L'Est républicain
L'affaire des sangliers abattus en pleine ville à Essey-les- Nancy, samedi, crée une vive polémique.
Quatre sangliers étaient abattus par un chasseur lieutenant de louveterie, samedi vers 12 h 30, dans la cour d'une maison, au 38 de la rue Parmentier à Essey-les-Nancy.
En pleine ville (voir ci-dessous).
De nombreux riverains avaient protesté contre ce choix des chasseurs en réclamant l'utilisation de seringues hypodermiques afin d'endormir les animaux avant de les relâcher dans leur milieu naturel.
Une solution techniquement et administrativement possible mais qui n'a pas été retenue pour « la sécurité des biens et des personnes », selon les chasseurs.
« On ne leur a laissé aucune chance, à ces animaux acculés dans une cour dont ils ne pouvaient s'échapper », regrette une habitante de la rue Parmentier, choquée, comme beaucoup de personnes (lire ci-dessous les réactions) par cet abattage intra-muros.
« J'appelle ce matin la SPA ainsi que la Fondation Brigitte Bardot pour dénoncer une telle méthode ».
Même si les deux lieutenants de louveterie, assermentés par le préfet, ont agi dans le cadre légal.
La décision leur revenait de saisir ou non le Groupe animalier des pompiers pour anesthésier les sangliers et, éventuellement, les relâcher ou les tuer à l'écart des habitations.
Il semble que ces sangliers aient quitté les bois du plateau de Malzéville pour fuir une traque des militaires qui chassent une fois tous les 15 jours, le samedi matin, sur leur zone.
« Nous avons des sangliers à profusions sur le plateau et je suis régulièrement interpellé par des habitants victimes de dégâts », indique le maire Jean-Pierre Franoux.
« Il est très compliqué d'y organiser une battue administrative car il y a plusieurs propriétaires privés, mais nous y travaillons ».
Même réflexion du côté de Jean-Paul Monin.
Le maire d'Essey a écrit à l'ONCFS « pour réguler la population de sangliers ». « Mais pas n'importe comment. Avec des battues adaptées. Nous sommes en phase de rachat de la butte Sainte-Geneviève et je n'y autoriserai pas la chasse car trop proche de la ville. Ceci afin d'éviter un accident de tir ou que des bêtes se réfugient dans les rues ».
http://www.estrepublicain.fr/une/france/art_941801.php
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L'Est Républicain, 23 novembre 2008
NANCY
Tension et émotion hier à 12 h au cœur d'Essey-les-Nancy, avec des habitants...
Alain THIESSE
Tension et émotion hier à 12 h au cœur d'Essey-les-Nancy, avec des habitants révoltés au moment de l'abattage de quatre cochons sauvages acculés dans la cour d'une maison.
Blottis l'un contre l'autre. Immobiles. Pétrifiés. Leur grosse carcasse à peine dissimulée derrière un minuscule arbuste d'ornement.
Ils attendent. Hagards. Egarés dans la ville. Loin, trop loin de la forêt et ses taillis protecteurs. Trop près des hommes et du béton.
Acculés contre ce muret surmonté de grilles en métal d'une petite cour hermétique au 38, rue Parmentier à Essey-les-Nancy, dans le quartier de la clinique Louis Pasteur.
Volets clos, la maison est en vente comme l'indique un panneau en façade. Photos, vidéos... Les quatre sangliers sont l'attraction à l'heure de midi.
La cour du nº 38 est une cage. Celle d'un cirque à ciel ouvert visité par les riverains stupéfaits. D'autres, voisins mitoyens, observent la scène depuis leur fenêtre. « J'appelle la SPA ! »
« A notre arrivée, les chasseurs avaient déjà réussi à guider les sangliers dans cet enclos », indique un responsable des pompiers.
« Nous sommes là pour sécuriser. Deux autres animaux ont été aperçus dans le secteur du McDo, mais ils n'ont pas pu être localisés ».
Dans le froid et les premiers flocons de neige de l'année, l'atmosphère de la rue Parmentier va s'électriser, se surchauffer. D'un coup.
Au moment où l'un des deux lieutenants de louveterie - des chasseurs assermentés par le préfet et habilités à intervenir dans ces circonstances -, sort une carabine à lunette de son véhicule. « Calibre 9.575 », indique le lieutenant de louveterie Gilles Grosdidier. Du lourd.
Comme en témoigne la taille des balles alignées dans une cartouchière fixée à même la crosse de l'arme. En réserve.
« Nous sommes missionnés par l'autorité préfectorale pour réguler ces animaux qui peuvent, ici, porter atteinte à la sécurité des biens et des personnes ».
Les riverains ne sont pas de cet avis et ne tardent pas à le faire savoir malgré la présence de la police qui leur intime de se taire.
« Vous n'avez pas droit de faire ça ! », hurle une femme depuis sa fenêtre. « Il existe des vétérinaires dans le coin. Faites les venir ! On peut les endormir, ces bêtes. Je vous préviens, j'appelle la SPA ».
Des enfants pleurent. Eux aussi, ils ont compris... Un adolescent se plaque les mains jointes sur le visage. Son père l'emmène à l'écart.
Entre les seringues hypodermiques (lire par ailleurs) et les armes, les chasseurs ont fait leur choix. Celui de tuer.
Sous l'œil de Philippe Kierren, son collègue, Gilles Grosdidier se poste en léger surplomb, sur un muret mitoyen.
A moins de 5 m des quatre bêtes. Le chasseur épaule.
Un premier coup de feu claque sèchement entre le mur des maisons. Une bête s'effondre. Les trois autres ne bronchent pas. Pas un grognement. Pas une tentative de fuite. Chacun une balle. Carton plein.
Terminé. Un sale boulot.
Couteau en main, le chasseur s'approche et vérifie que les sangliers d'une trentaine de kilos sont bien morts.
« Je suis dépité. Je trouve cela honteux de régler une telle situation par la mort », s'insurge Mathieu, un habitant de la rue.
« La méthode est déplacée », considère François. « Tirer au fusil dans cette rue de la ville, c'est dangereux. Pourquoi n'a-t-on pas eu recours à des seringues ? »
Marqué par les impacts de plomb qui ont traversé de part en part les cochons, le muret de la cour a servi de pare-balles.
Un angle de tir « sécurisé » selon le chasseur qui, au nom de « la sécurité des biens et des personnes », a opté pour l'abattage.