l'attention des législateurs.

    PeTA rend l'activisme trivial, tout comme Peter Singer rend triviale la théorie des droits des animaux.

    A eux tous, ces gens contribuent à transformer une idée sérieuse en « peep show ».

    Je pense que quelques-uns de ces leaders devraient s'accorder un instant de réflexion afin d'apprendre comment respecter la personne humaine avant de continuer leurs campagnes.

    Au lieu de finasser sur des nuances intellectuelles, PeTA devrait être attentif au fait évident que lier la philosophie de Playboy avec les droits des animaux distille un message assez perturbant.

    Si les droits des animaux peuvent ouvrir un espace à la pornographie, quelle sorte de mouvement social avons-nous là ?

    Certains critiques ont dit que le mouvement pour les droits des animaux était affecté par les attitudes de personnes misanthropes.

    Il est temps de prendre cette critique au sérieux.

    Fondamentalement, il n'y a pas de différence entre traiter un humain ou un animal avec respect.

    Nos campagnes doivent se penser en termes holistiques.

    Je voudrais inviter les défenseurs des animaux à réfléchir sur un principe fondamental : un changement radical - allant au plus profond des choses - ne peut être imposé par de grands conglomérats ni par ceux qui les courtisent.

    Il faut faire attention aussi au mot "expert".

    Quand nous nous référons plus particulièrement à une personne ou à un groupe plutôt qu'à une idée comme point central du mouvement, nous accordons un grand pouvoir à cette personne, qui peut alors faire un tort considérable au mouvement.

    Le meilleur exemple est Singer lui-même.

    Des défenseurs ont favorisé - et même encouragé et facilité - sa mise en avant comme porte-parole incontournable des droits des animaux.

    Tous ceux qui ont lu avec soin son livre sur la libération animale savent que Peter Singer ne défend ni les droits humains ni ceux des animaux.

    Il maintient de manière constante qu'il est moralement acceptable de manger des animaux et de les utiliser de différentes manières (aussi longtemps que nous ne les faisons pas souffrir).

    Il considère aussi comme acceptable le fait de tuer des enfants gravement handicapés et d'utiliser des humains comme sujets non-consentants pour des expériences de recherche biomédicale, et ceci dans certaines circonstances.

    Récemment, il a même absous des actes sexuels entre des hommes et des animaux.

    Le mouvement en vient peu à  peu à déifier Singer.

    Se poser en désaccord avec lui revient pour certains à un acte déloyal envers la cause !

    Le résultat est que le mouvement est maintenant encombré par un représentant qui défend McDonalds, qui pense que certaines formes de vie considérées comme ayant moins de valeur peuvent être sacrifiées pour nous, et qui déclare que "des relations sexuelles mutuellement satisfaisantes" peuvent être développées entre des hommes et des animaux.

    FoA : Vous avez parlé de "schizophrénie morale" à propos de l'attitude de l'homme envers les animaux.

    Qu'entendez-vous par là ?

    Gary Francione : La plupart d'entre nous vivent avec des chiens, des chats ou d'autres animaux et les considèrent comme des membres de la famille.

    Par contre, nous enfonçons sans complexe nos fourchettes dans la chair d'autres animaux qui ne sont pas différents de ceux que nous considérons comme étant de notre famille.

    C'est un comportement bizarre quand on y réfléchit.

    Si on élargit cela au niveau social, presque tout le monde est d'accord sur l'idée qu'il est immoral d'imposer des souffrances inutiles aux animaux - et ceci implique dans tous les sens du terme qu'il est incorrect de faire souffrir pour s'amuser, avoir du plaisir ou par convenance personnelle.

    Après tout, une règle qui dirait que nous ne pouvons infliger des souffrances aux animaux, sauf si nous y prenons plaisir, serait absurde.

    Or, à ce jour, 99,9 % de notre utilisation des animaux ne peuvent être justifiés par autre chose que le plaisir.

    Nous sommes en 2002.

    Personne ne peut affirmer que nous avons besoin de manger de la viande pour nous maintenir en bonne santé.

    De plus, un nombre de plus en plus grand de professionnels de la santé soutiennent qu'il est néfaste pour la santé de manger de la viande et des produits dérivés animaux.

    L'agriculture animale est un désastre écologique.

    Il faut entre 6 et 12 livres de protéines végétales pour produire une livre de protéines animales, et produire une livre de chair plutôt qu'une livre de blé demande cent fois plus d'eau.

    La meilleure justification que nous avons trouvée pour manger de la viande est que cela a bon goût.

