Dans les journaux français et étrangers, les articles se multiplient (voir ci-dessous), mettant en cause la légitimité du combat de celles et ceux qui veulent mettre fin à la torture des animaux, notamment dans les laboratoires d’expérimentation.
Or les terroristes ne sont pas ceux qui sauvent des innocents : les terroristes sont ceux qui les torturent.
L’histoire finira tôt ou tard par le reconnaître.
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9/06/2007 20:52
Des militants anti-vivisection jusqu'au-boutistes
À Oxford, un laboratoire où seront réalisées des expériences sur les animaux est au centre du débat entre les opposants et les partisans de cette méthode de recherche.
Sept policiers pour neuf manifestants, c’est sans doute l’une des manifestations les mieux surveillées du monde. Deux des agents des forces de l’ordre sont à cheval, un autre prend tout le monde en photo tandis qu’un quatrième filme la scène. La raison de telles mesures de sécurité ? Les protestataires défilent contre la vivisection. Presque partout dans le monde, ces buveurs de lait de soja, avec leurs sandwichs végétariens sagement préparés dans un sac en plastique, ne provoqueraient pratiquement aucune réaction.
Pas en Grande-Bretagne, où des militants extrémistes pour les droits des animaux défraient la chronique depuis des années, utilisant toutes les méthodes, y compris les plus illégales : colis piégés, campagnes d’intimidation, harcèlement… Dans les années 1990, une bombe a été posée contre un scientifique d’Oxford, qui a heureusement eu la vie sauve. Le fils d’un autre a été attaqué. L’une des méthodes d’intimidation les plus courantes consiste en « visites » de nuit, où les militants débarquent au milieu de la nuit chez les savants ou chez les chefs d’entreprise liés de près ou de loin à la vivisection.
En 2004, quelques extrémistes sont même allés jusqu’à déterrer les ossements de la grand-mère d’un homme qui dirige une entreprise reproduisant des cochons d’Inde destinés à l’expérimentation. Une nouvelle loi, spécifiquement destinée à lutter contre les terroristes du droit des animaux, a cependant permis de réduire fortement ces attaques.
Sabotage de camions
À Oxford, les militants mènent depuis des années un combat contre la construction d’un nouveau laboratoire – rassemblant dans un même endroit différents laboratoires déjà existants –, dans lequel des expériences seront réalisées sur des animaux, notamment des singes. Preuve du climat de peur qui règne, les ouvriers travaillant sur le chantier ont le visage recouvert d’un tissu, afin de ne pas être reconnus. Le laboratoire d’Oxford est devenu le centre du combat entre chercheurs et militants anti-vivisection.
« Sa construction a commencé de façon très discrète en 2003, raconte Nicky Old, porte-parole de l’université d’Oxford. Les manifestants anti-vivisection se concentraient alors sur un laboratoire à Cambridge. Mais ils ont finalement eu gain de cause quand Cambridge a décidé d’abandonner son projet. C’est alors qu’ils se sont intéressés à Oxford. » Les militants s’en sont immédiatement pris à l’entreprise de construction : lettre de menaces, intimidation, sabotage de camions… Ils ont également envoyé des courriers aux actionnaires, menaçant de faire chuter leurs cours boursiers. En juillet 2004, ils obtiennent gain de cause : le constructeur abandonne.
L’université d’Oxford obtient alors d’une cour de justice que soit établie une zone d’exclusion pour les manifestants autour du chantier. Ceux-ci n’ont plus le droit d’être présents que quatre heures par semaine, le jeudi après-midi. Un nouveau constructeur est finalement trouvé et les travaux reprennent fin 2005. Le laboratoire devrait voir le jour, sans doute fin 2007 ou début 2008.
Arguments scientifiques
Amanda Richard, membre de Speak, la principale association qui organise les manifestations contre le laboratoire d’Oxford, est présente tous les jeudis face au chantier : « Quand le laboratoire aura ouvert, je viendrai encore manifester », avertit-elle en prenant la défense des plus extrémistes : « Les dommages criminels qu’ils ont commis ne sont rien en comparaison de la torture que subissent les animaux. » Et elle avance des arguments scientifiques pour s’opposer à toute forme de vivisection. Les animaux sont tout simplement trop différents des humains pour que des enseignements valables en soient tirés pour la médecine. Elle avance le cas du 33, un anti-douleur introduit en 1999, mais retiré de la vente en 2004 quand il a été prouvé qu’il doublait les risques de crise cardiaque. « Les animaux n’avaient pas fait apparaître ce problème. »
Inversement, selon elle, l’aspirine et la pénicilline n’auraient pas été inventées si elles avaient été expérimentées aujourd’hui, parce que leurs effets sur les animaux sont très négatifs. « Les expériences sur les animaux reviennent, tout simplement, à tirer à pile ou face », dit-elle.
Une grande partie de la communauté scientifique rétorque que la vivisection apporte des informations irremplaçables. Lunettes rondes, moustache fournie, Tipu Aziz est de ceux-là. Neurochirurgien, spécialiste de la maladie de Parkinson, il conduit les expériences les plus controversées : celles qui sont menées sur les singes. Quand il a commencé en 1989, une partie du cerveau avait été associée à la maladie de Parkinson. « Je voulais savoir ce qui se passerait si on détruisait cette partie. » À l’aide d’électrodes chauffantes, il tente l’expérience sur des singes. Leur condition s’améliore et il publie les résultats en 1991. Cette découverte, couplée à d’autres, mènera à l’invention de ce qui s’appelle « Deep Brain Stimulation », une intervention qui a été pratiquée sur 40 000 patients à travers le monde.
"Il faut des animaux"
Aurait-il pu faire la même chose sans l’expérience sur les singes ? « Non, c’est impossible. Pour développer un médicament, on peut utiliser des cultures de cellules. Pour étudier une cellule en particulier, on peut faire des modèles sur ordinateur. Mais pour voir la réaction d’un corps dans son ensemble, il faut des animaux. »
Tipu Aziz s’exprime très publiquement en faveur du laboratoire, alors que la plupart de ses collègues préfèrent éviter d’attirer l’attention des militants anti-vivisection. « Je ne supporte pas qu’une minorité, en utilisant la violence, bloque le débat démocratique. C’est un véritable retour aux périodes sombres de l’histoire. »
Paul Bolan, pharmacologue, a lui aussi décidé de briser le silence, il y a deux ans. Menant également des recherches sur la maladie de Parkinson, il utilise des souris pour des expériences étudiant une partie du cerveau qui, dit-il, est très similaire à celui de l’homme, même s’il est beaucoup plus petit. Selon lui, les précautions prises pour limiter la souffrance des animaux sont très importantes : « Sur nos souris, par exemple, nous ne provoquons la maladie de Parkinson que sur la moitié du cerveau, ce qui signifie qu’elles peuvent continuer à se nourrir ou à se déplacer par elles-mêmes. La température et l’humidité des cages sont contrôlées à un ou deux degrés près, pour assurer un maximum de confort. »
Paul Bolan a décidé de parler ouvertement quand un de ses amis, qui dirige une entreprise de BTP, a commencé à recevoir des menaces, bien qu’il ne travaille pas sur le chantier du laboratoire. « Si les anti-vivisection avaient réussi à bloquer celui d’Oxford, cela aurait été un vrai coup d’arrêt à la recherche en Grande-Bretagne. Les expériences auraient simplement été faites ailleurs, en Asie notamment, où les soins apportés aux animaux sont moindres. Tout le monde aurait été perdant."
Éric Albert
http://www.la-croix.com/article/index.jsp?docId=2306440&rubId=5547