    Celle pour justifier les rodéos, les cirques, les zoos, la chasse, etc. est que cela nous distrait.

    En bref, la culture occidentale déclare prendre au sérieux les intérêts des animaux (nous disons tous être contre la souffrance inutile), mais nous imposons souffrance et mort à des animaux dans des situations où la nécessité est inexistante.

    C'est ce comportement que je définis par l'expression "schizophrénie morale".

    chien_maitre1.jpg
    FoA : Votre point de vue sur l'activisme et les théories relatives a-t-il évolué ces dernières années ?

    Gary Francione : Oui, je crois avoir modifié certaines approches.

    J'ai commencé par soutenir les défenseurs du bien-être.

    C'était au tout début de mon engagement et je croyais que cela serait porteur d'améliorations pour les conditions de vie des animaux.

    Je pensais que mettre l'accent sur leurs conditions de vie amènerait la suppression de leur utilisation dans l'industrie.

    Il m'apparaissait évident alors que favoriser le bien-être des animaux ne pouvait qu'agir dans ce sens.

    Ainsi, par exemple, si nous protestions contre l'établissement d'un camp de concentration, serait-il logique de militer pour des améliorations de conditions de vie dans ce camp ?

    Non, puisque, implicitement, le seul fait de le créer impliquerait au départ que le camp est satisfaisant tel quel.

    La seule chose appropriée serait alors de ne pas construire le camp ou de s'en débarrasser, car c'est l'idée de l'existence de ce camp qui est fondamentale.

    Nous sommes donc ici face, non pas à la manière de gérer les choses, mais face à leur existence.

    FoA : Beaucoup de défenseurs du bien-être disent que vos opinions sont sources de "division".

    Que leur répondez-vous?

    Gary Francione : Ne pas être d'accord n'est pas diviser.

    Je suis en désaccord avec les défenseurs du bien-être.

    Je considère le militantisme pour le bien-être comme inefficace et anti-productif.

    Je pense que c'est une évidence empirique que ce dernier ne fonctionne pas.

    Malgré toutes les campagnes en faveur du bien-être qui ont été menées au cours de ce dernier siècle, nous continuons d'utiliser les animaux, de manières plus horribles et intensives que jamais dans l'histoire.

    Mais il y a un point plus important : il n'y a pas de débat au sein du Mouvement américain pour les animaux.

    Si une campagne est lancée, nous sommes tous supposés la soutenir.

    Peter Singer et Ingrid Newkirk se plaignaient récemment que j'attaque leurs opinions en étant finalement du même côté.

    S'il y a une chose dont je suis certain, c'est que je ne suis pas du même côté.

    Nos vues sont différentes.

    Nous avons besoin de débattre davantage de nos désaccords au sein du mouvement, ni plus ni moins.

    Et nous ne devrions pas avoir peur d'être étiquetés "sources de division".

    C'est en fait une appellation uilisée par ceux qui n'ont rien à dire face aux critiques légitimes ou aux observations qui sont faites.

    FoA : Certaines personnes pourraient dire que votre théorie sur les droits des animaux est une théorie du "tout ou rien", et que cela n'est pas juste de ne pas apporter d'améliorations au bien-être d'animaux qui sont vivants et qui souffrent.

    Cela dit, comme cela prendra beaucoup de temps avant que les droits des animaux soeint reconnus et établis, y a-t-il un moyen efficace aujourd'hui d'aider les animaux qui souffrent ?

    Gary Francione : Devenez vegan et consacrez au moins une heure de votre temps quotidien pour éduquer votre famille, vos amis, vos voisins ou toute personne qui voudra écouter vos arguments moraux et environnementaux en faveur du véganisme.

    Je peux vous garantir qu'à la fin de l'année, vous aurez fait plus pour le changement en faveur de l'abolitionnisme (et ses étapes de changement) que si vous aviez passé votre temps à élargir les cages à poulets ou à militer pour des abattoirs plus "humains".

    Si vous souhaitez vous joindre à des campagnes législatives, rejoignez des campagnes abolitionnistes et non réformistes.

    Dans un de mes livres, je parle des critères qui permettent de distinguer les campagnes abolitionnistes.

    Mais je ne peux que mettre en évidence le fait que l'action la plus importante est de devenir vegan et de soutenir des programmes d'éducation en ce sens.

    Les campagnes en faveur du bien-être peuvent nous aider à nous sentir mieux, à nous déculpabiliser, mais elles ne font rien pour soulager la souffrance.

    [...]

    Récemment, certains défenseurs de la cause animale m'ont demandé de définir quelques principes qui pourraient être utilisés comme résumé de ce que je considère comme les bases morales des droits réels du mouvement pour les animaux.

    Les voici :

    1. La position de défense des droits des animaux soutient qu'il n'y a aucune forme de vie qui puisse être traitée comme la propriété d'une autre.

    2. La reconnaissance de ce premier principe implique que nous devons abolir, et pas seulement réglementer, l'exploitation institutionalisée des animaux - parce que celle-ci implique que l'animal est la propriété de l'homme.

    3. Tout comme nous rejetons le racisme, le sexisme, l'âgisme, l'homophobie, nous rejetons la discrimination par l'espèce. Celle-ci n'est pas différente des autres formes de discrimination fondées sur la race, le sexe, l'âge ou l'orientation sexuelle : comme ces dernières, elle entraîne l'exclusion de la communauté morale.

    4. Nous reconnaissons que nous n'arriverons pas à abolir en une nuit l'appropriation d'êtres vivants, mais nous ne soutiendrons que les campagnes ou les prises de position qui défendent explicitement l'évolution vers l'abolitionnisme. Nous ne soutiendrons pas des positions qui appellent à une amélioration supposée de la réglementation de l'exploitation animale.

    5. Nous rejetons toute campagne favorisant le sexisme, le racisme, l'homophobie ou toute autre forme de discrimination humaine.

    6. Nous soutenons que le pas le plus important que chacun de nous puisse faire en faveur de l'abolition est de devenir vegan et d'éduquer les autres en ce sens. Le véganisme est le principe de l'abolition appliqué à sa vie personnelle. La consommation de viande, poisson, volaille ou produits dérivés, de produits d'origine animale pour l'habillement, et plus généralement l'utilisation de tout produit d'origine quel qu'il soit est incompatible avec la perspective abolitionniste.
    7. Nous reconnaissons que le principe essentiel guidant le mouvement des droits des animaux est le principe de non-violence.
  • TREBES : 250 moutons et chèvres retirés à leur propriétaire pour maltraitance

    http://www.fondationbrigittebardot.fr/site/images/photos/mouton-bardot-sarkozy/DSC_0440%20copiesmall.jpg

    Le troupeau, 250 moutons et chèvres, privés de soins et très mal nourris, survivait dans une saleté patente.

    Les services vétérinaires, alertés par les riverains de Millegrand et la fondation Bardot, ont mis fin hier au calvaire des bêtes en évacuant la totalité du troupeau.

    250 moutons, brebis, chèvres et chevrots vivaient dans une bergerie où le fumier s'entassait à hauteur d'homme.

    Incommodés par les odeurs et les mouches, incroyablement nombreuses en cette saison, les résidents du domaine Millegrand ont permis de mettre fin aux privations et à la maltraitance que subissait le troupeau depuis plus d'un an.

    La fondation Bardot alertée

    En présence de Mmes Nanou Andrieu et Dimur, bénévoles de la fondation Brigitte Bardot, la brigade de gendarmerie de Trébes a fait procéder hier à l'enlèvement du troupeau, sur décision de justice.

    Mme Ouradou, représentante des services vétérinaires s'est livrée à un premier diagnostic.

    Très peu nourries et sans soins, pratiquement toutes les bêtes présentaient des plaies.

    Atteintes de la gale du mouton et de la teigne, elles perdaient leur laine en abondance.

    A l'intérieur de la bergerie, plusieurs cadavres de moutons attestaient des méthodes peu scrupuleuses de l'éleveur.

    Le troupeau va être confié à un tiers qui aura la charge de le soigner afin d'éviter l'abattage.

    Des abattages clandestins

    Par ailleurs, la gendarmerie a découvert jouxtant la bergerie, un atelier d'abattage clandestin et non loin de la bergerie, un lopin de terre servant de charnier.

    A l'origine de cette histoire, une relation conflictuelle entre le locataire des lieux (propriétaire du troupeau) qui voulait que le propriétaire du domaine de Millegrand prenne le défumage à sa charge.

    C'est l'enlisement de la situation qui a conduit la gendarmerie et les services vétérinaires à faire appliquer la décision de justice.

    Dès demain, le propriétaire du domaine en collaboration avec les services techniques de la mairie vont devoir s'atteler à la lourde tâche de défumage des locaux.

    http://www.ladepeche.fr/article/2000/03/30/86766-Le-troupeau-survivait-sans-soins-et-tres-mal-nourri.html